Les cérémonies d’ouverture et clôture des Jeux Paralympiques

Les cérémonies d’ouverture et clôture des Jeux Paralympiques


Comme l’a dit Olivia Leray, journaliste à France-Télévision, «Il va falloir la reprendre cette vie dans ce qu’elle a de plus quotidien et d’un peu moins magique…» Quoi que l’on espère du spectacle actuel, les cérémonies des Jeux Olympiques, comme celles des Jeux Paralympiques sont une réussite.

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Les professionnels du théâtre ou de la danse arrivent rarement à atteindre cette communion totale entre un événement éphémère et son public. La plupart des structures et compagnies ne fédèrent pas de tels sentiments, de tels bonheurs, de telles joies surtout sur  une période aussi longue.

 

©x Western du Royal d Luxe

©x Rue de la Chute, une parodie de western par le Royal de Luxe

Dans notre passé de spectateur, un «théâtre élitaire pour tous», comme disait Antoine Vitez, est un phénomène assez rare…  Et un théâtre inscrit dans la cité pourrait bouleverser le quotidien comme les spectacles « de rue » dans les années quatre-vingt avait apporté une vrai bonheur au public.
Comme c’est encore le cas aux festivals de Chalon ou Aurillac où la jauge est souvent doublée… quand l’entrée est libre! Ainsi le Royal de Luxe a-t-il soulevé en France mais aussi dans le monde entier, des passions et une joie que l’on n’imagine pas aujourd’hui, avec des spectacles comme, enter autres, La véritable Histoire de France créé au festival d’Avignon, ou Rue de la Chute…

 

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©x Le Réveillon des boulons

De même, le Théâtre de l’Unité, d’abord avec Le Carnaval des Ténèbres à Saint-Quentin-en-Yvelines, puis chaque fin d’année avec Le Réveillon des boulons à Montbéliard, ou Noce et Banquet. Et plus récemment avec  La Nuit unique, un peu partout en France. Ou encore son remarquable Kapouchnik, un cabaret mensuel à Audincourt (Doubs) qui a fêté son vingtième anniversaire avec plus de cent représentations !
Et cela a changé le quotidien de nombreux habitants de l’hexagone et ailleurs (voir pour tous ces spectacles Le Théâtre du Blog).

Mais il faut aussi continuer à fréquenter les salles pour y découvrir de nouvelles œuvres. Est-ce le paradoxe du plus bel été que l’Hexagone ait jamais connu? C’est le metteur en scène de théâtre Thomas Jolly qui a pensé et organisé ces cérémonies, aidé par de nombreux collaborateurs.
Le fameux Panem et circenses (Du pain et des jeux) du poète Juvenal ( fin du I dr sicèle après J.C.) accablé par la décadence du peuple romain qu’il voyait toujours occupé à s’amuser, a  toujours eu chez nous un sens péjoratif. Mais on peut espérer que ces Jeux paralympiques vont changer notre monde. Deux millions cinq cent mille billets ont été vendus, grâce au formidable fédérateur qu’ont été les Jeux Olympiques.
Le regard du public a-t-il changé sur le handicap? Sur celui visible, peut-être, mais sur celui, invisible? Les institutions sont, toutes et toujours, en retard et un gouvernement, quel qu’il soit, est-il capable de prendre en compte ce vaste problème? Rien n’est moins sûr.

En attendant, le public a découvert que les cérémonies d’ouverture et clôture des Jeux paralympiques avaient une réelle valeur artistique. Place de la Concorde-une des plus belles scènes du monde-Thomas Jolly et le chorégraphe Alexander Ekman (voir Le Théâtre du blog) ont tout fait, pour que, durant cette trop longue cérémonie, ait lieu un métissage entre danseurs valides, et danseurs handicapés.

© J. Couturier

© J. Couturier

À une course-poursuite des artistes en fauteuil roulant autour de l’Obélisque, ont succédé des portés acrobatiques avec des interprètes valides.
Quand tous les athlètes furent arrivés sur la place de la Concorde, Lucky Love, à trente ans enflamma le public avec sa chanson, My Ability, nouvelle version de son  tube Masculinity.
Né sans bras gauche, ce chanteur mais aussi mannequin, égérie des grandes maisons de couture, a joué avec Béatrice Dalle et Joey Starr dans Elephant Man mise en scène de David Bobée (2019). Cette soirée, ouverte par les avions de la patrouille de France, s’est terminée avec la renaissance du feu dans la vasque olympique, au jardin des Tuileries.

