Didon et Énée, chorégraphie de Bianca Li, musique d’Henry Purcell

Didon et Énée, chorégraphie de Bianca Li, musique d’Henry Purcell

 Pour en faire un ballet, Bianca Li a enregistré cet opéra créé par William Christie et son ensemble baroque Les Arts florissants, dont elle réalisa la chorégraphie. Ecrit par Henry Purcell en 1689, sur un livret du poète irlandais Nahum Tate et tiré de L’Énéide de Virgile cet opéra en trois actes raconte les amours maudites d’Énée, fuyant Troie après la guerre, et de Didon, reine de Carthage. La jeune veuve recueille le héros naufragé après une tempête mais leur idylle n’aura qu’un temps. Après un violent orage, mystifié par des sorcières et des esprits maléfiques, Énée reprendra la mer. Leurs adieux sont déchirants et la reine meurt de chagrin.

© Laurent Philipe

© Laurent Philipe

La chorégraphe, fidèle à la musique, se démarque du narratif de l’opéra : «Ce ballet, dit-elle, raconte moins l’histoire de Didon et Énée, que leurs émotions et la part d’indicible à chaque étape de leur amour. » Pour traduire les ressentis des personnages, elle invente un langage corporel fondé sur des mouvements partant du diaphragme. Les dix interprètes, traversés par le va-et-vient du souffle, se déploient amplement, corps souples et ondoyants comme les vagues.
C’est dans l’eau, répandue sur le plateau par eux, que se déroule le spectacle. Sur le sol mouillé, ils évoluent avec une incroyable légèreté, tantôt comme planant, tantôt se livrant à de réjouissantes glissades, se traînant avec force éclaboussures et simulant la nage ou le geste des rameurs. Il leur a fallu apprendre à freiner, sauter, ramper, virevolter, s’agripper, s’élancer sans craindre la chute… Un exploit pour Alizée Duvernois, Victor Virnot, Julien Marie-Anne, Meggie Isabet, Maeva Lassere, Coline Fayolle, Gaël Rougegrez, Martina Consoli, Gaetan Vermeulen et Quentin Picot. Chacun apporte son style à la pièce : du contemporain « classique », au hip hop et figures de salsa. Mais l’élégante finesse de la gestuelle n’enlève rien à la puissance de la danse, calquée sur la musique, les arias et les chœurs de l’opéra.

Bianca Li ne cherche pas à illustrer les épisodes de Didon et Enée mais plutôt à en traduire les climats grâce à des variations de lumière sur une grande toile tendue en fond de scène. Les costumes de Boris Pijetlovic soulignent les différentes ambiances : longues robes romantiques, courtes jupes ou maillots de bain…

Aux batifolages amoureux, successions de duos accompagnés de scènes chorales, succèdent de frénétiques solos, mouvements d’ensemble où s’insinue une sourde menace: les femmes agitent sauvagement leur chevelure, les lumières s’assombrissent… Le noir des costumes, du sol et de la toile de fond paraît manger les corps, de plus en plus dénudés. Et après un ultime duo, l’aria poignante de Didon est suivie par un Énée inconsolable qui s’en va… Danse, musique, scénographie : tout concourt à un Didon et Énée mémorable où l‘on reconnaît la rigueur et l’inventivité de Blanca Li
Formée à New York auprès de Martha Graham et d’Alvin Ailey, la chorégraphe espagnole s’est installée en France en 92. Elle dirige une des rares compagnies indépendantes. Aujourd’hui, elle crée ses nouvelles pièces dans ses studios à Romainville (Seine-Saint-Denis) et elle mène des recherches en réalité virtuelle et nouvelles technologies. Bianca Li a été nommée cette année, présidente de la Villette et dans la continuité des activités culturelles de ce Parc, aimerait y créer un festival de théâtre en plein air et «y organiser beaucoup de fêtes».

 Mireille Davidovici

Spectacle joué du 17 au 31 octobre à la grande halle de la Villette, Espace Chapiteaux, Paris (XIX ème).  T. : 01 40 03 75 75

Du 31 décembre au 2 janvier, Théâtre de Liège (Belgique).

Du 4 au 5 janvier, KVS Bruxelles (Belgique). Du 9 au 10 janvier, MC2,Grenoble (Isère).

Le 13 février Le Cube, Garges-lès-Gonesses (Val-d’Oise) 

Le 19 mars, Théâtre Alexandre Dumas, Saint-Germain en Laye (Yvelines).

 * La musique du spectacle des Arts Florissants -William Christie pour Didon et Enée et Celestial Music Did The Gods Inspire, Z322, a été enregistrée au Gran Teatre del liceu à Barcelone (Espagne).

 

 

 

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