Locomoción Templar et Templete, chorégraphie d’Israel Galvàn

Locomoción Templar et Templete, chorégraphie d’Israel Galvàn

Cet enfant sauvage du flamenco aime travailler avec, provenant d’univers différents, Akram Khan pour Torobaka en 2014, des musiciens du monde entier à Avignon (2018) ou un an plus tard avec le cirque Romanès . Et aujourd’hui, avec les excellents musiciens Juan Jimenez Alba (saxophone et instruments à vent ), Antonio Moreno (percussions ) et une véritable révélation: Ilona Astoul. Cette jeune actrice jouait l’un des trois Puck dans, mis en scène par Emmanuel Demarcy-Mota, Le Songe d’une nuit d’été (voir Le Théâtre du blog). Très présente sur le plateau, elle donne une distance à cette performance d’Israel Galvàn. Parfois, elle imite ses postures ou elle dit, entre autres, un extrait de La Métamorphose de Franz Kafka.

© Chrsitinaberal

© Chrsitinaberal

Comme à son habitude, Israel Galvàn fait exploser les codes du flamenco. D’abord en pantoufles, ensuite  pieds nus, il danse sur un plate-forme gonflable sonorisée, en complète fusion avec la musique. Il aime se déguiser : en mi-bas résille, il enfile des chaussures de flamenco à grelots, joue avec un éventail de plumes roses et met un chapeau de torero. Laissant libre cours à sa folie personnelle, il gémit parfois, crie et chante.
Israel Galvàn se remet en question: «Locomoción est une façon de me réinventer. Je danse habituellement en lien avec la musique ou le silence et travailler avec une actrice est nouveau Ici, je veux danser les mots et nous avons mené une recherche en commun sur cette relation qui peut être simplement phonétique: je ne comprends pas les textes dits en français.»

Templar: ce mot désigne l’instant de suspension, juste avant le mouvement d’un danseur ou la parole d’un chanteur. Ici, il se lance à chaque fois un nouveau défi, entre performance et humour décalé. Le public, surpris, le suit dans ses délires poétiques. Ce spectacle d’une heure confirme le talent et la grande liberté d’expression d’Israël Galvàn qui nous fait découvrir Ilona Astoul…


Jean Couturier.

 Théâtre des Abbesses-Théâtre de la Ville, 31 rue des Abbesses, Paris (XVIII ème). T. 01 42 74 42 74.


Archive pour février, 2024

Splendeurs et misères d’après Illusions perdues d’Honoré de Balzac, création dirigée par Paul Platel

Splendeurs et misères d’après Illusions perdues  d’Honoré de Balzac, création dirigée par Paul Platel

Cela se passe sous la Restauration, avec un  retour au pouvoir des Bourbon dans le cadre d’une monarchie constitutionnelle octroyée par Louis XVIII donc il y a deux siècles. A Angoulême, une petite ville à l’époque, vit tristement Lucien Chardon,fils d’une aristocrate sauvée de la guillotine et d’un pharmacien qui veut trouver un médicament contre la goutte. Il a une sœur Eve et un grand ami, David mais il n’en peut plus de cette vie provinciale et rêve d’être un jour écrivain à Paris, bien entendu. Ce personnage est celui des romans de Balzac, Illusions perdues et Splendeurs et misères des courtisanes.

Lucien rencontre Naïs de Nègrepelisse, dite Louise de Bargeton, une aristocrate du haut de la ville. Lui, habite l’Houmeau, un quartier du bas où se trouvent boutiques et artisans donc mal vu. Et les habitants de ces deux quartiers se haïssent cordialement.
Louise sera vite le grand amour de Lucien qui prend alors le nom de sa mère: de Rubempré, qui sonne mieux. David, lui, a repris l’imprimerie de son père et a épousé Eve. Ils vont soutenir Lucien quand il essayera de prendre l’ ascenseur social.
Mais les amis de Louise se moquent de lui et avec elle, il s’en ira à Paris. Mais elle va le quitter. Ses illusions envolées, l’écrivain en herbe, pauvre et abattu, voit alors comment sévit la toute puissance de l’argent sur la création artistique et littéraire. Mais tenace et doué, il réussit à devenir critique dans les quotidiens. Il rencontre des personnages peu scrupuleux et prêts à tout pour réussir. Lui aussi est à la fois d’une ambition sans limites, et pas trop regardant quant à ses fréquentations. Comme cet Etienne Lousteau qui passe son temps à des jeux d’argent. Mais aussi Daniel d’Arthez, un jeune homme lui d’une intégrité absolue. Honoré de Balzc raconte ici la société de son temps mais aussi l’essor de la presse qui va devenir un instrument de pouvoir, surtout dans les villes et dont les partis politiques vont se servir avc gourmandise. 
Lucien vit dans une mansarde et écrit un roman L’Archer de Charles IX qui est refusé par les éditeurs.
Vieille histoire: Lucien de Rubempré, à force de travail connaîtra une ascension puis une chute douloureuse. Il a voulu à tout prix de l’argent mais la société, cynique, ne lui fera aucun cadeau et il se pendra en prison.
Dans la très belle salle aux murs de pierre, quelques éléments de scénographie: tables et chaises en métal, châssis montés sur roulettes.
« Ce monde parallèle que crée Balzac avec La Comédie humaine, est une sorte de double littéraire de la société de l’époque, dit Paul Platel. Ce qui a pour effet d’intensifier encore sa singularité et créer en moi une véritable excitation à me lancer dans ce travail, avec, pour point de départ, une toute petite partie de cette œuvre titanesque. Pour finir, j’ai la chance d’avoir auprès de moi un groupe d’actrices et d’acteurs formidables qui sont aussi mes amis, mes compagnons de route, c’est ma fierté. »

© F. Robin

© F. Robin

« Ma mission, dit le metteur en scène, est d’emmener avec moi notre troupe dans l’exploration de cette montagne qu’est l’œuvre de Balzac. » Mais cette petite entreprise a bien du mal à fonctionner. Non, les êtres de fiction ne deviennent pas ici « chair et voix »et ce spectacle n’est pas aussi « drôle, pertinent et fidèle » comme il le prétend un peu vite. Ce très beau mais immense plateau avec ses hauts murs de pierre au fond, convient plus à une pièce épique qu’aux aventures de Lucien de Rubempré dans les rédactions des journaux, les chambres et salons des hôtels particuliers de la bourgeoisie parisienne.
Marianne Giropoulos, Gaètan Poubangui, Nicolas Katsiapis, Manon Xardel, Jason Marcelin-Gabriel et Willy Maupetit incarnent chacun, sans distinction de genre, plusieurs des vingt-cinq personnages. Ils font le boulot mais dans cette grande salle, on ne les voit ni les entend pas toujours très bien.
Et il y aussi une question de dramaturgie: à l’impossible, nul n’est tenu et comment retracer en un spectacle, les multiples aventures de Lucien de Rubempré? Que Paul Platel ait voulu moderniser cette histoire, pourquoi pas ? Balzac, en a vu d’autres avec les très nombreuses adaptations de ses romans au théâtre, bien avant sa mort en 1850. Lui-même écrivit sept pièces dont une seule
Le Faiseur, remarquable, eut du succès et qui est encore jouée. Et il y en eut bien sûr des dizaines au cinéma.