 

 © Jean Couturier

© Jean Couturier

La cérémonie de clôture au Stade de France, a eu lieu  sous la pluie incessante qui avait déjà accompagné l’ouverture des Jeux Olympiques! Quelques grands standards de la chanson française interprétés par l’orchestre de la Garde républicaine, ont été repris en chœur par le public.
Puis, devant la vasque des Tuileries qui s’est éteinte doucement, les chanteurs Amadou et Mariam ont entonné Je suis venu te dire que je m’en vais de Serge Gainsbourg.
Et Aurélie Aubert, championne paralympique de boccia, a soufflé sur la petite flamme de sa lampe de mineur (ci-dessous). De grands musiciens ont aussi clôt cette cérémonie.comme  Jean-Michel Jarre et Martin Solveig, sous un feu d’artifice éblouissant.

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©x Aurélie Aubert


Les spectateurs dans le stade de France ou les sept millions sept cent mille autres devant leur écran, auraient souhaité que cette période enchantée, presque irréelle, ne s’arrête pas. Quand nous avons regagné la station de métro Saint-Denis-Porte de Paris, une bénévole nous a indiqué, avec le sourire, la direction : Los Angeles, juillet 2028 …

Jean Couturier


Archive pour 11 septembre, 2024

La Cérémonie d’ouverture des Jeux Olympiques (clap de fin)

La Cérémonie d’ouverture des Jeux Olympiques  (clap de fin du feuilleton)

Nous passons d’un ciel à un autre, de la vasque en suspension, à un lointain point blanc au premier étage de la Tour Eiffel. Un mouvement de caméra assure l’approche:  Céline Dion apparait en longue robe blanche perlée et chante aussitôt. Elle simplifie à l’extrême sa présence, et cela accentue l’émotion. Quelques gestes…  Mais elle chante de tout son corps, modulant ainsi la voix dans les hauteurs et dans l’intime, frôlant parfois le silence. 

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La cérémonie s’est déroulée sur la Seine mais aussi sur  les monuments et les toits de Paris. Elle s’achève, grandiose, avec la voix immense de Céline Dion qui fait vibrer la nuit.  Avec L’Hymne à l’amour, elle lance « le bleu de l’immensité ». Ainsi l’espace musical infini enveloppe l’espace fini du ballon et de la vasque en suspension dans le ciel. L’infini peut se replier dans le fini mais le feu de la vasque est virtuellement infini: il exprime le courage, l’élan, la prise de risque dans la vie, mais aussi l’amour, la passion, l’art à travers la couleur, l’or jaune de la vasque répondant au bleu du ciel.
Et l’Hymne à l’amour lui-même vit de ce battement entre le fini et l’infini : cette  chanson évoque l’histoire d’une femme qui sacrifie tout à son amant et qui se soumet en tout . « Si tu me le demandais. » Elle élève cette soumission à la reconnaissance de l’amour. Son malheur ? Chercher une justification à l’amour. « Le ciel bleu sur nous peut s’effondrer. Et la terre peut bien s’écrouler Peu m’importe si tu m’aimes Je me fous du monde entier. Je renierais ma patrie. Je renierais mes amis  Si tu me le demandais »
Cet amour crée le désert et réduit l’espace  des amants à presque rien. Il y a deux amours: celui qui se définit par ce qu’il n’a plus, un amour sans monde, sans patrie, sans amis, limité à deux pauvres points. Et un  amour  qui s’ouvre à l’infini, d’où la nécessité d’une voix grandiose…

