In Situ,performance, texte de Patrick Bouvet, mise en scène de Joël Jouanneau
In Situ, performance, texte de Patrick Bouvet, mise en scène de Joël Jouanneau
Un spectacle en co-réalisation avec le Théâtre Nanterre-Amandiers-Centre dramatique national. Il y a plus de vingt ans, Patrick Bouvet, chanteur et compositeur dans un groupe rock, auteur d’installations sonores, publiait ce texte où il convoque habilement en une écriture répétitive: faits de guerre, terrorisme, camps de réfugiés, périphéries de villes, déserts criblés d’obus, frontières et zones de transit, aires de surveillance généralisée et une femme qui « aurait traversé les barrages avec une arme à feu dans son sac. «
Patrick Bouvet n’est pas un inconnu au théâtre puisque Shot et Direct avaient été mis en scène en 2003 par Cyril Teste avec le collectif MxM au festival d’Avignon. «Un texte disait le metteur en scène, est avant tout une parole; le travail musical, que nous avons expérimenté avec les comédiens et le compositeur sous forme de lecture à la table, reste pour nous primordial. À l’installation à partir d’une mise en voix et d’un travail vidéo sur les rouages de l’information télévisuelle et des conséquences que cela peut avoir sur un événement réel… »
Joël Jouanneau met aujourd’hui en scène ce In Situ avec simplicité et très efficacement, avec la très bonne actrice Cécile Garcia Fogel que l’on a souvent vue dans les mises en scène de Christopher Rauck (voir Le Théâtre du Blog), et avec le musicien Pierre Durand. Cet écrivain maintenant confirmé faisait apparaître en 2003 de nombreuses images qui sont maintenant d’une incroyable actualité. »Les grands poètes, les philosophes, les prophètes, disait déjà Charles Baudelaire, sont des êtres qui, par le pur et libre exercice de la volonté, parviennent à un état où ils sont à la fois cause et effet, sujet et objet.
Sur le plateau, rien que les nombreuses boîtes à pédale pour le son, disposées et une sorte d’aide-mémoire écrit à la craie. Cette performance est rythmée à la fois par les accords de guitare, une partition additionnelle de sons et la langue. Celle que fait brillamment entendre Cécile Garcia Fogel qui dit toute la difficulté qu’ont les pauvres humains à vivre sur une planète où leurs grands-parents, leurs parents et eux-même ont tout fait pour ne plus avoir le contrôle de ce qui se passe et va se passer dans un proche avenir.
« Un désastre esthétique doublé d’un fiasco technique » (…) «Dans un premier temps il faut éviter de jeter de l’huile sur le feu » il faut éviter le général président il peut faire faire fleurir la mort il peut jeter les enfants dans le feu le général président est un arbre mort(…) Du matériel de surveillance a été placé dans un dirigeable publicitaire qui tourne en permanence du matériel publicitaire a été placé du matériel publicitaire qui tourne en permanence la sécurité est à son niveau maximal en permanence du matériel publicitaire à son niveau maximal (…) Les ordinateurs serviront à vendre le site des ordinateurs dans les fonds marins des ordinateurs ivres de requins au centre d’un site sacré. »
Cécile Garcia Fogel, en pantalon noir et chemise blanche, a une gestuelle et diction impeccables et s’empare de ce texte avec la grande maîtrise qu’on lui connait. En une heure et quelque, elle réussit sans difficulté à faire passer ce flux poétique insolite, bien entendu influencé par la musique répétitive qu’a su créer son auteur. Côté mise en scène, nous aurions aimé que Joël Jouanneau la fasse parler de temps en temps sans micro. Quel bonheur d’entendre alors sa belle voix quelques minutes sans ! Et il aurait pu nous épargner ces jets de fumigène inutiles et polluants (pour nous, le quatrième en quatre jours!)
A ces réserves près, une performance chaleureusement applaudie qui mérite d’être reprise.
Philippe du Vignal
Performance jouée du 23 au 27 mai au Théâtre de la Bastille, 76 rue de la Roquette. T. : 01 43 57 42 14.