Notre Comédie humaine par le Nouveau Théâtre Populaire (suite): Splendeurs et Misères, adaptation et mise en scène de Lazare Herson-Macarel
Notre Comédie humaine par le Nouveau Théâtre Populaire (suite) : Splendeurs et Misères, adaptation et mise en scène de Lazare Herson-Macarel
Ce troisième volet commence par la fin d’Illusions perdues. Chez Honoré de Balzac, Lucien, après des manœuvres frauduleuses, est incapable de payer une dette et accablé de remords, veut se suicider en se noyant. Quand il rencontre Carlos Herrera, un soi-disant prêtre espagnol qui va le convaincre d’y renoncer. Il lui offre même beaucoup d’argent, une vie luxueuse et une vengeance possible mais il doit, pacte faustien, lui obéir aveuglément. Lucien accepte et envoie à David et Ève (des personnages du tome précédent) la somme nécessaire à l’apurement des dettes et s’en va à Paris avec le prêtre.
Dans l’adaptation de ce roman, Lucien va vite tomber amoureux d’Esther, une très belle prostituée rencontrée à un bal masqué. Carlos Herrera qui cherche à tout prix, de l’argent pour Lucien, va la persuader, d’être la maîtresse du richissime baron de Nucingen et de lui en soutirer le maximum. Dans un Paris autour du Louvre décrit par le grand romancier comme sale, et infecté de prostitution (ce qui était exact) les sbires de Carlos Herrera et ceux de Nucingen vont se bagarrer pour s’emparer du trésor.
Esther a accepté de faire l’amour avec le baron mais Lucien veut se marier avec une jeune fille dont la famille provinciale est riche. Et quand Esther apprend que l’homme avec qui elle vit depuis des années, va donc la quitter, elle n’hésitera pas à s’empoisonner. Lucien de Rubempré et Carlos Herrera, accusés de vol et assassinat, seront arrêtés. Lucien se pendra aux barreaux de sa cellule mais son complice réussira à s’enfuir.
Qui dit adaptation dit réduction, comme l’avait fait Pauline Payle dans son remarquable spectacle Illusions perdues que nous avions vu à sa création il y a quatre ans (voir Le Théâtre du Blog) et qui n’a cessé d’être joué. Lazare Herson-Macarel, lui, a choisi de mettre en scène les seuls protagonistes de cette histoire compliquée aux très nombreux personnages secondaires, voire anecdotiques où Honoré de Balzac sait dire le Paris d’alors avec une fascination pour le sexe, le pouvoir et le fric.
Ici, un plateau avec des gradins en bois, faiblement éclairés par des projecteurs latéraux ( un stéréotype des mis en scène actuelles. Lazare Herson-Macarel comme dans son beau Cyrano que nous avions vu il y a une dizaine d’années, privilégie ici les images. Entre autres, une quinzaine de personnages inquiétants descendent les gradins face public dans la pénombre. Déjà vu, mais cela marche… Ou quand Esther Gobseck (très crédible Kenza Laala) et Lucien de Rubempré (Valentin Boraud) s’embrassent érotiquement à plusieurs reprises. Ou encore le moment où Lucien rencontre Carlos Herrera (Philippe Canales) et celui où le baron de Nucingen (remarquable Clovis Fouin) se fait déposer chez lui Esther par ses sbires qui l’ont retrouvée dans Paris. Tous ces acteurs sont justes et vrais.
Mais comment ne pas être partagé? Là où cela va nettement moins bien : les récits dits les acteurs pour situer l’action dans le hall avant le spectacle mais noyés dans la musique et donc inaudibles, la suite de courtes scènes aux dialogues trop brefs et sans rythme, la pénombre en permanence (pour dire les rues très mal éclairées au XIXème siècle?), le noir du décor et des costumes (pour signifier le tragique?) sauf à la fin, le vert cru de la robe longue d’Esther, les cavalcades et inutiles petites danses de groupe…
Et le metteur en scène aurait pu aussi nous épargner ces clichés comme le recours systématique aux fumigènes, les sons de batterie électronique pour rythmer l’action ( en vain), les nombreuses trappes où disparaissent les protagonistes et, à la fin, une vidéo en fond de scène,où Lucien se maquille le visage en blanc…. Lazare Herson-Macarel sait diriger les acteurs de ce collectif installé dans le Maine-et Loire; malheureusement, ici tout est un peu terne et, malgré quelques répliques cinglantes, cette mise en scène de l’ascension de Lucien dans la haute société puis sa descente aux enfers, n’est guère convaincante et les spectateurs-sans aucune jeune ou presque-ont applaudi mollement.
Philippe du Vignal
Du 2 au 24 novembre, le vendredi. Les Belles Illusions de la jeunesse (opérette), le mercredi, et Illusions perdues le jeudi (intégrales les samedi et dimanche). Théâtre de la Tempête, Cartoucherie de Vincennes, route du Champ de manœuvre. Métro : Château de Vincennes + navette gratuite. T. : 01 43 28 36 36.
Du 11 au 14 décembre, Le Quai, Angers (Maine-et-Loire).
Du 29 janvier au 1er février, Théâtre de Caen (Calvados).
Du 5 au 8 février, La Commune-Centre Dramatique national d’Aubervilliers (Seine-Saint-Denis). Le Ciel, la nuit et la fête: Le Tartuffe /Dom Juan /Psyché, du 15 au 18 janvier, Le Trident- Scène Nationale de Cherbourg (Cotentin) et du 22 au 25 janvier, Théâtre de Caen (Calvados).