Cyrano de Bergerac, d’Edmond Rostand, adaptation et mise en scène de Katja Hussinger et Rodolphe Dana

Cyrano de Bergerac d’Edmond Rostand, adaptation et mise en scène de Katja Hunsinger et Rodolphe Dana

L’écrivain Maurice Pottecher (1867-1960) né à Bussang, un village lorrain près de l’Alsace, y a créé en 1892 le Théâtre du Peuple. Il avait rapporté du théâtre de Dionysos à Athènes, une pierre qu’il a incorporée au site pour unir nature et spiritualité.Ici trois principes: intégration d’amateurs à une compagnie professionnelle, adresse au plus grand nombre avec cette devise : Pour l’art, pour l’humanité,  et idée de transmission avec rencontres entre public et acteurs. Chaque année, le Théâtre du Peuple offre ainsi un programme de juillet à septembre.

Ce majestueux et imposant bâtiment construit en bois de pin, fait face aux monts colorés des Vosges. Selon une spectatrice, «c’est à la fois l’ouverture de l’esprit et l’ouverture à la nature ». Et pour Cathy, une ancienne ouvrière, agent d’entretien : « C’est une émotion continue. » On accède à cette salle de neuf cent places par des escaliers sur les côtés.
Invention magistrale, le fond de scène s’ouvre, selon les nécessités, sur un fragment de forêt et cela devient une scénographie avec cadre, comme au cinéma. Maurice Pottecher à Bussang, a inventé le plan au théâtre… La salle a été classée monument historique en 1976.

Quatre professionnels et onze amateurs interprètent ce Cyrano de Bergerac d’Edmond Rostand (1868-1918). Ils répètent ensemble sans distinction et ce travail crée cohésion et rythme. Nous avons vu ici une troupe pleine d’allant et traversée par l’amour du jeu dans les morceaux de bravoure comme dans les moments plus intimes et dramatiques.
Cyrano (Rodolphe Dana) Roxane (Laurie Barthélémy) et Christian de Neuvillette, (Olivier Dote-Doevi) opèrent un singulier chassé-croisé entre les apparences et la vivacité de la parole. On connait bien l’histoire : Cyrano, un homme laid mais inspiré, aime Roxane… Mais elle aime Christian, un beau jeune homme que l’amour rend mutique. Mais ici Rodolf Dana efface le nez de Cyrano  et quand il en dit : « C’est un pic, c’est une péninsule…un monument », il joue de tout son corps. Avec sa puissance physique, il  intègre, agile avec les mots comme avec l’épée, il ce nez comme partie de corps et de son énergie.

©x

©Ch. Raynaud de Lage

 Rodolphe Dana inverse ici l’intrigue et la laideur disparaît. Et la première fois que Cyrano parle à Roxane, sans doute inspiré secrètement par elle, il use de tous ses talents verbaux. Elle aurait pu l’aimer à ce moment-là mais elle veut l’apparence et les élans du verbe et inconsciemment, elle garde le souvenir de la voix de Cyrano qu’elle reconnaîtra plus plus tard : «C’était vous ? » Pourquoi revient-elle sur cette question de la laideur et donne-t-elle la primauté à la parole?

Roxane se trompe une seconde fois quand elle dit à Christian qu’elle aurait pu l’aimer même s’il avait été «laid». Rodolphe Dana, Laure Barthélémy, Olivier Dote-Doevi jouent sur la substitution des apparences. Ainsi Cyrano met le chapeau de Christian pour la fameuse scène du balcon, face à Roxane. Et il se prend tellement au jeu qu’il est sur le point de monter l’escalier vers Roxane. Un moment important où l’apparence, l’amour et le théâtre se mêlent en un seul geste. Comme dans une hésitation… Et Rodolphe Dana excelle dans l’émotion brève. C’est le « Aie ! » que Cyrano laisse échapper au moment du mariage de Roxane et Christian. Cela fait contrepoint à l’immense lune apparaissant en fond de scène. Olivier Dote-Doevi (Christian) ne subit pas seulement la situation mais introduit avec subtilité des instants comiques avec Cyrano.

©x

© Ch. Raynaud de Lage Au fond Roxane partant à cheval pour le siège d’Arras

La scénographie multiplie les résonances. Dans la pâtisserie du tonitruant et bienveillant Ragenau (Martial Durin), une table occupe tout le plateau avec au-dessus, des casseroles en cuivre suspendu à un fil. A la fin de la pièce, le fond de scène s’ouvre. Au cadre de cinéma, se substitue un cadre de théâtre. Avec arbres, buissons et rochers éclairés par la lumière du jour.
Rodolphe Dana  transforme ce cadre en décor et Cyrano y mourra en pleine gloire. Edmond Rostand s’est-il inspiré de Cyrano de Bergerac, l’auteur de L’autre monde, l’Histoire comique des états du soleil ? (1662).  Oui et sur deux points peut-être : les mots : «Mourir de chagrin » renvoient « A la fin de l’envoi, je touche.» Edmond Rostand sait encore toucher le public… presque un siècle et demi après la création de la pièce, comme le prouve cette mise en scène…

