Lacrima, texte et mise en scène de Caroline Guiela Nguyen (en français, tamoul, anglais, surtitrés en anglais et en français)

Festival d’Avignon

Lacrima, texte et mise en scène de Caroline Guiela Nguyen (en français, tamoul, anglais, surtitrés en anglais et en français) 

En  79 à l’Odéon à Paris,  Jean-Claude Grumberg évoquait dans L’Atelier en dix scènes de 45 à 52, la vie d’un atelier de confection pour hommes. Le vécu et les paroles douloureuses de ces ouvrières nous sont restés en mémoire. Ici, l’autrice et metteuse en scène nous plonge aussi dans l’univers de la couture: «Le spectacle, dit-elle, suit la création d’une robe de mariée et les parcours de Marion à Paris, Thérèse à Alençon et Abdul à Mumbai (Inde). Chacun doit faire face aux violences liées à leur travail et aux événements qui font faire basculer leur vie. » Pour Caroline Guiela Nguyen, « les larmes et l’émotion sont des éléments fondamentaux et assumés de mon travail.»

© Christophe Raynaud de Lage

© Christophe Raynaud de Lage

Le titre prend tout son sens et ce théâtre documentaire est une réussite, avec la création hyper-réaliste de trois univers. Alice Duchange a conçu une scénographie exceptionnelle: un atelier de couture dans tous ses détails. Nous allons assister à l’anatomie de la chute de Marion, première ouvrière dans un atelier de haute couture et responsable de la conception à la réalisation, de la robe de mariage d’une princesse anglaise imaginaire. Une annonce précise que toute ressemblance avec la réalité serait fortuite! 

Cette pièce -trois heures et demi!- s’ouvre sur une scène douloureuse qui nous fait entrer en empathie avec cette femme en perdition.  Mieux vaut avoir une bonne santé mentale devant ces drames intimes successifs dont personne n’est à l’abri. L’identification peut être complète quand on voit une famille brisée par l’engagement professionnel de cette ouvrière. Ces personnes, en souffrance physique réelle, font une travail intense et pénible: confectionner dentelles et broderies en perles pour le voile de cette future mariée. 

Grâce à des projections vidéo, le public voyage entre la maison de couture Beliana, rue du faubourg Saint-Honoré à Paris, un atelier de dentelières à Alençon et l’échoppe d’Abdul, un brodeur à Mumbaï en Inde. Il faudrait en théorie 500.000 heures de dur labeur pour réaliser un tel voile. Un temps que ces ateliers ne seront pas en mesure de respecter, vu les courts délais imposés. La pugnacité des couturières et dentelières-dont la doyenne Thérèse-comme l’habileté d’Abdul ne pourront arrêter la catastrophe annoncée.
Cette prise de risque va être foudroyante et entraîner la déroute mentale d’une femme qui voit son univers personnel se disloquer peu à peu, devant la mégalomanie d’Alexander, créateur de mode. Les interprètes, d’une justesse remarquable, ont presque tous participé aux  spectacles de Caroline Guiela Nguyen qui reste fidèle à son équipe. Ils sont d’exceptionnels artisans de théâtre.

 Jean Couturier

Le spectacle a été joué  du 1 er au 11 juillet,  au Gymnase Aubanel, Avignon.

Du 24 septembre au 3 octobre, Théâtre National de Strasbourg.

Les 20 et 21 novembre, La Comédie-Centre Dramatique National de Reims.  Du 28 au 30 novembre, Piccolo Teatro di Milano (Italie).

Du 7 au 11 décembre, Théâtre du Nord-Centre Dramatique National de Lille-Tourcoing- Hauts-de-France ; les 18 et 19 décembre, le Tandem, Scène nationale d’Arras-Douai (Nord).

Du 7 janvier au 6 février, Odéon-Théâtre de l’Europe, Paris.  Du 13 au 21 février, Les Célestins -Théâtre de Lyon. Du 26 au 28 février, Théâtre national de Bretagne, Rennes (Ile-et-Vilaine).

