Dancefloor, chorégraphie de Michèle Murray et Acid Gems, chorégraphie d’Adam Linder, avec le Ballet national de Lorraine
Dancefloor, chorégraphie de Michèle Murray et Acid Gems, chorégraphie d’Adam Linder, avec le Ballet national de Lorraine
Ces créations, différentes mais complémentaires, révèlent une fois de plus le talent et l’invention de cette troupe dirigée par les chorégraphes qu’invitent Petter Jacobsson et Thomas Caley, les directeurs de ce Ballet. Grâce à leur connaissance intime de la danse contemporaine -ils sont passés notamment par la Merce Cunningham Dance Company- ont fait évoluer en permanence ce Centre Chorégraphique National qui a une longue histoire (voir Le Théâtre du blog).
Dancefloor, chorégraphie de Michèle Murray
Sous la lumière noire, un corps réduit à un maillot blanc traverse le plateau en tous sens, avec une série de déboulés. Après cette ouverture tonique, sous une lumière rose brutale, un danseur se meut seul avec lenteur. Un à un, les membres du ballet le rejoignent. Vingt-cinq interprètes : chacun avec sa gestuelle, sans interaction avec les autres et dans sa bulle mais pourtant attentif à l’ensemble. Puis, ils esquisseront pas de deux et autres figures.
Le paysage sonore de Gérôme Nox, tout en variations infimes, enveloppe le spectacle sans l’illustrer. De même, les éclairages diffusés par d’imposants projecteurs, changent tout à coup: violents, sourds ou colorés, indépendamment de mouvements.
Michèle Murray, formée à la danse classique mais aussi chez Merce Cunningham, est partie du travail des interprètes pour créer une partition composée de motifs chorégraphiques, tel un catalogue. A partir de ce vocabulaire commun, chacun est laissé libre de ses mouvements. Ce travail d’écriture instantanée, associant vocabulaire classique et actuel, demande aux artistes une extrême concentration mentale et corporelle. « Nous sommes sur un fil», dit l’un d’eux.
La chorégraphe franco-américaine prend le titre de sa pièce aux deux sens du terme : « Dance floor signifie un plateau ou un sol consacré à la danse mais aussi une piste de danse. Je veux, dans cette création, à la fois chercher la rigueur de ce plateau et tenir compte de la liberté des corps sur cette piste… »
Avec différents temps, rythmes, espaces et formes, la chorégraphe met ici en valeur les énergies d’un groupe qui a la même recherche, tout en rendant tangible la singularité des interprètes. Une belle expérience pour eux, mais aussi pour le public, touché par cette danse partagée.
Acid Gems, chorégraphie d’Adam Linder
Sous la surveillance de deux mystérieux personnages voilés, juchés sur de hautes chaises d’arbitre de tennis, des corps se découpent de profil, figures hiératiques à l’arrêt dans diverses postures. Bientôt, ils s’amalgament en un enchevêtrement grouillant au sol d’où se détachent quelques danseurs risquant d’éphémères mouvements.
Ensuite, les interprètes se déploient en formations géométriques, quadrillant l’espace, défilant en rang ou dansant en ronde avec une belle symétrie, puis se dispersent en débandades soigneusement structurées. La musique percussive et mécanique de Billy Bultheel infuse une rythmique implacable aux déplacements. Les lumières acidulées : vert, rose fluo… de Shahryar Nashat habillent la pièce d’une tonalité futuriste, tout comme les costumes d’Antonin Tron, au plus près des corps mais ne les couvrant qu’en partie.
En s’appuyant sur la technique éprouvée des seize danseurs, Adam Linder explore les rencontres possibles entre les styles classique, contemporain mais aussi théâtral, pop et techno. Il entend, avec ces interprètes bien entraînés, «aborder la danse dans sa mécanique interne» et « opérer un massage cardiaque à tous les genres pour leur donner une vie nouvelle ».
Né à Sydney il y a cinquante ans ce danseur et chorégraphe travaille aujourd’hui à Berlin. Après une formation à la Royal Ballet School à Londres, il collabore avec la Michael Clark Company. Puis, il va, avec Damaged Goods, la troupe de Meg Stuart, tirer les premiers fils d’un travail expérimental.
Ici, il poursuit sa recherche sur l’hybridation des danses, inspiré par la démarche de George Balanchine qui, en 1967, réunissait, avec Jewels (Joyaux), les courants chorégraphiques américain, russe et français. Acid Gems (Gemmes acides) brille de tous ses éclats, porté par cette jeune troupe prête à toutes les expérimentations.
Mireille Davidovici
Jusqu’au 7 avril, Opéra National de Lorraine, place Stanislas, Nancy (Meurthe-et- Moselle). Ballet national de Lorraine, 3 rue Henri Bazin, Nancy. T. : 08 83 85 69 00.
Retrouver le Ballet de Lorraine : 4 mai , Static Shot , chorégraphie :; Decay – chorégraphie : Tatiana Julien For Four Walls – chorégraphie : Petter Jacobsson et Thomas Caley- Le Phénix, Valenciennes (Nord)
22 mai : Twelve Ton Rose, chorégraphie : Trisha Brown; Access to pleasure – chorégraphie: Petter Jacobsson et Thomas Caley, Musée de l’Orangerie, Paris 8e
28 juin, Discofoot , chorégraphie : Petter Jacobsson et Thomas Caley, Carreau du Temple, Paris 3e
10-11 juillet Static Shot chorégraphie Maud Le Pladec, Musée du Louvre – Festival Paris l’été