Ce qu’il faut dire de Léonora Miano, mise en scène de Catherine Vrignaud Cohen

Ce qu’il faut dire de Léonora Miano, mise en scène de Catherine Vrignaud Cohen

 

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Trois textes de l’écrivaine franco-camerounaise Léonora Miano qui a écrit plusieurs livres sur la colonisation et son histoire mouvementée. Elle analyse ici avec sérieux arguments à l’appui comment s’est nouée une relation ambigüe entre une Europe (au nom historiquement déjà douteux) et une Afrique ainsi nommée-comme ses différent pays- par les Européens eux-mêmes sur leur continent qui fixèrent au XIX ème siècle des frontières selon les rivalités politiques du moment. Mais l’écrivaine ose aussi poser une équation difficile à résoudre: comment fraterniser « quand les héros des uns sont les bourreaux des autres?»

Et Léonora Miano rappelle que les Africains furent quelle que soit leur histoire et leur statut: colonie, protectorat… De la chair à canon pour des guerres en Europe qui ne les concernaient en rien. Ils étaient aussi priés de fournir à bas prix en cacao mais aussi en produits alimentaires, la belle France-Bordeaux, Nantes s’enrichirent  grâce ua trafic d’esclaves,. Le Portugal, les Pays-Bas mais aussi la Belgique et l’Allemagne (au Togo) ont tous été des nations colonisatrices.
Ces pays de l’Afrique de l’Ouest (Congo, Dahomey-maintenant Bénin, Gabon, Côte d’Ivoire…colonisés par la France étaient dirigés par des administrateurs sortis de l’Ecole de la France d’Outre-mer spécialement créée pour.  Et chargés de protéger les intérêts des grandes sociétés capitalistes  européennes. Vous avez dit dégueulasse?

Oui, et tout cela, sous la protection de l’armée française avec entre autres, des médecins militaires, eux, assez efficaces. Une pensée pour le docteur Cabannes qui exerça avec une compétence et générosité à Porto-Novo (Dahomey, maintenant Bénin).
Et nombre de « missionnaires» étaient dépêchés par la Sainte-Eglise, il y a encore soixante-dix ans et… qui n’a jamais eu un mot de regret. Ils partaient évangéliser ces pauvres Africains, ignorants des innombrables bienfaits que pouvait leur apporter le catholicisme. Des réalités pas agréables à entendre par le clergé français mais toujours bonnes à rappeler… Et ici, Léonora Miano enfonce le clou avec une redoutable intelligence sémantique…

Stanislas Nordey avait adapté ce texte au Théâtre national de Strasbourg avec trois comédiennes.Ici, sur le plateau de la petite salle du Théâtre de la Reine blanche, dans le fond, de minces coffrages verticaux et une console pour le son d’une guitare électrique :la musicienne originaire d’Estonie, Triinu Tammsalu accompagnera la seule et brillante actrice: la  guadeloupéenne Karine Perdurand.
La Camerounaise Léonora Miano règle ses comptes avec raison et ne mâche pas ses mots. Après tout, nombre de ses ancêtres  de ces pays africains ont été déportés comme esclaves aux Antilles, avec souvent l’accord de potentats locaux. Que signifie être blanc et pourquoi qualifier les autres de noirs ? Pourquoi et comment l’Europe  a-t-elle appelé ce vaste continent : Afrique ? En trois épisodes dont le titre est projeté sur le fond de scène: La Question blanche, Le Fond des choses et La Fin des fins.

Karine Perdurant parle d’abord s’adresse à un invisible Européen et met vite les choses au point: « Cette affaire de couleur n’était qu’un stratagème, cette affaire de couleur n’était qu’un des rouages du système. Ta culpabilité n’a rien à voir avec moi. Ça se passe entre toi et toi. » Puis elle raconte au micro, la conquête inexorable de ces pays avec, souvent des rébellions vite écrasées dans le sang, des viols en série… Et la mise au pas de leurs culture et une colonisation lingistique comme  l’avait dénoncé le grand Frantz Fanon  dans Peau noire, masques blancs,
Les Européens ont pu rester en Afrique, rappelle Léonora Miano mais les Africains ont été autorisés en nombre très minime venir chez nous faire des études, ou ont été accueillis pour nettoyer le métro, ramasser les ordures, transporter les colis, etc. Et  cela continue. Autrement, ce qui a eu lieu autrefois ne donne aucun passe-droit et la sainte Eglise catholique et romaine est bien contente de trouver des prêtre africains, puisque, rien à faire, il n’y a plus de vocations…

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Et dans La Fin des fins,  toujours sur la musique de la guitare électrique dont Triiunu Tammsalu  joue puis effleure d’un archet,  Karine Perdurant conclut par une longue tirade mais plus doucement . Elle commence par les premiers et célèbres mots d’un autre africain d’origine, Martin Luther King.
Le texte est d’une rare exigence à la fois politique et poétique et Karine Perdurant, sait le porter avec une remarquable diction et une rare sensibilité. Malgré une mise en scène approximative :direction d’actrice peu convaincante, lumières pauvrettes, scénographie d’une rare laideur et surtout balance musique et bruitages/texte vraiment  ratée. Et pourquoi Catherine Vrignaud Cohen fait-elle hurler au micro une aussi remarquable actrice?  Bon, on va encore nous dire que nous ne sommes pas venus un bon soir et que la veille tout était parfait. Nous persistons et signons: cette jeune actrice comme ce texte de haut niveau méritent mieux que cette réalisation approximative…

Philippe du Vignal

Jusqu’au 10 mars, Théâtre de la Reine blanche, passage Ruel, Paris (XVIII ème). T.: 01.40.05.06.96. Le texte est publié chez l’Arche ( 2019). 