Ici, les courtes scènes se succèdent dans une certaine pénombre ( oui rassurez-vous, vous aurez droit à votre petite dose de fumigène!) mais n’accrochent pas vraiment l’attention. Sauf celle qui se passe dans un journal où commence à frémir alors un vrai moment de théâtre. Et il y a un redoutable et permanent carrousel de meubles et praticables, comme dans le dernier spectacle d’Ariane Mnouchkine dont Paul Platel était un des collaborateurs pour le stage qu’elle organisa à Kiev il y a un an voir Le Théâtre du Blog). Cela nuit aux dialogues et à la cohésion du texte.
Au bout d’une heure, de nombreux spectateurs qui s’ennuyaient dans cette salle à moitié vide, ont commencé à consulter leur portable ! Ce qui n’ont pas dû beaucoup apprécier les acteurs…
Il y a une phrase d’Oscar Wilde citée en tête du programme: «La mort de Lucien de Rubempré, est le plus grand chagrin de ma vie. Mais, disait-il aussi: « La vie est trop courte, pour supporter le fardeau des erreurs d’autrui.» Nous avons quand même réussi à tenir bon mais, après une heure quarante-cinq, nous avons quitté la partie. Donc, nous ne vous dirons rien de la fin de ces Splendeurs et Misères.

Les adaptations au théâtre, de romans anciens ou actuels, tous genres confondus, sont depuis quelques saisons, plus nombreuses que les mises en scène de véritables pièces. Et rien à faire, c’est toujours acsse-gueule et fonctionne rarement. Normal : l’espace, le temps et la parole ne sont pas les mêmes.
Seule Pauline Bayle y avait pourtant réussi il y a juste quatre ans, avec u
ne adaptation et une mise en scène remarquables des Illusions Perdues Mais, avec une dramaturgie claire et lisible, un excellent rythme, de bons dialogues, une scénographie et des costumes efficaces (voir Le Théâtre du Blog). Ce qui, ici, est loin d’être le cas.
Enfin, le spectacle peut s’améliorer, notamment quant au rythme mais sûrement pas dans une aussi grande salle et pas telle quelle, dans cette « création dirigée par Paul Platel » (sic) Est-ce une œuvre collective? En tout cas, cette mise en scène non signée est beaucoup trop approximative, pour être convaincante… A suivre.

Philippe du Vignal

Jusqu’en mars, Théâtre de l’Epée de Bois, Cartoucherie de Vincennes, route du Champ de manœuvre. Métro : Château de Vincennes + navette gratuite.

Passeport, texte et mise en scène d’Alexis Michalik

Passeport, texte et mise en scène d’Alexis Michalik

Après Une Histoire d’amour, et Edmond où il retrace la création de Cyrano de Bergerac, une pièce habilement tricotée qui remplit toujours les salles (voir Le Théâtre du Blog), l‘auteur et metteur en scène maintenant bien connu, essaie de peindre la vie dramatique des migrants dans la «jungle» de Calais. « J’ai parfaitement conscience, dit-il, que cela reste une pièce de théâtre qui s’adresse à une petite partie de la population. Néanmoins, une œuvre peut avoir un petit impact et amener un contrepoint à ce discours assez +réac+ en ce moment autour de la loi :immigration. »
On peut croire en sa sincérité mais bon, il y a ici quelque chose d’assez naïf… Comme l’ont montré les nombreux documentaires,  tout est maintenant bien connu sur cette situation internationale: des milliers d’hommes survivant dans des conditions très limite, attendent de passer en Angleterre en se cachant dans un camion circulant dans le tunnel sous la Manche… ou au-dessus dans un bateau pneumatique surchargé donc ultra-dangereux.

© A. Guerrero

© A. Guerrero

Issa (Jean-Louis Garçon), un jeune Érythréen a été violemment tabassé dans cette jungle. L’hôpital a bien fait son boulot et Issa a physiquement récupéré mais, même s’il a un passeport, donc une identité réelle, il a complètement perdu la mémoire. Abrité dans un conteneur avec Arun, un Indien (Kevin Razy) et Ali, un prof syrien qui connaît bien Shakespeare (Fayçal Safi). Malgré un rude parcours obligatoire où il lui faut passer par différentes administrations, Issa va quand même essayer d’obtenir un titre de séjour.
Issa, après Poitiers, arrive à Paris où il dort sous les ponts et travaille dur dans un restaurant de cuisine africaine. Il vit ensuite dans un centre d’accueil temporaire et a des rendez-vous à l’Office français de protection des réfugiés et apatrides. Il fréquente une bibliothèque où il rencontre Yasmine, une Française, née de père algérien et de mère marocaine,  qui a vécu en Bretagne… Ils attendront un enfant. Tous les lieux sont évoqués par de grandes et très habiles images-vidéo sur fond gris en fond de scène.

Et il y a aussi une autre histoire, celle de Lucas Lefèvre, un jeune né aux Comores. Michel, un fonctionnaire et sa femme Christine (Patrick Blandin et Ysmahane Yaqini) l’ont adopté. Puis ils sont revenus en métropole et habitent justement Calais. Lucas devenu gendarme s’est trouvé une amie. Jeanne d’origine malienne est née à Toulouse (Manda Touré).  Lui voudrait aller à Mayotte pour retrouver sa mère biologique. Pour le moment,  il vit sa vie de gendarme chargé d’empêcher les migrants de monter dans un camion pour l’Angleterre et ne connait même pas la trop fameuse « jungle ».

© A. Guerrero

© A. GuerreroL

L’histoire ronronne doucement quand arrive enfin une vraie scène de théâtre. Lucas est allé dîner chez ses parents pour leur présenter son amie, jeune et brillante journaliste. Mais le ton monte vite et Michel, le père de Lucas, ne s’attendait pas à ce que sa possible future belle-fille soit noire… Et il dit tout et n’importe quoi sur l’immigration. Jeanne, elle, reste calme et polie mais a vite fait, chiffres à l’appui, de recadrer les choses avec une intelligence remarquable. Lucas lui, ne dit rien : ce que son père lui reprochera. Raciste, ce père ? Pas vraiment, mais enfin quand même un peu…
Jeanne enfoncera le clou et quittera Lucas qui n’a pas osé affronter son père lors de cette soirée foutue. Mais il ne donne plus de ses nouvelles et Michel sera alors très doux quand, très inquiet, il appellera Jeanne. Même si la scène est cousue de fil blanc, il se passe enfin quelque chose de théâtral.

© A. Guerrero

© A. Guerrero

Il y a, tout au long de la pièce, de nombreux retours en arrière et si on a bien compris, Issa aurait été tabassé par Lucas, le  gendarme devenu violent après sa rupture avec Jeanne. Il aurait voulu vivre la « jungle » de l’intérieur et aurait pris l’identité d’Issa mort… Mais lui-même aurait été reconnu par un  Syrien qui deviendra son ami et tabassé, il aurait perdu la mémoire…Vous suivez toujours ? Mais nous n’allons pas vous emmener dans ce labyrinthe où, dans cette quête d’identité, temps et espace s’embrouillent. Même si on retrouve par moments l’influence des mises en scène d’Ariane Mnouchkine ou de Jérôme Savary.

