Showgirl , conception, texte, et interprétation de Jonathan Drillet et Marlène Saldana

Showgirl, conception, texte, et interprétation de Jonathan Drillet et Marlène Saldana

 

© J. Pique

© J. Pique

Ce spectacle, librement inspiré du film de Paul Verhoeven, a affiché complet sur les quatre représentations à Chaillot. «Peut-on se contenter d’un regard surplombant sur une réalité désespérément inhabitée était-il écrit dans Le Monde en janvier 1996), si rien ne vient meubler un récit qui se contente de ses conventions et n’invente que l’idée qu’il se fait de sa propre intelligence? Le vide, même avec la conscience de la vacuité, reste le vide. »

Depuis, Showgirl est devenu un film classique et la vie misérable d’une strip-teaseuse que le cinéaste situait dans un cabaret à Las Vegas, reste une réalité. Jonathan Drillet incarne le régisseur et confident de la strip-teaseuse et avec Marlène Saldana, nous emportent dans leur monde. Loin de Jacques Demy, un des personnages des Idoles de Christophe Honoré, un rôle qui lui valut le Prix de la meilleure comédienne du Syndicat de la Critique en 2019, cette actrice  nous surprend encore et réalise ici une performance crue et provocatrice.

 Parfois, vêtue d’un seul string, elle occupe le plateau durant une heure vingt-cinq. Avec des phrases qu’un psychiatre pourrait qualifier de “dissociées »  et ici, chantées : « Des seins, des culs, des chattes, des bites… » Ou proclamées : « Si tu veux faire de l’expressionnisme à poil, tu te mets au bûto (…) c’est la victoire de l’ironie sur la tragédie (…) on va tous crever, on va finir crevés ». Des phrases aux nombreuses significations. Cette confession dans un club sordide, rythmée par la musique électro de Rebeka Warrior, pleine d’humour est une remarquable performance de Marlène Saldana…

 Jean Couturier

 Spectacle joué du 8 au 11 mars, à Chaillot-Théâtre National de la Danse, 1 place du Trocadéro, Paris (XVI ème). T: 01 53 65 30 00.


Archive pour 12 mars, 2023

Mélisande, d’après Pelléas et Mélisande de Maurice Maeterlinck et Claude Debussy, direction musicale de Florent Hubert, mise en scène de Richard Brunel

Mélisande, d’après Pelléas et Mélisande de Maurice Maeterlinck et Claude Debussy, direction musicale de Florent Hubert, mise en scène de Richard Brunel

MelisandeG┬®_008

© JeanLouisFernandez

Dans cette adaptation, le destin tragique de l’héroïne est scellé: elle nous apparaît mourante sur un lit d’hôpital avec, à ses côtés, un médecin qui nous la présente comme l’une des femmes de Barbe-Bleue et contrairement aux autres, elle a réussi à s’échapper… Et nous allons découvrir comment elle en est arrivée là.

Dans cette blancheur morbide, Judith Chemla (Mélisande) brille d’un éclat singulier: avant même qu’elle ne chante, elle s’impose par sa voix presqu’enfantine et sa frayeur de biche aux abois quand,  fugitive, dans un tourbillon de feuilles mortes, elle rencontre Golaud, au bord de l’eau où elle a jeté sa couronne maudite. C’est aussi dans l’eau qu’ensuite, troublée par la présence de Pelléas, elle égarera la bague de mariage offerte par Golaud qui l’avait recueillie dans son austère château et épousée.

 L’action se focalise sur le triangle Mélisande-Golaud-Pelléas mais seuls les duos entre Pelléas (Benoît Rameau) et Mélisande seront chantés, Golaud étant, lui, incarné par un acteur Jean-Yves Ruf. Antoine Besson joue le Médecin, le Serviteur et d’autres rôles secondaires, autant de témoins du drame. Face à sa stature massive de Jean-Yves Ruf – un géant, dit le livret- Judith Chemla incarne une Mélisande délicate et fragile mais résolue à affronter son destin, dans un amour libératoire et fatal. Elle nous charme par son jeu subtil et intense qui trouve son point d’orgue dans les parties chantées, particulièrement réussies: le duo du balcon d’où s’évadent les cheveux de l’héroïne et l’ultime et déchirante scène d’amour interrompue par le surgissement fantomatique d’un Golaud devenu un ogre sanguinaire et aveuglé par la jalousie. «Elle chante quand elle voit Pelléas, dit Richard Brunel. Elle chante sa peine ou sa frayeur. »

MelisandePG┬_081

®JeanLouisFernandez

Nous retrouvons alors la magie de ce conte cruel, grâce aussi à l’orchestration et aux arrangements à la fois fidèles et transgressifs de Florent Hubert, saxophoniste et clarinettiste de jazz. Nous l’avions apprécié Orfeo-Je suis mort en Arcadie (2017), mise en scène de Jeanne Candel et Samuel Achache (voir Le Théâtre du blog). « L’accordéon, dit le directeur musical, est, comme un petit orgue, garant du mélodique et de l’harmonique. Les percussions accentuent les rythmes et se justifient par l’intérêt qu’avait Claude Debussy pour le gamelan indonésien. La harpe, instrument qui lui était cher, souligne la féérie. Le violoncelle apporte le lyrisme qu’on pourrait perdre en ne choisissant pas de vent. »  Cette formation réduite avec Yi-Ping Yang (percussions), Marion Sicouly (harpe), Sven Riondet (accordéon), Nicolas Seigle (violoncelle) et Benoit Rameau, (saxophone) respecte la sobriété voulue par Claude Debussy, même si la musique reste parfois trop en retrait.

