Vertige, conception de Rachid Ouramdane, en collaboration avec Nathan Paulin, musique de Christophe Chassol

Vertige, conception de Rachid Ouramdane, en collaboration avec Nathan Paulin, musique de Christophe Chassol

Rachid Ouramdane collabore à nouveau avec Nathan Paulin, un funambule qui aime travailler dans des sites prestigieux : la Tour Eiffel, le Palais des Papes à Avignon, le Pain de Sucre à Rio-de-Janeiro. Il a engagé sept funambules pour dormir avec lui sur des câbles tendus à plus d’une vingtaine de mètres de hauteur,. Comme ces animaux les paresseux. Bien  avant que ce spectacle d’une heure commence. La musique de Christophe Chassol, interprétée par lui même, par Mathieu Edouard et Jocelyn Mienniel, est accompagné par le chœur d’enfants de la maîtrise de Radio France. S’y associent des dizaines d’acrobates au sol, habillés en blanc.

© Quentin Chevrier

© Quentin Chevrier


Pour une deuxième représentation, ils feront corps avec les spectacles de La Nuit blanche. Et avec un mélange de musiques nouvelles, traditionnelles et des chœurs. A la tombée de la nuit, le Grand Palais a un aspect féerique… Le public allongé sur des tatamis ou assis dans les gradins, regarde souvent vers la coupole et cela nous rappelle les grandes heures des Arts Sauts où nous étions sur des transats. Au rythme de la musique, sur des câbles tendus, les huit artistes créent un ballet aérien en nous en faisant oublier sa dangerosité. Des deux grands escaliers, arrivent le chœur et les acrobates au sol qui rejoignent le terre-plein central et entament des figures individuelles ou en groupe.

Il y a un très beau beau moment, quand un fildefériste vient toucher la main d’une acrobate montée du sol grâce à une pyramide humaine. En haut des grands escaliers d’honneur, une constellation d’étoiles en vidéo fait écho à l’ancien Planétarium au Palais de la découverte voisin.
Les figures acrobatiques se succèdent… Un moment calme de poésie aérienne, loin des rugissements du public aux compétitions d’escrime et de taekwondo ici même, il y a déjà un an.


Jean Couturier

Spectacle créé du 6 au 8 juin, Grand Palais, 3 avenue du Général Eisenhower, Paris (VIII ème). T. : 01 44 13 17 42.

 


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Grand Palais d’été

Grand Palais d’été

Des chiffres qui donnent le vertige… . Le Grand Palais avait été construit en 1894 en seulement trois ans! La grande nef: un structure de 6.000 tonnes d’acier, plus que la Tour Eiffel- soit un total de 8. 500 avec le Palais d’Antin. 10% en a été remplacé pendant une première phase des travaux et la surface de la structure de 110.000 m 2, a été repeinte avec soixante tonnes de vert léger réséda fournies par l’entreprise Ripolin! comme à l’origine. Surface au sol : 13. 500 m2 . La verrière, de toute beauté, est la plus vaste en Europe: 17.500 m 2! a, elle, été remplacée. D’où une exceptionnelle lumière zénithale…

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Le ministre de la Culture et de la Communication Renaud Donnedieu de Vabres, avait voulu qu’au lieu d’en confier gestion et programmation à des organismes privés, on mette en place un « établissement public», ce qui a été fait depuis. Et le Grand Palais a fusionné avec la Réunion des Musées nationaux. Puis une restauration de grande ampleur a eu lieu de 2021 à 2023 et l’an passé, ont pu s’y dérouler les épreuves d’escrime des Jeux olympiques. Coût : 466 millions d’€, financé en partie par un emprunt et par un mécénat de Chanel. Maintenant la totalité du bâtiment a été remise à neuf. Didier Fusillier, qui a été nommé président du Grand Palais, a annoncé la programmation inaugurée le 6 juin dans la Nef et ses abords. Avec spectacles de danse, expositions, spectacles, DJ sets, performances et parades festives sous la verrière de la nef répartie en trois espaces dont un consacré au spectacle. Au programme de cette première édition, Balloon Museum invité par Didier FusillierEuphoria,une exposition conçue par les équipes du Balloon Museum né en 2021 en Italie et par Valentino Catricala, commissaire. Avec des œuvres de Philippe Parreno, Hyperstudio, Rafael Lozano-Hemmer, Ryan Gander, A.A. Murakami, Karina Smigla-Bobinski, Cyril Lancelin, Camille Walala, Quiet Ensemble, SpY, Nils Völker, Sun Yitian, MOTOREFISICO, Alex Schweder. Cette exposition itinérante a réuni plus de soixante artistes à Berlin, Singapour, San Francisco, Los Angeles, Rome et arrive en France pour la première fois. «Véritable phénomène immersif, l’exposition dévoile une multitude d’environnements aériens Il cultive les ponts entre l’art et le divertissement, en repoussant toujours plus loin les limites de formats et d’interactions. Une exposition qui ne manquera pas d’émerveiller petits et grands ! » (sic)

Bon, mais pas de quoi être  si émerveillé …Il y a, entre autres des œuvres de Philippe Parreno, des « quasi-objets », une notion empruntée à Michel Serres. Dans une grande salle, les poissons de différentes races- baudruches gonflées à l’hélium, assez réalistes et poétiques à la fois, se baladent, mus par le souffle produit par les allées et venues des visiteurs.