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©x Marguerite Monod

Edith Piaf, la parolière et la compositrice Marguerite Monnot (1903-1961) qui a signé entre autres la musique d’Irma la Douce, et maintenant Céline Dion qui interprète cette chanson…Comment nait cet amour délivré de la soumission, des clichés des sentiments ? Par le filtre de la mort: « Nous aurons pour nous l’éternité, Dans le bleu de l’immensité. » Avec cette phrase splendide, le contenu de la chanson et la voix se réconcilient. Et tous les amants du monde frissonnent. Pourquoi doit-on prouver son amour (et à qui, sinon à soi-même, en devenant son propre juge), par le sacrifice qui noue celui-ci à la violence? « La terre peut  bien s’écrouler. »
J’échangerais  la continuité de mon amour contre la fin du monde ? Mais que devient-il alors sans ce monde ? Pas grand chose. Il révèle un dépendance: désirer être aimé: le contraire de l’amour. Désirer être aimé, c’est à dire: se retirer de la passion, conduit à la bêtise: on voit alors les clichés de l’amour comme un absolu!

Mais la voix puissante ici dément le contenu de la chanson qui s’adresse à ceux qui s’aiment et qui frissonnent à son écoute… Amour devient un paysage fluctuant où habitent un grand nombre. Céline Dion, malade mais courageuse, sait admirablement moduler ces deux amours avec parfois des mouvements abrupts et des abondons mais toujours avec un grande économie de moyens. Elle a changé sa manière de chanter, retenant ses forces, en donnant d’autres. Elle finit en larmes. Emotion et gravité. Le monde est venu à Paris et L’Hymne à l’amour s’adresse à tout le monde.

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©x Edith Piaf et Marcel Cerdan

La compositrice Marguerite Monod se serait inspirée d’un lied de Schumann et cette chanson fait partie de la vie d’Edih Piaf qui a rencontré le boxeur Marcel Cerdan en 48 à New York. Elle crée L’Hymne à l’amour l’année suivante au Versailles, un cabaret new yorkais. Peu de temps après, le 29 octobre 1949, Marcel Cerdan est tué dans un accident d’avion. Après l’avoir appris, Edith Piaf décide pourtant le soir même de chanter cet Hymne à l’amour et le lui dédier. Mais la chanson change de sens et c’est l’amour infini qui l’emporte au prix de la mort. Et chaque soir, grâce à la voix elle rejoint son amoureux « dans le bleu de l’immensité ».

Il existe un autre Hymne à l’amour où un monde et les amants résonnent dans L’Amoureuse en secret qu’écrivit René Char en 1947 donc juste à la même époque: « Elle a mis le couvert et mené à la perfection ce à quoi son amour assis en face d’elle parlera bas tout à l’heure; en la dévisageant. Cette nourriture semblable à l’anche d’un hautbois. Sous la table, ses chevilles nues caressent la chaleur du bien-aimé, tandis que des voix qu’elle n’entend pas, la complimentent; Le rayon de la lampe emmêle, tisse sa distraction sensuelle.Un lit très loin, sait-elle, patiente, tremble dans l’exil des draps odorants, comme un lac de montagne qui ne sera jamais abandonné. »

 

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Athlètes de tous les pays, danseurs, ingénieurs, musiciens, entre autres ceux de la Garde républicaine, chanteurs, policiers, pilotes  de bateaux-mouche, inventeur de la vasque et de la flamme, menuisiers, charpentiers, couturières, bénévoles, cameramen, commentateurs de télévision, danseurs, ouvriers sur le chantier de Notre-Dame, stylistes, jeunes créateurs et créatrices de mode, acrobates,réparateurs de prothèse, leaders d’ambiance, inventeurs de lumières, peintre; informaticiens, fabricants de décor, photographes, médecins et infirmières, vérificateurs de pont, militaires, électriciens, ingénieurs du son, pompiers, pilotes d’hélicoptère…
Hommage à eux  à Thomas Jolly, le metteur en scène de la Cérémonie et à toutes ses équipes. »Voilà la France moderne qui s’avance avec ses alliés substantiels » écrivait aussi René Char.

Bernard Rémy
Remerciements au service de presse des Jeux Olympiques et Paralympiques. Et à Marie-Domitille du Murgat, Artea Etcheverry-Demaubert et Anne-Sophie de la Roquette-Basse, pour leur aide efficace et la recherche de photos.

 

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