Orphelins de Dennis Kelly, traduction de Philippe Le Moine et Patrick Lerch, mise en scène de Martin Legros et Sophie Lebrun

Orphelins de Dennis Kelly, traduction de Philippe Le Moine et Patrick Lerch, mise en scène de Martin Legros et Sophie Lebrun

 L’auteur britannique maintenant bien connu en France (voir le Théâtre du Blog) aborde ici un de ses thèmes favoris: la violence qui mine nos sociétés. Après Oussama ce héros (2016) la compagnie La Cohue revient à une écriture qui va au-delà du naturalisme. Dany et Helen vont fêter un heureux événement quand Liam fait irruption dans leur appartement, couvert de sang. Très nerveux, le garçon livre un récit contradictoire. A la fin, nous saurons qu’il a blessé et torturé un ouvrier pakistanais ! Helen veut protéger son petit frère mais son compagnon est horrifié par ce crime odieux. Le passé d’Helen et Liam les rattrape:  orphelins à la suite de circonstances tragiques, ils ont suivi des chemins différents. Elle, a fondé une famille mais lui, zone avec des néo-nazis dans le quartier mal famé où ils habitent. Le couple et l’enfant que porte Helen survivront-ils à cette soirée tragique?

© Virginie Meigne

© Virginie Meigne

 Cela se joue en huis-clos dans une scénographie tri-frontale et nous nous sentons pris à témoin de cette terrible histoire interprétée avec énergie. Une régisseuse et narratrice en fond de scène lit les didascalies, apportant ainsi une respiration bienvenue à cette situation intenable où les personnages sont sans cesse en porte-à-faux. «Nous aimons, disent les metteurs en scène, qu’ils évoluent avec la conscience qu’ils se sentent regardés, jugés. » Pour plus de distance, Liam s’enduit de peinture rouge pour apparaître ensanglanté et s’asperge le visage d’eau quand il pleure.

Nous sommes happés par ce récit délivré au fil du rasoir. Les traducteurs ont habilement transposé ces dialogues crus et hachés où la langue hésite et parfois bégaye. Martin Legros joue un Liam ambigu, à la fois attachant et repoussant et Sophie Lebrun, une jeune femme clivée entre son désir de normalité et une culpabilité qu’elle partage avec son frère. Face à eux solidaires, Dany (Julien Girard) se débat avec sa conscience, coincé entre le désir de ne pas faire de vagues et son aversion pour l’acte de son beau-frère.

Dennis Kelly met ses personnages en tension sans relâche pendant une heure et demi. Ici, les acteurs scrutent toutes les contradictions qui habitent ces jeunes en déshérence, dans un climat de fatalité sociale. On pense à Sweet Sixteen de Ken Loach et à The Old Oak sorti récemment où il analyse les mécanismes du racisme ordinaire dans un milieu populaire défavorisé.
La Cohue réunit de jeunes artistes de Caen. Avec Orphelins (2018), Sophie Lebrun et Martin Legros signaient leur première mise en scène clôturant un triptyque autour de la violence, initié avec Visage de feu de Marius von Mayenburg en 2015 (voir le Théâtre du blog). La compagnie travaille pour l’an prochain à une adaptation des Aventures de Pinocchio de Carlo Collodi.

Mireille Davidovici

 Jusqu’au 28 décembre, Théâtre de Belleville, 16 Passage Piver, Paris (XI ème). T. : 01 48 06 72 34.

 Le 6 février, Théâtre Charles Dullin, Grand-Quevilly (Seine-Maritime).

 

 

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