Le Rêve et la plainte de Nicole Genovese, mise en scène de Claude Vanessa

Le Rêve et la plainte de Nicole Genovese, mise en scène de Claude Vanessa

 Qui rêve, qui se plaint ? Tout le monde, les gens, nous, enfin le petit monde qui fait la françitude d’aujourd’hui. Sentant un parfum de fin de règne, aggravée par une fin du monde-les glaciers fondent-, l’autrice a été traversée par la figure de Marie-Antoinette et son statut d’icône ambigüe qui représenterait à Trianon, le plaisir de vivre tel que le regrettait Talleyrand : « Qui n’a pas vécu avant la Révolution ne connaît pas le plaisir de vivre. » Une citation apocryphe: il écrivait plus simplement, et avec moins de force:« avant 1780 ». Donc le rêve, avec les somptueux et délicats chiffons de la Reine.

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Là-dessus, faisons confiance à Julie Dhomps : elle a créé pour Marie-Antoinette et la princesse de Lamballe des robes ironiques volumineuses, aux couleurs de B.D. et motifs vitaminés citron et orange,. En hommage à une Côte-d’Azur de rêve plutôt qu’aux orangeries royales.
Non, pour cette Marie-Antoinette-Madame-tout-le-Monde, le rêve, réalisé-c’est se voir offrir une cuisine avec îlot central. Cela mérite qu’on s’y arrête: un « îlot central » encombre le milieu d’une cuisine pour qu’on puisse tourner la sauce, sans… tourner le dos à ses hôtes. Et avec des rangements, s.v.p. Surtout un signe : c’est «classe» et dit bien ce que cela veut dire, chacun au centre de ce monde incertain et décevant, sauvé du naufrage par cet îlot. Mais on ne cuisine pas tant que ça et on se fait livrer par des sans-papiers à vélo. Mais n’épiloguons pas : la couleur des rêves peut être douteuse….

Et la plainte ? Louis XVI, le comte d’Artois et celui de Tilly (un petit zeugma en passant), imperturbablement XVIII ème, se plaignent des « mesures ». Inutile de savoir lesquelles: évidemment gouvernementales, nuisibles, voire inacceptables. Une récréation : le pique-nique où déboulent Fred et Déborah, nos contemporains de la classe moyenne. Le spectacle joue sur les anachronismes, la dérision, le kitsch, une fausse naïveté obstinée, le tout illustré par une succession rapide de jolies toiles peintes. Cela n’interdit pas la quête d’une vraie mélancolie, annoncée d’entrée par la viole de gambe de Francisco Manalich.
L’autrice ne cache pas son ambition pascalienne : rendre compte du profond vide existentiel qui nous fait rechercher le « divertissement ». Et la metteuse en scène travaille beaucoup sur des silences surprenants : cela ressemble à première vue à une comédie fantaisiste qui, selon la loi du genre, devrait faire preuve de rythme. Eh ! Bien non, il faudra y renoncer. Diastoles et systoles, entre silences et moments de comédie, s’étirent, en nous plaçant dans un inconfort sans nous emmener assez loin. Entre divertissement, potache et talentueux, et vertige du vide. Nous restons entre deux chaises: formica et Louis XVI. Ce spectacle ne ressemble à rien mais nous laisse dans une intéressante insatisfaction et il résonne.

 Christine Friedel

 Jusqu’au 25 mai, Théâtre de la Tempête, Cartoucherie de Vincennes, route du Champ de manœuvre. ( Métro: Château de Vincennes + navette). T. : 01 43 28 36 36.

 

 

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