Dracula-Lucy’s dream, mise en scène d’Yngvild Aspeli

Dracula-Lucy’s dream, mise en scène d’Yngvild Aspeli

 Nous avions découvert cette créatrice norvégienne en 2011 (voirLe Théâtre du blog), avec sa première pièce Signaux au festival mondial de la marionnette de Charleville-Mézières. Depuis Yngvild Aspeli a eu un parcours exceptionnel et ses spectacles ont été programmés partout dans le monde avec grand succès.
« L’utilisation des marionnettes, dit-elle, est au centre de mon travail, mais le jeu d’acteurs, la musique, la lumière et la vidéo, comme le traitement de l’espace, sont des éléments tout aussi importants dans la communication de l’histoire. Avec la rencontre de ces différentes expressions, un langage étendu se crée et ouvre à une narration multi-sensorielle. »

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©Ch. Raynaud de Lage

La metteuse en scène a choisi de raconter par le biais d’une de ses victimes, l’histoire mythique du comte Dracula écrite par Bram Stoker. Lucy finira par devenir elle-même vampire, avant de mourir. Dominique Cattani, Yejin Choi, Sebastian Moya, Marina Simonova et Kyra Vandenenden donnent vie à Lucy et Dracula, des marionnettes à taille humaine. Accompagnés par la musique originale d’Ane Marthe Sørlien Holen.

Comme toujours avec la compagnie Plexus Polaire, le travail de manipulation est d’une précision exceptionnelle. Nous n’avons aucun de mal à croire à l’existence de Dracula aux charme fou avec de faux airs de l’acteur Samy Frey. Mais en une heure quinze, la trop rapide arrivée de Dracula ne nous laisse pas attendre. Ce qui contribuerait au plaisir de la découverte. Ici, très vite, le vampire assouvit son goût du sang sur les veines jugulaires de Lucy. Une superbe marionnette de chien-loup précède l’arrivée du Comte, manipulée selon la technique du théâtre noir: éclairer avec un puissant rayon de lumière, le pantin pour que le manipulateur reste invisible.
Yngvild Aspeli et ses artistes peuvent rompre avec cette technique et faire apparaître le comédien-manipulateur à vue, sans que l’illusion s’atténue. Il faut souligner le remarquable travail de l’équipe de fabrication des marionnettes: Yngvild Aspeli, Manon Dublanc, Pascale Blaison, Elise Nicod, Sé
bastien Puech et Delphine Cerf.

Un moment fort où dans une danse macabre, le corps de l’actrice qui joue Lucy se transforme en marionnette à taille humaine, manipulée grâce à des fils rouge sang sortant de son corps. Laissons-nous emporter par cette histoire entre rêve et réalité… Seul le théâtre peut redonner vie à ces fantômes nés de l’imagination d’un écrivain.

Jean Couturier.

Jusqu’au 24 juillet, de 9 h 30 à 11 h 20 (trajet navette inclus pour la patinoire). Départ de La Manufacture, 2 rue des Ecoles, Avignon. T: 04 90 85 12 71.

 


Archive pour 20 juillet, 2023

Tableau d’une exécution d’ Howard Barker, traduction Jean-Michel Déprats, mise en scène d’Agnès Régolo

Tableau d’une exécution d’Howard Barker, traduction de Jean-Michel Déprats, mise en scène d’Agnès Régolo

 Galactia, une peintre renommée, a été choisie par Urbino, Doge de Venise pour réaliser une fresque de trente mètres célébrant la victoire de la sainte-Ligue catholique sur l’empire ottoman en 1571 à la bataille navale de Lépante, où Miguel de Cervantès perdit un bras. Le dramaturge a été inspiré pour créer ce personnage de Galactia par la peintre Artemisia Gentileschi (1593-1652) est aussi peintre et il a écrit son texte à la manière de la fresque que l’artiste imagine, avec, entre autres, un soldat atteint par une flèche et le ventre ouvert…d’où le sang jaillit.

La République de Venise veut ainsi montrer sa puissance. Mais Galactia, elle, a décidé de montrer le massacre de quelque 30.000 Turcs…. Eternelle question: que peuvent alors être les relations d’un artiste avec le pouvoir, et si c’est une femme, quel rôle peut-elle avoir dans la société…
La pièce avait été mise en scène par Claudia Stavisky et le dramaturge anglais Howard Barker a été beaucoup joué en France. Jerzy Klesyk avait créé Les Possibilités  en 2000. Et  au théâtre de l’Odéon, furent mis en scène Hated Nightfall en 94, puis The Castle y Judith ou le corps séparé, Gertrude-Le Cri, mise en scène de Giorgio Barberio Corsetti en 2007 et, à cette même époque, Le Cas Blanche-Neige et Les Européens que réalisa Christian Esnay, avant Tableau d’une exécution.

