Festival d’Avignon Mothers. A Song for Wartime, conception et mise en scène de Marta Górnicka, (en polonais, ukrainien et biélo-russe, sur-titrage en français et anglais) Mothers. A Song for Wartime, conception et mise en scène de Marta Górnicka, (en polonais, ukrainien et biélorusse, sur-titrés en français et anglais).

Festival d’Avignon

Mothers. A Song for Wartime, conception et mise en scène de Marta Górnicka, (en polonais, ukrainien et biélo-russe, sur-titrage en français et anglais)

Durant une heure, un chœur de femmes venues d’une Europe de l’Est en souffrance et en résistance. «Pendant plusieurs mois, dit Marta Górnicka, j’ai mené des ateliers à Varsovie avec un groupe de vingt-et-une femmes : des Ukrainiennes touchées par la guerre, des Biélorusses qui ont subi l’oppression et la persécution politique, des Polonaises qui ont ouvert leur porte et leur cœur… Elles viennent de Kyiv, Soumy, Irpin, Kharkiv. De neuf à soixante-douze ans, elles forment un ensemble transgénérationnel.
Ces survivantes réfugiées, témoins de la violence et des bombardements, utilisent la puissance de leurs voix pour nommer ce qui ne peut l’être. Comme le viol politiques et individuels, les armes les plus puissantes  de l’armée russe: un instrument de torture utilisé consciemment et plus efficace que le meurtre: il demeurera   chez la victime qui survit.

 

© Ch. Raynaud de Lage

© Ch. Raynaud de Lage

Comme le chœur dans le théâtre antique, dit aussi Marta Górnicka, les mères, en réponse à la guerre et à la mort, deviennent soit des vengeresses qui assassinent leurs ennemis, soit des pleureuses. Ici, Ensemble, nous recréons le motif ancestral de l’Anasyrma, ce geste des femmes qui soulevaient leurs jupes face à l’océan houleux d’une armée, comme un acte de protestation et de moquerie : ce geste devient le point de départ d’un nouveau chant choral guerrier, une contre-lamentation, un chant de liberté ». 

Ce cri mêle discours politiques, poèmes, berceuses, extraits de Sophocle, Euripide et Lesya Ukraïnka, une écrivaine  (1871-1913) qui, avec Tarass Chevtchenko,est  à l’origine du sentiment poétique et national de tout un peuple, aujourd’hui projeté dans une guerre européenne déclenchée par l’impérialisme russe.
Avec ce spectacle choral, la metteuse en scène polonaise dénonce l’immobilisme de l’Europe devant les viols commis par l’armée russe. Perpétrés par cette même armée durant la seconde guerre mondiale en Pologne et en Allemagne, ils ont été cachés au prétexte que ses soldats venaient libérer l’Europe, des nazis. Les hommes russes ne changeront jamais!
On lit ces mots projetés et répétés sur le haut mur du Palais des Papes :« L’Europe ne fera rien, à part jouer à la paix, elle ne fera rien. (…) Ne pas voir, Ne pas entendre, Ne pas sentir. (…) C’est un scandale que l’Est soit si loin. (…) L’Europe a un traumatisme de guerre et a besoin de se reposer. (… ) Never again ».  Parmi ces paroles déclamées et chantées, une comptine pour endormir les enfants… Un paradoxe de la scène impossible à oublier, pour nous, spectateurs!
Dans la dernière partie, les témoignages de ces femmes retentissent dans la nuit calme d’Avignon. Elles ne dénoncent rien, disent leur quotidien heureux avant la guerre, leurs goûts culinaires, leur métier  mais aussi le manque cruel d’un fils, d’un ami, d’un époux… Des complaintes toutes bouleversantes mais l’une nous a frappé au cœur: «J’ai oublié temporairement de rêver, mais j’aimerais réapprendre.» A la fin, le public  a fait à ces actrices, une ovation debout. Espérons que leurs chants douloureux soient entendus au-delà de ces hauts murs!          

Jean Couturier

Spectacle joué les 9,10 et 11 juillet à la Cour d’Honneur, au Palais des Papes.                                          

Les 15 et 16 août, Zürcher Theater Spektakel, Zurich. Les 29 et 30 août, Comédie de Genève (Suisse).

Le 1 er septembre, Gorki Theater, Berlin (Allemagne).

Les 5 et 6 octobre, Teatr Powszechny, Varsovie (Pologne).

