Los Años, (Les Années), texte et mise en scène de Mariano Pensotti (en espagnol, surtitré en français)

Los Años, (Les Années), texte et mise en scène de Mariano Pensotti (en espagnol, surtitré en français)

Cet auteur-metteur en scène argentin a étudié le cinéma, les arts visuels et le théâtre à Buenos Aires, en Espagne et en Italie. Et il a fondé, il y a dix-sept ans, le Grupo Marea avec la scénographe Mariana Tirantte, le musicien Diego Vainer et la productrice Florencia Wasse. Il met en scène ses textes et crée aussi des installations in situ, entre fiction et réalité. Et il avait présenté El pasado es un animal grotesco et Cineastas au festival d’Automne à Paris en 2003.

Dans cette fiction, Mariano Pensotti pose une question philosophique vertigineuse: comment imaginer notre vie à l’horizon 2050? Quand tout ce qui fait le quotidien actuel aura muté, voire inexorablement disparu… comme la majorité des spectateurs dans cette salle? Et comment voir aussi notre présent à distance.

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Cela se passe à Buenos Aires en 2020. Une salle à vivre avec derrière une cuisine, et au-dessus une chambre, mais en deux exemplaires presque identiques. Côté jardin, un pianiste. Manuel, un jeune architecte perd son père et  lui-même va le devenir… Il réalise un documentaire sur un orphelin des quartiers très pauvres. Sur un écran au dessus de la scène, défilent des images d’immeubles Art Déco de la capitale argentine mais aussi celles d’un petit garçon errant et finissant par aller habiter dans l’appartement que son grand-frère a déserté. Il vit de rapines et grâce à l’architecte qui lui tiendra lieu de père, il pourra être inscrit à l’école où il aura gratuitement un petit déjeuner et un déjeuner. Le documentaire de Manuel avait eu un certain succès. Mais en 2050, on ne sait pas trop ce qu’est devenu ce petit garçon…

 Et il y a aussi un autre couple d’architectes…Lui, a soixante ans et vit en Allemagne avec sa compagne. Le monde a changé surtout dans les villes envahies par des animaux sauvages que des bénévoles  éliminent… Il essaye de renouer des relations avec sa fille. Elle a maintenant trente ans, et actrice, elle voudrait monter un spectacle sur la vie de son père quand elle n’était pas encore née… Ce serait un récital avec piano, un genre ancien quand l’Argentine était une colonie espagnole.
Les théâtres qui avaient connu une désaffection dans les années 2020 à cause de pandémies, sont à nouveau pleins: les gens veulent du vivant, ont assez des écrans et le cinéma a quasiment disparu… Il y a ici un très habile va-et-vient permanent entre présent, et futur au présent. La distance entre représentation et récit est ici particulièrement bien assumée, la narration comme le souhaite le metteur en scène, ajoute du sens et le libère effectivement de la nécessité de tout représenter. Un vieux procédé théâtral déjà bien connu d’Eschyle, Shakespeare, etc.
Les personnages, en circulant d’une époque à une autre, à la fois jeunes et déjà âgés, vivent une autre vie. Une mise en abyme permanente avec, à la fin, un texte en boucle qui revient comme en boomerang… Une sorte de dystopie séduisante et surtout très bien réalisée. Mais «s’il y a bien  quelque chose d’optimiste, dit Mariano Pensotti, c’est la capacité à créer de la fiction, et l’affirmation que l’on peut imaginer un futur différent.»

Oui, mais voilà, le flux d’informations est tel qu’on finit par décrocher quelquefois: deux lieux, avec des personnages qui passent sans cesse d’un salon à l’autre ou qui montent dans les chambres, de belles mélodies créées et jouées au piano par Diego Vainer qu’on a envie d’écouter, les images de détails architecturaux bien mis en valeur comme dans un livre d’art, rt celles de la vidéo de Martín Borini filmant avec tendresse la dérive de ce petit garçon marchant dans Buenos Aires et y vivant, le surtitrage du texte -à trop grande vitesse- et aussi les personnages très bien joués par Javier Lorenzo, Mara Bestelli, Bárbara Masso, Paco Gorriz et Julian Keck. Cela fait quand même beaucoup à la fois…
Alors à voir? Oui, malgré des réserves sur un texte parfois estouffadou et ces informations en trop grand nombre, pour la grande qualité de cette réalisation et la scénographie de Mariana Tirantte. Et ce n’est pas tous les jours que l’on a l’occasion de voir le spectacle d’un collectif argentin…

Philippe du Vignal

Spectacle vu le 13 décembre. Jusqu’au 18 décembre, Théâtre Nanterre-Amandiers, 7 avenue Pablo Picasso, Nanterre, (Hauts-de-Seine). T. : 01 46 14 70 00.



 

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