Escapade, soirée théâtrale hors-les-murs par Bonlieu -Scène nationale d’Annecy

Escapade, soirée théâtrale hors-les-murs par Bonlieu-Scène nationale d’Annecy

IMG_0816

Manolo Théâtre du Centaure © M. D.

Une échappée belle au bord du lac, imaginée par l’équipe de Bonlieu et Les Jardins EnChantés dirigés par Blaise Merlin.  Avec une trentaine d’artistes, musiciens, circassiens, chanteurs… dans les vastes jardins de l’Europe, face au lac. Sur les pelouses et sous les lampions suspendus aux arbres centenaires, des tables accueillent les familles en pique-nique.
Plus de six mille personnes ont assisté à cette soirée gratuite qui clôt la saison théâtrale et ouvre l’exposition d’œuvres contemporaines en plein air Annecy Paysage, tout l’été dans les parcs.

Cette version plus modeste de La Grande Balade du Semnoz en 2020 (voir Le Théâtre du blog), se déroule en partie dans les frondaisons où des musiciens perchés sur des nacelles, donnent un concert. Hissés dans les branches avec cordes et poulies, ils jouent à tour de rôle pour éviter la cacophonie et nous emmènent dans des univers sonores contrastés :les étonnantes polyphonies, chants, et percussions des Pygmées Aka  du Congo alternent avec les solos lancinants de kora du Sénégalais Abdou Kouyaté, et les airs soufis du Palestinien Abo Gabi.

LA9B9932

Chant pygmées Aka © Yannick Perrin

Mais aussi le Trio Unio de Grenoble avec Armande Ferry-Wilczek (chant), Juliette Rillard (chant) et violon), Elise Kusmeruck (chant et violon).
Les mélodies grecques et orientales de Dafné Kritharas et Paul Barreyre, les chants flamenco de Paloma Pradal (Espagne), le duo occitan Duò Lavoà Lapò  de Manu Théron et Damien Toumi, les chants d’Italie du Sud par Eléonora Petrulli, et le chanteur basque Julen Achiary..

Nous avons aussi vu Manolo, l’acteur-centaure sur son cheval noir au bord du lac, suivi par le public surpris et par Anwar Khan, le percussionniste du Rajahstan qui l’accompagnait dans son récent spectacle Animal.

 

Nous avons aussi retrouvé aussi Les Filles du Renard Pâle, cette fois pas sur un fil mais dans une roue giratoire où Noa Aubry tourne élégamment, accompagnée par Johann Guillon à la guitare.

LA9B9739

Les filles du renard pâle© Yannick Perrin

Cet agrès fait partie du prochain spectacle de la compagnie en résidence de création à Annecy, troisième volet de la trilogie de la funambule Johanne Humblet, artiste associée à Bonlieu depuis 2021. Après Résiste et RespireRévolte ou Tentatives de l’échec, mettra en scène cinq artistes, circassiennes, danseuses et musiciennes : elles iront jusqu’au bout quitte à échouer, et à recommencer inlassablement pour suivre le fil de la liberté « face à la déraison, gangrène sociale, y a-t-il d’autres possibilités ? Et si elles vont jusqu’à l’effondrement, ce sera le poing levé ! »

 

Nous assistons aussi à Desorden, une performance de dix-huit minutes duo pour patins à roulettes batterie. Justine Berthillot, juchée sur des rollers luminsecents élégante sous des éclairages violets, se lance, après quelques tours de pistes apaisants, dans des figures acrobatiques et équilibres précaires. Elle glisse, chute après de grands écarts périlleux, mais se relève avec grâce, sous l’impérieux diktat du batteur Xavier Roumagnac. Révolte et soumission se succèdent chez Justine Berthillot sous l’emprise de la musique, mais elle aura le dernier mot, quand les sons et mouvements se fondent en une commune énergie. Une artiste à suivre.

 Ce menu de qualité invitera-t-il les gens à entrer dans la Scène Nationale ? La prochaine saison a été programmée par Salvador Garcia, avant de quitter Bonlieu après vingt-six ans à sa tête, et par Géraldine Garin qui en assure la direction par intérim. En attendant une nouvelle nomination l’année prochaine….

 Mireille Davidovici

 Le 8 juillet, dans le cadre d’Annecy-Paysage.

