Boxing Shadows de Timothy Daly, traduction de Michel Lederer, mise en scène d’Isabelle Starkier

Boxing Shadows de Timothy Daly, traduction de Michel Lederer, mise en scène d’Isabelle Starkier

Producteur de cinéma australien mais aussi auteur dramatique, l’auteur a écrit entre autres The Don’s Last Innings, The Quiz King, Calliper et The Critic Assassinated. Kafka Dances a été créée au Sydney Theatre en 93 avec Cate Blanchett. Et Isabelle Starkier avait monté cette pièce après Richard III ou presque et L’Homme dans le plafond

© Merki

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Ici, deux personnages dans un huis clos. Raymond, un bibliothécaire, la quarantaine a été autrefois champion de box. Il rencontre Ariane, une jeune migrante, devant son immeuble où elle habite aussi. Il l’avait déjà croisée. Elle vient de lui piquer son portefeuille dans le métro… Il la menace de la dénoncer mais il a affaire à une professionnelle qui a la réplique facile comme ces jeunes mineurs sans papiers qui trichent dans le métro.
Elle n’a pas froid aux yeux et en a vu d’autres: elle lui dit que le vol est son seul moyen de survie… Lui, compréhensif, va lui apprendre sérieusement la boxe: «
Allez…allez… Boxe contre ton ombre…gauche…droite… uppercut, swing… danse contre la mort…boxe…gauche…droite…bats toi pour ta vie…tes jambes…  Sur ce ring il n’y a aucun lieu où te cacher…tu ne peux pas mentir, pas voler…uppercut…tes jambes…le ring, c’est la limite de ta volonté…Encore…direct droit…raconte ton histoire avec les poings…allez…allez droite gauche…mets tout dans tes combats…ta colère…ta rage…ta peur… »

Raymond voudrait qu’elle en finisse avec sa colère contre les règles que lui impose la société, qu’elle se dépasse, bref, qu’elle donne un sens à sa vie : «D’après toi, quel est le but de la boxe ? Ariane : Foutre une branlée à son adversaire. Raymond : Non pas du tout ,le but de la boxe, c’est trouver la liberté intérieure. Ariane: Trouver quoi? Raymond : La vérité enfouie au-dedans de nous. Ariane : Je comprends que dalle. Il est cinglé, ce type! »

Il lui trouvera même ensuite un petit boulot dans la bibliothèque. Jusqu’au jour où, face à un terroriste,e lle aura le courage de le terrasser, avant de mourir. « Cette petite histoire, dit Isabelle Starkier, s’inscrit dans la grande Histoire contemporaine en passant des fracas, des attentats au racisme : un climat dans lequel la jeunesse doit continuellement se battre.» Cette rencontre entre ces êtres socialement opposés et d’âge différent qui, dans ce huis-clos, peuvent apprendre beaucoup de l’autre, est accompagnée par un chant lyrique. (…) Je souhaite affirmer avec ce spectacle, la puissante présence de deux acteurs et une chanteuse sur un plateau (presque) nu. Composer avec leurs corps, le dessin de cette relation fraternelle qui transforme la peur, en respect de l’autre, et la violence en ballet sublimé à la recherche de soi-même. La voix lyrique vient nous extraire du réalisme social de cette histoire improbable aux relents absurdes. »

Sur le petit plateau, quelques chaises en tas, une grosse corde rouge de ring accrochée à des plots en fer par un crochet, côté cour, un fauteuil de bureau devant un écran où on pourra voir des images en boucle de la guerre Iran-Irak quand ce pays bombarda des bases aériennes  et pénétra sur le territoire iranien deux jours plus tard, avec la clé, un million de morts dont plus de 200.000 Irakiens! Et les costumes sont vraiment laids: mention spéciale à l’effroyable robe rouge avec capuche de Lila Maski… 
Le spectacle a été joué un peu partout, dehors et dans des salles, notamment dans le off d’Avignon et est donc bien rodé. Ce
match de boxe, plus mental que physique, est ponctué par les beaux chants de Lila Maski. Nicolas Zaaboub-Charrier fait le boulot et on sent la grande solitude de Raymond, capable d’une certaine tendresse pour cette inconnue: «Qui a prétendu que la vie était juste ?… Et pourquoi me soucierais-je d’une migrante, d’une voleuse, d’une sans-papier… Tout ce que je sais, c’est que j’ai envie de l’aider. Mais qui, est-ce que j’aide ? Elle ou moi ? »
Clara Starkier, elle, très concentrée, est crédible dès qu’elle entre sur le plateau. Présence, diction, voix et gestuelle impeccables. Vous pouvez aller la découvrir… si vous tenez  à voir ce spectacle: tout le temps en scène, elle tient seule le texte pendant une heure dix, malgré une salle très peu remplie: et c’est un euphémisme…
Pour le reste, autant en emporte le vent pluvieux qui soufflait sur la rue Véron ce dimanche soir. La dramaturgie comme la mise en scène, assez laborieuses avec ces images vidéo en boucle  et, à la fin, ce jeu dans la salle, manquent singulièrement de rythme et de rigueur. Dommage : le texte, même un peu facile, mérite quand même mieux. Nous serions heureux de voir Clara Starkier dans une vraie mise en scène…

Philippe du Vignal

Jusqu’au 10 avril, Manufacture des Abbesses, 7 rue Véron, Paris (XVIII ème).


 

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