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De Nils Völker, artiste allemand, connu par entre autres pour Fuchsia, Orange et Bleu Royal créée pour la M.A.D Galerie en Belgique. Ici, cent-vingt sacs-poubelle noirs se gonflent et se rétractent sans cesse comme un humain qui respire, de part et d’autre d’un long couloir. Un peu anxiogène mais impressionnant. A l’extérieur, une sorte de grand échelle en tissu plastique gonflé aux couleurs vives…d’environ dix huit m. Une « œuvre » gonflée en permanence mais pas vraiment convaincante. Et sous  la verrière, cinq gros ballons argentés qui bougent au-dessus de centaines de baudruches blanches accrochées aux balustrades des galeries.  Il y a aussi plus drôles, de grosses boules suspendues par des fils de couleur et magnifiquement éclairées qui font le bonheur des enfants. Mais beaucoup de plastique dépensé… à l’heure des économies d’énergie! Exposition payante, du lundi au vendredi.

© Joana Linda

© Joana Linda

Côté droit de la nef, à voir gratuitement, il y a une belle installation d’Ernesto Noto :  Nosso Barco Tambor Terra (Notre Barque Tambour Terre), une œuvre monumentale avec une grande voûte faite au crochet, un tapis d’écorce brune au sol et des  épices, du riz… dans de petits sacs suspendus et des instruments de percussion: gongs, tambours… Conçu pour être parcouru sans chaussures, cet environnement est fondé sur une relation fondamentale à la nature et veut «explorer la continuité entre notre propre corps et celui de la Terre, à travers la fabrication manuelle, les matériaux organiques et les techniques ancestrales. » L’œuvre, avec ses grands pans faits au crochet, suspendus par des cordes aux poutres de la grande verrière, s’inspire de l’influence de la voile et de la navigation sur les relations entre les peuples. A voir, et en plus, c’est gratuit.

Aussi gratuite: l’exposition Horizontes peintures brésiliennes, sur les balcons de la nef : une manifestation organisée dans le cadre de la saison Brésil-France 2025 avec des œuvres d’artistes contemporains de ce grand pays. Des pratiques entre mémoire collective et résonances intimes. Agrade Camíz s’inspire de l’architecture des banlieues et favelas de Rio-de-Janeiro et construit des univers colorés évoquant des espaces domestiques avec des thèmes comme la sexualité, l’oppression féminine, le corps et l’enfance. Dans les toiles de Vinicius Gerheim, la nature se mêle aux figures animales et humaines, entre sensualité et spiritualité.

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Antonio Obá, lui, étudie la culture du Brésil et ses contradictions. Sa peinture est fondée sur un acte de résistance : érotisation du corps de l’homme noir et construction de sa propre identité. Banhistas n° 3 – Espreita (Bathers no. 3-Peeking), 2020 est une œuvre étonnante où dans une belle piscine nagent deux hommes noirs ; on ne voit que leurs visages, une petite fille et… un crocodile noir. Les univers non figuratifs de Marina Perez Simão évoquent à la fois des paysages naturels, géologiques mais aussi intérieurs.

A aussi été annoncée Vertige, une expérience alliant acrobatie, musique et architecture de Rachid Ouramdane, chorégraphe et directeur de Chaillot-Théâtre national de la Danse, Chassol et Nathan Paulin, avec la compagnie de Chaillot et la maîtrise de Radio France. Un spectacle dont vous parlera Jean Couturier.

Philippe du Vignal 

Grand Palais 25 avenue du Général Eisenhower, Paris (VIII ème). T. : 01 44 13 17 17. 

Le Penseur-Au cœur de l’atelier de Rodin, adaptation, mise en scène et interprétation de Jean-Baptiste Seckler

Le Penseur-Au cœur de l’atelier de Rodin, adaptation, mise en scène et interprétation de Jean-Baptiste Seckler

Cela se passe l’atelier du célèbre sculpteur avec, côté jardin, un modèle réduit en plâtre de La Vénus de Milo, un buste grec d’homme, un petit poële en fonte, une chaise… et côté cour, quelques sellettes et une réplique du fameux et imposant Penseur (1902). Au commencement de cette «performance » donc à mi-chemin entre arts plastiques et représentation théâtrale, Auguste Rodin-Jean-Baptiste Seckler sculpte remarquablement le visage de Camille Claudel. Fascinant. Mais en voix off, on entend son amoureuse lui dire son amour mais  le prévenir: « Et surtout, ne me me trompe pas.»
Il sculpte vite et bien en silence avec le métier qui est le sien-le visage en terre de Camille, plus jeune de vingt-quatre ans… Très impressionnant.  Puis il fait plusieurs grands dessins et défend aussi avec passion sa statue d’Honoré de Balzac qui fut l’objet de virulentes critiques et qu’on peut voir boulevard Raspail… à une centaine de mètres du Lucernaire…

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Il raconte un peu de son voyage en Italie et sa passion pour ses artistes, comme Lorenzo Ghiberti qui réalisa entre 1425 et 1452 la Porte du Paradis dorés à l’est du baptistère de Florence, une des œuvres les plus célèbres de la Renaissance. Le sculpteur nous parle aussi de L’Age d’Airain qu’il créa sous l’influence de Michel-Ange (1475-1564) qui l’a tellement inspiré. Il voulait rendre le vrai avec cet homme nu, au genou droit, un peu fléchi et au bras droit levé et plié… comme L’Esclave mourant de ce génie.
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n 1877, c’était sa première statue en bronze et il avait trente-sept ans: cette œuvre  lui apporta enfin la reconnaissance et des commandes de l’État puis de particuliers. Auguste Rodin qui en avait été très blessé, dénonce aussi l’accusation de moulage sur nature qu’on lui avait faite

