La Honte ! Une célébration tragi-comique à visée universelle et cathartique de Léa Roblot et Élise Roth
La Honte ! Une célébration tragi-comique à visée universelle et cathartique de Léa Roblot et Élise Roth
Qui n’a pas éprouvé la honte dans sa vie ? Personne ! De cet état d’humiliation, faut-il rire ou pleurer? Et comment regarder en face un sentiment ? À partir d’une enquête et de nombreux témoignages; Léa Roblot et Élise Roth se saisissent avec aplomb et humour de cette sensation universelle. Un désir aussi, pour elles d’interroger la honte qui, aujourd’hui, semble être un affect majeur de notre époque. Si « le ridicule ne tue pas », il met mal à l’aise et parfois avec une violence inimaginable. On passe du climat d’une foire, à celui du cirque et de spectacles de télévision, avec ces actrices d’une énergie et d’une audace incroyables…
Des expertes, Laurence et Estelle, veulent éradiquer la honte en organisant une cérémonie haute en couleurs. Il est honteux, disait Saint-Augustin, «d’être sans honte », Laurence rétorque : « Mais nous répondons ceci : il est glorieux de l’assumer!) Ce duo clownesque, nous délivre de cet état destructeur et humiliant. Elles font de ce sentiment qui isole, un sentiment qui unit. Elles s’adressent au public comparable à une assemblée :« Pourquoi vous êtes là ? Pour entendre la honte d’autrui, c’est si jubilatoire ! » La diversité des situations, des plus banales aux plus loufoques, nous enchante : de la salade entre les dents, ou quand on vous regarde acheter du papier-toilette, comparer les prix et finalement le voler… Ou plus élégant : Phèdre, dans la tragédie de Jean Racine, aime d’un amour interdit Hippolyte, son beau-fils. Son désir la dépasse, mais pour s’affranchir de sa honte, elle s’empoisonne et meurt.
Le public s’identifie avec plaisir, aux récits parfois extravagants mais bien réels, tous issus d’un travail d’enquête fait par les metteuses en scène. Et nous devenons les témoins de la lutte des personnages avec leur propre honte. À l’image d’un cabaret humoristique et participatif, les séquences comiques, situations absurdes, chansons, danses, adresses au public, animent ici avec une théâtralité sensuelle et expressive, la célébration de la honte. Et cela agit comme une thérapie pour combattre un état psychologique absurde et toxique pour chacun. On peut être agacé par certaines situations trop attendues, pas toujours des plus drôles ou subtiles. Mais la poésie, le rire et l’interprétation l’emportent et en sortant du théâtre, le public se sent soulagé de sa propre honte et libéré du regard de l’autre !
Elisabeth Naud
Jusqu’au 16 novembre, Théâtre de La Reine Blanche, 2 bis passage Ruelle, Paris ( XVIII ème ). T. : 01 40 05 06 96.