Du 9 au 11 octobre, Théâtre national de Bordeaux-Aquitaine, et du 15 au 19 octobre, Théâtre du Rond-Point, Paris (VIII ème).

Le 7 novembre, Euro-Scene Leipzig Theatre Festival (Allemagne) ; le 18 novembre, The national Festival of directing art interpretations; du 30 novembre au 1er décembre, Teatr Powszechny, Varsovie (Pologne).

Du 6 au 12 décembre, International Divine Comedy Theatre Festival, Cracovie (Pologne)


Archive pour 11 juillet, 2024

Festival d’Avignon Sea of silence, de Tamara Cubas, ( en espagnol, édo, arabe, mapuche, alais, didxaza, borum, surtitré en français et anglais)

Festival d’Avignon

Sea of silence, de Tamara Cubas, (en espagnol, édo, arabe, mapuche, alais, didxaza, borum, surtitré en français et anglais)

Dans la Genèse, la femme de Loth (Ado ou Édith dans certaines traditions juives mais non nommée dans la Bible) s’enfuit de Sodome en feu. En se retournant, elle aurait trahi ses inclinations secrètes pour le péché et fut alors changée en statue de sel. Un épisode de la Bible qui a beaucoup impressionné cette créatrice urugayenne.
Et ici, le plateau est recouvert d’une épaisse couche de sel blanc. Tamara Cubas a entrepris depuis des années une recherche sur les mouvements migratoires, notamment avec Sculpting of silence, une installation créée pendant la pandémie. C’était un paysage où le public pouvait circuler et accompagné d’une bande sonore, et d’un texte poétique du dramaturge Gabriel Calderón ( voir Le Théâtre du Blog) qui a collaboré à cette Sea of silence où sept femmes de pays et de langue différente (Nigéria, Egypte, Indonésie, Brésil, Chili, Mexique,Uruguay) s’unissent dans une sorte de rituel en chantant et en dansant. Un rituel, dit Tamara Cubas, inspiré des sorcières ( en réalité des sortes de médecins) qui furent tuées par centaines en Europe du XV ème au XVII ème siècle.

 

© Ch. Raynaud de Lage

© Ch. Raynaud de Lage

La première image est de toute beauté : sous une sculpture suspendue qui se révèlera être une sorte de grosse racine, une femme est là seule debout dans la pénombre bientôt rejointe par les six autres, toute habillées de blanc avec des colliers ou cou ou aux chevilles. s’assiéront ou s’allongeront près d’elle en silence. Puis toutes ensemble, Noelia Coñuenao, Karen Daneida, Dani Mara, Ocheipeter Marie, Hadeer Moustafa, Sekar Tri Kusuma, Alejandra Wolff commenceront à marcher lentement en rythme, puis à danser et à chanter de longues mélopées. Mais on ne discerne pas très bien où Tamara Cubas veut nous emmener.
Le texte de cette «communauté éphémère dans un temps suspendu» : revendications féministes clairement affirmées, évocations de la vie des ancêtres plusieurs fois répétées, phrases disant l’importance du corps, bribes de prières catholiques dont «Priez pour nous pauvres pêcheurs, maintenant et à l’heure de notre mort.» s’affiche traduit sur le mur du fond.
Un texte intéressant mais sans fil conducteur et qui passe trop vite. Nous avons aussi envie de regarder ces danses souvent magnifiques, mais impossible de choisir ! Dommage et pourquoi ce recours systématique aux micros H.F.?  Pendant une heure et quart, le flot envahissant de ces voix trop amplifiées et sans aucune plage de repos, nuit à cette performance qui, sur le plan visuel, est de toute beauté mais dont la mise en scène devrait être sérieusement revue.
. « Nous créons ensemble, dit Tamara Cubas  un nouveau rituel anticapitaliste, nous imaginons une stratégie nouvelle pour bousculer les idées coloniales, les frontières imposées par les pays pour justifier les guerres. Il y a un côté épique assumé dans ce rituel. Les frontières, la division du monde… Tout cela est fondamentalement politique. » Mais tout cela n’est guère visible ici, et cette Sea of silence, malgré de grandes qualités picturales, est décevante.

Philippe du Vignal

Spectacle présenté du 4 au 9 juillet, au Théâtre Benoît XII, rue des Teinturiers, Avignon.

 

 

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