Birgit Kabarett,conception, écriture et mise en scène de Julie Bertin et Jade Herbulot
Birgit Kabarett, conception, écriture et mise en scène de Julie Bertin et Jade Herbulot
«Depuis le début de notre collaboration et la fondation du Birgit Ensemble, disent les créatrices, la musique occupe une place à part entière dans la dramaturgie de nos spectacles qui sont par nature polymorphes, polyphoniques et pluridisciplinaires. Par ailleurs, la forme du cabaret nous séduit par la proximité et la convivialité qu’elle induit dans le rapport aux spectateurs. » (…) Nous créerons une forme musicale évolutive qui s’ajustera, à chaque nouveau rendez-vous, au gré de l’actualité française et européenne.
Un poil prétentieux… Mais le mieux était d’ y aller voir. Inspiré entre autres par Bertolt Brecht, ce cabaret est en fait un spectacle de chansons en solo ou en chœur, sketches avec pancartes indiquant le nom de chaque politique européen. Défilent entre autres, jouées par cinq actrices et chanteuses: Eléonore Arnaud, Pauline Deshons, Anna Fournier, Morgane Nairaud, Marie Sambourg, des femmes et hommes politiques comme Angela Merkel, Ursula Von Der Leyen mais aussi français: entre autres, Emmanuel Macron, Rachida Dati, Eric Ciotti, Jean-Luc Mélenchon, Anne Hidalgo, Olivier Faure, Raphaël Glucksmann, Gabriel Attal, Jordan Bardella, Anne Hidalgo, Rachida Dati, Amélie Oudea-Castera, au besoin coiffées de perruques (assez réussies).
Les chansons du compositeur Grégoire Letouvet et du parolier Romain Maron font référence à l’actualité. Impossible cette année, d’échapper aux élections européennes et surtout législatives, et bien sûr, à la préparation des Jeux Olympiques à Paris. Cela commence assez bien : Grégoire Letouvet au piano et au synthé, Alexandre Perrot à la contrebasse, jouent le très fameux Hymne à la joie de la IXème Symphonie de Beethoven, emblème musical de l’Europe. Julie Bertin et Jade Herbulot sont déjà là avec leurs amies, boa bleu-blanc-rouge autour du cou. Elles accueillent avc gentillesse le public.Et ensuite jouent les maîtressses de cérémonie devant un haut pupitre où il y a de grosses fausses bougies
Personne n’est épargné, les hommes sont au minimum ridicules, comme Gabriel Attal à l perruque noire et Jordan Bardella avec une perruque blonde. Il se vantent chacun d’être les plus suivis sur Tiktok. Les femmes, elles, ne sortent pas non plus indemnes de ce jeu de massacre. Mention spéciale aux actrices-chanteuses qui interprètent une Rachida Dati, assez méprisante derrière ses lunettes et qui s’empêtre dans ses contradictions: «Je suis opportuniste mais pas traître. » Amélie Oudéa-Castera, consternante, gigote toute le temps et oublie qu’elle n’est plus du tout ministre de l’Education Nationale… Et Anne Hidalgo, bavarde mais n’arrive pas à tenir ses promesses.
Et, vers la fin, il y a un jeu où les spectateurs doivent trouver de quel politique, il s’agit, à partir de citations, ou de quoi il-ou elle- parle mais juste en mimant. Celui qui a le plus de points gagne une bouteille de vin blanc et un passe navigo (plein ou vide, on ne le saura pas). C’est mis en scène au cordeau, et parfois drôle. Oui, mais il faudrait revoir la balance de l’accompagnement musical au piano et à la contrebasse et les chansons… qu’on entend mal. Pourquoi les chanteuses actrices crient-elle souvent dans leur micro? Et les textes sans doute écrits il y a quelques jours, devraient être plus virulents et sarcastiques. Ici, tout est gentillet, sauf à de rares moments. Cela tient aussi beaucoup à une dramaturgie médiocre (on se demande ce que Jade Herbulot et Julie Bertin ont pu apprendre au Conservatoire National) et le spectacle du Birgitt Ensemble, assez conventionnel, accuse nettement ses faiblesses. Le public, lui, semblait partagé.
Un cabaret exige aussi, pour être efficace, d’être construit avec le plus grande rigueur. Conseil de vieux critique à ces metteuses en scène: prendre un train pour Montbéliard et aller voir un des ces kapouchniks mensuels, très populaires du Théâtre de l’Unité à Audincourt. y verront comment, avec un éclairage sommaire, seulement quelques accessoires, une bande d’acteurs réussissent, en une seule journée à créer un cabaret savoureux pour le présenter un soir. Ils établissent une véritable complicité avec le public. Malgré un inconfort évident, la salle est à chaque fois complète. Les spectateurs d’Audincourt donnent ce qu’ils peuvent à la sortie.
Il y a sans doute du travail mais ce spectacle vraiment trop inégal, manque de rythme et traîne en longueur avec un faux rappel. Et on peut se demander comment ce Birgitt Ensemble a pu arriver au Théâtre du Rond-Point…
Philippe du Vignal
Jusqu’au 24 juin, Théâtre du Rond-Point, 2 bis avenue Franklin D. Roosevelt, Paris ( VIII ème).