 Bernard Rémy

Jusqu’au 2 septembre.Théâtre du Peuple, Bussang (Vosges),


Archive pour 26 août, 2023

Cyrano de Bergerac, d’Edmond Rostand, adaptation et mise en scène de Katja Hussinger et Rodolphe Dana

Cyrano de Bergerac d’Edmond Rostand, adaptation et mise en scène de Katja Hunsinger et Rodolphe Dana

L’écrivain Maurice Pottecher (1867-1960) né à Bussang, un village lorrain près de l’Alsace, y a créé en 1892 le Théâtre du Peuple. Il avait rapporté du théâtre de Dionysos à Athènes, une pierre qu’il a incorporée au site pour unir nature et spiritualité.Ici trois principes: intégration d’amateurs à une compagnie professionnelle, adresse au plus grand nombre avec cette devise : Pour l’art, pour l’humanité,  et idée de transmission avec rencontres entre public et acteurs. Chaque année, le Théâtre du Peuple offre ainsi un programme de juillet à septembre.

Ce majestueux et imposant bâtiment construit en bois de pin, fait face aux monts colorés des Vosges. Selon une spectatrice, «c’est à la fois l’ouverture de l’esprit et l’ouverture à la nature ». Et pour Cathy, une ancienne ouvrière, agent d’entretien : « C’est une émotion continue. » On accède à cette salle de neuf cent places par des escaliers sur les côtés.
Invention magistrale, le fond de scène s’ouvre, selon les nécessités, sur un fragment de forêt et cela devient une scénographie avec cadre, comme au cinéma. Maurice Pottecher à Bussang, a inventé le plan au théâtre… La salle a été classée monument historique en 1976.

Quatre professionnels et onze amateurs interprètent ce Cyrano de Bergerac d’Edmond Rostand (1868-1918). Ils répètent ensemble sans distinction et ce travail crée cohésion et rythme. Nous avons vu ici une troupe pleine d’allant et traversée par l’amour du jeu dans les morceaux de bravoure comme dans les moments plus intimes et dramatiques.
Cyrano (Rodolphe Dana) Roxane (Laurie Barthélémy) et Christian de Neuvillette, (Olivier Dote-Doevi) opèrent un singulier chassé-croisé entre les apparences et la vivacité de la parole. On connait bien l’histoire : Cyrano, un homme laid mais inspiré, aime Roxane… Mais elle aime Christian, un beau jeune homme que l’amour rend mutique. Mais ici Rodolf Dana efface le nez de Cyrano  et quand il en dit : « C’est un pic, c’est une péninsule…un monument », il joue de tout son corps. Avec sa puissance physique, il  intègre, agile avec les mots comme avec l’épée, il ce nez comme partie de corps et de son énergie.

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©Ch. Raynaud de Lage

 Rodolphe Dana inverse ici l’intrigue et la laideur disparaît. Et la première fois que Cyrano parle à Roxane, sans doute inspiré secrètement par elle, il use de tous ses talents verbaux. Elle aurait pu l’aimer à ce moment-là mais elle veut l’apparence et les élans du verbe et inconsciemment, elle garde le souvenir de la voix de Cyrano qu’elle reconnaîtra plus plus tard : «C’était vous ? » Pourquoi revient-elle sur cette question de la laideur et donne-t-elle la primauté à la parole?

Roxane se trompe une seconde fois quand elle dit à Christian qu’elle aurait pu l’aimer même s’il avait été «laid». Rodolphe Dana, Laure Barthélémy, Olivier Dote-Doevi jouent sur la substitution des apparences. Ainsi Cyrano met le chapeau de Christian pour la fameuse scène du balcon, face à Roxane. Et il se prend tellement au jeu qu’il est sur le point de monter l’escalier vers Roxane. Un moment important où l’apparence, l’amour et le théâtre se mêlent en un seul geste. Comme dans une hésitation… Et Rodolphe Dana excelle dans l’émotion brève. C’est le « Aie ! » que Cyrano laisse échapper au moment du mariage de Roxane et Christian. Cela fait contrepoint à l’immense lune apparaissant en fond de scène. Olivier Dote-Doevi (Christian) ne subit pas seulement la situation mais introduit avec subtilité des instants comiques avec Cyrano.

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© Ch. Raynaud de Lage Au fond Roxane partant à cheval pour le siège d’Arras

La scénographie multiplie les résonances. Dans la pâtisserie du tonitruant et bienveillant Ragenau (Martial Durin), une table occupe tout le plateau avec au-dessus, des casseroles en cuivre suspendu à un fil. A la fin de la pièce, le fond de scène s’ouvre. Au cadre de cinéma, se substitue un cadre de théâtre. Avec arbres, buissons et rochers éclairés par la lumière du jour.
Rodolphe Dana  transforme ce cadre en décor et Cyrano y mourra en pleine gloire. Edmond Rostand s’est-il inspiré de Cyrano de Bergerac, l’auteur de L’autre monde, l’Histoire comique des états du soleil ? (1662).  Oui et sur deux points peut-être : les mots : «Mourir de chagrin » renvoient « A la fin de l’envoi, je touche.» Edmond Rostand sait encore toucher le public… presque un siècle et demi après la création de la pièce, comme le prouve cette mise en scène…

 Bernard Rémy

Jusqu’au 2 septembre.Théâtre du Peuple, Bussang (Vosges),

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