Festival Les Singuliers Péplum médiéval de Valérian Guillaume, mise en scène d’Olivier Martin-Salvan
Festival Les Singuliers
Péplum médiéval de Valérian Guillaume, mise en scène d’Olivier Martin-Salvan
Un titre accrocheur avec une alliance de mots évoquant Antiquité romaine et Moyen-Age: pour inscrire une autre idée du Moyen-Age , le metteur en scène s’est fait aider par des historiens et se réfère entre autres au grand tableau Le Combat de Carnaval et Carême (1599) de Brueghel l’Ancien, avec, sur la place du marché d’un village flamand, une centaine d’hommes et femmes dont certains aux masques inquiétants, des aveugles ou estropiés qui mendient, et, au fond, une petite ronde de danseurs.
Le jeune Guillaume dans son sommeil, rêve d’un château fort… Ici un modèle réduit en résine ivoire avec tours crénelées, et en deux parties, que, selon les besoins des scènes, les acteurs feront glisser.. Les costumes, chaussures, bonnets, collants de couleur vive, caricaturaux avec motifs inspirés de l’héraldique comme les drapeaux, ont été imaginés avec talent par les scénographes Clédat et Petitpierre. Olivier Martin-Salvan a réussi à créer avec eux un univers avec des images particulièrement soignées.
Ici, toute une bande de femmes et d’hommes montent sans arrêt dans le château, se poursuivent, caracolent sur un faux cheval, font l’amour, chantent… C’est souvent ssez drôle. Olivier Martin-Salvan qui joue aussi dans ce spectacle, dirige avec une remarquable maîtrise, un ensemble d’acteurs: Romane Buunk, Tristan Cantin, Manon Carpentier, Victoria Chéné, Fabien Coquil, Guillaume Drouadaine, Maëlia Gentil, Lise Hamayon, Mathilde Hennegrave, Rémy Laquittant, Emilio Le Tareau, Christelle Podeur, Jean-Claude Pouliquen et Sylvain Robic. Certains souffrant d’un handicap, et issus de l’ensemble Catalyse ou du Centre National pour la création adaptée de Morlaix.
Il n’y a ici aucune vedette ou rôles vraiment principaux. Et tous les interpètes passent d’une scène à l’autre avec fluidité, changent le château de place selon les scènes en le faisant glisser. Il y a là tout un travail gestuel, de groupe ou individuel, de premier ordre: aucun temps mort et les enchaînements sont d’une rare qualité.
Et dans ce Péplum médiéval, le metteur en scène a su créer de vraiment bons moments très picturaux. Comme sur un arbre stylisé, une étonnante accumulation de squelettes peints sur de grands pantins et une formidable danse macabre (chorégraphie d’Ana Rita Teodoro). Le tout avec un tissage musical léger en fond sonore ou plus fort pour les chants et les danses. La composition électronique de Vivien Trelcat rappelant celles, merveilleuses, d’Hildegard von Bingen ou Perotin (XI et XII èmes siècles), ou plus tard celle de Guillaume Dufay ou Guillaume de Machaut (XIV ème siècle).
Mais le scénario n’est pas facile à suivre et Valérian Guillaume semble s’être contenté de faire des gammes sur la langue du XII ème et XII ème siècle, associée à la nôtre ( ce qu’il revendique), au lieu d’offrir aux acteurs, un instrument de travail cohérent. Ici, on passe d’un récit, à des dialogues pauvrets, et après les vingt premières minutes, l’ennui arrive même s’il se passe toujours quelque chose sur la scène… et des spectateurs se mettent vite à déserter: ce qui n’est jamais bon signe… Il faudrait que le texte soit clair, ce qui est loin d’être le cas ici… Même si, pour une fois, tous les acteurs ont une excellente diction. Mais les micros H.F., en uniformisant les voix: on ne voit pas toujours bien qui parle dans la pénombre, n’arrangent rien.
Jouer au théâtre avec les mots et la langue, pourquoi pas? «Mon ambition, dit Valérian Guillaume, est de tisser dans un vaste corpus poétique, une rapsodie de mots mêlée à notre contemporanéité. » On veut bien mais tout le monde n’est pas-chacun dans un style différent- Jean Tardieu, Valère Novarina, bien sûr ou encore François Cervantes avec son récent et merveilleux Repas des gens au Théâtre de la Criée à Marseille ( voir Le Théâtre du Blog).
Bref, l’ensemble ne fonctionne pas sur la durée du spectacle et c’est dommage pour les acteurs… et le public. En majorité jeune, ce qui est rare, il semblait partagé, les uns ont applaudi fortement, les autres, très peu ou pas du tout. La jeune femme qui, sur le même rang que nous, baillait sans arrêt, s’était déjà envolée depuis un bon moment… Nous avons tenu jusqu’à la fin mais sommes restés sur notre faim. Alors, à voir? Peut-être, mais à condition de ne pas être difficile. A vous de décider…
Philippe du Vignal
Spectacle vu le 1 er février au Cent-Quatre, 5 rue Curial, Paris (XIX ème). Jusqu’au 3 février.
L’Archipel, Scène nationale de Perpignan (Pyrénées-Orientales), les 8 et 9 février.
Scène nationale du Sud Aquitain, Anglet (Pyrénées-Atlantiques), les 14 et 15 mars. Le Lieu Unique-Scène nationale de Nantes/Le Grand T, du 26 au 30 mars.
Le Théâtre, Scène nationale de Saint-Nazaire (Loire-Atlantique), les 4 et 5 avril. La Coursive, Scène nationale de La Rochelle (Charente-Maritime), les 10 et 11 avril. Le Grand R, Scène nationale de La Roche-sur-Yon (Vendée), les 17 et 18 avril.
L’Arc, Scène nationale du Creusot, en co-accueil avec le Théâtre-Scène nationale de Mâcon et L’Espace des Arts-Scène nationale de Chalon-sur-Saône, (Saône-et-Loire), les 17 et 18 mai.