Explosif d’Elise Wilk, traduction d’Alexandra Lazarescou, mise en scène de Lisa Wurmser
Explosif d’Elise Wilk, traduction d’Alexandra Lazarescou, mise en scène de Lisa Wurmser
Le texte de cette dramaturge roumaine, inspiré des Bacchantes d’Euripide, est une sorte de fable-chronique dans un établissement scolaire. « La presse à scandale dirait que c’est une «école de riches». Le Proviseur dirait que c’est un lycée «d’élite». La Fille Dépressive dirait que c’est un lycée «super merdique». Denis dirait que c’est un lycée «assez cool». La Femme de ménage (Valérie Haltebourg) n’en dirait rien. Trop occupée à savoir ce que les autres en disent. «
Agavé dans la pièce d’Euripide, elle raconte qu’elle voit tout mais ne dit rien de ce qui se passe. Il y a aussi un proviseur sérieux et assez imbu de lui-même, une psychologue, mère d’un élève, et des jeunes filles fascinées qui vont vite tomber amoureuses du jeune et beau Denis, intelligent mais incapable de se plier à une discipline. Il arrive dans ce lycée, auréolé de la gloire d’avoir été expulsé d’un autre établissement…
Il a quelque chose à voir, déjà par son prénom, avec le Dionysos des Bacchantes et se révélera dominateur et manipulera ses camarades garçons et filles comme Penthée, le délégué de classe. et tiendra facilement tête au proviseur. Denis (imposant Matisse Humbert) sait déjà parfaitement ce que veulent dire les rapports de pouvoir dans la société et comment les négocier… Un pétard a éclaté dans une salle de classe et malgré les menaces du proviseur, aucun des lycéens, ici trois filles et trois garçons ne veut se dénoncer. En filigrane, la tragédie menace et le bon élève appliqué, fils de la psychologue scolaire, un «garçon triste», (Penthée chez Euripide) se suicidera. La pièce d’Elise Wilk, c’est là un de ses défauts mais aussi une de ses qualités, part un peu dans tous les sens, avec de courtes séquences sur le harcèlement scolaire et la vie de ces jeunes gens, leurs amours et leurs conflits…
Les unes ici dialoguées, et les autres, bien dansées et bien chantées. La rencontre avec cette partition théâtrale, a été foudroyante, dit Lisa Wurmser et «sa polyphonie inventive universelle lui confère une portée universelle.» Nous n’avons pas été aussi séduits par ce texte, et le spectacle vaut surtout par une réalisation virtuose où les nombreuses entrées et sorties par une double porte battante à hublots sont impeccablement réglées. Ce n’est pas vraiment la comédie musicale annoncée… mais Elsa Wurmser dirige avec une rare précision Valérie Haltebourg, Matisse Humbert, Pierre Lefebvre Adrien, Charlotte Léonhardt, Gwenael Mettay, Diana Sakalauskaité, Pascal Vannson, et au chant, Fantine Baudelot et Chiara Davis, élèves de la maîtrise de l’opéra Grand Avignon. Aucun dérapage, aucune rupture de rythme sur ce grand plateau et même si au soir de cette deuxième représentation, la diction flottait dans quelques passages, il y avait toujours une unité de jeu exceptionnelle. Et c’est toujours un plaisir de voir ces acteurs d’âge différent, tous très crédibles….donner vie à un texte.
Philippe du Vignal
Jusqu’au 2 juin, Théâtre de l’Epée de bois, Cartoucherie de Vincennes, route du Champ de manœuvre. T. : 01 48 08 39 74.
Métro: Château de Vincennes, sortie n° 4 en tête du train +navette gratuite (mais pas toujours ponctuelle). Ou autobus 112, arrêt: Cartoucherie; attention zone 3 mais le pass navigo est dézonné les week-ends, jours fériés et vacances scolaires.