Lune Jaune La Ballade de Leila et Lee de David Greig, traduction : Dominique Hollier mise en scène d’Olivier Barrèr

Lune Jaune La Ballade de Leila et Lee de David Greig, traduction Dominique Hollier mise en scène d’Olivier Barrère


Ce dramaturge écossais est né à Edinburgh, il y cinquante-cinq ans et a écrit vingt pièces, régulièrement montées par les plus grandes compagnies du Royaume-Uni et ailleurs comme entre autres San DiegoThe American PilotPyrénéesThe Strange undoing of prudencia hartMonster in the Hall, ou Midsummer .Il aussi traduit Caligula d’Albert Camus et Créanciers d’August Strindberg.
David Greig est actuellement dramaturge au Théâtre national d’Écosse et n’est pas tout à fait un inconnu en France.
Lune jaune a été créée il y a dix ans au T.N.P de Villeurbanne et Nuit d’été, à La Manufacture des Abbesses à Paris. Le dernier message du cosmonaute à la femme qu’il aima un jour dans l’ex-union soviétique en 2012. Le Monstre du couloir il y a neuf ans. EtDunsinane au Théâtre de Vénissieux en 2020 (voir Le Théâtre du Blog).
Cette pièce (2006)
se passe à Inverkeithing, une petite ville écossaise de 6.000 habitants au bord de la mer. Leila est une jeune fille silencieuse et Lee, un « mauvais garçon » vit seul avec sa mère. Il a bien un père mais parti quand il avait cinq ans et il lui a juste laissé une casquette. Jenni, sa mère vit avec Billy.
Lee rêve de s’enrichir, tout simplement sans aucun état d’âme, en prostituant quelques jeunes personnes,  Leila, elle, encore adolescente, n’est pas trop à l’aise avec son corps et peut être une proie facile. Elle imagine qu’un vendredi soir, Lee Macalinden, une célébrité locale, va passer la soirée avec elle mais cela tournera mal : après un meurtre, Lee s’en fuit avec elle en plein hiver dans les collines à la recherche de son père. Un garde-chasse, heureusement les recueillera.

David Greig utilise habilement à la fois la narration, surtout celle de Leila, et le dialogue pour traduire cette histoire d’identité morcelée. Pas loin d’autres dramaturges écossais comme Ken Loach ou Irvine Welsh dont le bien connu Transpotting (1996) a été adapté au cinéma par Danny Boyle. Pas loin non plus, du célébrissime Baladin du monde occidental de l’Irlandais J. M. Synge. Avec, toujours en filigrane, cette terre natale mythique à laquelle les personnages sont viscéralement attachés. Mais David Grieg parle avec virtuosité de pulsion sexuelle, désir, sensualité, confiance en l’autre mais aussi solidarité dans un pays pas bien riche.

 Ces jeunes gens vont devoir affronter le rêve amoureux et l’imaginaire, plus confortables que la réalité quotidienne, mais aussi plus risqués. Fiction et parcours initiatique : comment arriver à concilier les deux…Sur le plateau, un praticable en demi-cercle avec au centre, un guitariste toujours présent. La mis en scène d’Olivier Barrère est nette et précise, même s’il est parfois difficile de se retrouver dans cette ballade romantique un peu longue mais la pièce est bien servie par Thibault Pasquier (Lee), Olivier Barrère (Franck), Titouan Huitric (Billy), bien accompagnés par Nico Morcillo à la guitare.

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Mais il y a surtout une jeune actrice et récitante de vingt-neuf ans, vraiment étonnante: Marion Bajot (Leila) qui a une diction et une gestuelle impeccable mais aussi et surtout  une singulière présence; sur elle, repose en fait toute la pièce, puisqu’elle est tout le temps en scène. Sans doute bien formée, elle passe sans difficulté d’un registre à l’autre : le désespoir, la fièvre, le rire parfois aussi, avec la même espièglerie. Elle travaille depuis longtemps déjà avec le metteur en scène qui a créé en 2015 sa compagnie avignonnaise il va sans dire, et cela se voit.
Au chapitre des réserves : la scénographie n’est pas du bois dont on fait les flûtes et le spectacle est encore un peu brut de décoffrage et mériterait d’être mieux éclairé mais
il y a une bonne direction d’acteurs. C’est l’occasion-matinale- d’aller à la rencontre d’un dramaturge écossais et d’une jeune compagnie locale. et d’aller découvrir une jeune  actrice. Que demande le peuple? Depuis quelque vingt ans maintenant, la Manufacture joue ici un rôle essentiel dans le festival: il faut en remercier Pascal Keiser et son équipe.

Philippe du Vignal

La Manufacture, 2 rue des Ecoles, Avignon ; navette pour le Château, à 9 h 55, jusqu’au 21 juillet.


Archive pour 4 juillet, 2024

Festival d’Avignon Exposition : On ne fait jamais relâche, hommage à Alain Crombecque

Festival d’Avignon:

Exposition : On ne fait jamais relâche, hommage à Alain Crombecque

Un homme de théâtre exceptionnel (1939-2009) que nous avons eu le bonheur de connaître, il y a déjà plus de cinquante ans. Souvenirs, souvenirs… Venu un soir dîner à la maison avec son amie Corinne Baccharah,  discret, presque taiseux, il  disait juste l’essentiel le temps de l’apéritif et des hors-d’œuvre mais restait attentif. Puis, à une question de Laurence Louppe sur sa jeunesse, sans doute mis en confiance, il nous raconta très longuement ses voyages dans le monde (Chine, Cuba, Europe, Japon, Etats-Unis…)  pays à l’époque encore peu visité, vu le prix des billets d’avion!).  Mais encore étudiant, il était le représentant de l’U.N.E.F. Et ce fut un moment passionnant!

