Festival d’Avignon Le Sommet,conception et mise en scène de Christoph Marthaler (en allemand, anglais, français, italien, surtitré en français et anglais)
Festival d’Avignon
Le Sommet,conception et mise en scène de Christoph Marthaler (en allemand, anglais, français, italien, surtitré en français et anglais)
«Sommet en français signifie en effet le haut d’une montagne et un temps, comme un lieu de réunion entre plusieurs personnes sur toutes sortes de sujets. Des individus se retrouvent pour aborder des questions qui leur semblent de première importance, dit le metteur en scène. Certains sommets revêtent un sens important, d’autres semblent plus « symboliques » mais toujours avec l’idée que les décisions primordiales en découleront. Et c’est aussi en effet, un aboutissement, une fin, après de grands efforts, être au top. Mais une fois arrivé en haut, que fait-on? On bascule dans autre chose, la philosophie, la poésie… ou la chute, ou simplement la descente. »
On retrouve ici le monde iconoclaste du metteur en scène suisse dont Aucune idée avait été présenté aux Abbesses (voir Le Théâtre du Blog). A soixante-quatorze ans, il n’a rien perdu de son humour et de sa dérision. Musique, chants (toujours très beaux) et jeu des comédiens se croisent ici dans un nid d’aigle: un chalet en bois sur un piton. Les six personnages en quête de sens sont joués par Liliana Benini, Charlotte Clamens, Raphaël Clamer, Federica Fracassi, Lukas Metzenbauer et Graham F. Valentine, tous excellents.
Ces deux heures semblent traîner en longueur mais c’est une volonté du metteur en scène de laisser certains tableaux en suspension. Lenteur et répétition font partie de son écriture, comme le mélange de textes d’auteurs aussi différents qu’Olivier Cadiot, Pier Paolo Pasolini, Werner Schwab…
Eugène Ionesco n’aurait pas renié ce huis-clos dans les cimes enneigées: ce chalet n’a pas de porte et les personnages y accèdent par un monte-charge. Mais il devient très vite une prison et une voix off annonce que les chemins d’accès seront: « définitivement fermés entre quinze ans et dix-huit ans .» Comme dans les films de Jacques Tati, bruits, accessoires et costumes (irrésistibles vêtements tyroliens), induisent des situations cocasses et absurdes. Plusieurs tableaux s’imposent par leur drôlerie, comme le sauna où chaque personnage jouit d’une oisiveté communicatrice. Ou quand tous, en tenue de soirée s’applaudissent longuement entre eux. Seul fil rouge de ce huis-clos: le bruit des hélicoptères, symbole de survie potentiel. Les scènes s’enchaînent avec une précision d’horloge suisse pour le plus grand plaisir d’une majorité de spectateurs. Mais certains restent au bord de ces chemins de traverse…
Jean Couturier
Jusqu’au 16 juillet, La Fabrica, Avignon.

