Last Work chorégraphie d’Ohad Naharin

Last Work, chorégraphie d’Ohad Naharin

 La dernière œuvre (2015) de ce chorégraphe n’était pas dansée à Lyon par sa compagnie la Batsheva fondée par Martha Graham à Tel Aviv en 1964, mais par le Ballet de la capitale des gones, à l’occasion de l’entrée de cette œuvre à son répertoire. La troupe lyonnaise, successivement dirigée par Françoise Adret, Yorgos Loukos, Julie Guibert, avant de l’être aujourd’hui par Cédric Andrieux, a prouvé, une fois de plus, qu’elle peut tout danser. C’est selon nous, une des raisons pour lesquelles le spectacle a été applaudi à tout rompre par une salle comble et comblée.

Le lever de rideau est extraordinaire. Nous assistons-et admirerons plus d’une heure durant- la course infinie d’Almudena Maldonado portant élégamment une robe bleue; en arrière-plan, elle essaye en vain d’aller de cour à jardin, contrainte au surplace par un tapis roulant masqué par une plate-forme. Les éclairages limpides d’Avi Yona Bueno, les murs latéraux en accordéon traçant la perspective, dessinés par Zohar Shoef, les costumes sexy d’Eri Nakamura, les plages de la bande originale de Grishka Lichtenberger, les danseurs entrant et sortant au compte-goutte, agissant ou s’agitant de manière saugrenue, produisent leur effet.

© Alice Brazzit

© Alice Brazzit

Si l’absolue abstraction s’estompera et si pointe l’anecdote, on finit, qu’on le veuille ou non, par s’habituer à la bizarrerie gestuelle, la suite vaut d’être vécue. La structure progresse par à-coups, jets discontinus, intermittence, petits pas et demi-pointes. Nul recours à l’effet de canon, que ce soit sur le plan musical ou chorégraphique ; nul usage du procédé à la Trisha Brown, d’accumulation et nulle impression de gradation rythmique ou de cheminement dramaturgique. La pièce change de nature, et nous avec. Au moment où nous nous étions accoutumés aux variations, pas de deux et, tout au plus, de six, déboule la troupe entière, engagée pour la représentation: dix-neuf danseurs, si l’on compte la marathonienne…

 De la singularité, de l’originalité et de l’insolite, nous passons en deuxième partie au travail à l’unisson, à la synchronie, à l’harmonie. Aussi bien en position debout, le corps de ballet distribué aux quatre coins du plateau, qu’au sol où les danseurs sont accroupis comme des grenouilles, agenouillés, allongés. Après avoir brillé en solitaire, les interprètes se fondent dans le groupe, font foule, créent grappes et mêlées, forment bataillon. Le signe devient symbole, et la danse: théâtre. Pas celui, expressionniste, d’un Kurt Jooss ; celui, plus précisément, d’une Martha Graham. Après s’être déshabillés et rhabillés à vue, les danseuses sont vêtues de clair comme des bébés, et les hommes, en tenue noire.

Une interprète se livre à des mouvements suggestifs, érotiques, contrôlée par un individu en soutane rappelant le prêtre d’Appalachian Spring de Martha Graham (1944). Un gaillard, de dos, semble s’auto-satisfaire façon Onan. Quand il se retourne, on s’aperçoit qu’il astiquait, en réalité, un fusil-mitrailleur. Allusion faite à la guerre en général, mais non à celle de Sécession à laquelle pensait Martha Graham, ni au conflit actuel à Gaza. Quoique…

Nicolas Villodre

Jusqu’au 17 avril, Opéra de Lyon, 1 place de la Comédie, Lyon (Rhône). T. : 04 69 85 54 54.

 

 

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