Les Sœurs Hilton, texte de Valérie Lesort, mise en scène de Christian Hecq et Valérie Lesort
Les Sœurs Hilton, texte de Valérie Lesort, mise en scène de Christian Hecq et Valérie Lesort
Vint-mille lieues sous les mers ( 2016) La Mouche, Le Voyage de Gulliver … des spectacles devenus culte à la fois par leur poésie, le jeu des acteurs, la scénographie, le texte à partir de Jules Verne, George Langelaan, Jonathan Swift… autant de merveilleux spectacles imaginés avec intelligence et sensibilité par ce couple d’artistes (voir Le Théâtre du Blog).
Valérie Lesort a écrit cette suite de courtes scènes en s’inspirant de l’histoire de Daisy et Violet , ces sœurs siamoises nées en 1908 mais attachées par quelques vertèbres soudées en bas de leur colonne vertébrale. Vite abandonnées par leur mère qui considérait cette naissance comme un châtiment divin! Les chirurgiens, à cause du trop grand risque de faire mourir l’une des deux, voire les deux, ont jugé préférable de de ne pas les séparer. Mary Hilton, la sage-femme qui les avait fait naître les adopta, non par charité mais pour, moyennant finance, les exhiber dans leur pays, en Allemagne, en Australie, aux États-Unis.
On leur avait aussi fait prendre des cours de chant et danse et elles seront quelques années de véritables vedettes du music-hall. Puis après la mort de madame Hilton, un producteur Meyer Meyers les fit jouer dans des cirques aux Etats-Unis mais aussi à Broadway et dans le célèbre film Freaks. Puis la roue tourna mais cette fois-ci dans l’autre sens et elles survirent, en étant caissières dans une petite épicerie avant de quitter cette vallée de larmes en 69…
Une histoire émouvante… que Valérie Lesort n’a a pas réussi à traiter correctement. Les petites scènes défilent les unes après les autres sur une piste de cirque inspirée sans doute par celle de Freaks. Ici, tout est en rouges assez laids et manque d’harmonie, du décor au costume de Christian Hecq et Iann Frisch. Nous allons assister pendant deux heures-l’éternité c’est long surtout vers la fin- à la naissance de Daisy et Violet, à de petites anecdotes de leur vie comme les flatulences de l’une, suite aux oignons que l’autre aurait mangés, même si elles avaient chacune un système digestif. Vous avez dit : passionnant?
Elles sont jouées par Valérie Lesort et Céline Milliat-Baumgartner qui n’arrivent jamais à imposer ce double personnage…On voit entre autres l’une faire l’amour derrière un rideau, pendant que l’autre sans arrêt bousculée par les ébat de sa sœur, lit un magazine. Ouaf ! Ouaf ! Ouaf ! Et enfin le spectacle se termine plutôt qu’il ne finit, par le décès de l’une… auquel assiste l’autre.!Mais rien ici qui permette une seule minute, de nous intéresser à la vie et de Daisy et Violet. Tous aux abris ! Aucune énergie véritable, aucune poésie… Et cela, malgré une réalisation technique au cordeau.
Côté jeu Christian Hecq joue, entre autres, le rôle principal de la méchante sage-femme mais en fait des tonnes, ce qui est vite insupportable. L’excellent magicien Yann Frisch (voir Le Théâtre du Blog) dont on se demande ce qu’il fait là, n’a pas vraiment de personnage et fait quelques tours, comme celui de la corde coupée, avec la participation d’une spectatrice… Au, moins, à ces moments-là, on ne s’ennuie pas… Ici, tout se passe comme si Christian Hecq et Valérie Lesort essayaient de de remplir le temps. Mais rien à faire, l’éternité, c’est long surtout vers la fin… et même au début.
Que sauver de ce désastre? Quelques belles images, comme ce grand hublot hérité de Vingt mille lieux sous les mers, les tours de Yann Frisch et un merveilleux prologue, quand leur fidèle petit chien vient dire au tout début quelques mots au micro. Reste à comprendre comment on en est arrivé là. Un cas d’école intéressant pour les élèves-acteurs et/ou metteurs en scène…
D’abord et surtout, une fausse bonne idée que cette adaptation des soixante ans de la vie de Daisy et Violet qui n’a pas dû être si passionnante que cela… Si on ajoute un manque criant de dramaturgie, un dialogue très médiocre et sans aucun rythme, une auto-direction d’acteurs inexistante, une scénographie peu adaptée, cela offre quelques pistes… Christian Hecq et Valérie Lesort se sont plantés. Dommage pour le public et la Comédie-Française: quelqu’un de cette grande Maison a-t-il lu le texte de ce projet?
Amis de province et de Belgique, vous aurez compris que vous pourrez vous épargner cet ennuyeux spectacle qui a été mollement applaudi…
Philippe du Vignal
Jusqu’au 3 novembre, Comédie-Française, Théâtre du Vieux Colombier, 21 rue du Vieux-Colombier, Paris (VI ème).
Théâtre de Namur (Belgique), du 6 au 8 novembre.
Théâtre Edwige Feuillère-Scène conventionnée de Vesoul (Haute-Saône), les 19 et 20 novembre. Saint-Michel-sur-Orge (Essonne) les 23 et 24 novembre. Le Bateau-Feu, Scène nationale de Dunkerque (Nord), les 28 et 29 novembre.
Centre national de Création Orléans (Loiret), du 6 au 14 décembre.
Le Volcan-Scène nationale du Havre (Seine-Maritime) du 8 au 10 janvier. Le Grand R- Scène nationale de La Roche-sur-Yon (Charente-Maritime), les 13 et 14 janvier. Théâtre Auditorium de Poitiers-Scène nationale (Vienne), les 17 et 18 janvier. Les Salins-Scène nationale de Martigues ( Bouches-du-Rhône), les 31 janvier et 1er février.
Malraux-Scène nationale Chambéry-Savoie, les 11 et 12 février.