Les Nécessaires, texte et mise en scène de Garance Rivoal

Les Nécessaires, texte et mise en scène de Garance Rivoal

par Josic Jégu

par Josic Jégu

Un solo en forme de fable contemporaine. Dans le bureau d’une association qui travaille pour une Préfecture, Diane, une travailleuse sociale est chargée de l’évaluation de l’âge réel des étrangers qui se disent mineurs pour échapper à un refoulement et avoir accès à une aide financière et à un hébergement. Donc à la protection de l’Etat français.
«J’aime mon métier, dit-elle, j’aime mon métier, je crois en son utilité et je crois que chaque jour, je fais du mieux que je peux pour aider. »
Diane est précise et pleine de bonne volonté, mais a du mal à trouver une cohérence entre l’obligation qui lui est faite par ses supérieurs de préparer un dossier social exact et son intention de faire le maximum pour faciliter la vie de ces laissés pour compte en état de grande précarité.
Même si comme elle essaye en vain de le faire comprendre à un de des interlocuteurs, elle n’a aucun pouvoir décisionnaire pour l’aider efficacement. Même en cas d’urgence quand il faut trouver un lit pour la nuit. Donc elle est coincée et aurait tendance à ne pas indiquer l’âge réel, puisqu’on lui demande un quota de plus en plus serré. Une situation ingérable…
Elle va même à frôler le mélange des genres, quand elle accueille chez elle une jeune migrant. Ce que lui reprochera vertement sa directrice. Retournement de situation : c’est elle maintenant qui se retrouvera évaluée voire jugée. Comment tout faire alors pour que son travail ne participe pas au système d’une société qui refuse ou du moins d’accueillir dignement les migrants de pays pauvres et qui demandent l’aide de la France. Et dur retour de manivelle, Diane sera elle encore  jugée par des conseillers administratifs quand elle voudra adopter un enfant…

Sur cette petite scène, un bureau avec une lampe et une chaise où est assise Diane (Alice May) face à ses interlocuteurs bien présents mais en voix off que nous nous ne verrons donc  jamais. Cela fonctionne plutôt bien: l’actrice a une présence indéniable et une belle gestuelle pendant ces soixante-dix minutes. Mais on se demande bien pourquoi elle a un micro H.F.  ( sans raison dans cette si petite salle!) C’était la première, donc soyons indulgent mais il faudrait que Garance Rivoal lui fasse travailler de toute urgence une diction plus qu’approximative ! Et qu’elle-même revoit aussi sa mise en scène. Il n’y aucune raison pour que la jeune accessoiriste déménage le bureau de place toutes les cinq minutes : cela cause un brouillage visuel qui nuit au texte…

A ces réserves près, la pièce est proche d’un bon théâtre documentaire avec un texte inspiré d’un article d’Arnaud Aubry et Karine le Loët. Garance Rivoal a travaillé bénévolement un mois au Centre d’accueil et d’Evaluation des situations à Nanterre, une structure qui dépend de la Préfecture, donc de l’Etat. Elle sait donc de quoi elle parle et cela se sent aussitôt dans la vérité des dialogues. Les Nécessaires sans aucune esbrouffe et loin du prétentieux Welfare de Julie Deliquet sur le même thème: le traitement de l’exclusion sociale (voir Le Théâtre du Blog), mérite d’être vu.

Philippe du Vignal

Théâtre de Belleville, 11 passage Piver, Paris (XI ème). T. : 01 48 06 72 34.

Les 9 et 10 novembre, Théâtre Claude Chabrol, Angers (Maine-et Loire).

 

 

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