Le décor d’Anouk Dell’Aiera  traduit l’austérité des lieux et l’âpreté du récit : un grand lit surmonté de tubulures, un escalier métallique et une longue table banale occupent l’espace de jeu. Autant d’obstacles à franchir pour Mélisande, toujours en équilibre au bord du gouffre… Mais rien de féérique dans cette scénographie encombrante, ni dans les costumes peu stylés et les bassines en plastique blanc symbolisant l’eau, élément omniprésent chez Maeterlink: rivière, mer, fontaine…

Hybride et dépouillé, à l’inverse de son modèle romantique, le spectacle qui hésite entre théâtre et opéra, ne nous a pas entièrement convaincus. Reste le charme de Judith Chemla qui irradie la pièce de sa présence énigmatique. Musicienne, chanteuse et actrice, après un bref passage à la Comédie-Française (2007-2009) elle avait triomphé dans Célimène du Misanthrope, mis en scène par Lukas Hemleb. elle a repris sa liberté: «La sécurité me flatte mais m’engourdit, dit-elle. J’ai besoin de vide, de vertige, d’inconnu, pas de confort. Rien n’y surgit.» Comme Mélisande choisissant l’amour, plutôt que le confort conjugal, un rôle qu’elle avait déjà tenu dans Pelléas et Mélisande, réalisé par Benjamin Lazar. On la retrouvera sous sa direction pour une reprise de Traviata, vous méritez un avenir meilleur, au Théâtre des Bouffes du Nord, à l’automne prochain.

 Mireille Davidovici

Jusqu’au 19 mars, Théâtre des Bouffes du Nord, 37 bis boulevard de la Chapelle, Paris (X ème) T. : 01 46 07 34 50.

Mon frère c’est Dieu sur Terre de Thomas Fersen, mise en scène par Jessica Dalle et Benjamin Lazar

Mon frère c’est Dieu sur Terre de Thomas Fersen, mise en scène par Jessica Dalle et Benjamin Lazar

Seul en scène, le chanteur et compositeur nous offre une belle surprise, avec un spectacle tiré de son premier roman Dieu sur Terre. Selon lui: «Une sorte de journal intime de mon personnage de chanson.» Léger, poétique et plein d’humour. Il nous prend par la main et nous emmène dans son histoire personnelle, réelle où inventée, qui tourne autour d’une figure importante de sa vie: son grand frère, son père, sa mère et sa sœur qu’il peints dans ce monologue en vers. « Entre contes et fables, farces et poèmes qui ont nourri mes spectacles ces dernières années. »

© Ch. Raynaud de Lage

© Ch. Raynaud de Lage

L’écrin de ce magnifique théâtre à l’italienne convient parfaitement à ce genre de chansons intimes. Au violon, Cécile Bourcier à l’accordéon, Maryll Abbas à la guitare sèche, Pierre Sangrã (en alternance avec Pavel Guerchovitch) accompagnent avec joie Thomas Fersen et certains de ses textes prennent une belle dimension théâtrale. Comme ici, avec Monsieur : «Les passants sur son chemin soulèvent leur galure./Le chien lui lèche les mains, sa présence rassure./Voyez cet enfant qui beugle, par lui secouru./Et comme il aide l’aveugle à traverser la rue./Dans la paix de son jardin, il cultive ses roses, / Monsieur est un assassin quand il est morose./Il étrangle son semblable dans le Bois de Meudon./Quand il est inconsolable, quand il a le bourdon./A la barbe des voisins qui le trouvent sympathique./Monsieur est un assassin, je suis son domestique.» En cette période pas facile, nous redécouvrons un auteur de textes poétiques comme le XX ème siècle a pu en générer… C’était bien aussi, avant !

 Jean Couturier.

Le spectacle a été joué du 23 février au 4 mars au Théâtre de l’Athénée-Louis Jouvet, 2-4 square de l’Opéra-Louis Jouvet, Paris (IX ème). T. : 01 53 05 19 19.

DAROU L ISLAM |
ENSEMBLE ET DROIT |
Faut-il considérer internet... |
Unblog.fr | Annuaire | Signaler un abus | Le blogue a Voliere
| Cévennes : Chantiers 2013
| Centenaire de l'Ecole Privé...