© Benoîte Fanton
Entretien avec René Aubry, compositeur de Signes, chorégraphie de Carolyn Carlson
Une pièce créée pour le Ballet de l’Opéra de Paris en 1997 a connu un énorme succès à chacune de ses reprises. Signes a été conçu sur une idée originale d’Olivier Debré (1920-1999) qui en a réalisé les décors et costumes.
Cette fois, Carolyn Carlson a travaillé à partir des sept tableaux du peintre, représentatif de l’abstraction lyrique. Avec, ce soir de première, les danseurs-étoiles Hannah O’Neill et Germain Louvet et le Corps de ballet.
Une pièce au croisement de la peinture, de la danse et de la musique. Pour René Aubry, elle est le témoin de sa relation avec la chorégraphe avec qui il a vécu et qu’il voit toujours comme une fée qui l’a initié à la danse.
-Olivier Debré avait proposé à la chorégraphe plusieurs tableaux. Elle en avait retenu sept, très différents les uns des autres par leurs couleurs. Comment votre musique s’est-elle introduite dans cette création ?
-Ces tableaux, je les ai découverts à la fin. Ma création musicale s’est faite à partir du travail de Carolyn qui a dessiné la scène et les personnages dans l’espace. A l’époque, je ne vivais plus avec elle mais nous étions restés proches. Dès que le projet a été sur les rails, elle m’a donné des indications : « Là, il y aura un duo, là, il y aura toute la troupe ». Alors j’allumais mon Mac et faisais des maquettes de deux où trois minutes. Soit en fonction de ce que j’avais déjà dans la tête, soit inspiré par les indications de Carolyn à qui je faisais écouter un morceau qu’elle choisissait alors pour telle où telle scène.
Ensuite, je creusais ce morceau, le rallongeais et elle le réécoutait. Puis, je le modifiais selon ses remarques. Tout en sachant qu’à trois jours de la première, Carolyn était capable de modifier quelque chose…
Mais, avec l’exigence d’Olivier Debré, sa chorégraphie était plus écrite que d’habitude. Et du fait de la structure de ces tableaux, elle était devenue assez claire. J’avais envie qu’il y ait plusieurs instruments à cordes : guitare, mandoline, bouzouki … Mais le reste était plus orchestral. C’est la première musique que je créais sur disque dur et je découvrais une nouvelle manière de travailler : plus rapide et plus pratique.
-Pour vous, est-il plus difficile de concevoir une musique de scène pour Carolyn Carlson ou Philippe Genty, avec qui vous avez beaucoup travaillé ? Ou pour le cinéma d’animation comme celle du Gruffalo, de La Sorcière dans les airs, etc.. Ou encore pour un album ?
-Le plus difficile ? Etre seul… pour réaliser un projet personnel : je n’ai alors ni dialogue ni contrainte immédiate ni «retour». Du coup, j’ai tendance à me satisfaire trop vite du résultat : j’ai ma couleur, mon style et aime bien m’y tenir…
Mais travailler avec des créateurs exigeants m’oblige à aller plus en profondeur et il se passe alors des choses nouvelles dans ma musique. Je m’en étonne moi-même…
Jean Couturier
Jusqu’au 15 juillet, Opéra-Bastille, Place de la Bastille Paris ( XII ème). T. : 0 892 89 90 90.