Berlin Alexanderplatz, adaptation du roman d’Alfred Döblin, mise en scène de Stathis Livathinos

Berlin Alexanderplatz, adaptation du roman éponyme d’Alfred Döblin, mise en scène de Stathis Livathinos

Publié sept ans après Ulysse de James Joyce et quatre ans après Manhattan Transfer de John Dos Passos, ce roman allemand s’inscrit en 1929 dans la modernité du monologue intérieur. Et son auteur se revendique omniscient mais aussi narrateur souverain et intervenant donc subjectivement dans son récit. Il se veut surtout le constructeur d’une œuvre qu’il appelle épique, et par là-même, refuse d’écrire un roman qui serait fondé sur l’intrigue, l’action, la psychologie. Il préconise un récit libéré de tous dogmes et une composition polyphonique.

©x

©x

Il relate ici le parcours de Franz Biberkopf, un délinquant à peine sorti de prison, qui retrouve le monde de la pègre et sent bien qu’il lui sera impossible d’en sortir. Berlin Alexanderplatz n’est pas un roman social ou populiste, même si les bas-fonds interlopes y sont très présents. Alfred Döblin a recours, avec de nombreux leitmotivs, aux mythes antiques et bibliques. Mais cette parabole censée exister dans un présent daté avec précision, est ici transcendée par une sorte d’histoire de l’humanité, dans une lutte éternelle entre le Bien et le Mal.
Biberkopf a comme destin de retrouver symboliquement, devant les exigences de l’ «être collectif», le sort de l’Humanité tel qu’il a été illustré par les grands mythes : orgueil, faute, sentiment de culpabilité, expiation, sacrifice de soi et humilité consentie. Originalité de 
Berlin Alexanderplatz dans la littérature allemande : la ville moderne ne forme plus, comme dans les romans du XIX ème siècle, un simple décor mais vit, bouge et respire… Et Alfred Döblin utilise donc collages de publicités, articles de journaux, affiches, statistiques… et jongle aussi avec tous les langages possibles:  des rengaines, aux chants militaires et des discours politiques, à l’argot de la pègre ou au yiddish. En les intégrant à son récit, il donne à son personnage, à travers ses mésaventures anecdotiques, l’ampleur d’un héros épique.

Ce roman, adapté au cinéma par Phil Jutri dès 1931, l’a été aussi pour la télévision, cinquante ans plus tard par R.W. Fassbinder. Dans cette adaptation scénique, Stathis Livathinos réussit à nous en offrir la quintessence.  C’est une réalisation de très grande qualité, avec un rituel des séquences renforçant la parabole sans être didactiques en deux heures et demi. Mais à un rythme rapide, souvent «orageux», où, comme dans le livre, s’intercalent des chansons, etc. Le mécanisme est bien réglé et y a une richesse de stimulis de style cabaret mais aussi des éléments grotesques. Les personnages prennent forme, bien servis par onze acteurs jouant plusieurs rôles et ont, pour  la plupart, déjà très souvent travaillé avec Stathis Livathinos.  Il y a donc un code de jeu commun. Costumes et maquillages « d’époque », musique de scène et des chansons tout à fait exceptionnelle. Et Eleni Manolopoulou réussit à utiliser pour sa scénographie chaque  espace avec une liberté et une poésie remarquables. Un des meilleurs spectacles actuels. A ne pas manquer..

Nektarios-Georgios Konstantinidis

Théâtre Odou Kykladen-Lefteris Voyatzis, 11 rue Kykladen, Athènes.  T. : 00302108217877.
Excellent et riche en informations : le livre-programme dont le matériau a été recueilli par Elena Karakoulis.
https://www.youtube.com/watch?v=fJgF3IU1Ups

 

DAROU L ISLAM |
ENSEMBLE ET DROIT |
Faut-il considérer internet... |
Unblog.fr | Annuaire | Signaler un abus | Le blogue a Voliere
| Cévennes : Chantiers 2013
| Centenaire de l'Ecole Privé...