Les 14 et 15 mars, Les Théâtres de la Ville de Luxembourg; les 20 et 21 mars, Théâtre de Liège (Belgique).


Archive pour 12 juillet, 2024

Festival d’Avignon Vive le sujet I

Festival d’Avignon

Vive le sujet I

Un Ensemble (morceaux choisis) conception d’Anna Massoni, chorégraphie et interprétation d’Ola Maciejewska et  Anna Massoni


Cela se passe dans la merveilleuse petite cour de la chapelle du lycée Saint-Joseph dont la porte en bois, comme les murs sont tapissés de lierre. Anne Massoni a invité Ola Maciejewska, une artiste polonaise connue entre autres, pour son travail sur les danses serpentines de Loïe Fuller que nous avions vu parmi les sculptures du musée d’Orsay (voir Le Théâtre du Blog).

© Ch. Raynaud de Lage

© Ch. Raynaud de Lage

En jean gris et T shirt noir, elles reproduisent des mouvements quotidiens souvent minimaux, voire dérisoires, comme le frottement sur le sol, du pied droit puis du pied gauche, l’élévation d’un bras… Seules ou à deux et en silence. « Des gestes d’une étrange familiarité disent-elles, composant une grammaire commune.» Avec une précision remarquable, cette pièce a quelque chose de fascinant dans la mesure où elle nous force à concentrer notre regard sur un geste minimal comme ceux que nous produisons tous les jour, sans en avoir même conscience.
Cet ensemble aurait sans doute bien plu à Gilles Deleuze. qui,
en 92, avait écrit un texte sur Quad (1980), une chorégraphie que le dramaturge avait réalisé en 81 pour la télévision allemande. Une pièce sans paroles, répétitive et minimale en vingt minutes pour quatre personnages : «Dans le théâtre de la répétition, on éprouve des forces pures, des tracés dynamiques dans l’espace qui agissent sur l’esprit sans intermédiaire, et qui l’unissent directement à la nature et à l’histoire, un langage qui parle avant les mots, des gestes qui s’élaborent avant les corps organisés. »


Le Siège de Mossoul,
une épopée contemporaine de Félix Jousserand, musique originale de Bruno Ducret et Felix Jousserand

Suit sur la scène nue de cette même belle petite cour, un poème épique en alexandrins dit par ce slameur et interprète de quarante six ans qui a publié une dizaine d’albums et de livres*. Il est aussi le chanteur du collectif  Spoke Orkestra et du groupe Dum Dum.
Dans cette performance orale et musicale avec documents sonores et, au violoncelle, Bruno Ducret, Félix Jousserand, raconte comment à Mossoul la seconde ville d’Irak,  s’est passée une guerre très dure entreprise par les États membres de la Coalition internationale contre Daech. le groupe terroriste qui a mené une politique de terreur : décapitations, réduction en esclavage, tueries de masse :l’attaque a été préparée tout l’été 2016
« A l’intérieur, chaque jour était mis à profit;le temps et l’invention compensaient les millions dépensés par l’armée, les tunnels retrouvaient leur fonction ancestrale. les civils s’activaient pour transformer Mossoul en piège, en labyrinthe.les maçons étayaient, à cinq mètres sous terre, les boyaux excavés, béton contre aviation. »

© Ch. Raynaud de Lage

© Ch. Raynaud de Lage

Les musulmans (chiites et sunnites) ont été les premières victimes de Daech, dont de nombreuses femmes et enfants. Cette organisation avait aussi organisé plusieurs attentats meurtriers à l’étranger comme au Bataclan à Paris en 2015, Bruxelles en 2016 ou Londres en 2017. Daech a procédé à la destruction des cités antiques de Palmyre, Nimroud et Hatra, et du musée de Mossoul. Formée en septembre 2014 et rassemblant 79 États, ainsi que l’OTAN et l’Union européenne, la coalition internationale contre Daech a mené un combat décisif contre cette organisation terroriste et a pu libérer les 7,7 millions d’Irakiens et de Syriens qu’elle avait soumis.

