Livres et revues:
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Lac artificiel de Marine Chartrain
En périphérie d‘une ville, le long d’une route et près d’un lac artificiel, des adolescentes: Laura et Salomé, cherchent à retrouver une fête. L’une imbibée de vodka-pomme mais l’autre, pas. Personne et aucun bus… Confessions et souvenirs se répandent et se répondent. Mais Laura finit par laisser en plan Salomé..
Cette jeune autrice issue du département Écriture dramatique de l’E.N.S.A.T.T., a saisi leurs hésitations et absolus. L’errance et la quête de ces filles, sont vues avec une grande justesse, le cadre à la marge mal défini: comme une métaphore de l’adolescence.
Marine Chartrain a trouvé un ton et une situation justes. Ses dialogues et leurs extensions en monologues fonctionnent, et il y a comme on dit, une «atmosphère». Tout y est. Une lecture en public à Théâtre Ouvert en mars dernier, en avait révélé la force dramatique. Pourtant, nous avons l’impression d’avoir affaire à une nouvelle bien écrite, plus qu’à une pièce. Mais Marine Chartrain est une autrice à suivre…
City Stade de Sarah Hassenforder
Coïncidence ou projet éditorial ? Ce texte est publié au même moment. Près d’un stade une bande de jeunes se réunit pour faire la fête. Neuf adolescents, entre douze et dix-huit ans, sont là pour s’«éclater».
Danger des mots : la fête? Ne plus être là, assigné à une identité, aller voir ailleurs très haut, ou très bas, si on y est. Mais aussi danger d’aller trop loin, ce qu’ils et elles font,l’un après l‘autre. «J’ai peur de passer toute ma vie au même endroit/de me marier avec quelqu’un d’ici/d’envoyer mes enfants à la même école où j’étais/Et puis passer ma vie à bosser au snack. » dit une fille.
Tout près, à côté et même au cœur de la bande, : la mort. La très jeune autrice qui a mené sa pièce jusque là, en a déjà écrit sur la jeunesse : Pépite (2020) et Bille et Bonnie l’année suivante. Est-elle aussi dans cette passe dangereuse ? En tout cas, l’écriture très maîtrisée, est chargée d’une poésie à la fois pudique et forte, avec comme une inquiétude en direct. Une autre écrivaine à suivre.
Dans ces textes, la fête est au centre : rite de passage, lieu où se reconnaît une génération, somme d’espoirs déçus, plaisir de l’instant… On dira que la fête, indispensable, incontournable, « c’est pas la joie » et ces autrices le disent bien. Le tapuscrit joue ici son rôle : donner envie d’en savoir plus sur elles, et à un artiste de mettre en scène ces textes. Il en stimulera le potentiel dramatique, ici un peu masqué à la lecture par le soin porté aux «atmosphères»…
En 2023, City Stade a fait l’objet d’une mise en voix par Pierre Cuq à Théâtre Ouvert, dans le cadre de l’École pratique des auteurs de théâtre.
Christine Friedel
Tapuscrits, éditions Théâtre Ouvert.