Mouton noir, texte de Paul Molina, mise en scène de Wilmer Marquez

Mouton noir, texte de Paul Molina, mise en scène de Wilmer Marquez

Labellisé « Olympiade Culturelle » (bon ! )ce court spectacle a été créé à Equinoxe-Scène Nationale de Châteauroux (Indre). Ce solo à base autobiographique de Paul Molina ( vingt-huit ans) passionné de free-style est un cocktail de texte, acrobatie, jonglage avec un ballon. Hérité des figures réalisées aux entraînements par les joueurs de foot il y une vingtaine d’années, le « free-style» est encore peu connu en France mais assez populaire auprès des jeunes générations. Mais attention, il y faut une très bonne souplesse, une résistance physique, une exceptionnelle précision dans le geste et un travail tenace au quotidien…Bref, Paul Molina n’est pas n’importe qui.

Il y a deux ans, Jérôme Montchal, directeur d’Equinoxe-Scène Nationale à Châteauroux, l’avait vu s’exercer devant cette salle et lui a proposé de faire un spectacle. Paul Molina, avec Mélodie Joinville et Wilmer Marquez ont préparé et testé ce Mouton noir dans des festivals, avant de le créer en septembre dernier sur le plateau de cette Scène Nationale.
Ici, cela se passe dans un grand gymnase à Celin, une ville toute proche de Douai. Pas la grande chaleur! Pour accueillir une centaine de spectateurs dont beaucoup de jeunes et d’enfants les gradins en dur et devant des chaises en plastique et des bancs (pas attachés, merci la sécurité!). Le petit espace scénique un peu perdu dans cet arène sportive est au ras du sol donc pas non plus l’idéal pour le second et le troisième rang de spectateurs: ils ne voient pas toujours bien ses figures et ce genre de performance mériterait plus d’intimité mais bon, Paul Molina opère ici courageusement et sans micro H. F..

Il va nous raconter sa vie de jeune homme au lycée puis en classe prépa (première, deuxième année et redoublement) pour enfin intégrer non H.E.C. ou l’E.S.S.E.C. mais une autre grande école privée de commerce. Il travaillera ensuite dans une boîte de marketing. Déjà un beau parcours mais cette acrobatie-jonglage lui restera accroché au cœur et il y consacrera tout son temps libre.
Il a bien réussi à bien gagner sa vie après avoir réussi un concours difficile, alors pourquoi, se dit-il, ne pas aussi être le meilleur en free-style. Il sera troisième
au Super Ball 2022 (catégorie Rookie),au championnat du monde et il va avec ses complices créer Mouton noir.

On le voit s’échauffer à vue avant l’entrée du public populaire -loin entre autres de celui des Ateliers Berthier-Odéon à Paris- et cela fait du bien… Ici, pas grand-chose à voir avec le théâtre proprement dit, même s’il y a un texte mais plutôt avec ce qu’on nomme la performance, en arts plastiques. Sur le mur du fond et sur le sol, des dalles noires s’imbriquant qu’il va retourner. Laissant apparaître des graffitis colorés et Paul Molina demandera au public de venir après le spectacle,  les compléter…

© Ch. Raynaud de Lage

© Ch. Raynaud de Lage

Paul Molina, avec humour et une incomparable virtuosité, jouer pendant quarante-cinq minutes de ce ballon rond. Avec aussi, la grande précision des footballers professionnels.  Il fait tourner sur un doigt. Ou allongé au sol, alternativement sur ses deux pieds. Ou il le fait circuler-figure connue chez les jongleurs-sur ses bras, puis sur la nuque. Brillantissimes, ces belles images poétiques ravissent le public.
Mais le texte -pas toujours clair-est un peu faible et on aurait aimé qu’il ait cette même précision et cette même poésie, pour nous dire qui il a été et qui est maintenant l’artiste intermittent qu’il est devenu? Quels sont ses espoirs ses doutes et ceux de ses parents? Comment se voit-il dans quelques années? Pourquoi cette discipline très exigeante fait-elle partie au plus profond de sa vie ? Là, cette autobiographie a un goût de trop peu….
Cette performance a quelque chose d’émouvant mais comme elle est devenu un spectacle, il faudrait absolument revoir les choses : le metteur en scène aurait pu nous épargner un fond sonore bruyant (proche de Rameau, dit la note d’intention mais que nenni !) et des éclairages approximatifs. Il y a aussi quelques temps morts, une fausse fin et une petite dose inutile de fumigène (pour évoquer ceux des stades ? Et la troisième pour nous cette semaine : un véritable poncif cette saison) Mais ce Mouton noir a de grandes qualités et une impressionnante tournée devant lui. Donc à suivre.

Philippe du Vignal

Spectacle vu le 8 décembre à la salle des sports Jolliot-Curie, Sin-le-Noble (Nord), Tandem Scène nationale-Hippodrome de Douai/Théâtre d’Arras,du 6 au 9 décembre. Maison de la Culture de Bourges-Scène Nationale ( Cher) le 16 décembre.

Festival Spring en Normandie (différents lieux) du 14 au 21 mars. Scène nationale du Sud-Aquitain, Bayonne ( Pyrénées-Atlantiques) du 27 au 29 mars.

Quai des Rêves, Lamballe-Armor, ( Côtes-d’Armor) du 5 au 7 avril Théâtre d’Auxerre-Scène conventionnée (Yonne) le 11 avril. Théâtre Beaumarchais, Amboise (Indre-et-Loire). Le 18 avril, Théâtre L’Eclat, Pont-Audemer ( Eure) le 20 avril. Festival Rencontre des jonglages, La Courneuve ( Seine-Saint-Denis) du 26 au 28 avril.