Il raconte aussi qu’il réalisa en 1883 un buste en plâtre du grand écrivain qui avait quatre-vingt un ans et était réfractaire aux séances de pose exigées, même quand il posait chez lui ! Il dit aussi son admiration pour Rembrandt et des écrivains comme ou Charles Baudelaire ou Dante : l‘État lui commandera La Porte de l’enfer, inspirée par la Divine Comédie. 
Cette plongée au cœur de la vie d’un grand sculpteur auquel Jean-Baptiste Seckler ressemble physiquement, ne manque pas d’intérêt. Après plusieurs films et documentaires sur lui :
Camille Claudel (1988) de Bruno Nuytten avec Gérard Depardieu et Isabelle Adjani. Et Rodin de Jacques Doillon (2017).
Mais Jean-Baptiste Seckler qui avait déjà joué ce spectacle à l’Essaïon en 2019, est tout à fait à l’aise dans ce double rôle, à la fois sculpteur in vivo et comédien incarnant Auguste Rodin avec tact. Il y a aussi quelques belles images de sculptures et de modèles projetés sur un simple drap blanc.
Mais le plateau mériterait d’être désencombré : une réplique
du Penseur occupe une trop grande place et ce court spectacle gagnerait à être dirigé par un metteur en scène… Jean-Baptiste Seckler est presque toujours face public côté jardin ! Ou il joue de dos. Tant pis, pour ceux comme nous qui sommes assis côté cour.
Enfin, ces soixante minutes passent très vite et on assiste-ce qui est rarissime-au travail d’un sculpteur à quelques mètres de nous et les textes d’Auguste Rodin méritent d’être connus.
Mais il faut monter par un escalier en spirale pour atteindre ce Paradis situé au troisième étage! L’ouvreuse a beau nous dire avant la représentation, qu’il y a aussi une sortie de secours en fond de scène, quid, en cas de pépin, si les spectateurs-en général pas très jeunes dont certains ont une canne-essayaient de descendre en vitesse par ce foutu escalier? Reste l’autre qu’il faudrait atteindre malgré tout ce bric-à-brac sur le plateau! La commission de sécurité est sans doute passée mais cela fait quand même froid dans le dos. 

 Philippe du Vignal

 Jusqu’au 27 juillet, Le Lucernaire, 53 rue Notre-Dame des Champs, Paris (VI ème). T. : 01 45 44 57 14.

 

Un Fil à la patte de Georges Feydeau, mis en scène de Florence Le Corre et Philippe Person

Un Fil à la patte de Georges Feydeau, mis en scène de Florence Le Corre et Philippe Person

Cette comédie en trois actes créée en 1894 avec grand succès, est très souvent montée, notamment à la Comédie Française avec un Robert Hirsch, exceptionnel dans le rôle de Bouzin. C’était il y a déjà soixante-quatre ans! Il en reste une vidéo en noir pas très bonne mais enfin… Ou, dans ce même personnage, Christian Hecq,  dans une formidable réalisation de Jérôme Deschamps.
L »histoire est aussi compliquée qu’invraisemblable mais cela fait tout le charme des pièces de cet auteur français… et polonais par sa mère… 
Après le déjeuner, Fernand de Bois-d’Enghien doit annoncer à la chanteuse Lucette Gautier qu’il rompt avec elle une longue liaison mais a bien du mal à le lui dire. Il se marie en effet avec Viviane, fille de la baronne Duverger comme annoncé dans Le Figaro du jour. Ce qu’il découvre et il va tout faire pour cacher ce journal… Sont aussi là, Gontran de Chenneviette, père d’un enfant de Lucette, Ignace de Fontanet, un ami de la famille qui a une haleine repoussante, Marceline la sœur de Lucette et Nini Galant, une jeune prostituée mondaine.

Pendant le déjeuner, Bouzin, minable clerc de notaire et auteur de chansons médiocres sonne à la porte. Il en apporte justement une à Lucette qui refuse de le recevoir. Resté seul, il glisse sa carte de visite dans un très beau bouquet pour faire croire que ce cadeau est de lui… Par ailleurs,  la baronne Duverger a demandé à Lucette de venir chanter au mariage. Elle accepte, sans savoir, bien entendu, que le futur époux est… son amant. Le valet rend sa chanson à Bouzin et lui dit que Lucette la trouve stupide. Très vexé, s’en va. Et sans aucun scrupule, la chanteuse se laisse aussi draguer par Irrigua, un général argentin réfugié en France à cause de malversations.Très amoureux de Lucette, c’est lui qui a offert ce bouquet (anonyme) accompagné d’une superbe bague. Lucette ne sait pas, bien sûr, que ce cadeau lui a été fait par le général Irrigua.. et découvre la carte de Bouzin! Elle le fait aussitôt rappeler et lui dit qu’il a malentendu et qu’elle trouve ses chansons très intéressantes…  Mais quand très en colère, elle découvre la supercherie, elle le chassera une fois de plus. Le général veut tuer Bois-d’Enghien, son rival qui lui ment : Bouzin, dit-il, est l’amant de Lucette. Il le provoque alors en duel mais Bouzin s’enfuit…
Arrivée chez la baronne Duverger, Lucette découvre son amant caché dans une armoire. Il lui dit alors qu’il y a un vent coulis dans le salon… Affolée, elle affirme qu’elle ne pourra donc pas chanter. Mais la baronne fait vérifier: il n’y a aucun courant d’air. Bois-d’Enghien explique alors la situation à Gontran de Chenneviette qui va emmener Lucette sentir le vent coulis… Bois-d’Enghien chuchote à la baronne et à Viviane de ne surtout jamais prononcer les mots : fiancé et futur gendre, sinon Lucette se sentirait mal aussitôt. Bien entendu, c’est ce que fera la baronne! Lucette s’évanouit puis dit qu’elle se suicidera. Bois-d’Enghien la persuade qu’il l’aime toujours, pour qu’elle ne se tue pas. Ils se réconcilient mais Lucette lui a glissé un épi dans le dos. Pendant qu’il se déshabille pour l’enlever, elle rouvre les portes. Tout le monde qui va à un mariage, se trompe d’étage et voit donc Fernand avec Lucette!
Mais la porte a claqué et il se retrouve seul en caleçon sur le palier. Il prend de force le pantalon et la veste de Bouzin qui est venu le voir. Viviane veut se marier avec Bois-d’Enghien et Lucette épousera finalement le général Irrigua. Bouzin, toujours victime expiatoire, sera arrêté pour nudité dans un lieu public.

