Four New Works , conception et chorégraphie de Lucinda Childs, musique de Johann Sebastian Bach, Philip Glass, Hildur Guðnadóttir

Four New Works, conception et chorégraphie de Lucinda Childs, musique de Johann Sebastian Bach, Philip Glass, Hildur Guðnadóttir

 La compagnie Lucinda Childs vient de présenter à Chaillot quatre pièces, étrennées le 7 août dernier à Hambourg : Actus, Geranium (un solo créé par la chorégraphe en 65, puis recréé l’an passé), Timeline et Distant Figure.  Sept danseurs aguerris forment actuellement la Lucinda Childs dance Company: Robert Mark Burke, Katie Dorn, Kyle Gerry, Sharon Milanese, Map Pardo, Lonnie Poupard Jr. et Caitlin Scranton. L’ensemble trouve à s’exprimer après l’entracte, dans Timeline et, pour six d’entre eux, à briller dans Distant Figure, une magnifique composition, gardée pour la bonne bouche…

@ Alexandra Polina

@ Alexandra Polina

Les clignotements du lumiériste Sergio Pessanha permettent de voir pour une fois le grill de la salle Gémier qui avait été entièrement reconstruite par l’architecte Vincent Brossy en 2017, à la fin du mandat de Didier Dechamps et le font participer à la scénographie. Plus loin, un très grand écran–plus large que l’actuel 16/9 ème; ou le cinémascope d’autrefois, couvre l’ouverture du plateau- rectangle gris Malevitch, enrichi d’images de sport en noir et blanc. Détournées/surimprimées par le vidéaste Anri Sala, elles font office de toile de fond. Le scénographe n’étant pas crédité dans la feuille de salle, on peut penser que la chorégraphe, par ailleurs excellente plasticienne, occupe aussi cette fonction. Les costumes beige clair, sobres et fonctionnels, sont signés Nile Baker.

 La musique va du baroque, au minimalisme, de Bach.. à Bach rabâché, ressassé, répété ad libitum, autrement dit jusqu’à  Phil Glass, superbement joué par le pianiste et compositeur moscovite Anton Botagov. Le style de Lucinda Childs est d’ailleurs plus proche qu’on croit de la «belle danse» du XVII ème siècle. Un même geste, un même motif, une même cellule, dessinés ou décidés a priori, arbitrairement, subjectivement, froidement, varié à l’infini et décalé à l’excès, enrichi de peu d’autres, a pour effet de fasciner ou, au contraire,, d’exaspérer le spectateur. Comme cela avait pu l’être en 76, quand l’interprète de post-modern danse prit le relais du mevlevi (derviche tourneur) Andy de Groat dans Einstein in the Beach, le célèbre opéra de de Bob Wilson.

Avant de trouver sa voie, son style, sa marque de fabrique, Lucinda Childs est passée par une étape dada-surréaliste, comme Merce Cunningham, Trisha Brown, Pina Bausch… D’où cet humour pince-sans-rire à la Buster Keaton, froid, usant de gestes quotidiens et d’éléments prosaïques. Un esprit difficilement perceptible par le public dans le solo Géranium où elle prouve aussi, son talent de comédienne en incarnant avec ironie et conviction, un joueur de football américain (sans doute Johnny Unitas, des Colts de Baltimore opposés aux Cleveland Browns), sisyphe en pays plat, luttant contre la pesanteur. Empêché d’atteindre la zone d’en-but par un métaphorique harnais. Cette situation d’inquiétante étrangeté en rappelle d’autres, plus cocasses, comme le solo Carnation (1964).

De la structure toute simple (A-B-A ou A1-B-A2), aux reflets symétriques produits par de canoniques accumulations et d’infimes discordances qu’est Actus avec Caitlin Scranton et Sharon Milanese, danseuses très différentes par leur style, leur technique et leur gabarit, aux agencements de groupe fondés sur le langage académique, le pas de sept Timeline et le pas de six Distant Figure nous ont permis d’apprécier la subtile prestation de Katie Dorn), en passant par Geranium, une performance « arty» (rebaptisée en français avec un accent aigu, Géranium ’64), résume en à peine plus d’une heure, soixante ans de travail  et quelque cinquante œuvres à son actif….

Nicolas Villodre

Ce spectacle a été présenté au Théâtre National de Chaillot, 1 place du Trocadéro, Paris (XVI ème), du 19 au 22 mars.