Théâtre de Sénart-Scène nationale (Seine-et-Marne) les 21 et 22 mai. Théâtre La Passerelle-Scène nationale de Gap, du 31 mai au 2 juin.

Scène Nationale d’Orléans-La Passerelle, Fleury-les-Aubrais (Loiret) les 4 et 5 juin. Lieux publics-Centre national des arts de la rue et de l’espace public et Pôle Européen de production, Marseille (Bouches-du-Rhône) du 8 au 12 juin. La Verrerie d’Alès, Pôle National Cirque Occitanie (Gard) du 13 au 15 juin. Le Safran d’Amiens-Scène conventionnée (Somme), les 19 et 20 juin

Théâtre du Cloître- Scène conventionnée, Bellac (Haute-Vienne), du 1er au 6 juillet. Le Cratère-Scène nationale d’Alès (Gard) du 4 au 6 juillet. Espace Georges Sadoul, Saint-Dié (Vosges), le 8 juillet.

Saint-Jean-de-Monts ( Vendée) le 20 septembre.

Nuit du cirque, Le Sirque-Pôle National Cirque de Nouvelle Aquitaine, Nexon ( Haute-Vienne), les 16 et 17 novembre.

 


Archive pour 9 décembre, 2023

Chapter 3: The Brutal Journey of the Heart chorégraphie de Sharon Eyal et Gai Behar

2 Chapter 3 - Photo by

© Stefan Dotter for Dior

 

Créée en 2019, cette pièce est la dernière d’une trilogie : OCD Love (2016) et Love Chapter 2 (2017) consacrée à l’exploration du sentiment amoureux. Ici, les battements de cœur rythment le corps collectif de la L-E-V Dance Company. Nous retrouvons avec plaisir le vocabulaire si particulier de Sharon Eyel et Gai Behar qu’ils ont décliné ensuite dans Into the Hairy et dernièrement Jakie avec le Nederlands Dans Theater (voir le Théâtre du Blog)

 Les sublimes costumes en tissu imprimé avec un grand cœur rouge, conçus par la styliste Maria Grazia Chiuri (Christian Dior Couture), sculptent les anatomies des interprètes, tous exceptionnels. Parés de cette seconde peau, Keren Lurie Pardes, Darren Devaney, Alice Godfrey, Guido Dutilh, Johnny McMillan, Juan Gil, Nitzan Ressler et Frida Dam Seidel dansent avec ardeur, épousant de manière quasi organique la musique électronique de DJ Ori Lichtik avec parfois des élans latino ou disco : autant de respirations dans cette plongée brutale au vif des émois amoureux…

La chorégraphe exige un engagement extrême et une tension intense pour traduire physiquement des états émotionnels. La tribu se défait et se recompose en un mouvement perpétuel: échappées en duos sensuels, petits pas de côté vers la liberté..  Puis les danseurs s’agglutinent en un tout organique. Leurs bras et jambes semblent être des tentacules se déployant et se rétractant. Les lumières d’Alon Cohen traduisent toutes les couleurs de l’amour: rouge de la passion, vert spectral du dépit, clairs-obscurs de la mélancolie…

4 Chapter 3 - Photo by

© Stefan Dotter for Dior

 Sharon Eyal cite volontiers Little Life de l’autrice américaine Hanya Yanagihara : «Les choses se cassent et parfois se réparent. Et vous réalisez que la vie se réorganise pour compenser votre perte, parfois à merveille.» Ici, les corps érigés comme des flèches et oscillant sur la pointe des pieds, les torses cambrés à l’extrême et les petits gestes allusifs des mains constituent sa signature : «Je travaille à l’instinct, dit-elle, je mets la peau de mon âme à nu.» Et les artistes suivent ses indications: « silence, sécheresse, peur, intégrité, secret, nostalgie, noir, lune, eau, odeur, démon, froideur, couleur… »

Issue de la Batsheva Dance Company où elle a été danseuse, puis chorégraphe et directrice artistique associée, Sharon Eyal a développé un style minimaliste avec techniques gaga d’Ohad Naharin et bases classiques, avec aussi un penchant pour le «groove» et l’«underground clubbing culture». Un monde d’où vient Gai Behar qui a créé avec elle, en 2015, leur compagnie L-E-V, maintenant installée en France. Il faut aller la découvrir. Sharon Eyal et Gai Behar sont  aussi artistes-invités de grands ballets.
La chorégraphe, née à Jérusalem, se dit aujourd’hui le cœur brisé par la guerre que mène son pays: on peut l’entendre dans cette pièce exigeant du public et des artistes, une grande concentration.

 Mireille Davidovici

Spectacle vu le 5 décembre dans le cadre de Fréquence Danse, au Cent-Quatre, 5 rue Curial, Paris (XIX ème). T. : 01 53 35 50 00.

Les 2 et 3 février, Comédie de Genève (Suisse); le 8 février, L’Onde, Vélizy-Villacoublay (Yvelines); le 20 février, Théâtre de l’Arsenal, Val-de-Reuil (Eure).

Love Chapter 2 , du 21 au 23 mars, Théâtre du Rond-Point, Paris ( VIII ème) 

Into the Hairy, les 9 et 10 avril, Comédie de Clermont-Ferrand. Du 12 au 14 avril, avec Chaillot-Théâtre national de la Danse, à la Grande Halle de la Villette, Paris (XIX ème).

 

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