Alexis Michalik est un bon fabricant : sens du rythme, habile évocation des lieux grâce à des images vidéo très réussies, progression jusqu’au dénouement. Et il sait choisir et diriger au cordeau ses acteurs-tous crédibles… Ici, comme dans ses spectacles précédents, tout est bien ficelé et, même si la dramaturgie est inutilement compliquée et les dialogues, pauvrets, le public semble fasciné par la succession de saynètes qu’il a mises au point avec virtuosité.
Aucun doute là-dessus, Alexis Michalik a une véritable énergie mais cette pièce, souvent d’une écriture assez naïve et maladroite, n’est pas du bois dont on fait les flûtes et, en filigrane, elle dégouline de bons sentiments. Comme il y a toujours quelque chose qui se passe, on ne s’ennuie pas vraiment mais la mise en scène, par ailleurs très précise, ressemble une fois de plus à une entreprise de déménagement avec arrivée d’éléments toutes les cinq minutes: un praticable sur roulettes qui sera une camionnette de gendarmerie, un compartiment de train.. Mais aussi des tables, un lit, des éléments et accessoires de cuisine…  Une maladie du théâtre contemporain.  Même réalisé avec fluidité, cela détourne l’attention et parasite l’action.

Ici, mieux vaut donc ne pas être trop exigeant quant à la qualité du texte, à la limite un peu réac, sur l’air de : «Réjouissez-vous, braves gens, la France reste une terre d’accueil exemplaire pour les migrants et Issa pourra même ouvrir son restaurant… L’auteur-metteur en scène qui œuvre uniquement dans le théâtre privé, choisit des thèmes de société  comme la prison, les couples homosexuels… Et il sait y faire pour donner bonne conscience à son cher public. Il aborde un thème «porteur» comme on dit mais avec une dramaturgie et une pseudo-modernité à trois centimes d’euro: entrelacement de scènes, décors en vidéo et juste une petite touche de fumigènes (la vingtième au compteur pour nous depuis janvier dernier).
Ce public, la cinquantaine et assez bourgeois, (les places au parterre sont à 60 € pour le carré OR!) est celui habituel d’Alexis Michalik et il a fait une ovation debout aux sept acteurs qui sont tous crédibles et passent avec virtuosité d’un rôle à l’autre. Mais l’auteur et metteur en scène, en louvoyant, loin d’un théâtre documentaire ou d’agit-prop, va plutôt vers la très petite-comédie. Bref, le nouveau boulevard est arrivé et il est passé à côté d’une tragédie surtout africaine qui est loin d’être finie. Nous ne nous faisions pas trop d’illusions quant à ce Passeport mais le compte n’y est pas vraiment. Dommage.

Philippe du Vignal

Jusqu’au 30 juin, Théâtre de la Renaissance, 20 boulevard Saint-Martin, Paris (X ème). T. : 01 42 08 18 50.


L’Oiseau de Prométhée, mise en scène de Camille Trouvé et Brice Berthouda

L’Oiseau de Prométhée, mise en scène de Camille Trouvé et Brice Berthoud 

 La compagnie Les Anges au Plafond mêle une fois de plus théâtre et politique: après la désobéissance civile dans Une Antigone de papier, après la lutte pour les droits civiques dans White Dog (voir Le Théâtre du Blog), les metteurs en scène et marionnettistes nous plongent ici dans la crise économique grecque de 2010 à 2018 , avec quatre copains, garçons et filles qui se retrouvent dans un restaurant d’Athènes des années plus tard. Ex-activistes, ils se remémorent aujourd’hui les événements marquants de leur jeunesse.
Mais ils ne sont pas seuls à la table. Apparaissent, sous forme de marionnettes genre Guignols de l’info, les acteurs politiques européens des négociations: Giórgos Papandréou, Christine Lagarde, Michel Sapin, Angela Merkel… Puis, Aléxis Tsipras qui, avec son parti, Syriza affronta la  terrible troïka qui dépouilla la Grèce avec les représentants de la Banque Centrale Européenne, du Fond Monétaire International et de la Commission Européenne. Et les Dieux antiques de l’Olympe veillent encore sur les hommes. Ces marionnettes géantes ont été convoquées par l’oiseau de Prométhée, un gros volatile qui s’agite en haut de la scène et assure narration et commentaires.

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Pour ce projet grand format, Camille Trouvé et Brice Berthoud, une fois n’est pas coutume, ne sont pas  sur scène. Ils ont écrit la pièce avec  Christos Chryssopoulos, un auteur grec, et confié à des manipulateurs, les marionnettes, de taille et facture contrastées, selon qu’elles figurent humains ou immortels. Le compositeur présent  au plateau rythme avec bonheur les différentes séquences d’une musiqueélectro-acoustique mâtinée de rebetiko.

 Comme dans une série, la pièce est un feuilletage spatio-temporel avec, à la même table, les retrouvailles des quatre amis, les négociations entre la troïka et la Grèce, et le banquet des Dieux. Les gargotiers, bon enfant, s’affairent derrière un bar-castelet et deviennent au fil du récit, les trois Parques déjantées aux masques en carton pâte, habilement animées par Christelle Ferrera.  Ici, Prométhée trompe Zeus en faveur des hommes mais celui-ci condamne le voleur de feu à un terrible châtiment: chaque jour un vautour  lui dévore le foie, tout comme l’Europe a dépecé la Grèce. Une  tragédie qui annonce peut-être de sombres lendemains pour notre continent, dominé par un vautour criard et avide.

Ces fils conducteurs s’entrecroisent, et alternent règlements de compte entre les quatre amis, démêlés de la réal-politique, et ceux de la mythologie. Cette narration complexe  n’est pas toujours lisible, et la forme vient parfois brouiller le fond. Le champ politique nous apparaît clairement, bien mené et documenté mais s’accorde mal à l’univers des dieux. Le funambule qui traverse le plateau, symbolisant l’équilibre précaire des négociations, apporte peu d’éclaircissements, comme à la fin, l’apparition de Dionysos… On se perd dans les trajectoires multiples de cet Oiseau de Prométhée, même si l’on retrouve avec plaisir le savoir-faire et l’esthétique des Anges au Plafond dont les fondateurs ont été nommés en  2021 à la tête du Centre Dramatique National de Normandie -Rouen.  

 Mireille Davidovici

 
Spectacle vu le 21 février au Théâtre des Quartiers d’Ivry-Centre Dramatique National (Val-de-Marne).
Les 7 et 8 mars, Les Passerelles-Scène de Paris-Vallée de la Marne, Pontault-Combault (Seine-et-Marne). Les 21 et 22 mars, Festival MARTO, Scène Nationale de Malakoff (Hauts-de-Seine).Le 26 mars, Théâtre Paul Eluard-Scène conventionnée d’intérêt national art et création pour la diversité linguistique, Choisy-le-Roi (Val-de-Marne).

Les 3 et 4 avril, Le Sablier-Centre National de la marionnette, en collaboration avec la Comédie de Caen-Centre Dramatique National, (Calvados). Avec l’aide de SPRING-Festival des nouvelles formes de cirque en Normandie.

