Pinocchio d’après le conte de Carlo Collodi, adaptation, musique et mise en scène de Thomas Bellorini
Pinocchio, d’après le conte de Carlo Collodi, adaptation, musique et mise en scène de Thomas Bellorini
Un célèbre conte adapté et souvent mis en scène, comme le récent et tout à fait remarquable Pinocchio d’Alice Laloy (voir Le Théâtre du Blog). Metteur en scène averti, compositeur mais aussi chanteur, Thomas Bellorini est maintenant bien connu pour ses réalisations où intervient la musique. Ila créé À la périphérie de l’auteure turque Sedef Ecer où il aborda les notions d’exil et de frontières. Il a aussi mis en scène Le dernier Voyage de Sindbad d’Erri de Luca et en 2021, Femme non rééducable de Stefano Massini. Puis l’année passée, Tombeau pour Palerme (voir Le Théâtre du Blog) et cette année, Roberto Zucco.
Thomas Bellorini a adapté et mis en scène ce conte où Gepetto, un pauvre menuisier toscan, fabrique un pantin dans une bûche. Mais celui-ci pleurera, rira et parlera comme un enfant. Gepetto le nommera Pinocchio, à qui il arrivera de nombreuses aventures mais une Fée le sauvera. Il part ensuite avec son ami Lucignolo pour le Pays des jouets mais ils seront transformés en ânes. Jeté à la mer et avalé par un énorme poisson, il retrouve Gepetto dans son ventre. Puis il travaillera et deviendra un véritable petit garçon.
Ici sur le plateau, de nombreux accessoires: deux tourets avec des câbles, et des tonneaux en fer faisant office de sièges mais aussi de batterie, une guirlande lumineuse, deux trapèzes dont un où se tient une acrobate qui se mettra aussi en équilibre sur un gros ballon rouge. Dans le fond, un petit écran avec quelques images fixes (pas très réussies) pour situer l’action- une cheminée, une carriole où sont assis des enfants, tirée par vingt jeunes ânes…
Et vers la fin, la neige tombe doucement ravissant les enfants, et des cintres tombent des baudruches rouge et jaune, de gros confettis rouges… En cinquante-cinq minutes, avec un acteur-conteur à l’excellente diction, vont ainsi défiler les aventures du célèbre pantin de bois dont le nez s’allonge quand il ment…
Pour l’accompagner, une belle fée qui joue aussi de l’accordéon, un pianiste et un guitariste mais aussi un homme à tout faire. Thomas Bellorini a réalisé cette mise en scène et composé une musique instrumentale avec quelques chansons… Sur le plateau, Brenda Clark, Zsussanna Varkonyi, Céline Ottria, Samy Azzabi, Edouard Demande, François Pérache et Jo Zeugma font le boulot.
Et cela fonctionne? Oui, au début, mais ensuite pas vraiment… Le spectacle est rodé et tout s’enchaîne bien, les rapports récit/musique sont fluides, mais nous n’avons pas bien compris le pourquoi de cette mise en scène avec entre autres, un Pinocchio, ici représenté par une belle et jeune trapéziste qui effectue quelques sauts impeccables.. En fait, tout se passe comme si Thomas Bellorini avait voulu lier conte et musique pour en faire théâtre. Et même s’il y a de belles images, on reste sur sa faim et il aurait pu nous épargner ces inutiles jets de fumigènes en fond de scène.
Les enfants semblaient heureux d’entendre le célèbre conte mais les adultes qui les accompagnaient, ont applaudi frileusement. Ici, nous assistons en fait au récit de l’adaptation de ce conte sur fond musical dans un foutoir sympathique mais qui parasite le spectacle. Et il n’y a pas d’incarnation: c’est le point faible de cette mise en scène.
Il nous souvient encore de l’adaptation d’une intelligence et d’une sensibilité exemplaire de Joël Pommerat que nous avions vue il y a déjà quinze ans, avec ces fonds noirs qui donnaient une forte présence à des personnages fascinants, joués par des acteurs exemplaires dont Philippe Lehembre. Puis nous l’avions revue avec le même bonheur (voir Le Théâtre du Blog), mais sans ce grand acteur, hélas disparu quelques années avant.
Ici, manque le merveilleux et la poésie de Collodi mais aussi la dureté de la vie que subissent les adultes où, dans l’adaptation de Joël Pommerat, Pinocchio était projeté.
Alors à voir? A la rigueur mais ce spectacle est décevant -les enfants ont droit au meilleur, on ne le répètera jamais assez- et mieux vaut ne pas être trop exigeant. A vous de décider…
Philippe du Vignal
Jusqu’au 27 décembre, Le Cent-Quatre, 5 rue Curial, Paris (XIX ème). T. : 01 53 35 50 00.