Poupées persanes d’Aïda Asgharzadeh, mise en scène de Régis Vallée
Poupées persanes d’Aïda Asgharzadeh, mise en scène de Régis Vallée
C’est une reprise de ce conte sur fond autobiographique créé l’an passé dans le off à Avignon: cela se passe en Iran avec l’histoire de deux couples d’universitaires en 1971. Le spectacle commence avec « Eki boud, Yeki naboud, les premiers mots des histoires dans ce pays, du genre : « Il était une fois…. Les personnages vivent sous la dictature du Shah puis arrive la révolution avec l’arrivée de Khomeiny, autre dictateur et du régime islamiste.
Puis, au tout début de l’année 2000, on retrouve deux sœurs ados et leur mère célibataire dans un chalet à Avoriaz, avec quelques petits secrets de famille quand deux incroyables tempêtes ravagent la France. Mais il y aussi l’évocation de la légende persane de Bijan et Manijeh. Vous mixez le tout et vous avez une pièce? Pas vraiment et on s’y perd un peu dans ce texte tricoté par l’autrice et loin d’être convaincant : à mi-chemin entre un théâtre documentaire qui n’ose vraiment dire son nom et une intrigue, souvent à la hauteur de Plus belle la vie !
Les petites scènes se succèdent sans arrêt entre évocation de la situation politique en Iran dans les années soixante dix et au-delà, et scènes de famille amenées par date et le lieu projetés. Il y a quelques éléments de décor (pas très réussis) pour signifier le chalet, l’appartement, la prison….
Mais la mise en scène est bien sage-heureusement il y a quelques images vidéo d’époque bien choisies et qui font sens- Régis Vallée peine à donner une vie réelle à ces silhouettes de personnages. Et il aurait pu nous épargner ces fumigènes à plusieurs reprises pour dire les nuages dans la montagne ou les gaz lacrymo contre les manifestants hostiles au régime islamiste.
Heureusement, il y a pour sauver l’ensemble, une délicieuse musique persane en toile de fond et surtout le jeu solide des acteurs qui jouent tous plusieurs personnages : Aïda Asgharzadeh qui est aussi l’autrice de la pièce, Juliette Delacroix, Kamel Isker, Toufan Manoutcheri, Sylvain Mossot. Mention spéciale à Azize Kabouche.
Mais rien à faire, malgré ce beau titre, le compte n’y est pas, la piécette n’arrive à décoller et cette heure et demi passe bien lentement. Le public-âgé en grande majorité-semblait prendre plaisir à voir évoqués des événements qui, quand ils étaient jeunes et beaux, avaient fait la une de l’actualité en France: Khomeini avait été accueilli en 78 et était admiré par Michel Foucault et Jean-Paul Sartre! Lequel Khomeini arrivé au pouvoir fera ensuite exécuter plusieurs milliers de prisonniers politiques.
Bref, il y a de la nostalgie dans l’air mais ce spectacle qui a récolté deux Molière l’an passé, celui l’auteur francophone vivant ???? et celui justifié du second rôle pour Kamel Isker, reste sous des airs un peu contemporains, très conventionnel et décevant.
A voir? Mieux vaut ne pas être trop exigeant… et être prêt à payer cher votre place : carré Or : 41 et 48 €, catégorie 1 : 38 et 44 € ; strapontins pour les moins de vingt-six ans, 12 €. « Nous vivons une époque moderne » comme le disait Philippe Meyer.
Philippe du Vignal
La Pépinière-Théâtre, rue Louis-Le Grand, Paris (Ier)