Clément Hervieu-Léger, nommé administrateur général de de la Comédie-Française
Clément Hervieu-Léger, nommé administrateur général de de la Comédie-Française
Sur proposition de Rachida Dati, ministre de la Culture, le Président de la République a nommé à la tête du premier théâtre officiel français, un de ses acteurs et metteurs en scène. En août prochain, il prendra ses fonctions pour un mandat renouvelable de cinq ans, à l’issue du troisième et dernier d’Eric Ruf. Formé au Conservatoire du Xème arrondissement de Paris, il est entré à la Comédie-Française en 2005 et en est devenu sociétaire en 2018. Il est régulièrement membre du comité d’administration.
Clément Hervieu-Léger a joué de très nombreux rôles: entre autres Robespierre dans La Mort de Danton de Georg Büchner, mise en scène de Simon Delétang. Dorante dans Le Bourgeois gentilhomme de Molière, par Valérie Lesort et Christian Hecq. Günther von Essenbeck dans Les Damnés de Visconti, mise en scène d’Ivo van Hove, Prior Walter dans Angels in America de Tony Kushner. Et sous la direction de Robert Wilson, il a aussi joué dans Fables de Jean de la Fontaine.
Clément Hervieu-Léger a monté La Critique de L’École des femmes et Le Misanthrope de Molière, Le Petit-Maître corrigé de Marivaux, L’Éveil du printemps de Frank Wedekind et La Cerisaie d’Anton Tchekhov.
Il a aussi fondé en 2010 avec Daniel San Pedro (voir Le Théâtre du Blog) la compagnie des Petits Champs et a créé On achève bien les chevaux, d’après Horace McCoy avec le Ballet de l’Opéra national du Rhin, Un Mois à la campagne d’Ivan Tourgueniev au Théâtre des Célestins, Une des dernières soirées de carnaval de Carlo Goldoni aux Bouffes du nord. Ou encore Le Pays lointain de Jean-Luc Lagarce au Théâtre National de Strasbourg Il a aussi assisté Patrice Chéreau dans ses mises en scène d’opéra et a joué dans Rêve d’automne de Jon Fosse qu’il avait créé au Théâtre de la Ville. Clément Hervieu-Léger préside la Société d’Histoire du Théâtre et enseigne le théâtre à l’école de danse à l’Opéra de Paris.
La feuille de route du Ministère, classique et précise, ne mange pas de pain: « Clément Hervieu-Léger sera chargé de poursuivre le rayonnement du premier établissement théâtral de France, tant sur le plan artistique que sur le développement des publics. Pour cela, il œuvrera à la présentation et à l’exploitation du répertoire actuel de la Comédie-Française tout en veillant à son élargissement à des œuvres contemporaines ou anciennes qui n’y ont pas été encore présentées. Il aura à cœur de piloter le développement des tournées, de la politique audiovisuelle, ainsi que de politiques en direction des jeunes et des publics éloignés de la culture. Il aura également la responsabilité de mener d’importants travaux de mises aux normes, de restauration et de rénovation énergétique des différents sites de la Comédie-Française. «
C’est sans doute un bon choix d’avoir nommé cet artiste encore jeune et bourré d’énergie. Reste, en ces temps de sérieuses restrictions budgétaires, à atteindre, même en partie, ces objectifs. Clément Hervieu-Léger a de solides atouts: acteur et metteur en scène cultivé, il connait bien aussi la maison de Molière et ne devrait pas à avoir de mal à succéder à Eric Ruf qui a su ouvrir la Comédie-Française avec des résultats mitigés à de jeunes autrices et metteuses en scène et avec plus de succès, et à une meilleure parité hommes/femmes.
Mais reste un problème récurrent: la Comédie-Française travaille dans trois sites: la salle Richelieu, le petit Studio situé là ou se trouvait l’habitation de Molière au sous-sol du musée du Louvre, mais où on entend au lointain le bruit du métro, et le Vieux-Colombier, lieu historique (trois cent places) où, en 1913, Jacques Copeau donna un formidable coup d’accélérateur au théâtre contemporain…
Manque de toute évidence au Français, un autre plateau mieux adapté aux créations actuelles, comme l’Odéon en a une: celle des Ateliers Berthier dans le XVII ème arrondissement… Sur ce vaste site devait être édifiée, sur plus de 20.000 m 2, la Cité du Théâtre, avec des espaces pour le Conservatoire national supérieur d’art dramatique qui aurait bien besoin de plus grandes surfaces de travail, et de nouvelles salles pour la Comédie-Française et le Théâtre national de l’Odéon…
Mais il y a deux ans, Rima Abdul Malak, alors ministre de la Culture, renonça à ce projet, aussi ambitieux que mal ficelé, après quelques millions d’€ dépensés en études préalables et cinq ministres de la Culture! Le budget prévisionnel de 86 millions d’euros aurait dû être augmenté de près de la moitié!
En ces périodes de vaches maigres, il faudra donc que Clément Hervieu-Léger fasse avec ce qui existe actuellement… Peter Stein, le grand metteur en scène allemand avait dit « qu’il ne fallait pas enlever toute la poussière de la Comédie-Française »… Pas toute mais sans doute un peu! Et déjà commencer par attirer de jeunes spectateurs-ce qui n’est pas facile-et aller jouer davantage les œuvres du répertoire en banlieue parisienne où il y a souvent de beaux plateaux, à des tarifs attractifs: cela semble être une priorité…
Jean Couturier et Philippe du Vignal