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©x Ignace de Fontanet, Lucette et Bois-d’Enghien.

Une des meilleures pièces de cet auteur malgré une fin un peu difficile. Philippe Person l’a adaptée en éliminant les nombreux personnages secondaires et a fait des coupes dans ce texte ici joué en une heure quarante, au lieu de quelque deux heures ! Cela est donc parfois un peu cahotant… Quant aux éléments scéniques décrits avec précision par Georges Feydeau dans les nombreuses didascalies, ici les metteurs en scène ont  réduit le mobilier au strict nécessaire : un canapé, une petite table ronde, une malle au lieu d’une armoire, un paravent, deux portes et quelques guirlandes lumineuses…
Et cela fonctionne? Oui, malgré une distribution inégale, des ruptures de rythme et une direction d’acteurs approximative: pourquoi faire crier presque sans cesse ces jeunes acteurs? Crier oui mais exceptionnellement: ce qu’on apprend dans n’importe quel cours de théâtre. Il faudrait faire quelque choses d’urgence et Feydeau mérite mieux que cela.
Mais ils arrivent à donner une belle énergie à ces personnages habillés en costumes actuels. Tous pas moins intelligents que d’autres, mais emportés par un vent de folie qui va bousculer leur vie. Selma Hubert est une Lucette tout à fait crédible et brillante. Toujours en scène, elle porte le spectacle sur ses épaules : de la graine de bonne comédienne… Clément Ternisien (Bois-d’Enghien), Théo Brugnans (Bouzin) sont aussi très bien comme Dushan Dellic llien (Ignace de Fontanet) et Jean-Gérard Dupau ( le Général Irrigua).
Ce projet est né à l’Ecole du Lucernaire… et cela se sent. Le spectacle, encore très brut de décoffrage, aurait  besoin d’une sérieuse révision mais cela peut valoir vaut le coup d’aller rire à ce Feydeau emmené par ces jeunes acteurs qui s’en donnent à cœur joie: le public qui rit sans cesse, les a longuement applaudis… Il y a là au moins une véritable vie, loin de la prétentieuse et médiocre mise en scène par Stanislas Nordey de
L’Hôtel du Libre Echange écrit la même année 1894 par Georges Feydeau. A vous de voir si cela vaut le coup: au moins, on ne s’ennuie pas… et dans le théâtre actuel, ce n’est pas si fréquent!

Philippe du Vignal

Jusqu’au 28 juin, Le Lucernaire, 53 rue Notre-Dame des Champs, Paris ( VI ème). T. : 01 45 44 57 34.

Adieu, Vassilis Papavassiliou

 Adieu, Vassilis Papavassiliou 

Cette grande figure du théâtre grec, n’est plus. Metteur en scène, auteur, acteur et traducteur, il avait été  été hospitalisé ces derniers mois pour de graves problèmes de santé. Vassilis Papavassiliou a été nommé Chevalier des Arts et des Lettres par le ministre français de la Culture. Une reconnaissance de sa contribution à un théâtre de niveau international.

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Né à Thessalonique en 1949, il entre à la faculté de médecine de cette ville mais s’inscrit vite à l’école du Théâtre d’art Karolos Koun où il commence à tracer sa voie… Puis, avec passion et constance, il mettra en scène plus de trente pièces: des tragiques grec, aux auteurs classiques et contemporains: Sophocle, Shakespeare, Molière, Marivaux, Pirandello, von Horvath, Anagnostakis, Maniotis…
Il s’est  aussi consacré avec la même ardeur à la traduction d’œuvres de grands auteurs, donnant ainsi une nouvelle vie  à celles de Carlo Goldoni, Edward Bond… Les spectacles qui portent son empreinte sont connus: Hélène de Yannis Ritsos et Relax… Minotis (2017), Iphigénie en Tauride de Goethe, L’Aventurier, d’après Hourmouzis, Le Mariage de Koutroulis (2012), Cyclope (2013), et deux opérettes de Théophraste Sakellaridis.

Sa carrière artistique et sa contribution au théâtre grec ont été reconnues par les municipalité d’Athènes et d’Halandri, l’Association des critiques de théâtre et de musique.  Et, au niveau international, par le festival  de Syracuse (Sicile). Vassili Papavassiliou, en y enseignant, a aussi mis ses connaissances au service d’écoles d’art dramatique et du département Théâtre à l’école des Beaux-Arts de l’université Aristote à Thessalonique. Travailleur infatigable, ce créateur était un artiste qui a servi la scène avec éthique, spiritualité et cohérence. Sa disparition laisse un vide dans le théâtre  de notre pays…
 
Nektarios-Georgios Konstantinidis

Palombella Rossa, d’après le film de Nanni Moretti, texte et mise en scène de Mathieu Bauer

 Palombella Rossa, d’après le film de Nanni Moretti, texte et mise en scène de Mathieu Bauer


