Le Groupe 33: Les Archives à la racine, une exposition aux Archives de Bordeaux-Métropole

Le Groupe 33: Les Archives à la Racine, une exposition aux Archives de Bordeaux-Métropole
 
Rares sont les compagnies de théâtre qui atteignent la cinquantaine comme le Groupe 33 à Bordeaux. Dans cette exposition-rétrospective, aucune odeur de naphtaline mais le goût du bordelais qui vieillit bien en barrique. Cette troupe du cru s’appelait la  Compagnie Dramatique Universitaire de Bordeaux; fondée en mai 68, elle réunissait de joyeux étudiants de la Fac et était animée par Jacques Albert-Canque, leur professeur, et l’ami de la compagnie dramatique d’Aquitaine, ancêtre de l’actuel Théâtre National de Bordeaux en Aquitaine.
 
Jaquel, disparu il y a trois ans, était un boulimique de la scène. Il avait su appliquer des principes qui ont peu cours dans le théâtre, dit amateur: la rigueur, la force d’un collectif et la foi absolue en un travail expérimental. Il n’aimait guère les instituions parisiennes  comme il l’avait clairement dit dans un manifeste écrit en 85, et ici présenté. Lesquelles le lui rendaient bien! À peine une création faite, il en préparait une nouvelle. Caractéristique essentielle chez lui : mettre en scène des textes, souvent plus que des pièces  dans des lieux hors-circuit théâtral mais absolument raccord avec le thème de l’œuvre. 

© Sud-Ouest

© Sud-Ouest


Une chose peu pratiquée et devenue aujourd’hui presque une mode…
Il faut bien connaître Bordeaux, son histoire et ses lieux secrets à l’image d’une bourgeoisie fermée à toute innovation, pour apprécier cette démarche. Lieux non conventionnels, souvent désaffectés: salles en déshérence, base sous-marine de la dernière guerre, entrepôts Lainé, toit de théâtre, garage Pigeon…
Tel a été aussi le fil conducteur de l’exposition présentée dans une scénographie de Claire Morin à l’Hôtel de Ragueneau à Bordeaux, un des rares hôtels particuliers du XVII ème siècle encore visibles à Bordeaux et
ancien siège des Archives municipales.

© Fabien Cottereau. répétition sur les toits du Théâtre Barbey

© Fabien Cottereau. Répétition sur les toits du Théâtre Barbey

Plus de cinq cent interprètes ont travaillé avec ce metteur en scène, très cultivé et grand connaisseur du romantisme allemand, en particulier de Friederich Hölderlin qui vécut un temps à Bordeaux où il fut précepteur. Jacques Albert-Canque aimait aussi les dramaturges en rupture, comme, entre autres, Jean Genet dont il avait mis en scène Les Bonnes, Les Paravents, Le Balcon et Les Nègres. Il fallait à l’époque à Bordeaux, avoir un sacré culot pour s’attaquer à un tel répertoire.

Humble mais habité d’un feu sacré, il savait le transmettre avec foi, rigueur  et compétence aux artistes en herbe amateurs qui l’entouraient. Tous restés fidèles à cette troupe comme on disait… Un terme un peu désuet encore utilisé pour parler de la Comédie-Française. Rappelant aussi Molière et son théâtre nomade trimbalant ses malles, de scène en scène dans le Sud de la France.

©x L'Illusion comique de Corneille (2006)

©x L’Illusion comique de Corneille (2006)


Jacques Albert-Canque avait dirigé le festival de Blaye (Gironde), y accueillit plusieurs fois l’Ecole du Théâtre National de Chaillot avec Peines d’amour Perdues, mise en scène d’Andrezj Seweryn et Noces et banquets monté par le Théâtre de l’Unité ( Hervée de Lafond et Jacques Livchine) en 94 .
Il avait aussi mis en scène conjointement pour le festival de Condom, là aussi dans un lieu non- théâtral, l’allée d’un cloître, avec les élèves-acteurs de cette école, Cédrats de Sicile de Luigi Pirandello et La Demande en mariage d’Anton Tchekhov. Des pièces courtes mais brillantes, l’une sur un amour malheureux et l’autre sur un amour heureux qui avaient obtenu un réel succès populaire. Là aussi, sans scène, avec juste quelques accessoires.

© Sud-Ouest Jacques-Albert Canque à Blaye en 91

© Sud-Ouest Jacques-Albert Canque à Blaye en 91

Cette exposition traduit bien la vie du Groupe 33 avec de nombreuses photos, articles, accessoires, boîtes de maquillage, vidéos de spectacles, enregistrement vocaux. Ces documents viendront enrichir les fonds privés des Archives métropolitaines pour les rendre accessibles gratuitement à tous, chercheurs, curieux…
Un sacré déballage qui n’a pourtant rien d’un vide-grenier mais qui retrace le parcours aussi insolite qu’exemplaire, de Jacques Albert-Canque qui resta professeur à la Fac des Sciences et qui créa le Groupe 33 en 72… 850 visiteurs ont apprécié cette exposition.
Leur ami Jacquel disparu, ses compagnons, Colette Sardet en tête, ont repris le travail avec la même ardeur et répètent actuellement un prochain spectacle… 

 
Guy Lenoir
Cette exposition a été présentée du 10 au 20 mai à l’Hôtel Ragueneau, 71 rue du Loup, Bordeaux ( Gironde).

