Mauvaise Petite Fille blonde, texte et mise en scène de Pierre Notte
Mauvaise Petite Fille blonde, texte et mise en scène de Pierre Notte
Un spectacle singulier: une petite fille interprétée par un acteur dans toute sa maturité. Antonio Interlandi ne compose pas un personnage. Il est à l’ évidence, dès qu’il se plante en jupette rose à l’avant-scène, une petite fille indignée par l’injustice de ses parents. Magie du théâtre.
« Antonio est chanteur et danseur : sa voix et son corps sont des outils rares, précieux, dit Pierre Notte. Nous avons travaillé à une sorte d’incarnation brûlante.» Cette pièce était initialement écrite pour Catherine Hiegel qui voulait jouer une petite fille mais la crise du covid en a décidé autrement et nous découvrons cette fable grinçante sous un jour inattendu. La petite fille raconte : elle marchait dans la rue, en regardant un nuage, il avait une drôle de forme -de zizi, osera-t-elle dire, même si ce mot n’est pas permis- quand elle a renversé, par mégarde, la coupelle d’une mendiante. Sa mère la gifle, lui demande de ramasser la monnaie éparse. Elle refuse : elle n’a pas fait exprès, elle le répète… Et la voilà accusée à tort et privée de goûter.
Cet événement anodin en entraîne d’autres en cascade, décryptés dans une logique enfantine, à l’aune de cet incident. Antonio Interlandi est devenu cette gamine de sept ans pleine de vie qui nous livre ses états d’âmes et réflexions, au premier degré. Elle imagine que son petit frère est à l’hôpital à cause d’une fourchette sale qu’elle lui a plantée dans la main… On l’accuse toujours, elle, des bêtises qu’il fait, alors, elle a tellement envie de le tuer! Comme Saphira, la petite Syrienne de l’école aux cheveux frisés qui sentent mauvais… Elle la déteste… Elle qui comme lui dit son père, incarne un peu le France avec ses bouclettes blondes. Alors, elle va se venger… Joyeuse et drôle, la petite fille à qui l’on donnerait le bon Dieu sans confession, peut aussi être cruelle et dangereuse avec ses jugements à l’emporte-pièce… Pas si bête, mais méchante. Les démons qui couvent en elle sont lâchés et Pierre Notte nous dévoile ici l’innocence des bourreaux.
L’acteur révèle toutes les nuances de ce monologue logorrhéique et dit avec naturel les rancoeurs de cette enfant mais aussi les saillies poétiques et traits d’humour qui font la saveur et la légèreté de Mauvaise Petite Fille blonde. Immobile la plupart du temps, il esquisse quelques pas de danse entre les séquences, des respirations nécessaires à ce beau moment de théâtre. On peut aller aussi sans hésiter voir Moi aussi, je suis Barbara joué dans la même salle, à vingt-et-une heures (voir le Théâtre du blog).
Mireille Davidovici
Jusqu’au 28 janvier, Studio Hébertot, 78 bis boulevard des Batignolles, Paris ( XVII ème). T. 01 42 93 13 04 78.