Un film-culte sorti en 89… Après un accident de voiture, Michele Apicella, un jeune député communiste (Nicolas Bouchaud) a été frappé d’amnésie. Il arrive par la salle puis monte sur la scène où il va jouer un match de water-polo… Des fragments de sa vie passée renaissent alors et il a quelque propos sur la politique… Ce spectacle mêle musique sur scène, chansons populaires italiennes, petits épisodes de water-polo, histoire du Parti Communiste italien où le protagoniste se souvient avoir adhéré. Et il s’adresse parfois au public. A mesure que le match avance, il retrouve la mémoire de son enfance.  À la fin, l’équipe de water-polo adverse a neuf points et  la sienne, huit: ce qu’on peut lire sur une affiche lumineuse. Il y a, entre temps, quelques séquences projetées du film Le Docteur Jivago. Michele Apicella rate finalement son tir et l’autre équipe remportera le match.

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Mathieu Bauer  dit vouloir développer «une critique subtile de la société de consommation.» ( sic!!!! ) Mais on est très loin du compte… L’erreur est ans doute d’avoir voulu écrire une pièce à partir d’un film, même reconnu; l’inverse est plus facile et a été largement exploité mais au théâtre, il faut de vrais personnages et cette mise en scène ne fonctionne à aucun moment: le public ne sait jamais si on est dans le présent ou dans le passé… Il y a aussi parfois un jeu dans la salle (vieux poncif…)  et de nombreuses projections d’images d’eau en mouvement sur un grand praticable bleu pâle faisant office de piscine! C’est laid et ne fonctionne pas plus.

Nicolas Bouchaud, par ailleurs excellent comédien, paraît s’ennuyer et regretter d’être là, obligé de dire un texte sans aucune saveur. Quant aux autres acteurs, ce sont des silhouettes auxquelles il est impossible de s’intéresser. Tous se déshabillent, se mettent en maillot de bain puis se rhabillent sans arrêt… Comprenne qui pourra. Où Mathieu Bauer veut-il nous emmener? Il doit penser que tout le monde a vu le film de Nanni Moretti et que ce mélange en est un écho artistique mais le spectacle n’apporte rien; finalement assez prétentieux avec micros H.F. pour les acteurs, il ennuie très vite: la balance est mauvaise et on comprend mal ce texte envahi par une soupe musicale de qualité, avec le metteur en scène à la batterie et à la trompette, mais trop amplifiée. Le public a mollement applaudi: on le comprend… Inutile de vous déplacer.

Philippe du Vignal

Jusqu’au 14 juin, Théâtre Silvia Monfort,  106 rue Brancion, Paris (XV ème). T. : 01 56 08 33 88. 

L’Art d’avoir toujours raison de Sébastien Valignat et Logan de Carvalho, mise en scène de Sébastien Valignat

 L’Art d’avoir toujours raison de Sébastien Valignat et Logan de Carvalho, mise en scène de Sébastien Valignat

Cette conférence-théâtre a été créée en décembre 24 à la Maison de la Culture de Grenoble.  Avec un titre emprunté au philosophe allemand Arthur Schopenhauer (1788-1860), elle traite du discours politique et de la forme mensongère de tout énoncé commercial, scientifique, économique… de la manipulation exercée sur les citoyens et les électeurs.
Le public vu comme futur candidat est invité à participer à une formation pour réussir une campagne et remporter avec succès les élections présidentielles! Objectif : convaincre, coûte que coûte, et peu importe les moyens… En fond de scène et sur grand écran, l’intitulé de cette conférence pédagogique, élaborée par deux scientifiques de la G.I.R.A.F.E. (Groupe Interdisciplinaire de Recherche pour l’Accession aux Fonctions Électorales). Comment remporter une élection. Méthode rapide  simple et infaillible en 5 points s’affiche sur le grand écran.
Les formateurs: Jane et Bruno (Adeline Benamara et Sébastien Valignat, excellents interprètes) vont expliquer au public la démarche à suivre pour atteindre le succès: comment avoir un bon programme? Comment faire disparaître un conflit et réussir sa communication ? Comment parler, quand on n’a rien à dire? Et enfin, la plus importante et la plus complexe de toutes : comment avoir toujours raison?

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«Le point de départ de cette création, dit Sébastien Valignat, est une inquiétude liée à ce qui me semble être une défiance grandissante vis-à-vis de tout discours.» À partir de cette sérieuse préoccupation socio-politique les auteurs ont écrit une « comédie documentée ». Ils préciseront à la fin, leurs sources authentiques et leur bibliographie sur écran. Sébastien Valignat et Logan de Carvalho interrogent la nature, le sens et le fonctionnement de la démocratie aujourd’hui.
La pensée philosophique d’Hannah Arendt en 70 résonne ici avec la même force: «Quand tout le monde vous ment en permanence, le résultat n’est pas que vous croyez ces mensonges mais que personne ne croit plus rien. Un peuple qui ne peut plus rien croire, ne peut se faire une opinion. Il est privé de sa capacité d’agir mais aussi de penser et juger. Et, avec un tel peuple, vous pouvez faire ce qu’il vous plaît. »

Avec un formidable sens du comique, les auteurs lèvent le voile sur les stratégies de communication à la fois puissantes et trompeuses mise au service du pouvoir. Insensées mais bien réelles ! Le public à la fois surpris et amusé, suit avec curiosité et plaisir! La personnalité des conférenciers, souvent drôles malgré eux, annonce la couleur: décalage, humour et ambiguïté du discours. Subtile mais visible dans l’écriture et augmentant le comique de situation, est la différence de statut de ces enseignants. Jane et Bruno, issus d’un univers intellectuel et politique opposé, n’ont pas la même place dans la hiérarchie.
Jane, convaincue par Macron, est professeur dans une prestigieuse université. Bruno, lui, est enseignant en géographie dans un lycée à Limoges.  Un clin d’œil à l’absurdité des classements des universités, que prise tant notre société friande de performance ! Et au manque de respect de la qualité des professeurs du secondaire. Une allusion à la crise actuelle !