 

 

Le mariage forcé de Molière, mise en scène de Louis Arene

 Le Mariage forcé de Molière, mise en scène de Louis Arene

Crée, il y a juste quatre cent ans le 29 janvier 1664, au palais du Louvre devant le roi Soleil, cette comédie-ballet est composée en trois actes et en prose sur une musique de Jean-Baptiste Lully et Marc-Antoine Charpentier. La pièce fut ensuite jouée devant le public en un acte, le 15 février 1664 au théâtre du Palais-Royal.

Sganarelle, un baron fortuné de  cinquante trois ans, veut épouser la jeune et belle Dorimène.  Mais son ami Geronimo le lui déconseille. Sganarelle demande alors à deux philosophes et à des bohémiennes leur avis dont les réponses ne font qu’accroîtrent sa grande hésitation.
Dorimène confie à son amant Lycaste, sans savoir que Sganarelle l’entend, qu’elle se marie pour l’argent et qu’elle compte bien être veuve avant six mois. Sganarelle veut alors renoncer au mariage mais le frère de Dorimène ne l’entend pas ainsi et le provoque  en duel. Devant son refus de se battre, le frère de Dorimène le roue de coups. Sganarelle accepte le mariage.

Quatre ans pensionnaire de la Comédie-Française, Louis Arene a quitté l’illustre Maison en 2016 pour fonder avec Lionel Lingesler, le Munstrum Théâtre. A la Filature de Mulhouse en décembre dernier, ils avaient créé 40° sous zéro de Copi, en juxtaposant Les quatre Jumelles et Lhomosexuel ou la difficulté de sexprimer (voir Le Théâtre du Blog).
À nouveau, l’étonnement et l’originalité sont au rendez-vous dans cette reprise du Mariage forcé au Théâtre du Rond-Point, dans la mise en scène de Louis Arene, créée au Studio-Théâtre de la Comédie-Française en 2022.

Dès le début, l’atmosphère carnavalesque et fantasmagorique jaillit. Après les trois coups répétés plusieurs fois avec une sonorité métallique -pour vérifier que tout était en ordre de marche avant la représentation-apparait Sganarelle au centre de la scène, dans un décor de Louis Arene et Éric Ruf. Sobre et astucieux avec trappe, fenêtre et porte invisibles, Il ressemble à une boîte ouverte avec trois murs et un sol en lambris incliné, l’ensemble peint d’un blanc sans éclat et sous un éclairage fade. 

Seul en scène, Sganarelle, coiffé d’une énorme perruque grise longue et frisée, tremblote et bafouille des répliques mémorables extraites de pièces de Molière. Une belle idée que ce dédoublement, comme si, derrière Sganarelle, se cachait l’auteur: « Que diable allait-il faire dans cette galère ? (Les Fourberies de Scapin), une réplique bien venue pour ouvrir le spectacle vu le sort réservé à Sganarelle. Puis: « Le petit chat est mort » (L’Ecole des femmes) et la célèbre réplique : «Cachez ce sein que je ne saurais voir.» dans Tartuffe ou l’Imposteur), ces répliquent enchantent le public et lancent le ton follement décalé de la mise en scène.

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©Brigitte Enguerrand


Autre surprise et singularité: certains des personnages masculins sont joués par une femme, comme celui de Sganarelle par l’extraordinaire Julie Sicard. Admirable de présence, elle est sur scène pendant la majeure partie de la représentation et nous éblouit par les facettes qu’elle prête à ce vieux baron libidineux, à la fois odieux, violent, tragique et misérable! Nous finissons par éprouver du dégoût mais aussi une certaine empathie  envers ce personnage odieux.

Le rythme du spectacle et le jeu des comédiens donne une tension dramatique remarquable, aujourd’hui assez rare dans les mises en scène du théâtre de Molière. Tout particulièrement lorsqu’il s’agit de créer une réactualisation de l’écriture classique de cet immense auteur. Trouvailles audacieuses, étrangeté, horreur, humour, avec masques et prothèses, font surgir toute la folie de cette comédie humaine! Sans aucune grossièreté le metteur en scène ose l’extravagance et le décalage, pour notre plus grand plaisir.
Il fait résonner tambour battant la violence et le ridicule, le profit mais aussi la naïveté, à travers la géniale écriture de Molière. En dix scènes, le spectacle présente une succession de situations très condensées mais éclatantes  et nous fait vivre intensément la situation dramatique de Sganarelle qui vire au cauchemar.
Au début de la pièce, bien décidé à épouser la belle Dorimène pour rendre son âge vieillissant plus joyeux, et satisfaire aussi ses désirs sexuels, il se retrouve face à une vérité insoutenable, en entendant l’avis de son fidèle ami Géromino. Le metteur en scène excelle d’inventivité de toute part. Comme avec son excellent choix en faisant appel, pour la création des costumes,  à Colombe Loriot-Prévost. Les habits de scène, au mélange d’étoffes précieuses, et costumes inachevés issus du stock de la Comédie-Française : « Ils laissent apparaître la peau, dit Louis Arène, ou bien les faux corps de certains personnages.», ou d’autres 
plus grand-guignol ou actuels, avec un blouson en cuir, une casquette, renforcent avec esprit, le caractère de chacun des personnages et leur interprétation par tous les comédiens, remarquable … Magnifique et comme un clin d’œil aux oeuvres picturales de Goya mais aussi au calcul secret de la belle jeune femme: devenir très vite la veuve de Sganarelle, Dorimène entre en scène dans sa robe au tissu délicat et soyeux, couleur pastel  et son ombrelle toute en rivière de dentelle dissimulant son visage. Celui du comédien Christian Hecq ! Encore un des comédiens masculin interprétant un rôle de femme. L’acteur est tous aussi épatant dans le jeu de Marphurius.

 

© Brigitte Enguerrand

© Brigitte Enguerrand

Louis Arene s’empare de cette comédie dramatique assez peu jouée et nous la fait partager jusqu’aux limites les plus audacieuses de la comédie. Entre fantasme, tragique, farce, et artifice, orchestrés avec subtilité dans la mise en scène, Louis Arene reste fidèle à l’écriture, et à l’intelligence sensible de Molière dont les protagonistes sont prêts à tout pour arriver à leurs fins. Quatre siècles après, sont encore bien vivants: lubricité, cupidité, prétention, esprit de vengeance, lâcheté…

Avec une distribution et une mise en scène brillantes, Louis Arene parvient, -les spectateurs sont enthousiastes- à donner à cette pièce du XVIIème siècle, une éminente modernité. Une performance théâtrale à ne pas manquer, toutes générations confondues !   

Elisabeth Naud 

Jusqu’au 1er mars, Théâtre du Rond-Point, 2 bis, av. Franklin D. Roosevelt, Paris ( VIII ème). T.:  01 44 95 98 21. 

