Tartuffe de Molière, traduction d’Andreas Staïkos, mise en scène de Yannis Dalianis

Tartuffe de Molière, traduction d’Andreas Staïkos, mise en scène de Yannis Dalianis 

Sans doute dans l’intention d’attaquer le parti dévot et, en particulier, les membres de l’influente Compagnie du Saint-Sacrement, Molière a-t-il voulu peindre un hypocrite prêchant la religion la plus austère pour mieux profiter de la naïveté de sa future victime.
Tartuffe parvient ainsi à s’introduire dans la maison d’Orgon, un grand bourgeois dont il veut capter la fortune et séduire l’épouse. Deux camps se forment alors: Orgon et sa mère, Madame Pernelle qui croient en la sincérité de cet imposteur.
Mais Dorine, la fidèle servante,  Elmire, l’épouse et Damis et Marianne, les enfants d’Orgon, son beau-frère, Cléante et sa femme Elmire sont eux beaucoup plus lucides. Leurs actions combinées finiront par ouvrir les yeux d’Orgon, mais trop tard! Tartuffe a déjà pris possession de la maison , grâce à un acte qu’il a discrètement fait signer à Orgon. Mais un deus ex machina, en l’occurrence, Louis XIV lui-même, sauvera au dernier moment le patrimoine de cette famille.

© Patroklos Skafidas

© Patroklos Skafidas

Yannis Dalianis nous offre un spectacle moderne, plein de musique et de couleurs, dans une version qui respecte l’esprit du texte. Mais en dialoguant avec l’actualité. Belles trouvailles, jeux de mots, scènes improvisées et allusions discrètes rappellent et commentent l’abus de pouvoir, les harcèlements sexuels et tous les côtés négatifs de la vie politique contemporaine. Le rôle de Valère, le jeune amoureux de Marianne, a été supprimé: selon le metteur en scène, il retardait l’évolution  de la pièce… Marianne, elle, devient une vivante-morte qui se sacrifie et Damis, un homosexuel. Et il y a très intéressant, un rôle-surprise: le valet de Tartuffe qui reste silencieux quand à  la fin, il dévoile ses vraies intentions. Le metteur en scène utilise les chansons d’Elvis Prisley comme moyen de séduction.
Le jeu des comédiens est plein de brio et d’énergie et Manos Karatzoyannis incarne un Tartuffe exceptionnel. Il réussit à bien mettre en valeur le sarcasme et l’obscurité de ce personnage complexe. Une adaptation à ne pas manquer.

Ce spectacle est dédié à la mémoire du grand metteur en scène Lefteris Voyatzis, mort en 2013. Il avait mis en scène L’Ecole des Femmes et Le Misanthrope, que le public et la critique avait beaucoup appréciés. Et il avait aussi joué le rôle de Tartuffe sous la direction de Spiros Evaggelatos. 

Nektarios-Georgios Konstantinidis 

Théâtre Stathmos, 55 rue Victor Hugo, Athènes. T. : 0030210523026 https://www.youtube.com/watch?v=-RxsSdZdcnI


Archive pour 15 mai, 2023

Irrésistible Offenbach de Bruno Druart et Patrick Angonin, mise en scène d’Anne Bourgeois

Irrésistible Offenbach de Bruno Druart et Patrick Angonin, mise en scène d’Anne Bourgeois

Un beau rideau rouge de cet ex-cinéma devenu un petit théâtre (d’habitude, c’était plutôt le contraire!) s’ouvre et le spectacle commence sur Belle Nuit, ô nuit d’Amour de La Barcarolle, un opéra fantastique de Jules Barbier et Jacques Offenbach. Avec tous les personnages de cette pièce. Nous sommes dans le bureau du compositeur qui était aussi mais on le sait moins, le directeur du théâtre des Bouffes Parisiens dont la scène est  évoquée avec quelques châssis à l’envers et une belle toile peinte dans le fond.
Le thème : les dix dernières années de sa vie, moins connue que ses célèbres opérettes. Ce personnage fantasque et haut en couleurs, excellent musicien, avait nombre d’amoureuses, dépensait sans compter, et cherchait sans cesse à éponger ses dettes.

 ©x

  Amandine, sa secrétaire dévouée fait preuve d’une insolente autorité (Claudine Barjol), Pitou, son fidèle régisseur grognon (Daniel-Jean Colloredo et son vieil ami, un ancien soldat (David Le Roch) l’entourent. Comme sa muse, la brillante et insupportable cantatrice Hortense Schneider (Héloïse Wagner) qu’il finit par renvoyer mais qui réapparait à la fin.
Mais aussi de jeunes actrices et chanteuses qui feraient l’impossible pour être recrutées par le maître. Comme cette jeune fille sortie d’un couvent  et donc un peu naïve (Alexie Ribes)  à qui Jacques Offenbach fait passer une audition. Un peu naïve sans doute mais qui saura ensuite très bien le séduire: un bon moment de cette pièce.

Anne Bourgeois a choisi Jean-Paul Farré pour être Jacques Offenbach.  Une belle idée: cet acteur qui a récemment créé Dessine-moi un carré  (voir Le Théâtre du Blog), a une véritable passion pour la musique et joue aussi du piano.
Ici, à peu près toujours en scène, il s’amuse beaucoup à recréer ce personnage excentrique et savoureux. Côté diction et gestuelle, il est vraiment impeccable et tient tout le spectacle. Le reste de la distribution et la direction d’acteurs sont assez inégaux et le texte, souvent pauvret… Et on oubliera vite le semblant de scénographie et les costumes un peu tristounets.
Mais cela peut se voir avec plaisir si on n’est pas trop exigeant. Mais nous aurions quand même bien aimé entendre un peu plus les airs de Jacques Offenbach, que lors de petits intermèdes…Bref, on reste sur sa faim. Dommage.

Philippe du Vignal

Théâtre de Passy,  95 rue de Passy, Paris ( XVI ème). T. : 01 82 28 56 40.

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