Cette conférence, souvent proche d’une plaidoirie, possède une théâtralité joyeuse. Le lieu prévu initialement était une salle de mairie, mais suite à un imprévu, elle a lieu au T.N.P. Avec esprit, Jane et Bruno nous indiquent le mode d’emploi de ce qu’il faut faire, et surtout, de ce qu’il ne faut pas faire. Un exposé sur la composition graphique des affiches ou «comment réussir sa communication? » avec l’exemple authentique de deux candidats de la Première circonscription des Pyrénées-Orientales aux législatives en 2017, exprime avec cocasserie gestuelle et verbale, et sur un ton à la fois sérieux et ironique les choses à éviter à tout prix. Jane- « Qu’est-ce qui est réussi dans cette affiche ? (Le public répond ou pas s’il répond on lui dit non…) Voilà. Rien. Il n’y a absolument rien de réussi: ni les couleurs, ni la police de caractères, ni les tenues vestimentaires, ni la lisibilité du nom des candidats, ni l’exposition au soleil… Là, c’est un cas d’école. (…) Ce sera notre premier conseil et il est central : quelles que soient votre couleur politique ou vos opinions: faites appel à un graphiste. » Ou quand ils citent les noms imprononçables des candidats les plus tendancieux, donc sujets à moquerie, c’est un moment digne des solos comiques des meilleurs humoristes !

Loin d’être fastidieux et moral, cette conférence, avec une drôlerie décapante, va nous apprendre à manipuler: une action majeure ! Un choix perspicace, vu le fonctionnement politique entre autres, de notre société. Victime et sous influence d’une communication séduisante ou d’un langage trompeur pour mettre en place une autorité, le peuple se laisse guider et charmer inconsciemment par les discours fallacieux.

Autre point fort: avoir eu recours à des documents, tous véridiques! Formidable pour éclairer notre conscience sur les pratiques incontournables de la manipulation pour gagner une campagne. La seconde et remarquable partie-une séance de travaux pratiques- démontre les mécanismes de persuasion, entre autres: la déconstruction du langage : Jane  « C’est quoi Bernard ! (une réponse à une des spectatrices qui doit respecter le nom qui lui est attribué !), vous nous faites quoi là… Syndicat, ça se dit plus. Ce mot-là pue le conflit. Même les syndicats d’initiative, on appelle ça des offices de tourisme. Fallait utiliser un euphémisme. Par quel mot, vous pourriez remplacer : syndicat. On pourrait mettre quoi à la place, Bernard? Oui, bien sûr, «partenaires sociaux ».

Une démarche singulière que cette formation mise en scène sous forme de conférence mais nous aurions aimé qu’il y ait un peu plus d’imagination scénographique. Le texte, documenté si drôle et parfois farfelu ou exagéré, est parfait et le travail rigoureux de recherche mené par Sébastien Valignat et Logan de Carvalho, ont toutes les qualités pour faire de ce texte une création riche en fantaisie et invention.
Un vrai plaisir théâtral sur un thème captivant et sérieux, mais ici traité avec panache et comique. L’Art d’avoir toujours raison s’adresse à nous tous, qui devons conserver notre liberté, notre esprit de discernement et notre faculté de juger, quand les politiques sont souvent faussement clairs !

Elisabeth Naud

Spectacle présenté les 22 et 23 mai au Théâtre de Châtillon ( Hauts-de-Seine)

Festival Off d’Avignon, du 5 au 24 juillet à 17 h 35, au Onze, 11 boulevard Raspail. T. : 04 84 51 26 01.

 

Valentina, texte et mise en scène de Caroline Guiela Nguyen

Valentina, texte et mise en scène de Caroline Guiela Nguyen


Créé en avril dernier au Théâtre National de Strasbourg, ce spectacle, adapté d’un conte, est fondé sur une situation bien réelle avec un thème socio-politique comme les aime son autrice. En fond de scène, une sorte d’autel avec fausses bougies, un écran où sont retransmises les images en gros plan des visages des protagonistes et un autre, celle d’un cœur humain souffrant de plusieurs pathologies. Au centre, une grande table de salle à manger, mais aussi de bureau pour la médecin à l’hôpital. Côté jardin et côté cour, cinq barres fluo blanches verticales et devant une ligne lumineuse. Mais la scène est plongée dans la pénombre.
A Valentina, une petite fille roumaine, M. Popa, un cuisinier roumain lui aussi, explique ce qu’est La Classification Européenne des Mensonges avec chacune une lettre de A à D en fonction de leur durée. Dans chaque grande ville de l’Hexagone, les établissements de santé recourent à des interprètes pour aider les exilés parlant mal ou pas du tout français à dialoguer avec les médecins qui les prennent en charge. Mais, comme pour les démarches administratives, les adolescents scolarisés et souvent doués aident aussi leurs parents…
Valentina, à seulement neuf ans, est partie de Roumanie avec sa mère qui a une grave maladie cardiaque et espère être soignée ici. Elle a vite appris à l’école maîtriser le français et va expliquer en détail la grave maladie dont souffre sa maman au médecin qui, elle, insiste pour avoir recours  à un interprète: assez peu crédible,  d’autant plus que le dossier médical complet transmis par l’hôpital roumain est sur la table. Il n’y a pour le moment aucun espoir qu’une greffe cardiaque, mais quand il y aura une possibilité et cela peut être soit dans quelques jours ou dans des années. Pour la prévenir Valentina est équipé d’un bracelet électronique et sa mère ne doit pas déplacer plus loin que trente kms.  Le père et resté là-bas pour travailler et s’occuper de l’autre enfant.
Valentina se sert d’abord de la traduction simultanée que lui propose son portable. Mais pour accompagner sa mère, elle s’absente de l’école et écrit d’incroyables mots d’excuse qui s’affichent sur l’écran et s’enfonce, de plus en plus dans le mensonge...