 

Ce qu’il reste de mon carnet de Jacques Livchine


 Ce qu’il reste de mon carnet… de Jacques Livchine

Le 18 mai 1991, Le Théâtre de l’Unité a été d’un attentat à Jérusalem. Ma tête, cette nuit, est comme un grenier avec des loirs qui galopent. Des phrases-sentences me labourent la chair. Celle d’Arthur Rimbaud:«Je suis de la race qui chantait dans le supplice”. A quoi pensait-il, il y a cent-cinquante ans? Et celle d’Albert Camus: «Mal nommer les choses, c’est ajouter au malheur du monde. »
Curieux de voir que Juifs et Arabes, unis dans la même configuration, sont mal nommés. Etre Juif, c’est difficile à expliquer: il y a confusion entre peuple et religion… Et puis voilà, toi, Jacques Livchine, t’es français et pourtant juif. D’origine ukrainienne mais, à l’époque, l’Ukraine, c’était la Russie…Ton père avait un gros accent? T’es qui, toi? Arabe ne veut pas dire musulman. Arabes, une émigration d’Arabie. Les Kabyles comme les Berbères ne sont pas arabes… Il y a toutes sortes de croyances sans aucune vérité historique mais, c’est comme ça, les hommes adorent croire à de fausses histoires. Quand le Théâtre de l’Unité est allé jouer en Israël, nous sommes tombés sur des illuminés. Selon eux, la Palestine n’aurait jamais existé et ces salauds d’Arabes auraient construit avant 680 à Jérusalem, la mosquée al-Aqsa sur les ruines du temple de Salomon. Et il serait bien temps de la détruire pour reconstruire le temple dont il reste le mur où on se lamente..

Surprise! A Tel Aviv, Atay Citron, directeur artistique du festival international de théâtre de rue Bat-Yam  entre 2007 et 2010, me demande si je préfère manger juif, ou arabe! Nous sommes dans un magnifique restaurant arabe face à la mer et il me dit qu’il vit à Jaffa dans un quartier où ses voisins arabes sont ses meilleurs amis.
Ces Yéménites qui, à Tel Aviv font un excellent houmous, sont-ils Juifs ou Arabes ? Je dois revoir mes fiches… Haïfa avec environ 25.000 Arabes israéliens, Saint-Jean d’Acre, une ville peuplée en majorité d’Arabes, eux aussi israéliens et ces deux millions d’Arabes qui ont la nationalité israélienne et qui vivent bien côte à côte ? Alors, pourquoi pas un seul Etat pour deux peuples ? Je discute avec un sympathique Français qui a fait son « allia ». Ici, dit-il, on n’a plus de marge de manœuvre pour une pensée originale ou pacifiste, respectueuse des Palestiniens. On est pris dans le flux et, conditionné, on ne quitte jamais son arme.
Nous passons une très agréable soirée dans une belle maison ; un stagiaire est le fils du conservateur du musée de Tel-Aviv. «Oui, dit-il, elle a du cachet cette maison, c’est une des belles occupations de 1967. Je lui demande si cela ne le gêne pas de vivre dans un lieu dont les propriétaires ont encore la clef?: «C’est ça, dit-il, le sens de l’Histoire. Tous les pays se fondent sur des conquêtes. »
A Jérusalem, nous jouons notre spectacle Mozart au chocolat. Nous allons voir le vieux quartier de la Médina.
Nous avions garé la voiture de location dans une grande avenue mais. au retour de nos emplettes, la bagnole a été incendiée! Je vais au café voisin où on me dit : «C’est l’intifida! C’est ça, Jérusalem : on vous a pris pour des espions israéliens. » Je sauve un de mes précieux carnets, à moitié carbonisé. Les attentats, cela n’arrive pas qu’aux autres.

©Jacques Livchine

©Jacques Livchine  Mon carnet

Je vais dans une colonie. C’est fou! Elle a été construite sur des champs d’oliviers appartenant à des paysans palestiniens. Un colon me dit: «Nous sommes chez nous ici. Les Palestiniens ne vont pas nous faire croire qu’ils sont chez eux!» Quelle violence! Cela ne demande qu’à péter et là, on entre dans le vif du sujet : la terrible attaque du 7 octobre 2023… Le Hamas, terroriste ou résistant ? On s’empoigne sur la sémantique.
Un ami israélien m’envoie un film où on veut prouver que la Palestine n’existe pas. La suite ? On la connait: la vengeance! Mais je persiste à dire qu’on n’a jamais gagné une guerre contre un peuple. Les valeureux Vietnamiens aux sandales en vieux pneus de caoutchouc l’ont gagnée contre les Etats-Unis…
Et les milliers de bombes israéliennes ne font que renforcer le Hamas. En principe, les hostilités financées par les Etats-Unis-quatre milliards de dollars- devaient durer quatre mois… Si on coupait les vivres à Tsahal  (en hébreu: la force de défense d’Israël) trois jours plus tard, la guerre s’arrêterait.
La leçon de l’Histoire? Foutaises. Je me fâchais contre mon père il y a quarante ans: « Après ce que tu as vécu : la perte au camp de Sobibor, de ta mère et ta sœur, tu devrais juste te dire qu’aucun Juif n’a le droit d’humilier le moindre peuple. Même une araignée, tu n’as pas le droit de la tuer!» Mon père ne m’entend plus. Personne autour de moi ne m’entend… Et cette nuit, à quatre heures quarante-cinq, une armée de loirs galope dans ma tête.

Jacques Livchine, co-directeur avec Hervée de Lafond, du Théâtre de l’Unité, Audincourt ( Doubs).

 

Les Chaises d’Eugène Ionesco, mise en scène de Thierry Harcourt

Les Chaises d’Eugène Ionesco, mise en scène de Thierry Harcourt

 La pièce créée en 1952 par Sylvain Dhomme, avec Paul Chevalier et Tsilla Chelton, au Théâtre Lancry dans le dixième arrondissement de Paris qui accueillit  aussi Les Amants du métro de Jean Tardieu et La Parodie d’Arthur Adamov, mise en scène de Roger Blin. Mais il ferma l’année suivante, faute de public. Devenue un classique du théâtre contemporain et l’une des plus jouées de l’auteur (1913-1994) qui habita rue Guynemer, donc près du Lucernaire elle fut remarquablement mise en scène par Bernard Lévy il y a cinq ans, avec Emmanuelle Grangé et Thierry Bosc (voir Le Théâtre du Blog).

Lui, quatre-vingt quinze ans et Sémiramis, son épouse, quatre-vingt quatorze ans, vivent dans une île. Lui ne n’intéresse à rien et regarde les quelques bateaux qui passent par là. Elle continue à admirer son mari qui l’appelle: ma crotte : «Mon chou, ah ! oui, tu es certainement un grand savant. Tu es très doué, mon chou. Tu aurais pu être Président chef, Roi chef, ou même Docteur chef, Maréchal chef, si tu avais voulu, si tu avais eu un peu d’ambition dans la vie.»
Bien entendu, ce « maréchal des logis » était juste concierge. Il disent qu’ils n’ont pas pu avoir d’enfant mais Sémiramis parle d’un fils qui les a quittés…à sept ans pour mener sa vie.