Howard Barker a écrit, dit-il, un «théâtre de la catastrophe et c’est aussi celui d’hommes cruels. »
Avec des thèmes comme la mutilation, l’arrogance des nantis, la violence qui règne partout, même si elle est souvent invisible: «Le théâtre doit être une expérience éprouvante, dit-il, et la plus grande réussite d’un écrivain est de créer un personnage qui suscite de l’angoisse. » (…)  « Nous vivons à un moment de l’histoire de la démocratie où nous vouons un tel culte à la transparence, que cela en devient oppressant. C’est une forme de répression. »
En filigrane, c’est le thème de la pièce jusqu’à la révolte! Howard Barker situe l’action à Venise mais, dit la metteuse en scène, il fait «coexister notre présent et le passé. » Comme décor, juste quelques tables souvent dans la pénombre. Un homme nu allongé sur une table pose de dos pour la peintre, sa muse, son amante.. Déflagration en vue dans ce couple mais il ne veut pas divorcer… 

Un discours féministe mis en scène par Agnès Régolo et là, tout s’accélère. Pourquoi Galactia a-t-elle été choisie par le Doge ? Ici, vont se succéder jalousie, conquête du pouvoir, règlement de comptes, jusqu’à l’arrestation et l’enfermement de l’héroïne. Mais elle sera libérée par ceux qui l’ont eux-mêmes enfermée. Réhabilitée de justesse… l’artiste ne sera pas exécutée et sa fresque ne sera pas détruite…
Les acteurs regardent tour à tour la toile blanche : l’artiste a peint la fresque d’une exécution collective, plutôt qu’une victoire. Mais nous imaginons les couleurs rouges d’un charnier et la cruauté des soldats…

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Maud Narboni, Kristof Lorion, Pascal Henry, Rosalie Comby, Nicolas Geny et Antoine Laudet sont impeccables dans ces dialogues souvent crus mais teintés à la fois d’ironie et de lyrisme. Le Duc Urbino  ne mâche pas ses mots : «Je sais que vous êtes une artiste, et moi je suis un homme politique, et nous avons tous les deux toutes sortes de petites habitudes, de façons de parler, de croyances et ainsi de suite auxquelles nous ne serions heureux de renoncer ni l’un ni l’autre, mais afin que la communication soit plus facile, puis-je suggérer que nous arrêtions ce petit ballet de l’amour propre pour nous concentrer sur les faits ? Les faits simples et incontournables ? Mon frère est amiral de la Flotte et il n’est pas assez en vue sur ce croquis. Voilà tout ! »
Agnès Régolo sait faire naître les images conçues par Howard Barker avec une grande maîtrise. Malgré quelques longueurs du texte, un spectacle bien mis en scène et à voir.

Sylvie Joffroy

Jusqu’au 26 juillet, Théâtre des Halles, rue du Roi René, Avignon. T. : 04 32 76 24 51.
Le texte est publié aux Éditions Théâtrales-Maison Antoine Vitez.

Le Songe d’une nuitd’été adaptation et mise en scène de Jean-Michel d’Hoop

 

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Le Songe d’une nuit
d’été, adaptation et mise en scène de Jean-Michel d’Hoop

Mise en scène le 15 juillet 1959 par Jean Vilar dans la cour d’honneur du Palais des papes, ensuite par Jérôme Savary en 90 à la carrière Boulbon (voir Le Théâtre du Blog), la pièce est aujourd’hui montée par Jean-Michel d’Hopp avec sa compagnie belge.
Le metteur en scène voit dans Le Songe, une pièce avec pour  cadre, une forêt qui «permet aux personnages d’échapper momentanément à tout contrôle social, à la censure et aux interdits.  Ainsi  cette forêt de  magie invite aussi à l’exploration des identités de genre fluctuantes et offre un espace de liberté loin du machisme qui sévit à la Cour d’Athènes.  Et une espèce de refuge, un lieu en marge et un squat abritant des rêves-parties pour fêtards noctambules. »

La compagnie Point Zéro utilise des marionnettes portées et aussi le corps-marionnette où se confondent acteur et pantin offrant toutes les libertés. Les marionnettes et masques de Loïc Nebreda, en résine, latex, mousse, tissus et lycra, sont impressionnantes de vie et font corps avec les acteurs-manipulateurs.

Avec une grande bouche, elles disent le texte avec une telle précision que l’on dirait des morceaux de bravoure improvisés par les manipulateurs. Mais ici, on retrouve bien le texte fou du grand dramaturge.
Parfois les pantins se permettent une interaction humoristique avec leurs acteurs: qui manipule qui? Et qui prend l’ascendant sur l’autre? Ils ont une telle maîtrise qu’on en oublie leur présence. Sur un rythme rapide et coordonnés par de remarquables régissseurs, ils nous emportent dans cette nuit d’été pendant une heure quarante.

Nous entendons donc à nouveau l’admirable épilogue dit par Puck: «Si nous, les ombres que nous sommes, Vous avons un peu outragés, Dites-vous pour tout arranger. Que vous venez de faire un somme. Avec des rêves partagés. Ce thème faible et qui s’allonge. N’a d’autre rendement qu’un songe. Pardon, ne nous attrapez pas, Nous ferons mieux une autre fois, Aussi vrai que Puck est mon nom, Si cette chance nous avons. D’éviter vos coups de sifflet. Vite nous nous amenderons. Ou Puck n’est qu’un menteur fieffé. Sur ce, à vous tous bonne nuit, Que vos mains prennent leur essor. Si vraiment nous sommes amis. Robin réparera ses torts ».
Ces phrases magiques qui lient depuis à jamais les ici les personnages-marionnettes et le public. Allez vous perdre dans cette forêt de magie et prendre un bain de vie, vous ne le regretterez pas.

Jean Couturier.

Jusqu’au 26 juillet, Le 11 théâtre, 11 boulevard Raspail, Avignon. T. : 04 84 51 20 10.

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