Les Grooms ont fêté leurs quarante ans…

Les Grooms ont fêté leurs quarante ans…

Le soleil va s’éteindre dans cinq milliards d’années mais on dit  que la vie s’arrêtera sur terre dans trois milliards d’années. Je suis un tantinet obsédé par « la fin qui grouille et qui s’amène avec sa gueule moche  et qui m’ouvre ses bras de grenouille bancroche», comme disait Boris Vian. Que restera t-il du Théâtre de l’Unité, après notre disparition annoncée… sans date précise? Je me réjouis que Catherine Fornal remonte à Besançon, nos Brigades d’Intervention Théâtrale avec une jeune génération.

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Nous étions conviés le 5 octobre au château de Buno, à Géronville-sur-Essonne. Mais Hervée  de Lafond, ma codirectrice du Théâtre de l’Unité n’était pas trop gaillarde pour y aller… Les Grooms, avec, comme noyau de base, Antoine Rosset, Bruno Travert, Christophe Rappoport, Diego Asuncio, Serge Serafini, Jacques Auffray, et, au chant: Sevan Manoukian, Maryseult Wizoreck… y fêtaient leur quarantième anniversaire! J’ai enfourché le RER D, changé à Corbeil et découvert sur une petite île, un château du style : Belle au bois dormant.. Cette fanfare née à Elancourt (Yvelines) quand le Théâtre de l’Unité y résidait en 84, est un peu notre bébé.
Rien ne présageait une telle longévité! Hervée de Lafond au saxo, ne savait rien du solfège et moi, à la trompette et au tuba… étais assez médiocre. Alors, je m’étais dit qu’il fallait compenser les faiblesses du groupe par de l’étonnement théâtral. Nous jouions couchés, ou perchés sur des monuments ; nous avions de petits feux d’artifice désuets, et puis aimions faire des aubades à une seule personne que nous entourions de tendresse musicale…

L’hôtel Concorde qui renouvelait ses costumes de grooms, nous en avait offert une quinzaine : ainsi cette fanfare fut-elle baptisée. Lors d’inaugurations, nous avions expérimenté le « tapis rouge vivant » sur lequel les personnalités devaient marcher. Un des grands moments fondateurs fut le voyage Paris-Pékin par le transsibérien, en 1985… Une aventure incroyable en onze jours de train : nous jouions à toutes les gares dont Moscou, Tcheliabinsk, Perm… et à Pékin, place Tien an Men. Le Théâtre de l’Unité a monté avec les Grooms, La Flûte enchantée de Mozart, devenue La Flûte en chantier, puis La Tétralogie de Richard Wagner adaptée en une heure trente…  Ensuite les Grooms, devenus indépendants, ont fait d’énormes progrès en musique sous la férule de l’excellent Antoine Rosset et ont joué dans trente-neuf pays…

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Donc, ce soir-là, ils racontaient leur histoire avec anecdotes et témoignages, entre autres, ceux des membres de Musique Pluriel à Chalon-sur-Saône qui intervenaient cachés dans le public, et de leurs nombreux amis. Les musiciens illustraient le tout avec une facilité déconcertante, toujours par cœur et toujours avec une complicité engendrant une exceptionnelle fluidité… Les Grooms habitent intensément leur musique sans aucune sonorisation et on se demande parfois comment on arrive à entendre aussi bien les parties vocales. Ils ont aussi offert un bel hommage à une autre fanfare, La Belle Image.
On m’a sans cesse demandé: tu es tout de même ému et/ou fier ? A vrai dire, c’est comme les enfants : ils ont tellement grandi, que je les reconnais à peine. Les Grooms ont gardé quelques ingrédients que nous leur avions inculqués et nous leur avons fait prendre un virage capital : comment passer de la fanfare tout terrain, à l’opéra, devenu leur spécialité. Ensuite, ils inventèrent ces «baronnades» incroyables, où l’on se fait toujours avoir, avec, aux fenêtres d’immeubles, leurs chanteurs… en vêtement de plombier, marchande de légumes, poissonnier… ( voir Le Théâtre du Blog)
Mais il ont aussi créé avec d’autres metteurs en scène Le Roi Arthur d’Henry Purcell, Le Bonheur est dans le chant,  Dom Qui… Oui, bien sûr, Les Grooms sont un prolongement du Théâtre de l’Unité. Pendant quinze ans encore, ils vont prospérer, quand nous n’y serons plus : ce sera un supplément de vie….

Jacques Livchine, co-directeur avec Hervée de Lafond, du Théâtre de l’Unité.