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Finalement la mère arrivera à surmonter ses ennuis cardiaques mais c’est Valentina qui elle, en aura aussi mais guérira. Alléluia…Alléluia!!!!  C’est un conte et on pardonnera-peut-être-les nombreuses invraisemblances et le côté mélo appuyé de ce texte que Caroline Guiela Nguyen veut mettre au service d’une revendication socio-politique: les responsabilités endossés par de jeunes exilés, quand un membre de leur famille est malade, voire hospitalisé… et qui ne sont pas de leur âge.
Et cela fonctionne? Juste grâce au talent extraordinaire de la très jeune actrice, tout à fait authentique, et à celui des comédiens professionnels comme Chloé Catrin, même si ce rôle de médecin et directrice d’école est traité de façon caricaturale, mais les non-professionnels sont aussi impeccablement dirigés. Mais on entend très mal les acteurs à cause d’une musique de fond au piano qui n’a rien à faire là…

Quant à la mise en scène, cela va aussi nettement moins bien : Caroline Guiela Nguyen a recours à des micros H.F. dont on ne voit pas une fois de plus l’utilité, à un grossissement des visages retransmis sur grand écran par cadreur omniprésent sur le plateau, à une projection d’ image de cœur souffrant de plusieurs pathologies et on l’entend aussi très amplifié. Le tout a un petit côté brechtien mal assumé avec un commentaire en voix off et des chaises sur les côtés attendent les acteurs qui ne jouent pas dans la scène présentée. Cela fait quand beaucoup de stéréotypes! et même si la metteuse en scène veut faire contemporain,  le tout a un côté vieux théâtre poussiéreux et on s’ennuie très vite!
En fait, tout se passe comme si  Caroline Guiela Nguyen avait constamment hésité entre un théâtre documentaire (après vérification, tous les termes médicaux sont bien exacts) et un conte moral. Mais l’écriture est affligeante de banalité et la dramaturgie nous a laissé perplexe: pourquoi ces personnages secondaires qui ne disent pas grand chose… ou jouent seul ou à deux un petit air de violon. Et cette fin bien gentillette ? Sortez tous vos mouchoirs! Bref, pas de quoi délirer! Cela n’a rien d’un vrai et bon moment théâtral. On vous aura prévenu enfin si cela vous tente…

Philippe du Vignal

Jusqu’au 15 juin, Théâtre de la Ville-Les Abbesses, rue des Abbesses, Paris ( XVIII ème).

Théâtre national de Strasbourg ( Bas-Rhin), du 16 septembre au 3 octobre.

Les Célestins, Théâtre de Lyon (Rhône), du 8 au 12 octobre. Romaeuropa Festival, Rome (Italie) du 16 au 19 octobre.

Théâtre de l’Union, CDN du Limousin, Limoges ( Haute-Vienne) ,du 5 au 7 novembre. Le Channel, Calais du 14 au 16 novembre, Tandem, Scène nationale Arras-Douai (Nord) du 24 au 26 novembre.

Teatre Lliure, Barcelone (Espagne), du 8 au 11 janvier 2026. La Garance, Scène Nationale de Cavaillon (Vaucluse), les 21 et 22 janvier.

Le Grand R- Scène Nationale de La Roche-sur-Yon ( Vendée), les 4 et 5 février, Piccolo Teatro, Milan (Italie) du 14 au 16 mai.

Ruhrfestspiele, Recklinghausen (Allemagne), du 3 au 5 juin.

Valentina, adaptation du conte Valentina ou la Vérité,est publié aux éditions Actes Sud-Papiers.

Festival Théâtres en mai De Là-Bas, conception, interprétation de Romain Bertet

Festival Théâtres en mai

 De Là-Bas, conception, interprétation de Romain Bertet

  Le Consortium Museum, centre d’art contemporain dijonnais, accueille ce spectacle entre performance et arts plastiques. Romain Bertet a étudié la sociologie, l’anthropologie, l’histoire et la physique. Il commence la danse à vingt-quatre ans en intégrant la compagnie Coline à Istres de 2005 à 2006, puis le cursus De l’interprète à l’auteur au C.C.N. de Rilleux-la-Pape-compagnie. Il travaille avec plusieurs chorégraphes et metteurs en scène et  pendant quatre ans cette compagnie. Il poursuit sa carrière d’interprète et en parallèle, crée des petites formes et une première pièce De là-bas, en 2016 à La Valette et plusieurs performances dans des musées à Toulon où il  travaille aussi à l’aménagement d’un espace artistique Le Volatil, fabrique pour danseurs, performeurs, comédiens et plasticiens à qui a ouvert en 2017. 

