Faust de Charles Gounod, direction musicale de Louis Langrée, mise en scène de Denis Podalydès
Faust de Charles Gounod, direction musicale de Louis Langrée, mise en scène de Denis Podalydès
Avec les décors d’Éric Ruf, les costumes de Christian Lacroix, les masques de Louis Arène… toutes les fées se sont penchées sur ce Faust qui a reçu, du Syndicat de la critique, le prix Claude Rostand, (meilleure coproduction lyrique régionale et européenne).
Julien Dran (Docteur Faust), Jérôme Boutillier (Méphistophélès), Vannina Santoni (Marguerite) interprètent avec justesse et fougue les rôles principaux. Leurs performances vocales ont ébloui le public de la salle Favart surchauffée malgré la climatisation. Louis Langrée -chemise noire trempée!- est à la tête de l’Orchestre national de Lille avec le merveilleux chœur de l’Opéra de cette ville. Il a a voulu monter dans sa version d’origine, le deuxième opéra le plus joué au monde après Carmen. Et ici, pour la première fois depuis sa création en 1859, avec dialogues parlés et textes chantés. Le travail des musicologues du Palazzetto Bru Zane et du Centre de musique romantique française sont à l’origine de cette renaissance.
Denis Podalydès a réalisé une mise en scène classique et très lisible avec les costumes sobres fin XIX ème siècle de Christian Lacroix. Tonalité sombre et grise, comme si les personnages évoluaient dans l’antichambre de la mort. Il y a seulement au début du quatrième acte, des couleurs chatoyantes, quand démons et damnés se transforment en prostituées, et que le docteur Faust se livre à ses plaisirs dans la nuit de Walpurgis. La scénographie d’Éric Ruf, très mobile, apparait comme un élément vivant. Il aime montrer les coulisses autour d’un plateau nu comme pour Le Soulier de Satin, avec, ici, un plateau tournant où les techniciens et les deux interprètes accompagnant Méphistophélès mettent en place les éléments de décor. Entre les II ème et III ème actes, sont inversés de hauts châssis représentant l’habitation de Marguerite : un bel effet…
La chorégraphie de Cécile Bon occupe aussi une place importante. La nuit de Walpurgis au dernier acte imposait le corps de ballet de l’Opéra qui, ici, était absent… Mais les danseuses Julie Dariosecq et Elsa Tagawa sont un fil rouge très présent sur ces quatre heures. Denis Podalydès résume bien cet opéra: « Je ne sais plus qui a dit : « Faust, c’est l’histoire d’un infanticide. » Il y a en effet derrière l’histoire fantastique et religieuse, un fait-divers banal et sordide dans une nouvelle qu’aurait pu écrire Gustave Flaubert ou Guy de Maupassant… Un vieil homme, triste mais riche, veut goûter une dernière fois aux plaisirs de l’amour avec une jeune fille pauvre qui sera enceinte de lui. Mais il la quitte… Elle tuera l’enfant et sera condamnée à mort.
On retrouve les grands standards vocaux avec un réel plaisir. Entre autres à l’acte II, quand Faust chante cette cavatine : « Salut ! Demeure chaste et pure. Où se devine la présence d’une âme innocente et divine. »
Au même acte, Marguerite chante l’air immortalisé par la Castafiore, une créature d‘Hergé : «Ah! Je ris de me voir si belle en ce miroir! » Ce spectacle affiche complet mais il serait bien qu’il soit repris et vu par un large public…
Jean Couturier
Opéra-Comique, place Boieldieu, Paris (II ème), du 21 juin au 1er juillet. T. : 0 825 01 01 23.