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Alain Crombecque dirigea le Festival d’Automne de 74 à 77, puis de 92 à 2009. Auparavant, il avait été attaché de presse de Jérôme Savary qui avait joué au Théâtre National de Chaillot (il n’en était pas encore le directeur), Alain accueillait les critiques à l’entrée de la salle Gémier, leur remettait un programme et les billets d’entrée, répondait au téléphone en même temps, disait quelque mots à une ouvreuse… Et quand je lui demandais des photos-papier du spectacle pour mon article (on n’était pas encore à l’heure d’Internet il me dit sans rien noter, tout en continuant à répondre au téléphone et à remettre un billet d’entrée: « Ouais, ouais…  On pouvait penser qu’il aurait oublié mais le lendemain matin, à 9h , une enveloppe avec deux photos était sous mon paillasson ! Déjà très professionnel.

Aussi discret qu’efficace, il fut directeur du festival d’Automne. Nous faisions le point chaque année sur les spectacles qu’il programmait, en déjeunant dans un bistrot vers la place des Vosges où le festival avait alors ses bureaux. Il précisait bien le contenu de son programme, insistait pour qu’on parle dans Artpress de tel ou tel artiste encore inconnu à l’époque… Je le revois encore levant la main, et faisant juste le geste d’écrire et de mettre un coup de cachet : Alain jamais bavard, sans un seul mot, demandait juste l’addition…
Sans lui, le théâtre contemporain ne serait pas ce qu’il est devenu. Remarqué par Michel Guy, il dirigea avec une rare intuition le festival d’Avignon pendant sept ans de 85 jusqu’à 92. Puis il reprit la direction du festival d’Automne jusqu’en 2009 quand, hélas, il fut terrassé par une crise cardiaque.
Cette exposition  dont le commissaire est Antoine de Baecque commence avec un vrai Solex, le moyen de déplacement favori et devenu mythique d’Alain Crombecque dans Avignon… Pas le sien perdu mais son exact petit frère. Et deux affiches qu’il avait gardées  celles réalisées en mai 68 aux Beaux-Arts de Paris, par entre autres, des membres du collectif des Malasssis : Lucien Fleury,  Michel Parré, Henri Cueco… avec ces mots:  « La police vous parle tous les soirs à 20 h »  « Et Non à l’Université de classe. »

On pourra voir de nombreuses photos, documents, lettres, affiches objets… de sa vie personnelle qu’il avait soigneusement conservés.  Il y en a sans doute un peu trop mais bon, c’est toujours bien de saisir tout ce parcours émouvant pour nous: Alain aurait notre âge. Cette collecte réalisée en collaboration avec son épouse Christine et il y aussi, au-delà de l’intime, tout un pan de l’histoire du théâtre contemporain qui défile devant nous avec les photos des spectacles des plus grands, la plupart disparus mais que nous avons tous connus.
Sont accrochées aussi de formidables dessins de l’immense Tadeusz Kantor, Peter Brook avec Le Mahabharata pour lequel il fit ouvrir la carrière Boulbon, devenu un lieu emblématique du festival d’Avignon, Mais aussi entre autres les photos des spectacles d’Antoine Vitez, Klaus Michael Grüber,
Patrice Chéreau qui créa dans la Cour d’honneur son remarquable Hamlet avec Gérard Desarthe (scénographie de Richard Peduzzi), une grande toile de Valère Novarina dont les pièces furent souvent crées en Avignon.
Il y a enfin des œuvres de Christian Boltanski et Annette Messager, ses amis. Et enfin, sa voix, si particulière et que nous avons encore dans l’oreille, aux cinq émissions d’A voix nue sur France Culture avec Joëlle Gayot.
Si vous vous intéressez à l’histoire du théâtre contemporain et bien sûr si vous connu Alain Crombecque, surtout ne ratez pas cette exposition…


Philippe du Vignal

Maison Jean Vilar, 8 rue de Mons, Montée Paul Puaux, Avignon. T. : 04 90 86 59 64. Prix: 6 € et 3 €

Feuilleton Crombecque.
à partir de lettres notes, témoignages, articles, extraits de textes dramatiques ou romanesques qu’il aimait, ce feuilleton en huit épisodes tracera un portrait sensible d’Alain Crombecque
A 11h :
Lundi 8 juillet L’homme intime, lecteur Xavier Gallais
Mardi 9 juillet, Valère Novarina, lectrice :Agnès Sourdillon

Mercredi 10 juillet Le Soulier de satin, lectrice : Valérie Dréville.
Jeudi 11 juillet Le Mahabharata, lectrice : Isabelle Lafon.
Vendredi 12 juillet, Le directeur, lecteur : Marcial Di Fonzo Bo.
Samedi 13 juillet Copi et ses amis, lecteur : Marcel Bozonnet.
Dimanche 14 juillet Tadeuz Kantor : lectrice Marie Vayssière.
Lundi 15 juillet Nathalie Sarraute : lectrice Jeanne Balibar

Entrée libre mais réservation conseillée (places limitées) : accueil@maisonjeanvilar.org  T:  04 90 86 59 64

 

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