Archive pour 2 mars, 2024

Ce qu’il faut dire de Léonora Miano, mise en scène de Catherine Vrignaud Cohen

Ce qu’il faut dire de Léonora Miano, mise en scène de Catherine Vrignaud Cohen

 

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Trois textes de l’écrivaine franco-camerounaise Léonora Miano qui a écrit plusieurs livres sur la colonisation et son histoire mouvementée. Elle analyse ici avec sérieux arguments à l’appui comment s’est nouée une relation ambigüe entre une Europe (au nom historiquement déjà douteux) et une Afrique ainsi nommée-comme ses différent pays- par les Européens eux-mêmes sur leur continent qui fixèrent au XIX ème siècle des frontières selon les rivalités politiques du moment. Mais l’écrivaine ose aussi poser une équation difficile à résoudre: comment fraterniser « quand les héros des uns sont les bourreaux des autres?»

Et Léonora Miano rappelle que les Africains furent quelle que soit leur histoire et leur statut: colonie, protectorat… De la chair à canon pour des guerres en Europe qui ne les concernaient en rien. Ils étaient aussi priés de fournir à bas prix en cacao mais aussi en produits alimentaires, la belle France-Bordeaux, Nantes s’enrichirent  grâce ua trafic d’esclaves,. Le Portugal, les Pays-Bas mais aussi la Belgique et l’Allemagne (au Togo) ont tous été des nations colonisatrices.
Ces pays de l’Afrique de l’Ouest (Congo, Dahomey-maintenant Bénin, Gabon, Côte d’Ivoire…colonisés par la France étaient dirigés par des administrateurs sortis de l’Ecole de la France d’Outre-mer spécialement créée pour.  Et chargés de protéger les intérêts des grandes sociétés capitalistes  européennes. Vous avez dit dégueulasse?

Oui, et tout cela, sous la protection de l’armée française avec entre autres, des médecins militaires, eux, assez efficaces. Une pensée pour le docteur Cabannes qui exerça avec une compétence et générosité à Porto-Novo (Dahomey, maintenant Bénin).
Et nombre de « missionnaires» étaient dépêchés par la Sainte-Eglise, il y a encore soixante-dix ans et… qui n’a jamais eu un mot de regret. Ils partaient évangéliser ces pauvres Africains, ignorants des innombrables bienfaits que pouvait leur apporter le catholicisme. Des réalités pas agréables à entendre par le clergé français mais toujours bonnes à rappeler… Et ici, Léonora Miano enfonce le clou avec une redoutable intelligence sémantique…

Stanislas Nordey avait adapté ce texte au Théâtre national de Strasbourg avec trois comédiennes.Ici, sur le plateau de la petite salle du Théâtre de la Reine blanche, dans le fond, de minces coffrages verticaux et une console pour le son d’une guitare électrique :la musicienne originaire d’Estonie, Triinu Tammsalu accompagnera la seule et brillante actrice: la  guadeloupéenne Karine Perdurand.
La Camerounaise Léonora Miano règle ses comptes avec raison et ne mâche pas ses mots. Après tout, nombre de ses ancêtres  de ces pays africains ont été déportés comme esclaves aux Antilles, avec souvent l’accord de potentats locaux. Que signifie être blanc et pourquoi qualifier les autres de noirs ? Pourquoi et comment l’Europe  a-t-elle appelé ce vaste continent : Afrique ? En trois épisodes dont le titre est projeté sur le fond de scène: La Question blanche, Le Fond des choses et La Fin des fins.

Karine Perdurant parle d’abord s’adresse à un invisible Européen et met vite les choses au point: « Cette affaire de couleur n’était qu’un stratagème, cette affaire de couleur n’était qu’un des rouages du système. Ta culpabilité n’a rien à voir avec moi. Ça se passe entre toi et toi. » Puis elle raconte au micro, la conquête inexorable de ces pays avec, souvent des rébellions vite écrasées dans le sang, des viols en série… Et la mise au pas de leurs culture et une colonisation lingistique comme  l’avait dénoncé le grand Frantz Fanon  dans Peau noire, masques blancs,
Les Européens ont pu rester en Afrique, rappelle Léonora Miano mais les Africains ont été autorisés en nombre très minime venir chez nous faire des études, ou ont été accueillis pour nettoyer le métro, ramasser les ordures, transporter les colis, etc. Et  cela continue. Autrement, ce qui a eu lieu autrefois ne donne aucun passe-droit et la sainte Eglise catholique et romaine est bien contente de trouver des prêtre africains, puisque, rien à faire, il n’y a plus de vocations…

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Et dans La Fin des fins,  toujours sur la musique de la guitare électrique dont Triiunu Tammsalu  joue puis effleure d’un archet,  Karine Perdurant conclut par une longue tirade mais plus doucement . Elle commence par les premiers et célèbres mots d’un autre africain d’origine, Martin Luther King.
Le texte est d’une rare exigence à la fois politique et poétique et Karine Perdurant, sait le porter avec une remarquable diction et une rare sensibilité. Malgré une mise en scène approximative :direction d’actrice peu convaincante, lumières pauvrettes, scénographie d’une rare laideur et surtout balance musique et bruitages/texte vraiment  ratée. Et pourquoi Catherine Vrignaud Cohen fait-elle hurler au micro une aussi remarquable actrice?  Bon, on va encore nous dire que nous ne sommes pas venus un bon soir et que la veille tout était parfait. Nous persistons et signons: cette jeune actrice comme ce texte de haut niveau méritent mieux que cette réalisation approximative…

Philippe du Vignal

Jusqu’au 10 mars, Théâtre de la Reine blanche, passage Ruel, Paris (XVIII ème). T.: 01.40.05.06.96. Le texte est publié chez l’Arche ( 2019). 

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