© Fabienne Rapeneau

© Fabienne Rapenneau

« Elle est doucement gâteuse, » précise Eugène Ionesco dans une didascalie.» Mais ce vieux couple arrive encore à rire ensemble: « Alors on a ri. Ah !…ri… arri…Arri. Ah !…Ah !…ri…va… va…arri..arri… le ventre nu… auri… arriva… Alors on a … ventre nu… arri…la malle… On a… ah…arri… ah ! Arri.. ah.. arri… va… ri. »Eugène Ionesco joue avec virtuosité sur le langage : répétitions, allitérations involontaires, etc.
Ils vont recevoir des invités, comme un colonel et sa femme, un médecin, un photograveur, une «belle très romantique» et l’Empereur… qui viennent écouter un conférencier. Les coups de sonnette n’arrêtent pas, ils arrivent tous et «on devra avoir l’impression que le plateau que le plateau est archi-plein de monde » selon la didascalie. Sémiramis vend le programme de la soirée, bonbons acidulés, chocolats glacés, caramels… aussi invisibles que les invités. Elle et Le Vieux apportent sans arrêt des chaises vides qui envahissent le plateau…Puis enfin l’Orateur arrive. »C’est bien lui, dit Sémiramis, il existe. En chair et on os. Et le vieux confirme : «Il existe. C’est bien lui. Ce n’est pas un rêve.»

Des personnages aussi invraisemblables que bien réels mais hors du temps et de l’espace, à la fin de leur existence, comme des marionnettes à mi-chemin entre comique et tragique, très seuls et parlant beaucoup comme pour se rassurer (l’ombre de la mort rôdant toujours en coulisses ) et se jouant ou non la comédie ? Nous ne le saurons jamais. Ici, sur le plateau drapé de pendrillons noirs, juste deux chaises hautes en fer et deux marche-pieds. Aucun autre accessoire. Le Vieux en complet noir et chemise blanche, Sémiramis en tailleur aussi noir, et chemisier tout aussi blanc. Cela commence bien mal!  Avec, sans qu’un mot ait encore été prononcé. un énorme jet de fumigène, lequel jet reviendra deux fois, envahissant scène et salle. Décidément Thierry Harcourt adore cela et réitère après Bitos (voir Le Théâtre du Blog) où il en avait employé pour un changement de décor,  conjugué à des lumières éblouissantes face public ! Ici, cela ne se justifie pas plus…
« Cette partition de jeu est quasi-musicale et demande une grande dextérité technique, dit Thierry Harcourt. La lumière, le son et pour tout décor, des chaises, voilà nos seule exigences , afin de raconter cette histoire passant sans arrêt de la la comédie pure à la tragédie assumée. Chalenge remarquable s’il en est, excitant à relever. »

Bernard Trombey et Frédéric Tirmont ne sont pas jeunes mais Thierry Harcourt a eu raison de ne pas les transformer en vieillards: ce qui, au théâtre, est toujours risqué! Il font le boulot :diction et gestuelles impeccables. Mais la direction d’acteurs n’est pas vraiment au rendez-vous et pourquoi ces trop nombreuses criailleries ? Et que le metteur en scène n’ait pas respecté à la lettre les nombreuses didascalies, on peut le comprendre… Mais pourquoi cette invasion de fumigènes (un procédé vraiment con), pourquoi ce manque de chaises entassées qui, à lui-même, fait sens et qui devient presque un personnage de la pièce. Et pourquoi, à la fin, avoir remplacé (sans doute par économie), le personnage de l’Orateur par une voix off, même s’il ne dit que: «He,Mme,mm mm » puis:  » NNAA, NNm, NWNWNW. »  Bref, malgré la présence indéniable des acteurs, on est loin du compte! Eugène Ionesco et le public méritent mieux que cette mise en scène approximative.

Philippe du Vignal

Jusqu’au 10 mars, Théâtre du Lucernaire, 53 rue Notre-Dame des Champs, Paris (VI ème). T. : 01 42  22 66 67.

 

Au bord de la guerre : Ariane Mnouchkine et le Théâtre du Soleil à Kyiv, un documentaire de Duccio Bellugi-Vannuccini et Thomas Briat


Au bord de la guerre : Ariane Mnouchkine et le Théâtre du Soleil à Kyiv, un documentaire de Duccio Bellugi-Vannuccini et Thomas Briat

Ariane Mnouchkine dirige, depuis soixante ans! le Théâtre du Soleil qu’elle a fondé en 1964 avec Jean-Claude Penchenat, et  Philippe Léotard, acteur,  Roberto Moscoso, peintre et scénographe, Françoise Tournafond costumière, Claude Forget, acteur, eux quatre disparus. Le Soleil jouera dans des lieux parisiens souvent atypiques et en banlieue. Gengis Khan d’Henry Bauchau, mise en scène Ariane Mnouchkine aux arènes de Lutèce en 61 , puis en 65, Les Petits Bourgeois de Maxime Gorki, Le Capitaine Fracasse de Théophile Gautier au Théâtre Récamier, puis dans l’ancien petit théâtre de Sartrouville. Et en 1969, Les Clowns, une création collective au théâtre de la Commune à Aubervilliers (Seine-Saint-Denis), puis au festival d’Avignon.
Dans une ancienne salle de boxe à Montmartre donc non équipée d’une scène, le Soleil créera la fameuse Cuisine d’Arnold Wesker qui révélera la compagnie. Puis le Cirque Médrano, aujourd’hui un supermarché ! accueillera Le Songe d’une nuit d’été de Shakespeare.
En 70, le Théâtre du Soleil s’installe dans deux salles d’une ancienne cartoucherie dans le bois de Vincennes, au terrain assez boueux en hiver et pas encore arboré. Y sera présenté après sa sa création au Piccolo Teatro à Milan, un spectacle devenu culte: 1789, suivi par 1790.
Le temps a passé mais Ariane Mnouchkine n’a rien perdu de son courage et de ses engagements politiques. «Je me suis dit : pourquoi on irait pas faire une école à Kyiv? (..) « J’ai quatre-vingt quatre ans et  l’impression d’être en train de vivre ce qu’ont vécu les gens dans les années trente. Il y a des moments où les démocraties doivent être défendues et nous, nous avons une arme, une arme de vie: le théâtre. Si les Ukrainiens perdent, nous perdrons.»

En mars, l’an passé, Le Soleil, cette compagnie emblématique bien connue au-delà de nos frontières a accueilli au Théâtre de l’Opéra de la jeunesse à Kyiv pendant douze jours, une centaine d’acteurs ukrainiens de tout âge, déjà professionnels ou étudiants aux conservatoires de Lviv, Kharkiv ou Kyiv, mais aussi des amateurs. Ils ont découvert une pratique théâtrale maintenant bien connue, celle qu’Ariane Mnouchkine et ses acteurs ont souvent enseignée avec succès dans de nombreux stages.