Ici, le public est invité à descendre à s’asseoir des gradins dans une petite salle plongée dans le noir total. Bruit assourdissant… Un carré de lumière apparait au loin (création de Gilbert Guillaumond et Charles Périchaud) proche d’une toile de Mark Rotkho. Notre œil distingue encore mal mais brusquement des pieds apparaissent au-dessus puis vont disparaitre dans un fondu au noir, principe à l’œuvre pendant toute la représentation ouvrant et fermant ainsi les espaces-temps.Enfin un homme réussit à s’extraire du plafond. Nous découvrons alors un espace trapézoïdal en perspective couvert d’argile, du sol au plafond. L’homme va essayer d’en sortir en grattant les murs argileux, créant des trous d’où il va sculpter des boules qui surgissent aussi des murs et se faufiler la tête la première. Son corps est constamment  sollicité, amputé, décapité… il se fond dans la matière organique, ne fait plus qu’un avec la terre qui l’aspire, le digère et le rejette.
L’homme revient toujours au même endroit, comme si le temps le ramenait constamment au point de départ. Quand la solitude s’empare de lui, il fait surgir des murs une vingtaine de visages sculptés qui l’encerclent et le regardent dans un dernier jugement sans appel. L’homme disparait ensuite dans le sol… pour revenir indéfiniment dans le même espace, prisonnier à jamais.

© Vincent Arbelet

© Vincent Arbelet

Romain Bertet nous fait entrer dans cet endroit sans histoires ni repères, en perpétuelle mutation, transformation et déformation. Un lieu poreux et instable, sujet à des failles temporelles multiples et sans aucune issue possible… Cet homme des cavernes va s’inventer des compagnons fictifs et illusoires pour être moins seul et ne pas tomber dans la folie, à moins que ce ne soit trop tard à cause d’un effet psychotique dû à un enfermement prolongé.
Il y a une dimension sacrée et chamanique dans ce remarquable spectacle où l’homme revient à un état primitif dans une renaissance venue du fond des âges. Les effets spatiaux et temporels sont travaillés avec une utilisation minutieuse de la lumière qui découpe l’espace à des endroits bien précis, provoquant des abîmes où se projettent nos fantasmes. La remarquable bande-son renvoie au monde extérieur (bruits de pas, chants d’oiseaux, chuchotements…) en  une boucle sans fin. Une sorte d’allégorie de la caverne où les ombres illusoires sont remplacées par des bruits. Il faut souligner la synchronisation parfaite entre le danseur et l’éclairagiste qui a su créer espaces fractionnés et paysages changeants, tantôt exigus, tantôt infinis.
Ce voyage archéologique au centre de la terre (tête) n’a rien d’une mission ludique et spéléologique mais plutôt d’une angoissante plongée dans la psyché humaine dont nous sortons sonnés, retrouvant fébrilement la lumière du jour et nos vacillantes certitudes.

Sébastien Bazou

Spectacle vu à Dijon ( Côte-d’Or) le 25 mai.

Le Moulin Rouge au Musée d’Orsay

Le Moulin Rouge au Musée d’Orsay

Dans le cadre de la programmation autour de l’exposition L’Art est dans la rue, le musée d’Orsay a invité le Moulin- Rouge à s’installer pour deux journées sous le signe des strass, paillettes et plumes. Au deuxième étage dans la salle des fêtes, pleine de miroirs et dorures, costumiers, plumassiers, bottiers et brodeurs présentent leurs créations pour le Moulin Rouge.
En même temps, des conférences sur cette institution qui fête ses cent trente-cinq ans ont lieu à l’auditorium. Dans le nef du Musée, on peut voir les costumes des trois dernières revues et d’autres pièces

© Nicolas Blandin

© Jean Couturier

historiques. Nous avions rencontré les créateurs de la maison Février créée en 1929, (voir Le Théâtre du Blog); ils exposent ici leur savoir-faire et il lui a été attribué le label Entreprise du patrimoine vivant pour la qualité de leur travail artisanal de la plume. Les autres entreprises qui exposent aussi dans cette salle des fêtes sont dans le même état d’esprit : l’atelier Valentin travaille les broderies, l’atelier de création Mine Vergès réalise des costumes et Clairvoy, bottier depuis 1945, fabrique les fameuses bottines rouge et bleu du french-cancan.
Après une visite libre, le public aller dans la nef assister à un formidable et féérique défilé de costumes pour reprendre deux titres des revues du Moulin Rouge. Corrado Collabucci, la créatrice des costumes a assisté à leur naissance parmi les œuvres d’art exposées.

 

Les danses avec chapeau, boas et strass au milieu des sculptures, donne une dimension magique à ce lieu. Les formes des sculptures de Jules Lafrance, Jean-Baptiste Baujault, Eugène Delaplanche ou Alexandre Falguière, répondent à celles des danseuses. On célèbre ici la beauté et la féminité, même si l’époque actuelle remet en cause beaucoup des critères esthétiques qu’elle voit comme machistes.
Mais le public, féminin comme masculin, est ravi de voir les danseuses et danseurs en rythme sur les musiques de Pierre Porte qu’il a écrites pour les revues du Moulin Rouge. Sur la plateforme centrale, Une occasion exceptionnelle d’admirer aussi de très près les costumes

© Nicolas Blandin

© Jean Couturier

et de pouvoir les photographier : exceptionnel car strictement interdit au Moulin Rouge, boulevard de Clichy. En soirée, un french-cancan endiablé par les Doriss Girls qui avait déjà enflammé l’an dernier une épreuve cycliste des Jeux Olympiques à Montmartre, a réveillé les sculptures de cette grande nef, devant un public conquis.
D’autres manifestations sont prévues dont une évocation du cabaret Le Chat Noir par les élèves du cours Florent. Tous ces événements sont gratuits sur présentation du billet d’entrée au musée.

Jean Couturier

Les samedi 24 et dimanche 25 mai, au Musée d’Orsay, 1 rue de la Légion d’honneur, Paris (VII ème) . T : 01 40 49 48 14.   

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