M comme Médée, adaptation, dramaturgie et mise en scène d’Astrid Bay
M comme Médée, adaptation, dramaturgie et mise en scène d’Astrid Baya
Une réalisation à partir de textes d’auteurs contemporains: Médée de Jean Anouilh, une pièce pas très bonne et bien oubliée, Médée-Matériau d’Heiner Müller, Médée, poème enragé, un bon texte de Jean-René Lemoine, Manhattan Medea de Dea Loher et Medealand de Sara Stridsberg. Mais aussi des classiques: Médée de Sénèque et celle d’Euripide, sans doute la plus connue où l’héroïne n’hésite pas aussi à empoisonner avec un vêtement, Créuse, l’héritière du trône de Corinthe, causant aussi la mort du roi Créon.
Il s’agit ici d’un montage sur le thème de l’exil mais il est surtout question d’une histoire d’amour extraordinaire, dit Astrid Bayiha.» Une scène en bois clair avec quelques marches et une avancée vers le public et dans le fond quelques voiles bleu foncé. Une scénographie réussie de Camille Vallat. Les acteurs sont de Martinique, Afrique, Maghreb, Moyen-Orient, Brésil et France. Fernanda Barth, Jann Beaudry, Valentin de Carbonnières (en alternance avec Anthony Audoux), Swala Emati, Daniély Francisque, Nelson-Rafaell Madel, Josué Ndofusu.
Et en ces temps troublés, cette équipe donne une belle lumière et surtout vers la fin, il y a de remarquables chants africains qui sauvent cette réécriture pallôte d’une histoire mythique, ici axée sur une relation amoureuse légendaire. Mais voilà, tout part un peu dans tous les sens et il manque un véritable fil rouge. Ce cocktail de pièces ne pouvait pas bien fonctionner.Jason chef des Argonautes va en Colchide pour voler la fameuse Toison d’or grâce à laquelle il pourrait récupérer son trône que lui a piqué son oncle Éétès, roi de Colchide. Il va impose à Jason des épreuves insurmontables qu’il gagnera grâce à Médée, fille d’Éétès et magicienne.
Très amoureuse de Jason, elle s’en ira avec lui et ils auront deux enfants. Mais Jason la quittera pour Créuse, la fille de Créon. Médée n’a aucun espoir et est d’une jalousie féroce… Déjà meurtrière de son frère, elle tuera à nouveau ses deux enfants. Une tragédie restée très actuelle dans la douce France: voir les journaux télévisés… Mais on ne verra ici aucun mort.
Astrid Baya a fait jouer Médée à la fois par Fernanda Barth, Jann Beaudry et Danièly Francisque, et Jason par Josué Ndofusu et Valentin de Carbonnières. Nelson-Rafaell Madel est un remarquable Choryphée.
Ils font le boulot mais cette pluralité d’acteurs sans doute pas l’idée du siècle, sauf à de rares moments où jaillit un petit semblant d’émotion.
Malgré les belles lumières de Jean-Pierre Népost, l’ensemble ne décolle pas et tout reste ici un peu terne, malgré des costumes très colorés mais peu réussis. Bref, nous sommes restés sur notre faim et ce M comme Médée, affligé d’une dramaturgie assez prétentieuse sur fond de féminisme, ne nous a pas convaincu. Ce collage de textes s’avère finalement une fausse bonne idée???
«La question de la pluralité dans l’interprétation et l’adaptation, dit Astrid Baya, est le point d’ancrage de mon travail.» Soit. Mais si nous sommes tous des Jason et des Médée en puissance, encore faudrait-il savoir comment redonner au célèbre mythe toute sa puissance et là, c’est plus difficile que d’opérer vite fait un petit mélange de sept pièces. Malgré encore une fois la beauté des chants, il n’y a pas le compte et la salle n’était pas très pleine. On oubliera vite ce M comme Médée...
Philippe du Vignal
Jusqu’au 25 novembre,Théâtre de la Tempête, route du Champ de manœuvre, Cartoucherie de Vincennes. Métro: Château de Vincennes + navette gratuite. T. : 01 43 28 36 36.