Festival off d’Avignon En une nuit, notes pour un spectacle, d’après Pier Paolo Pasolini , écriture, mise en scène et interprétation : Ferdinand Despy, Simon Hardouin, Justine Lequette et Eva Zingaro Meyer
Festival off d’Avignon
En une nuit, notes pour un spectacle, d’après Pier Paolo Pasolini, écriture, mise en scène et interprétation : Ferdinand Despy, Simon Hardouin, Justine Lequette et Eva Zingaro Meyer
Faire revivre l’œuvre et l’héritage du grand réalisateur est une création qui a eu le prix du jury du Festival Impatience 2023. Dans la nuit du 1 er novembre 1975, Pier Paolo Pasolini a été assassiné sur la plage d’Ostie près de Rome, dans des conditions qui resteront inexpliquées. Cinquante ans plus tard, quatre artistes se retrouvent pour faire un spectacle, de cette disparition et, en même temps, diffuser l’héritage de l’écrivain et réalisateur. Ce constant aller et retour entre son message politique et leur parole à eux, n’est pas toujours simple à percevoir. Et le théâtre dans le théâtre, sans doute une fausse bonne idée pour évoquer une personnalité aussi complexe.
Les écrits de Pasolini paraissent visionnaires, surtout au lendemain d’élections législatives qui ont bouleversé l’équilibre politique de la France: «Une bonne partie de l’antifascisme d’aujourd’hui, ou du moins ce qu’on appelle antifascisme, est soit naïf et stupide, soit pré-textuel et de mauvaise foi. En effet, il combat, ou fait semblant de combattre, un phénomène mort et enterré, archéologique qui ne peut plus faire peur à personne. En sorte un antifascisme de tout confort et de tout repos. Je suis profondément convaincu que le vrai fascisme est ce que les sociologues ont trop gentiment nommé: la société de consommation, définition qui paraît inoffensive et purement indicative. Il n’en est rien. Si l’on observe bien la réalité, et surtout si l’on sait lire dans les objets, le paysage, l’urbanisme et surtout les hommes, on voit que les résultats de cette insouciante société de consommation sont eux-mêmes les résultats d’une dictature, d’un fascisme pur et simple .» Ce phénomène mort et enterré dont il parle, ne le semble pas tant que cela! Et nous subissons aujourd’hui ces deux types de fascisme…
Le spectacle commence dans l’obscurité, par le long et émouvant témoignage en italien, d’une comédienne sur son travail avec Pier Paolo Pasolini. Puis, les artistes nous expliquent comment ils ont procédé sous forme de Notes pour un spectacle. Pour eux, son corps mort plusieurs fois représenté sur scène, est un fil rouge, une métaphore :«Relier son assassinat, et celui des mondes paysan et sous-prolétaire.»
Un discours généreux mais pas certain que les jeunes vivant, eux, dans le numérique, y soient très sensibles ! Ce spectacle vaut surtout par la volonté de transmettre au public un ou plusieurs messages de Pasolini et donne envie d’aller revoir Journal Intime de Nanni Moretti qui évoque avec poésie la mort du réalisateur. Il se balade dans Rome, dansant sur sa Vespa pour rejoindre à la fin, le terrain vague où a été assassiné Pasolini.
Jean Couturier
Jusqu’au 21 juillet, La Scala Provence, 3 rue Pourquery Boisserin, Avignon. T. : 04 65 00 00 90.