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Silence impressionnant dans ce hall du théâtre. Les acteurs avec leur prénom inscrit sur leur chemise, ont conscience de la chance qu’il ont d’être là. Ariane Mnouchkine au micro, généreuse, est pleine d’énergie et rit souvent avec ses actrices et ses acteurs dont Maurice Durozier. Précise, avec des mots de tous les jours, elle dit ce qu’elle veut voir sur le plateau, à partir des fondamentaux. « Pas de propagande. Chez Stanislavski, tu ressens et tu fais, chez Meyerhold, tu fais et tu ressens, et ici, tu fais et tu ne rend pas compte que tu as fait. D’une grande courtoisie mais aussi d’une exigence exemplaire, quand elle voit quatre jeunes allongés sur la scène : «Qu’essayez-vous de faire ? Je ne ressens rien… Je veux le découvrir quand vous le proposez. (…) Jouer c’est recevoir. »

Et devant un petit décor, elle dit simplement et sans crier : « Combien de fois vais-je vous regarder jouer aux cartes à l’intérieur de votre décor ? Vous ne donnez rien. Allons-nous assister au moment où ils tombent, ou sont déjà tombés amoureux. Je ne le vois pas. Ce qui m’intéresse  que dans cette guerre, on voit votre amour. » Quelle leçon de théâtre! Ariane Mnouchkine pratique avec intelligence et sensibilité, l’indispensable d’une pédagogie théâtrale : savoir corriger, avec bienveillance, mais sans jamais rien céder. Autrement dit: rien de conventionnel ne sera admis et il faudra trouver une vérité, même par ces temps de guerre avec à chacun, son lot de souffrances. Et là, il y en a un paquet : une actrice s’inquiète pour son mari parti se battre.Un autre comédien dit: « Honnêtement nous sommes fatigués mais cette rencontre nous donne de l’espoir. »
Le théâtre les aide tous à se sentir vivants dans cette capitale en danger permanent.Ariane Mnouchkine, elle, est lucide: «Ils sont en train de vivre ce qu’on a vécu dans les années trente. Il n’y a que Winston Churchill qui a dit: non. J’ai eu envie de les saluer et de leur dire merci. S’ils perdent, nous perdrons.»
Elle veut «faire un théâtre en prise directe avec l’histoire brûlante de notre temps, qui ne soit pas un simple constat, mais un encouragement permanent à changer les conditions dans lesquelles nous vivons. » Cela, dit-elle, m’intimide toujours quand quelqu’un me demande: «Que peut le théâtre contre la guerre? Je me dis que, si on était si inconsistant que ça, si vraiment l’art ne pesait rien, alors pourquoi tous les tyrans du monde voudraient tellement tuer les artistes? »

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Ariane Mnouchkine tient bon, comme elle a tenu bon et a sut lutter, quand,pour mener à bien cette lourde opération avec ses collaborateurs, elle a demandé à être aidée financièrement par le Ministère de la Culture et par celui des Affaires étrangères… Mais on la sent lucide et très inquiète. Tout peut arriver quand la guerre fait rage à quelques kms  et, dans le hall de l’hôtel, elle donne à ses acteurs le protocole à suivre en cas d’alerte…
Les réalisateurs de ce remarquable documentaire montrent un grand écran installé dans la ville où on voit des explosions un peu plus loin et des torches de fumées noires, un grand pont écroulé avec des voitures écrasées, des gens qui font la queue pour avoir un peu de nourriture. Et un mémorial couvert de fleurs où sont enterrés là des civils tués à bout portant dans le massacre de Bouchta à quarante kms de Kyiv, qualifié par Poutine de «mise en scène». Les Ukrainiens ont apprécié ce beau mensonge…

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Mais il y aussi ces jeunes gens qui veulent croire en leur jeunesse et au théâtre qui, leur a rappelé Ariane Mnouchkine, est « indestructible ».Et cela, malgré et envers toutes les horreurs qu’ils ont subies et vont encore subir. «J’ai dû dire au revoir à ma mère qui est restée avec ma grand-mère qui ne peut plus marcher dit une actrice. Il y avait juste cinq places dans la voiture pour mon mari, mes enfants et moi.» Quand Ariane Mnouchkine dit aux jeunes gens avec humilité : «J’espère que ce stage vous aura été utile. », ils sont tous au bord des larmes.
Une actrice remercie chaleureusement : cela lui a aussi permis de rencontre des acteurs de toute l’Ukraine. Un autre apporte, dit-il, un sac avec les meilleurs croissants de Kiev, ceux préparés par son amie. Un autre lui offre un œuf décoré: «Je ressors de ce stage plein d’espoir pour les arts. »La grande dame du Soleil est tout aussi émue de les quitter : «Après la victoire, on recommencera.» On ne peut tout dire de ce film, riche et si simple à la fois. En soixante minutes, il parle si bien du combat de nos amis ukrainiens et des magnifiques promesses que donne le théâtre. Nous avons souvent pensé  à Tadeusz Kantor qui, nous disait-il, montait des spectacles avec ses acteurs quand sa chère Pologne était occupée par les nazis : «Pas d’autorisation donc pas de salle, ni sièges pour le public, ni affiches mais dans un appartement vide sans chauffage, sans décor, sans costumes, sans lumière ni son, nous arrivions à faire du théâtre. »
Surtout, ne ratez pas ce film.

Philippe du Vignal

Jusqu’au samedi 24 février sur France-Télévisions. GRATUIT.
Il faut simplement faire un effort et créer un mot de passe. Pas d’une extrême facilité ! Mais si nous y sommes arrivés après deux échecs, vous devriez aussi y parvenir…

La Beauté du geste, un documentaire de Xavier de Lauzanne

La Beauté du geste, un documentaire de Xavier de Lauzanne

Ce film sur le Ballet royal du Cambodge a été réalisé à la demande de la princesse Norodom Buppha Devi, fille aînée du roi Sihanouk, et demi-sœur de Sihamoni, actuel roi de ce pays. Le cinéaste, avec son scénariste Pierre Kogan, croise l’histoire de la troupe ancestrale avec celle, plus récente, du petit royaume. Des images d’archives rappellent les guerres incessantes dans l’ancien protectorat français depuis son indépendance en 1953. Bombardements américains de 1965 à 1973, puis gouvernement des Khmers rouges avec deux millions de morts et installation par le Viet nam, de la République populaire du Kampuchéa (1978-1989) présidé par Norodom Sihanouk. En 1979, les Khmers rouges sont renversés dans une guerre contre le Viet nam qui instaure un gouvernement pro-vietnamien. Une  guérilla contre l’occupation vietnamienne surgit au cours des années 1980. Àprès les accords de paix en 1991, le pays tombe sous la tutelle de l’Organisation des Nations unies jusqu’à 1993 où est rétablie une monarchie constitutionnelle.
Le pays est alors renommé Royaume du Cambodge et il y a eu un renouveau du Ballet royal, aujourd’hui sorti du Palais, considéré comme un héritage culturel national.Contre vents et marées, ce théâtre héritier des rituels khmers, chanté et dansé, a traversé les siècles. En témoignent, dans les temples d’Angkor, les statues d’Apsaras, ces nymphes, célestes créatures du dieu hindou Brahma et célébrées dans Le Rig Véda et Le Mahabharata.

 

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Des trois cents artistes du Ballet royal avant la guerre civile et le régime des Khmers rouges, trente ont survécu: interprètes, costumiers et musiciens et onze ballerines. Rescapés des massacres, ils montrent ici, gestes à l’appui, les secrets de ces chorégraphies, inspirées de la Nature. Les danseuses Voan Savay et Sophiline Cheam Shapiro, mémoires vivantes qui perpétuent cet art, en font une émouvante démonstration: le corps est un arbre entre ciel et terre et selon la position des doigts, les mains racontent les cycles des plantes: de la graine, à la feuille, et de la fleur, au fruit…. Le répertoire classique, nous explique-t-on, immortalise les légendes fondatrices du peuple khmer. Il y a quatre types de personnages avec costume et masque spécifique: la femme (Neang), l’homme (Neayrong), le géant (Yeak) et le singe (Sva). Tous interprétés par des femmes, sauf les singes depuis les années cinquante. La gestuelle très codifiée traduit une gamme d’actions et d’émotions..

