Showgirl, conception, texte et interprétation de Jonathan Drillet et Marlène Soldana, librement inspiré de Showgirls de Paul Verhoeven

Showgirl, conception, texte et interprétation de Jonathan Drillet et Marlène Saldana, librement inspiré de Showgirls de Paul Verhoeven

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A l’origine, un
film  réalisé il y a trente ans:  échec au départ et devenu culte ensuite. Une jeune femme Nomi Malone va à Las Vegas en espérant y être show-girl. Jeff, qui l’a prise en auto-stop, lui vole ses affaires et son argent. Seule et perdue, elle rencontre une créatrice de costumes qui la loge et l’invite au casino Stardust où elle travaille.

Suivra une série d’aventures où, après des rencontres parfois douteuses, ce sera pour gloire et fortune pour Nomi dont le père a tué sa mère puis s’est suicidé. Mais ensuite, elle sera arrêtée pour possession et usage de drogue, racolage et agression à main armée. Vu la situation, Nomi quittera Las Vegas et fera de l’auto-stop pour aller à Los Angeles. Par hasard, elle retombe sur Jeff, celui qui lui avait tout volé à son arrivée. Pour qu’il lui redonne sa valise, elle le menacera d’un couteau.

 Créé à Chaillot l’an passé, ce Show-Girl commence bien avec, dans une presque obscurité, un visage féminin éclairé d’un pinceau de lumière. On devine un corps ou plutôt la silhouette d’une danseuse… en fait juste imprimée sur une robe ample. Une voix éructe une litanie de propos obscènes à l’écriture simple, parfois rythmée en décasyllabes, voire en alexandrins et aux rimes d’une pauvreté absolue (le tout au second degré bien entendu sur fond d’humour et vulgarité… Le mauvais goût ici élevé au rang d’une esthétique revendiquée comme telle.
Nous sommes emportés de gré ou de force par une oralité où les mots : chatte, bitte, merde, sexe, sang… reviennent en boucle. Dans un tradition finalement bien française, proche d’une culture populaire
, avec comme chez Rabelais ou dans les chansons paillardes, avec des expressions crues, voire obscènes et insupportables aux autorités religieuses. Pendant une vingtaine de minutes, Marlène Saldana chante à peu près nue pour finir en string…
Le corps nu sur scène? Pas nouveau et plus souvent féminin, que masculin. Des metteurs en scène comme Jérôme Savary très souvent, Antoine Vitez, une fois ou deux, et une foule d’autres. Mais un corps aussi volumineux et face public, rarement, voire jamais. C’est une remarquable performance comme celles de la grande créatrice Angelica Liddell qui sait aussi appeler une chatte, une chatte.
Aucun répit, aucune pause dans ce torrent verbal signé des auteurs, et musical de Rebeka Warrior.  Cette giclée de mots permanente écrase toute autre forme artistique. Comme il n’y a rien d’autre, à part une scénographie sans intérêt, cela tombe bien… Et Marlène Saldana sait y faire pour s’imposer.
Côté cour, il a une sorte d’arc en polyester moulé, et côté jardin de fausses plantes vertes d’une laideur exemplaire, chères à la S.N.C.F. Le tout passé à la peinture couleur alu. Et quatre marches d’un escalier sur roulettes recouvert de peluche crème, que viendra installer plusieurs fois le coauteur et interprète Jonathan Drillet, chaussé de hautes bottines pailletées. Tout cela, kitsch absolu.
Grosse cerise sur ce gâteau de provocation, un sexe masculin dressé et suspendu (deux mètres de hauteur, en grosses perles de plastique avec lumières intégrées). Bref, le tout-meuch comme disent les Cantaliens, élevé au rang d’œuvre d’art. Une performance corps et âme assez réussie, même si la balance chant/musique n’a guère été le souci de Jonathan Drillet et Marlène Saldana.

Mais après ce moment poético-musical réussi la chose devient beaucoup, beaucoup moins convaincante. L’autrice l’avoue: «Il a finalement fallu trouer le spectacle par des scènes dialoguées entre Jonathan et moi, car on n’en pouvait plus d’entendre des obscénités sur de la musique techno. » Comme la dizaine de spectateurs qui ont fui…  Mais ces scènes dialoguées sont bien longuettes.
Ce pseudo-texte assez confus censé relater des moments de la vie de Nomi Maldone reste la plupart du temps incompréhensible car submergé par la techno… Marlène Saldana qui joue plusieurs des personnages du film, écrit sans état d’âme que «la conversation, c’est une manière de travailler et une manière d’écrire. » Ou: « On aime bien donner à voir une pensée qui avance qui se construit, qui se contredit totalement, tout en éclairant le sens des moments les plus abstraits du spectacle.» Vous avez dit : prétentieux ?

Mais encore pendant une heure, Marlène Saldana fait feu de tout bois et la musique aussi forte, continue à marteler nos pauvres têtes… Pour essayer de masquer cette indigence, arrivent bien conventionnel des rafales de fumigène (les vint-quatrièmes au compteur pour nous depuis janvier), entre autres pour imiter un volcan en action et à la fin, il  y a même un petit feu d’artifice!
Le public était partagé… Il y a de quoi ! Certains hurlaient de joie, d’autres semblaient indifférents et applaudissaient à peine… A vouloir faire d’une performance, un acte théâtral, on est sûr de rater son coup. Toujours le même refrain : une histoire de temps… «Peut-être, écrivait Albert Camus, y a-t-il même deux temps, celui qu’on observe, et celui qui nous transforme.»
La deuxième partie de
Show Girl, ennuyeuse et décevante, elle, ne nous a pas transformé! Tout le monde n’est pas Angelica Liddell qui  maîtrise admirablement la durée scénique. Et reste cette éternelle question: les musées d’art contemporain accueillent volontiers ce type de performance, même sur une demi-heure. Mais les théâtres, sauf dans le cadre d’un festival et encore, ne le font jamais: le minimum admis est en général d’au moins cinquante cinq minutes: question de culture…Dommage. Voilà, en espérant que ces quelques lignes pourront vous éclairer… A vous de choisir.

Philippe du Vignal

Jusqu’au 9 mars, Théâtre de la Bastille,  76 rue de la Roquette, Paris (XI ème). T. : 01 43 57 42 14.

 

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