Le Grand Œuvre de René Obscur, texte et mise en scène de Bertrand de Roffignac

© Ch. Raynaud de Lage

© Ch. Raynaud de Lage


Le grand Œuvre
 de René Obscur, texte et mise en scène de Bertrand de Roffignac

C’est le deuxième volet d’une trilogie initiée avec Les sept Colis sans destination de Nestor Crévelong et créée au théâtre de Vanves en janvier dernier. Il s’agit ici non d’une comédie musicale, mais d’un spectacle avec des scènes jouées, des monologues, des numéros d’acrobaties (trapèze et corde, ou chaîne) et des ensembles ou duos dansés). Joué face public sous un chapiteau, au sol, sur une scène et sur de nombreux praticables à roulettes disposés par les acteurs eux-mêmes. En haut, côté jardin, un batteur et côté cour, un synthé.
L’argument? « Dans un continent aux instances démocratiques fracturées, René Obscur, un réalisateur passé maître dans la réalisation de films contestataires porno, a inventé une caméra révolutionnaire. Elle peut produire des films suscitant une jouissance sexuelle et spirituelle inégalée mais en défigurant irrémédiablement les acteurs. Avec ce outil, René veut créer le film parfait et pouvant infléchir l’inertie politique de son temps. Il serait aussi un hommage à Elio, sa muse disparue dans un incendie tragique. Cette quête singulière attire l’attention d’Ange Cratère, héritier d’une des plus grandes fortunes du continent. » C’est du moins, ce que dit la note d’intention… mais que l’on voit moins sur le plateau…

Les images d’une grande force font penser à celles du Bob Wilson il y a bien longtemps entre autres, avec son opéra-culte Eisntein on the beach  comme ces hautes fenêtres aux vitres couvertes de poussière, ou ce René suspendu à un câble et tournant son film avec une très grosse caméra bidonnée en contre-plaqué (remarquable scénographie d’Henri-Maria Leutner très en phase avec le propos).
Et il y a des moments très bien dansés. Bertrand de Roffignac (il joue aussi René) a un sens de l’image  exceptionnel comme, entre autres, l’arrivée de pompiers plus vrais que nature et il sait incontestablement diriger toute une équipe d’acteurs, acrobates et techniciens: Adriana Breviglieri, Axel Chemla, Gall Gaspard, Marion Gautier, Xavier Guelfi, Loup Marcault-Derouard, François Michonneau, Pierre Pleven, Erwan Tarlet, Baptiste Thiébault et lui-même.
Et il réussit à mettre en scène des tableaux expressionnistes avec une grande précision et aux impeccables enchaînements.
Oui, mais… comment ne pas être partagé. Le niveau sonore de la musique est sans raison trop élevé et le metteur en scène fait crier ses interprètes en permanence à des micros H.F. avec une sono réglée au maximum. Résultat : on a plus que du mal à comprendre le texte et on décroche assez vite. Dommage. Et comme Bertrand de Rofignac, par ailleurs très bon acteur, maîtrise mieux l’espace que le temps, ces deux heures sont longuettes et l’énergie du début a tendance à fléchir. Et il aurait tout intérêt à élaguer sérieusement les nombreux monologues qu’il s’offre sans doute avec grand plaisir:  cela apporterait de l’air au spectacle quand même un peu estouffadou…
Pourtant cette œuvre originale a quelque chose de fascinant et a été visiblement inspirée par les univers dystopiques du cinéma fantastique, entre autres, celui du célèbre 
Métropolis de Fritz LangOu par celui de La Cité des enfants perdus de Caro et Jeunet. Mais s’est-il peut-être aussi souvenu de B.D. genre La Brigade chimérique de Fabrice Colin, Serge Lehman, Gess, et Céline Bessonneau où les auteurs reprennent l’esprit des feuilletons fantastiques populaires avec des savants fous et des super-héros. Ou comme  Marie des Dragons  d’Audrey Alwett, Nora Moretti et Marina Duclos, une remarquable série d « horreur-fantaisie ». Bertrand de Roffignac est à l’évidence un réalisateur doué et bien armé pour diriger toute une équipe…

© Ch. Raynaud de Lage

© Ch. Raynaud de Lage


Oui mais voilà son ambitieux récit semble partir un peu dans tous les sens- du moins d’après ce que nous pouvons en entendre! et le metteur en scène aurait pu nous épargner nombre de stéréotypes actuels comme ces nombreux et trop faciles lancers de fumigène blanc, des lumières stroboscopiques insupportables et vues cent fois, des rampes d’éblouisseurs clignotants et des déménagements incessants de praticables qui ne font jamais sens…

Mais, et c’est rare, Bertrand de Roffignac ose créer dans un cirque un spectacle hors-normes qui doit beaucoup à la science-fiction, avec quelques plans érotiques. Et pour une fois, signe qui trompe rarement, es gradins étaient surtout pleins de jeunes gens qui, visiblement, y trouvaient leur compte. Ce qui est exceptionnel dans le théâtre officiel ou privé.(Les places ne sont pas chères et c’est tant mieux.)
Nous n’avions pas vu
Destination de Nestor Crévelong mais nous serons curieux de le découvrir au prochain festival Impatience en décembre au Cent-Quatre à Paris. Il faudra suivre de près Bertrand de Roffignac.

Philippe du Vignal

Jusqu’au 24 septembre, Cirque électrique, place du maquis de Vercors, Paris ( XX ème). Prendre l’avenue des Lilas et à droite, on voit de loin le chapiteau rouge mais c’est tout près du métro Porte des Lilas.

 

DAROU L ISLAM |
ENSEMBLE ET DROIT |
Faut-il considérer internet... |
Unblog.fr | Annuaire | Signaler un abus | Le blogue a Voliere
| Cévennes : Chantiers 2013
| Centenaire de l'Ecole Privé...