Éducation Nationale de François Hien et l’Harmonie Communale, mise en scène de François Hien et Sigolène Pétey
Éducation Nationale de François Hien et l’Harmonie Communale, mise en scène de François Hien et Sigolène Pétey
A l’école, faut-il privilégier la transmission des savoirs ou le développement des personnalités? Instruire ou éduquer ? Comment accueille-t-on des enfants tout neufs dans une société déjà vieille ? Des questions et bien d’autres posées par les artistes de l’Harmonie Communale et qu’ils nous livrent, après deux ans d’enquête. Une ambitieuse proposition brillamment menée.
Nous vivons pendant trois heures trente (entracte compris) au rythme du lycée Jean Zay, dans la ville imaginaire de Virieux-en-Vezon, avec les professeurs, le proviseur et l’intendante, le CPE ( conseiller principal d’éducation), l’ AESD (assistant d’éducation à domicile), lAESH (accompagnant d’élèves en situation de handicap), et d’autres agents de l’Éducation nationale.
Sur scène, chaque soir, une classe de terminale participe au spectacle et ce pour deux représentations. Aujourd’hui, les élèves en Langues, littératures et cultures étrangères au lycée Pierre Brossolette à Villeurbanne. Ils ont été entraînés dans les ateliers de pratique théâtrale, comme ceux qui leur succéderont, .
Au lycée Jean Zay, à la rentrée des classes, les enjeux sont posés: manque de moyens et d’effectifs, réformes maladroites de l’enseignement, ordres contradictoires des rectorats, incidents répétés avec élèves à problème. Sur une année scolaire, nous naviguons entre plusieurs classes, la salle des profs, le bureau du proviseur, l’infirmerie… Nous assistons aux cours de maths, anglais, français… selon différentes pédagogies. Il y a des conflits entre enseignants et avec l’administration, des heurts ou certains élèves… Bref, la vie d’un bahut de mille trois cents élèves en perte d’effectifs et où chaque prof ou administratif, essaye de gérer les choses tant bien que mal.
En trois actes composs de courtes séquences, nous assistons à un conseil de classe et d’orientation, un conseil de discipline, à la visite d’une inspectrice, aux réunions syndicales, etc. Cela témoigne des tensions qui montent et pour finir, il y aura une grève et une occupation des locaux, et une assemblée générale avec doléances et propositions.
L’écriture, simple et efficace, permet de glisser d’une scène et d’un espace de jeu, à l’autre. Il suffit aux comédiens de pousser rapidement tables, chaises et murs. Entre les lignes, Education Nationale suggère des solutions collectives portées par des enseignants solidaires… Une traversée passionnante…
Et nous rions souvent, en accord avec les acteurs, chacun excellant dans plusieurs rôles de composition. Chaque spectateur se sent concerné dans son rapport à l’école et y reconnaît l’élève qu’il est ou a été, les professeurs qui l’ont marqué… Une connivence s’installe entre les interprètes, les enseignants, les parents d’élèves et le public .
« Nous adoptons résolument la perspective des adultes ou plutôt nous nous interrogeons sur la pratique et les métiers des acteurs de l’éducation», dit Sabine Collardey, professeur de philo, dramaturge et interprète d’Éducation nationale: » François Hien a eu la responsabilité du texte et je livre beaucoup de mon expérience d’enseignement et de la réflexion qu’elle suscite depuis des années.»
Ce spectacle très animé a demandé un gros travail en amont auprès de dix établissements de la métropole lyonnaise, soixante professeurs et deux cent-cinquante neuf élèves. Un texte a été publié avec le scénario du spectacle, témoignages et problématiques de personnes rencontrées. Une matière à réflexion…
Ici, on montre du doigt un système en crise à travers des personnages bien campés par des acteurs qui passent habilement d’un rôle à l’autre. Devant un public séduit, Éducation nationale clôt en beauté la résidence de François Hien et de sa compagnie L’Harmonie communale, au T.N.P. où ils ont créé La Crèche mécanique d’un conflit et joué d’autres pièces de leur répertoire.
Il faut voir ce spectacle qui sera en tournée dans la région Rhône-Alpes puis au-delà: il aborde avec sérieux et humour l’éducation des futurs citoyens, quand une nouvelle réforme des lycées prône la loi du chacun pour soi, avec parcours individualisés clivants.
Mireille Davidovici
Jusqu’au 19 janvier, Théâtre National Populaire, place Lazare Goujon, Villeurbanne (Rhône). T. 04 78 03 30 00.
Les 1er et 2 février, Le Vellein-Scènes de la CAPI, Villefontaine (Isère) ; le 9 février, Théâtre du Parc, Andrézieux-Bouthéon (Loire) ; le 15 février, 5C, Vaulx-en-Velin (Rhône).
Les 6 et 7 mars, Théâtre de Villefranche-sur-Saône (Rhône); les 14 et 15 mars Théâtre Théo Argence, Saint-Priest (Rhône).
Éducation nationale de François Hien et Sabine Collardey est publié aux éditions Libel.