Le Beau Temps ou Chroniques ostréicoles, texte et mise en scène de Cécile Feuillet


Le Beau Temps ou  Chroniques ostréicoles, conception et mise en scène de Cécile Feuillet

Cette comédienne et metteuse en scène a participé au Théâtre Olympia, Centre Dramatique National de Tours, à la création de Grammaire des mammifères de William Pellier, mise en scène de Jacques Vincey et, il y a deux ans, elle réalise son premier spectacle Et puisque départir nous fault, (voir Le Théâtre du Blog) pour ces deux  pièces.
Celle-ci, sur une thématique ostréicole a été créée au Théâtre Romain Rolland-Scène Conventionnée de Villejuif et réunit Logann Antuofermo, Émilie Baba, Jade Labeste, Charlie Nelson (en père âgé très étonnant), Alice Rahimi et Mathilde Weil. Cela se passe au bord de la mer. Les ostréiculteurs y font un travail dur, usant, en répétant les mêmes gestes: il faut quatre ans pour faire grossir ce délice.
Les naissains placés dans des poches de grillage sur des cadres sont élevés dans des parcs. Un monde ici évoqué par une grande bâche inondée (remarquable scénographie non illustrative mais suffisamment évocatrice de Diane Mottis et Julien Puginier où il y a des kgs d’huîtres (enfin de coquilles…) et dans l’eau, marchent en bottes ces femmes et ces hommes en ciré jaune et bonnet qui travaillent lentement dans la pénombre et la brume. Peu de paroles, juste ce qu’il faut pour se comprendre. Il y a une femme qu’on nomme La Sourdine qui, elle, parle beaucoup plus que les autres.

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Cécile Feuillet sait diriger ses acteurs et sans doute  inspirée par tout un théâtre surtout visuel entre autres par celui de l’immense Polonais Tadeusz Kantor (1915-1990) et par Bob Wilson, fabrique des scènes d’une impressionnante beauté avec la complicité de Claire Eloy, sa créatrice lumière et de Marion Cros, sa créatrice-son. Comme ces quatre personnages au visage très curieux nez, assis sur un banc et qui regardent en silence le public. Une image assez étonnante….

La mise en scène, très picturale (inspirée d’artistes comme entre autres, James Ensor, Vincent Van Gogh) est d’une extrême précision. Il y a parfois des visages reproduits sur un écran rond placé en hauteur, (comme les fameux tondos de la Renaissance italienne)  et une formidable petite scène surréaliste où trois huîtres dialoguent sur une planche en ouvrant leur coquille comme une bouche humaine.

Mais l’ensemble peine à convaincre: texte manquant d’unité et allant un peu dans tous les sens, rythme trop lent, longueurs, abus de la pénombre… Et la metteuse en scène a du mal à boucler ce spectacle qui se termine… sans vraiment finir. Cela fait quand même beaucoup trop d’erreurs. Et on s’ennuie un peu.

Créé sur une plus petite scène, il va ici sans doute se bonifier et monter en puissance quand les acteurs auront mieux pris leurs marques mais ce Beau Temps ou  Chroniques ostréicoles, malgré de réelles qualités, est décevant. Cela dit, Cécile Feuillet a toutes les capacités pour créer un autre opus. Donc à suivre…

Philippe du Vignal

Jusqu’au 28 novembre, Théâtre de la Cité internationale, 17  boulevard Jourdan, Paris (XIV ème). T. : 01 85 53 53 85.

 


Archive pour 19 novembre, 2024

Ballet de Lorraine-C.C.N. Saison 2024-25 : programme 2

 Ballet de Lorraine-C.C.N. Saison 2024-25 : programme 2

 

© Mireille Davidovici

© Mireille Davidovici

Avant de confier les rênes du Centre chorégraphique national de Lorraine à Maud Le Pladec, Petter Jacobsson et Thomas Caley présentent, en ce début de saison, leurs deux derniers programmes. En 2011, ce tandem de chorégraphes prenait la suite de Didier Deschamps, aujourd’hui directeur artistique du Festival de Danse de Cannes. Pendant leur mandat, ils ont créé ensemble Untitled Partner #3, Performing Performing, Relâche, Armide, Discofoot, L’Envers, Record of ancient Things, Happening Birthday, For four Walls, Air-Condition, Mesdames & Messieurs et, dernièrement, Instantly forever (Voir Le Théâtre du blog).

En invitant des artistes de tous horizons, ils ont parié sur une programmation diversifiée et résolument contemporaine. « Ils nous ont appris à apprécier la danse contemporaine sans nous ennuyer. Ils nous ont ouvert les yeux sur des formes nouvelles», confie l’une des fidèles spectatrices venue leur faire ses adieux.

Au menu, trois courtes pièces, dont une recréation d’un ballet de Merce Cunningham dans lequel Thomas Caley avait dansé, et la reprise de deux titres du programme Pas assez suédois (2022) un hommage au Ballet Suédois de Rolf de Maré et Jean Börlin, qui de 1920 à 1925 défraya la chronique parisienne au Théâtre des Champs Elysée (Voir Le Théâtre du blog).