 Xavier de Lauzanne a aussi filmé la tournée en France et en Suisse, de Métamorphosis, la dernière création de la princesse Norodom Buppha Devi (ex-danseuse étoile et chorégraphe du Ballet), à partir des dessins d’Auguste Rodin. On voit ces magnifiques esquisses réalisées en 1906 quand la troupe était venue danser à l’Exposition coloniale de Marseille. Le sculpteur, émerveillé par les ballerines, passa des journées entières à les regarder danser et croqua leurs gestes: «Elles m’ont appris, dit-il, des mouvements que je n’avais jamais encore rencontrés dans la statuaire, ni dans la nature. »
Avec la même curiosité, le public se laisse séduire par cette danse complexe et insolite. Elle a survécu au chaos grâce à l’engagement et à la persévérance des artistes. En archéologue, Xavier de Lauzanne la décrypte pour nous, avec une bande-son originale de Camille Rocailleux, écrite à partir des musiques et chants traditionnels khmers qu’elle a recueillies. A la fin de cette soirée deux jeunes danseuses en costumes dorés et chapeaux coniques d’Apsaras, inspirés par ceux des bas-reliefs d’Angkor Vat.

Mireille Davidovici

Film vu le 10 février au Musée Guimet, 6 place d’Iéna, Paris ( XVI ème) T. : 01 56 52 54 33.

Le 11 mars, présentation à l’UNESCO, Paris (VII ème) .

Le 13 mars, sortie nationale en France, précédée d’une tournée avec projection du film et performance de deux danseuses cambodgiennes.

Le Molière imaginaire, un film d’Olivier Py

Le Molière imaginaire, un film d’Olivier Py

 

Au théâtre, tout est possible, au cinéma aussi, pourvu que cela marche et que nous y croyons. Surtout si le réalisateur revendique l’imaginaire: confier à un homme d’une santé éclatante, le rôle d’un mourant. Laurent Lafitte joue sincèrement la mort de Molière, même si cette mort jouée ressemble plus à celle d’un motard chutant en pleine accélération, qu’à celle, tout aussi violente, d’un homme atteint d’une maladie pulmonaire et vomissant le sang : « Le poumon ! Le poumon, vous dis-je ! » Il meurt à la force de l’âge, entouré d’une jeunesse tendre et attentive: une Armande un peu pâle (sa bientôt veuve) et un Baron plus présent, favori  de Molière.

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Le scénario de ses dernières amours, imaginé par Olivier Py et Bertrand de Roffignac (qui joue le rôle de Baron) s’appuie sans nuances sur un pamphlet anonyme La Fameuse comédienne ou l’histoire de la Guérin, auparavant femme et veuve de Molière (1688). Lequel attribue surtout à Armande, remariée et toujours actrice, et par contagion à son défunt mari, tous les péchés de Sodome et Gomorrhe. Sans oublier une accusation d’inceste: dans Le Malade imaginaire (entre autres), elle aurait joué le rôle de la fille d’Argan, et donc de son mari.
Quant à Baron, l’enfant de la balle, un orphelin recueilli par Molière, il serait sa dernière passion, évidemment malheureuse. «Il tenait Baron chez lui comme un enfant .(…), il le gardait à vue dans l’espérance d’en être le seul possesseur. Il était écrit dans le ciel qu’il serait cocu de toutes les manières.», selon l’aimable auteur de ce pamphlet, bien renseigné sur l’intimité du dramaturge.

Ce même Baron trahit son mentor, en quittant la troupe ( elle n’était plus que celle du fidèle Lagrange) pour l’Hôtel de Bourgogne rival, jusqu’à une fin heureuse quand ces compagnies s’unissent pour former la Comédie-Française. Olivier Py s’amuse de cette fusion et suggère de lui donner, entre autres, le nom de: Théâtre du Soleil… En hommage à Louis XIV bien sûr mais absent du film, et pour cause : c’est le moment, sinon de la disgrâce, au moins de sa désaffection pour Molière, au profit de Lully. C’est dit dans le film, mais ni joué ni montré.

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 Alors l’enjeu politique de ce Molière imaginaire, s’il y en a un?s’efface. On ne verra du monde que la boîte du théâtre avec ses comédiens bien vivants sur scène, qui ne renverra rien de ce monde là, et avec aussi ses spectateurs momifiés dans la salle. Plâtrés de fard blanc au plomb (dont on nous apprend, ce que nous savions, qu’il est mortel) et de rouge aux pommettes, surmontés de perruques carnavalesques, quatre petits marquis et six duchesses-dont Judith Magre, Dominique Frot et Catherine Lachens disparue en septembre dernier  jouent Les Vieilles de Goya (un tableau exposé musée de Lille) dans les loges d’un fragile décor.

Image de la décadence du théâtre, mort de son public, vraiment? Ou est-ce une question que l’on se pose : il faut bien s’occuper quand on vous repasse la même scène pour la quatrième fois ! La caméra plonge par des trappes et échelles, dans les dessous de la scène : c’est plus intéressant que les moments dans les loges, eux assez conventionnels. Ici, le temps est suspendu, on peut vivre ses amours-passons sur un interminable scène de bain entre beaux garçons-réelles ou imaginaires dans une forêt de charpentes. En s’enfermant au plus profond d’u théâtre, on échappe peut-être à sa représentation banale. Mais là encore, l’imagination fait défaut.

Un acteur en particulier nous ramène à un Molière qu’on connaît moins. Jean-Damien Barbin joue Chapelle, un homme d’esprit qui a fait connaître à l’auteur les libertins de la pensée. Beau travail : avec une constance humanité et un présence sensible, il porte sur ses épaules un XVII ème siècle, à la fois marginal et moderne.
Une scène liée à ce thème de la pensée éclate au milieu du film et offre une image de ce qu’il aurait pu être: Laforêt (Marie-Christine Ory), la fidèle servante-peut-être le modèle de Dorine dans Tartuffe et la Toinette du Malade imaginaire- fait des papillotes pour friser la perruque du Maître… Et si ces petits bouts de papier n’étaient autres que les brouillons de la traduction de Lucrèce entreprise par lui. Vrai ou faux ? C’est en tout cas l’œuvre à jamais détruite d’un homme qui n’a laissé aucun écrit, confronté au malentendu de sa vocation. Il se voulait, en secret, philosophe, il n’aura été qu’un amuseur. Sans savoir qu’en étant amuseur, il était philosophe. Mais avant tout, il avait une troupe à faire vivre.

Cela aussi, le film le dit mais ne le montre pas, sinon avec le personnage du « comptable « Lagrange, et il reste pauvre. Faute de moyens, ou d’imagination ? Même quand Olivier Py met en scène le désir et la mort, Éros et Thanatos, avec de beaux danseurs et danseuses à moitié nus, au lieu du ballet des médecins avec leurs clystères, cela manque de force et de chair. Il fallait montrer la modestie du théâtre : ce génie de Molière a été de créer quelque chose de grand, avec presque rien, et il a ouvert des portes (symboliques) dans un espace fermé, a joué la mort et a en fait du vivant. Mais ici, Olivier Py a manqué à son devoir d’imagination.

Christine Friedel

Ce film est en salles actuellement. 

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