Tango y tango, musique de Philippe Cohen Solal, livret de Santiago Amigorena, mise en scène de Marcial di Fonzo Bo

Tango y tango, musique de  Philippe Cohen-Solal, livret de Santiago Amigorena, mise en scène de Marcial di Fonzo Bo 

Un spectacle musical avec une partition d’un fondateur avec l’Argentin Eduardo Makaroff et le Suisse Christoph H. Müller du célèbre groupe Gotan Project (gotan en verlan : tango). Ici les notes de l’électro rejoignent parfois celles du tango.  Cela se passe -remarquable scénographie d’Alban Ho Van- dans une pauvre milonga à Buenos-Aires (le mot désignant un forme musicale et/ou dansée de tango mais aussi le lieu.

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Ici, les murs gris n’ont pas été repeints depuis longtemps… Au centre, un grand espace pour la danse encerclé par un rideau de fils qui servira d’écran comme le fond de scène derrière des portes vitrées, aux belles images vidéo signées Nicolas Vesdom montrant Buenos-Aires comme on s’y était ou presque.
 A cour, une loge en hauteur pour Aurélie Gallois au violon,   Victor Villena au bandonéon, et 
un petit bar minable et quelques tables de café. Jeanne (Rebecca Marder), une jeune Française de père argentin disparu, erre dans cette milonga  et semble vouloir chercher quelqu’un et connaître ses origines. Elle rencontrera Juan (Julio Zurita), un grand homme maigre d’un certain âge, un peu triste, qui aime beaucoup le tango mais qui n’a plus guère envie de le danser. 
Ils parlent de tout et de rien, en français et en espagnol. Mais l’osmose avec le chant et la danse ne se fait pas malgré l’impeccable mise en scène de Marcial di Fonzo Bo. Nous avons peine à croire à cette rencontre qui sonne faux: les dialogues et l’intrigue de
 Santiago Amigorena sont trop minces et il aurait fallu un véritable texte pour raconter l’histoire récente et douloureuse de l’Argentine avec quatre juntes militaires successives de 76 à 83, responsables de la mort ou de la disparition de 30.000 personnes… Des millions d’Argentins se sont aussi exilés. Et ici, les images de télé de l’époque, avec ces mères réclamant leurs enfants sans doute tués par les militaires au pouvoir, font froid dans le dos. Mais le texte reste aux abonnés absents.
Reste la danse et la musique. On pense quelquefois à Pina Bausch passionnée de tango qui avait monté Bandonéon en 1980. 
Matias Tripod a chorégraphié les tangos de plusieurs couples et quelques solos avec une précision et une virtuosité remarquables. Il y a quelques mouvements qui font aussi penser à la danse contemporaine.
Les personnages esquissés deviennent, à la fin surtout, très émouvants et on sent que
Maria-Sara Richter, Sabrina Amuchástegui, Fernando Andrés Rodríguez, Estefanía Belén Gómez, Eber Burger et Sabrina Nogueira sont
heureux de nous transmettre le plaisir de danser et de vivre libres dans une Argentine qui a été, encore longtemps après, marquée par la dictature sanglante des colonels.
Cristina Vilallonga exprime en chantant une véritable mélancolie et s’impose très vite. Mais Rebecca Marder, elle, n’a pas beaucoup de grain à moudre et a donc du mal à imposer un personnage inexistant. Un spectacle très vivant en une heure vingt qui a de grandes qualités, avec des danseurs exceptionnels mais qui vaut seulement pour sa musique, sa chorégraphie et ses images. Manque à l’appel une véritable dramaturgie qui apporterait du souffle à cette pièce remarquablement dirigée mais un peu conventionnelle. Dommage…

Philippe du Vignal

Jusqu’au 27 juin, Théâtre du Rond-Point, 2 bis avenue, Franklin D. Roosevelt, Paris (VIII ème). T. : 01 44 95 98 21.

 

 

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