CRWDSPCR Chorégraphie de Merce Cunnigham, remontée par Thomas Caley et Jeannie Steele

Treize artistes sont en piste pour vingt-sept minutes et dansent sans discontinuer sur une musique composée par John King : Blues ’99. Une suite de sons électroniques joués glissando sur une guitare. Électrons libres évoluant dans des mouvements d’ensemble géométriques, ils se distinguent les uns des autres, par les couleurs des carreaux de leurs combinaisons académiques, divisant leurs corps en quatorze sections (création de Mark Lancaster).

© Ronan Muller

© Ronan Muller


CRWDSPCR,
condensé de Crowdspacer, est, en1993, la première pièce de Merce Cunningham conçue à l’aide du logiciel LifeForms, qui produit des mouvements aléatoires, transposés ensuite au plateau.
D’où le titre, signifiant que «la technologie informatique change notre langage, en condensant les mots».
Cette œuvre étrange marque un tournant dans l’œuvre de Merce Cunningham (1919 -2009), auteur de plus de cent cinquante chorégraphies.


L’esprit glisse sur ces corps disparates, passant sporadiquement de mouvements de groupe à des duos, trios, quintettes, se croisant, s’effleurant à peine, à l’exception de quelques rares portés. « Tout ce qui est vu trouve sa signification à l’instant même. Le sujet de la danse, c’est la danse elle-même. », disait le maître américain, précurseur dans l’utilisation des nouvelles technologies dans l’art. Par ses agencements mathématiques qui effacent toute narration ou affect en laissant le mouvement parler de lui-même, cette pièce brillamment prise en charge par le Ballet nous ramène aux origines de la danse dite « contemporaine ».

Fugitives Archives, chorégraphie de Latifa Laâbissi

Huit danseuses et danseurs, en costume à damiers, jouent avec leurs ombres et les réminiscences du Marchand d’oiseau, chorégraphié en 1923 par Jean Börlin sur un livret d’Hélène Perdriat et une musique de Germaine Tailleferre. En plongeant dans les archives, Latifa Laâbissi et sa scénographe et costumière Nadia Lauro ont été séduites par les ombres étranges découpées sur le décor et les petits personnages à la périphérie de l’argument du ballet : des écolières turbulentes en costume à carreaux. «C’est une rencontre entre une image d’archives et mon inconscient, dit la chorégraphe, l’idée est de se plonger dans ces années vingt: leur liberté, nous ont autorisées cette impertinence.»

© Laurent Philippe

© Laurent Philippe

En arrière-plan, un rideau de papier blanc plissé sur lequel se découpent la silhouette noire d’une sorcière griffue et des branches dénudées. Les interprètes, masques blancs et robes déployées en larges corolles, évoluent dans des postures incongrues, courbées ou tordues. Tels des insectes, ils s’éloignent en petits piétinements sonores, reviennent au pas de l’oie ou s’installent dans des positions indécentes, avec force grimaces. La construction aléatoire de Fugitives Archives où dominent le noir et blanc et quelques carrés rouges, est ponctuée par des bribes musicales élaborées par Manuel Coursin.
Une pièce-mémoire de vingt-cinq minutes d’une beauté formelle dans la lignée de Pourvu qu’on ait l’ivresse (2016) la dernière création de Latifa Laâbissi, avec des paysages imaginaires où se côtoient le beau et le grotesque. On retrouve aussi le dépouillement du butô japonais avec des mouvements de mains et bras d’une extrême précision. Une performance des interprètes…

 Mesdames et Messieurs, chorégraphie de Petter Jacobsson et Thomas Caley

 En vingt minutes, treize interprètes se lancent en groupes ou en solos dans une série de numéros clownesques, inspirés de l’univers du cinéma muet de Charlie Chaplin, Buster Keaton. La joyeuse bande émerge d’un amas de plaques en plexiglass, rappelant les pellicules d’antan. Les chorégraphes convoquent des personnages d’époque en costumes hétéroclites, comme sortis des malles de cabarets ou cafés-concerts, pour un grand carnaval grotesque multicolore dans l’esprit du  Cinésketch de Francis Picabia (1924).

© Laurent Philippe

© Laurent Philippe

Il y a le comique troupier, le travelo, la danseuse à frou-frou et d’autres figures fantasques dansant sur des chansons en vogue. «Le shimmy, je veux danser le shimmy », clame Mistinguett, au son aigrelet d’un phonographe hors-d’âge. « Nous avons travaillé sur une “ playlist “ d’airs populaires de l’époque », dit Petter Jacobsson.  Et cette revue festive se construit sur ces morceaux ressurgis du passé. Sur un rythme accéléré rappelant les vingt-quatre images par seconde des films muets, les danseurs, pour la plupart masculins, transcendent les genres, dans les costumes extravagants de Birgit Neppl et sur un fond vert pour incrustations d’un studio de cinéma ou télévision. Un clin d’oeil à notre modernité…

 Mireille Davidovici

 Vu le 10 novembre à l’Opéra de Nancy CCN – Ballet de Lorraine, 3 rue Henri Bazin Nancy (Meurte-et-Moselle). T. 03 83 85 69 08

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