 

 

 


Archive pour 17 octobre, 2024

Peau d’âne-La fête est finie de Marie Dilasser, conception et mise en scène d’Hélène Soulié, (tout public à partir de dix ans)

Peau d’âne-La fête est finie de Marie Dilasser, conception et mise en scène d’Hélène Soulié,  (tout public à partir de dix ans)

 Le célèbre conte de Charles Perrault fait peau neuve avec ce texte de Marie Dilasser dans une mise en scène, en forme de procès fait aux pères abusifs. Nous avions découvert Hélène Soulié avec MADAM, une trilogie au féminin entre fiction et documentaire. Membre active du mouvement H./F. en région Occitanie prônant l’égalité professionnelle dans les arts et la Culture (voir Le Théâtre du Blog), elle poursuit son engagement militant avec une version actuelle de ce conte.

Dans l’intérieur froid et propret d’une famille actuelle «normale» : le père, la mère et leur petite fille. Lui, perruque blanche, bon chic bon genre, est éditeur. Son épouse, femme au foyer tirée à quatre épingles comme sa maison, confectionne des cakes d’amour en fredonnant la recette chantée par Catherine Deneuve dans Peau d’âne, le film de Jacques Demy.  Leur enfant ne se fie qu’à la voisine chez qui elle va soigner les animaux, et à Bergamotte, son inséparable âne en peluche…
Quand la mère déserte le foyer (sans raison apparente), le père reporte ses désirs sur sa fille, «joue à la sieste » avec elle, la pare de vêtements féminins, la retient prisonnière
et invite son ami, l’auteur libidineux du Roi porc, à reluquer sa jeune proie. C’est l’ogre dévorateur, le loup des contes de fée.

© Marc Ginot

© Marc Ginot

La petite n’en dort plus, s’affaiblit mais ne dit rien. Elle arrive pourtant à s’enfuir à la recherche sa mère. La pièce bascule alors dans le féérique. La petite roule en auto tamponneuse avec l’âne doudou, devenu Francis, une créature hybride et transgenre, figure de la fée providentielle. Dans la forêt, ici réduite à maigre bosquet, ils rencontrent la Belle au bois dormant (Laury Hardel), qui milite pour sauver les arbres… Elle se joint à eux et le trio poursuit joyeusement sa route. La petite fille, libérée de sa peur et de sa culpabilité, trouve auprès de ses amis , les mots pour dénoncer son père prédateur. La mère sera retrouvée et tout est bien qui finit bien par un procès où les choses seront dites, l’inceste reconnu et le père condamné…

A la lumière de #metoo-inceste, Marie Dilasser et Hélène Soulié , tout en respectant la structure de Peau d’âne, vilipendent aussi le contenu de nos fictions séculaires ! Les frères Grimm, Charles Perrault mais aussi Jacques Demy en prennent ici pour leur grade. Et plus généralement, le patriarcat. L’esthétique glaçante de la première partie (scénographie d’Emmanuelle Debeusscher et Hélène Soulié) nous laisse un peu à la porte, malgré les accessoires et les meubles apparaissant et disparaissant, comme par enchantement.  Le jeu distancié des six interprètes-tous excellents-rompt heureusement avec le réalisme du quotidien familial et apporte une inquiétante étrangeté à l’histoire.

La deuxième partie, elle, séduit par son onirisme farfelu : tous les coups sont permis pour dénoncer le sort des petites filles maltraitées, sauvées par les fées et des princes charmants, le destin des reines qui meurent en abandonnant leurs filles à des marâtres, la pléthore de figures masculines monstrueuses qui peuplent les contes d’antan.  Les autrices proposent ici des contre-modèles amusants où hybrides, trans, princesses racisées… sont les personnages d’un nouveau monde non-patriarcal.
Mais le charme de cette fable moderne «trouée de réel», est rompu par une volonté d’être trop explicite.
Peau d’Âne-La fête est finie donne la parole aux victimes et il est important de nommer un chat, un chat. Mais pourquoi le faire avec tant d’insistance ? Un tel didactisme était-il nécessaire quand, à cette matinée scolaire, les enfants réagissaient au quart de tour sans besoin de commentaire devant les épreuves subies par l’héroïne?

 Mireille Davidovici

 Jusqu’au 22 octobre, Théâtre Public de Montreuil, 10 place Jean Jaurès, Montreuil (Seine-Saint-Denis). T. :01 48 70 48 90.

Du 22 au 25 janvier MC 93, Bobigny (Seine-Saint-Denis).

Du 26 et 27 mars, Théâtre de Lorient (Morbihan). Du 10 au 16 mars, Théâtre Nouvelle Génération, Lyon (IX ème).

 

 

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