Archive pour 5 juin, 2023

Le Printemps des comédiens 2023

Le Printemps des comédiens 2023

Printemps des Comédiens__2

©Marie Clauzade

Ce festival né en 1987, est devenu un endroit incontournable de la création théâtrale. Une histoire exemplaire de «décentralisation». « Le Conseil général de l’Hérault, raconte Odette Michel, a demandé à Daniel Bedos qui dirigeait la Maison Molière à Pézenas, d’imaginer un festival pour les habitants de Montpellier et au-delà. Il a lieu en juin et Daniel Bedos fut dès l‘origine, un pilier du Printemps des comédiens, en contribuant à sa mise en réseau. » A la bibliothèque centrale de prêt du département où elle travaillait, elle a pu interpeller ses collègues « pour voir s’il y avait un public potentiel ». Et très vite, le public fut au au rendez vous : «J’ai créé l’accueil des professionnels, et la presse a rapidement  adhéré à ce festival. Grâce à des acteurs comme Michel Galabru, Michel Bouquet et au président,  Jean-Claude Carrière, des metteurs en scène reconnus sont venus  comme Ariane Mnouchkine qui y a créé Les Atrides. » 

Itinérant à l’origine, le Printemps a établi son quartier général au domaine d’Ô. Ce grand parc, à la lisière de Montpellier, était le lieu rêvé pour cette manifestation. En bas du jardin, d’un premier théâtre en dur (le Théâtre d’Ô) et d’un autre avec des gradins en plein air, les spectacles ont progressivement migré vers la pinède en haut, où deux salles ont été construites: le théâtre Jean-Claude Carrière et un amphithéâtre de mille huit cent places. « Le Printemps a eu dès le départ une vocation internationale, souligne Odette Michel. Avec des artistes européens, chinois, japonais… »

Depuis l’arrivée de Jean Varella à sa direction en 2011, le Printemps n’a rien perdu de son souffle et continue à grandir. Il accueille aujourd’hui de grandes productions européennes et des ténors de la création . Cette année:  Ivan van Hove, Julien Gosselin, Robert Wilson, Georges Lavaudant, complice artistique de Jean Varella de longue date. Sans oublier les artistes de la région Occitanie, sollicités au long de l’année dont Mama Prassinos et son remarquable Ismène ou Marie Lamarchère qui fait jouer La Tempête et Le Songe de Shakespeare par, entre autres, des artistes handicapés. Présentes aussi cette année les grandes écoles de théâtre: celle du T.N.S. avec L’Esthétique de la résistance et la troupe éphémère de l’Atelier-Cité du Centre Dramatique National de Toulouse, avec Même si le monde meurt (voir Le Théâtre du blog).

Avec quarante-cinq spectacles sur cent-trente représentations, et grâce à des tarifs abordables (de 6 à 38 €) le public revient tous les ans. Se mêlent aux fidèles des jeunes gens qui ont pu suivre pendant l’année les ateliers de pratique artistique ou le nouveau dispositif Campus. Mais aussi les apprentis-comédiens de l’E.N.S.A.D. dirigé par Gildas Milin, ou ceux du cours Florent racheté aujourd’hui par Galileo, un groupe privé qui gère des écoles de commerce et qui a ouvert une école de théâtre à Montpellier, Bruxelles, Bordeaux…

Le Printemps des comédiens organise aussi Le Printemps des collégiens, un festival dans le festival, avec, en juin, une journée pour présenter les travaux des ateliers de pratique théâtrale sur une pièce de Shakespeare depuis 2016, et de Molière, depuis 2022. Ces auteurs sont un des fils rouges de la programmation du festival. Les élèves de chaque classe sont tour à tour acteurs et spectateurs. Il s’agit d’éveiller la curiosité artistique et la sensibilité de ces futurs, ou déjà, citoyens. Une  École du spectateur vise à initier les élèves à la pratique culturelle.  Et, dans la foulée sera mis en place à la rentrée prochaine au lycée Clemenceau (premier lycée de jeunes filles créé en France) un baccalauréat à double cursus, avec les classes du Conservatoire de Montpellier  en théâtre, musique, danse…

Jean Varella a pour objectif, la transmission et depuis cette année, Campus invite des artistes de plusieurs disciplines et de toutes générations à dispenser leur savoir-faire. Pour les jeunes professionnels, «Il s’agit de formations thématiques d’une semaine fondées sur l’échange d’expertises, méthodes et pratiques (interprétation, mise en scène, image, écriture) à partir de textes et langages artistiques. » 

Porté par la candidature de Montpellier-Sète au statut de Capitale européenne de la Culture 2028, le festival va muter, avec l’appui du maire de Montpellier et des collectivités régionales. Il sera en effet permanent toute l’année, grâce à sa fusion avec l’Etablissement Public du domaine d’Ô. Sur vingt-trois hectares, il offre de nombreux espaces de représentation. Et cette future Cité européenne du théâtre va devenir un pôle régional de création avec, à la clef, des moyens pour produire des spectacles, au-delà des résidences pour artistes qu’il accueille déjà. Il ne faut pas hésiter à s’y rendre. En tramway depuis le centre de Montpellier. et une navette part du domaine à la fin des spectacles tardifs.

A suivre 

Mireille Davidovici

Du 1er au 21 juin, Le Printemps des comédiens, Cité du Théâtre, Domaine d’Ô, Montpellier (Hérault ) T. : 04 67 63 66 67.
Printempsdescomediens.com

 

 

 

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