Archive pour 23 mars, 2025

Four New Works , conception et chorégraphie de Lucinda Childs, musique de Johann Sebastian Bach, Philip Glass, Hildur Guðnadóttir

Four New Works, conception et chorégraphie de Lucinda Childs, musique de Johann Sebastian Bach, Philip Glass, Hildur Guðnadóttir

 La compagnie Lucinda Childs vient de présenter à Chaillot quatre pièces, étrennées le 7 août dernier à Hambourg : Actus, Geranium (un solo créé par la chorégraphe en 65, puis recréé l’an passé), Timeline et Distant Figure.  Sept danseurs aguerris forment actuellement la Lucinda Childs dance Company: Robert Mark Burke, Katie Dorn, Kyle Gerry, Sharon Milanese, Map Pardo, Lonnie Poupard Jr. et Caitlin Scranton. L’ensemble trouve à s’exprimer après l’entracte, dans Timeline et, pour six d’entre eux, à briller dans Distant Figure, une magnifique composition, gardée pour la bonne bouche…

@ Alexandra Polina

@ Alexandra Polina

Les clignotements du lumiériste Sergio Pessanha permettent de voir pour une fois le grill de la salle Gémier qui avait été entièrement reconstruite par l’architecte Vincent Brossy en 2017, à la fin du mandat de Didier Dechamps et le font participer à la scénographie. Plus loin, un très grand écran–plus large que l’actuel 16/9 ème; ou le cinémascope d’autrefois, couvre l’ouverture du plateau- rectangle gris Malevitch, enrichi d’images de sport en noir et blanc. Détournées/surimprimées par le vidéaste Anri Sala, elles font office de toile de fond. Le scénographe n’étant pas crédité dans la feuille de salle, on peut penser que la chorégraphe, par ailleurs excellente plasticienne, occupe aussi cette fonction. Les costumes beige clair, sobres et fonctionnels, sont signés Nile Baker.

 La musique va du baroque, au minimalisme, de Bach.. à Bach rabâché, ressassé, répété ad libitum, autrement dit jusqu’à  Phil Glass, superbement joué par le pianiste et compositeur moscovite Anton Botagov. Le style de Lucinda Childs est d’ailleurs plus proche qu’on croit de la «belle danse» du XVII ème siècle. Un même geste, un même motif, une même cellule, dessinés ou décidés a priori, arbitrairement, subjectivement, froidement, varié à l’infini et décalé à l’excès, enrichi de peu d’autres, a pour effet de fasciner ou, au contraire,, d’exaspérer le spectateur. Comme cela avait pu l’être en 76, quand l’interprète de post-modern danse prit le relais du mevlevi (derviche tourneur) Andy de Groat dans Einstein in the Beach, le célèbre opéra de de Bob Wilson.

Avant de trouver sa voie, son style, sa marque de fabrique, Lucinda Childs est passée par une étape dada-surréaliste, comme Merce Cunningham, Trisha Brown, Pina Bausch… D’où cet humour pince-sans-rire à la Buster Keaton, froid, usant de gestes quotidiens et d’éléments prosaïques. Un esprit difficilement perceptible par le public dans le solo Géranium où elle prouve aussi, son talent de comédienne en incarnant avec ironie et conviction, un joueur de football américain (sans doute Johnny Unitas, des Colts de Baltimore opposés aux Cleveland Browns), sisyphe en pays plat, luttant contre la pesanteur. Empêché d’atteindre la zone d’en-but par un métaphorique harnais. Cette situation d’inquiétante étrangeté en rappelle d’autres, plus cocasses, comme le solo Carnation (1964).

De la structure toute simple (A-B-A ou A1-B-A2), aux reflets symétriques produits par de canoniques accumulations et d’infimes discordances qu’est Actus avec Caitlin Scranton et Sharon Milanese, danseuses très différentes par leur style, leur technique et leur gabarit, aux agencements de groupe fondés sur le langage académique, le pas de sept Timeline et le pas de six Distant Figure nous ont permis d’apprécier la subtile prestation de Katie Dorn), en passant par Geranium, une performance « arty» (rebaptisée en français avec un accent aigu, Géranium ’64), résume en à peine plus d’une heure, soixante ans de travail  et quelque cinquante œuvres à son actif….

Nicolas Villodre

Ce spectacle a été présenté au Théâtre National de Chaillot, 1 place du Trocadéro, Paris (XVI ème), du 19 au 22 mars.

DAROU L ISLAM |
ENSEMBLE ET DROIT |
Faut-il considérer internet... |
Unblog.fr | Annuaire | Signaler un abus | Le blogue a Voliere
| Cévennes : Chantiers 2013
| Centenaire de l'Ecole Privé...