En juillet 2017, Mossoul a été reprise, puis en décembre, les autorités irakiennes ont annoncé la libération de l’ensemble des territoires contrôlés par Daech. Une feuille de salle résume les principaux moments de cette guerre au déroulement parfois compliqué entre Daech et la coalition internationale.
Et Félix Jousserand dit très bien les horreurs de cette guerre avec bruitages et l’appui de la musique au violoncelle ultra-sonorisée mais il y a une mauvaise balance avec la voix au micro du conteur. Cette marée sonore sans aucune pause, finit par envahir le plateau et c’est dommage…

Philippe du Vignal

Spectacle vu le 6 juillet au Jardin de la Vierge du lycée Saint-Joseph, Avignon.

* Blah ! Anthologie du slam  (2008) et Rhapsodes, anthologie du rap français (2016) comme ses recueils de poésie Basketville et Mauvais Penchant sont éditée au Diable vauvert.

 

Vous avez dit malsain?

Vous avez dit malsain ?

Quelque chose de malsain est en train de se passer.  L’Union de la Gauche, elle, aura gagné le plus grand nombre de sièges :182, soit quarante de plus qu’en 2022 et il y aura treize  divers gauche.  Ensemble, le camp Macron a 168 sièges (contre 250 en 2022). Le Rassemblement National arrive troisième avec 143 élus mais a la plus forte progression du nombre d’élus (+ 54). 

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Le Président de la République refuse la démission de Gabriel Attal, Premier ministre « pour assurer la stabilité du pays ». Autrement dit, l’instabilité proviendrait du résultat de l’élection même, et la démocratie serait le désordre…
Ce qui  remet en cause la Constitution même: le pouvoir pacifique est ordonné par le plus grand nombre. Une élection ne dépend pas d’une reconnaissance mais est un fait, incontestable. Il n’y a rien au-dessus d’une élection. Sinon, on  serait à la limite de la forfaiture. avec ce qu’on pourrait appeler, un « coup d’Etat au ralenti »…

Le déplacement du pouvoir vers l’Assemblée Nationale vidant l’exécutif, provoquerait celui du gouvernement vers une zone a-démocratique; « J’ai perdu le pouvoir, donc je m’accorde arbitrairement un sur-pouvoir »:Emmanuel Macron s’attaque aussi aux députés Renaissance. Centre gauche et Centre droit ont passé un accord de désistement  impliquant un contrat de législature. Mais un décentrement peut-il être non violent?

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©x Un ballet de Merce Cunningham


Vivre est un problème privé et public. L’art peut-il travailler l’espace public et avoir  des perspectives bénéfiques?
En politique, le Centre exprime l’idée d’équilibre qui serait nécessaire à la stabilité de la société.
Mais cette idée se coupe de tout avenir, diminue les activités humaines et met en valeur des concepts dévitalisants.

Les écrivains et les artistes, eux, soulignent pour l’existence de tous, le danger qu’il y aurait à diviser les événements en parties égales et  fixées à un point central et  immobile. L’existence, offerte à tous, est plus grande: Paul Claudel écrivait dans L’Oeil écoute:  » Une composition, c’est toujours un ensemble, une structure en train de se déséquilibrer ».

Le déséquilibre est producteur en art mais aussi dans l’exercice de vivre. Merce Cunningham concevait un espace scénique central, et sans point fixe. Avant les corps, ce sont  des multitudes de points dans cet espace avec un décentrement et un rapide écart qui prend la mort, de vitesse.  Au plus près de la matière vivante, il crée un souffle d’air. L’équilibre peut être dangereux, dans la mesure où il prépare sourdement des impulsions maléfiques.

Bernard Rémy

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