Bonlieu-Scène nationale, 1 rue Jean Jaurès, Annecy (Haute-Savoie) T. : 04 50 33 44 11.


Archive pour 11 juillet, 2023

Voyage à Zurich de Jean-Benoît Patricot, mise en scène de Franck Berthier

Voyage à Zurich de Jean-Benoît Patricot , mise en scène de Franck Berthier

©x

©x

De hauts voilages blancs encadrent une chambre. Sur grand écran en fond de scène, un long couloir d’hôpital blanc, immaculé… Ainsi commence inspiré d’une histoire vraie, ce Voyage à Zurich. Le thème:  le suicide assisté d’une vieille dame qui refuse tout traitement chimique pour la prolonger et qui veut être en forme pour choisir d’aller mourir calmement et avec dignité en Suisse. Entour de sa fils, de son gendre et d’une grande amie. Bref, nous sommes priés d’assister à ce voyage, comme celui de l’actrice Maia Simon, une proche de l’auteur qui, elle aussi, il y a seize ans avait choisi d’aller en Suisse se faire euthanasier.

Une épreuve à laquelle cette vieille dame s’est préparée et relevant de l’intimité mais beaucoup plus traumatisante pour ses proches qui acceptent avec difficulté de savoir que dans quelques jours, puis dans une dizaine de minutes, elle, aussi joyeuse et calme, ne sera plus là. Une gestion du temps dans un pays célèbre pour son exactitude qui ne doit pas être facile. Le tout sous l’œil vigilant d’une caméra de la Police helvétique pour qu’il n’y ait aucun malentendu.

Et cela donne quoi ? Pas grand chose d’inoubliable. Le texte est du genre bavard et la mise en scène de Franck Berthier est assez conventionnelle et part un peu dans tous les sens. les vidéos, sauf la première avec grand couloir blanc d’hôpital, ne font pas sens comme souvent au théâtre : paysages de forêt en noir et blanc, ensembles de lignes noires et blanches laides sans intérêt Et côté scéno, il y a des meubles que l’on déplace souvent.
Et ce qui aurait pu faire une sorte de performance est ici bien longuet: la pièce dure plus d’une heure! Ce n’est sûrement pas le bon format mais on nous dira sans doute que sinon le public ne viendrait pas. Pas sûr du tout ! Ici, les acteurs font leur boulot mais il faut attendre la fin pour que naisse l’émotion.


Avec cette dernière scène très réussie où dans une clinique, Florence (Marie-Christine Barrault) assise dans un grand fauteuil de cuir attend patiemment à côté de ses proches qu’un très stylé assistant (pantalon noir et veste blanche) lui serve le verre fatal, après bu un café… Souriante et paisible, elle semble nous dire que c’est juste un mauvais moment à passer mais qu’ensuite tout ira bien pour elle comme pour eux.  Elle s’affaisse sur le côté quelques minutes après. L’assistant dit simplement après lui avoir pris  le pouls: c’est fini. Mais ils sortent de la pièce accablés, surtout son fils. Ce choix de fin de vie est aussi une épreuve douloureuse pour la famille, et l’auteur fait bien de le rappeler…
Mais bon, cette scène mise à part, ce spectacle nous a laissé sur notre faim. La présence de Marie-Christine Barrault réussit heureusement à l’éclairer.Alors à voir? A vous de juger…

Philippe du Vignal

Jusqu’au 27 juillet , Présence Pasteur,  13 Rue Pont Trouca, Avignon. T : 04 32 74 18 54

 

Maison Close, chez Léonie, texte et mise en scène d’Agnès Chamak et Odile Huleux

Maison Close, chez Léonie, texte et mise en scène d’Agnès Chamak et Odile Huleux

Cela se passe en 1900. Donc il y a déjà très longtemps ; quand les bordels fleurissaient à Paris comme dans toutes les grandes et petites villes de la douce France. Avant la loi Marthe Richard en 1946 avec la fermeture de ces « maisons closes » et le renforcement de la lutte contre le proxénétisme,
Ici, Louise, une très jeune femme arrive, amenée d’Yvetot en Normandie par un recruteur, arrive dans le petit bordel de Léonie (appelé aussi maison close : la loi imposait que le bâtiment ait toujours ses volets fermés, qu’une lanterne rouge et un gros numéro le signalent. Un commerce très rentable et tout à fait admis par l’Etat, comme dans plusieurs milliers d’Eros Centers en Espagne et aussi très fréquentés… par les Français… et les Belges

©x

©x

Léonie est autoritaire et les jeunes ou moins jeunes prostituées doivent obéir. Comme Louise parait plus jeune que son âge, elle sera «la mineure » ou « la vierge », selon les désirs des clients.
Ses nouvelles camarades : Céleste, la sous-maîtresse enceinte de son mac, Fantine qui rêve toujours d’abandonner la prostitution et de faire un beau mariage et Victoire qui ne doute de rien..
Sans instruction, elles semblent résignées à accepter  pour vivre, ce « métier»,  au lieu d’être bonnes à tout faire chez des bourgeois dans une campagne reculée. Souvent aussi obligées de coucher avec monsieur, et d’initier les fils de la maison.
Mais elles vont avertir Louise qui tombe de sa chaise : ici, elles reçoivent un salaire mensuel, mais… entièrement récupéré par la mère maquerelle pour frais de logement, nourriture, vêtements. La misère non, mais l’exploitation, oui! Et c’est à prendre ou à laisser. Seuls, leur restent les cadeaux des clients, y compris la syphilis et autres maladies vénériennes.
Bref, un vrai rêve, comme ne le voyait pas tout à fait la naïve Louise… qui ne va pas le rester longtemps… Les jeunes femmes peuvent toujours refuser un client. Mais une nuit, le fils syphilitique d’un notable de la région essaye de violer Louise qui n’a pas voulu de lui. Elle se défend mais il meurt accidentellement dans une chambre de ce bordel.
Et son cocher qui l’a attendu dehors toute la nuit, affirmera qu’il ne l’a jamais vu ressortir de  cette maison close.  Parole contre parole. Mais que vaut celle d’une pute devant la Justice française en 1900!
Les filles et la tenancière comprennent quand arrive Louise, le corset couvert de sang, que l’heure est grave et qu’elles risquent toutes d’aller en taule pour un bon moment. Cette société patriarcale avec flic douteux, juge d’instruction qui leur fait la morale, mac sans scrupule… a un pouvoir exorbitant. Alors qu’elles ne sont que de jeunes putes sans défense et tout juste utiles à des hommes… qui ne les aideront jamais.
Elles cherchent mais en vain comment s’en sortir et, avec la sous-maîtresse, elles vont emballer le corps dans un tapis puis d’aller le jeter dans un étang. Mais cela ne va se passer comme prévu: le juge devient de plus en plus méfiant, bref, l’étau se resserre. Seule solution, elles vont mettre le feu à la maison pour faire disparaître toute trace. Et essayer ainsi de sauver leur peau.

C’est un spectacle que nous avions vu il y a quinze ans ! Ici repris dans une version un peu différente par son autrice Agnès Chamak et par Odile Huleux.La mise en scène, pas toujours très précise, mériterait des ajustements, le texte a quelques longueurs et mieux vaut oublier la scénographie et les costumes. Mais la direction des actrices et de Fabien Floris qui endosse plusieurs rôles est tout à fait remarquable. Tous avec une bonne diction et très crédibles dès qu’ils entrent sur le petit plateau, à la fois justes et pleins de vie. Un petit miracle. Comme une plongée dans un monde disparu (encore que?). Mais avec toujours en filigrane, l’exploitation des corps,  la maladie et  la mort qui guette.
Ici pas de fumigènes, lumières sophistiquées, micros H.F… Mention spéciale à Montaine Fregeai et Taos Sonzogni pour la qualité de leurs personnages. Allez découvrir ce petit spectacle très applaudi et à juste titre, vous ne le regretterez pas.

Philippe du Vignal

Jusqu’au 27 juillet, Théâtre des Brunes, 32 rue Thiers Avignon . T : 04 84 36 00 37.

DAROU L ISLAM |
ENSEMBLE ET DROIT |
Faut-il considérer internet... |
Unblog.fr | Annuaire | Signaler un abus | Le blogue a Voliere
| Cévennes : Chantiers 2013
| Centenaire de l'Ecole Privé...