Austerlitz, texte et chorégraphie de Gaëlle Bourges

Austerlitz , texte et chorégraphie de Gaëlle Bourges

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© Danielle Voirin

 Le spectacle devait s’intituler Ruines, mais, à la suite d’un rêve, Gaëlle Bourges a repris titre du livre de l’auteur juif allemand W. G. Sebald (1944-2001). Dans ce roman, le personnage principal, Jacques Austerlitz, né dans le village maintenant polonais qui porte le nom de la célèbre bataille, reconstitue son histoire d’exilé par glissements et rencontres fortuites, d’une ville à l’autre. Ce titre rappelle à Gaëlle Bourges  la gare par où elle passait autrefois pour se rendre à la Grande Bibliothèque, un des endroits où Jacques Austerlitz recherche ses racines perdues, à travers les photographies dont W.G. Sebald  a truffé son ultime récit…

En suivant la structure aléatoire du roman, la chorégraphe mêle, sur un canevas onirique, ses  souvenirs à ceux de ses interprètes, avec images à l’appui. Sur scène, elle croise ainsi ses premiers pas de danseuse en herbe, ses années de formation et rencontres artistiques avec les réminiscences d’ Agnès (Butet), Camille (Gerbeau), Pauline (Tremblay), Alice (Roland), Marco (Villari) et Stéphane Monteiro a.k.a XtroniK).

Sur un petit écran en fond de scène, comme un trou de mémoire, surgissent des images en noir et blanc : une jeune ballerine, un spectacle d’enfants… Et celles des maisons de famille des artistes, ou de lieux emblèmatiques de la création au XX ème siècle.  Ainsi la Mad Brook Farm, un communauté d’artistes au Vermont (Etats-Unis) où Steve Paxton développa la «contact improvisation». Et le Judson Church Theater à New York, un berceau de la danse post-moderne américaine  par où nombre d’artistes  français sont passés… Le groupe de danseurs et danseuses fait ainsi naître anecdotes communes et parcours qui les ont mis sur le chemin des autres.

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© Danielle Voirin

Ici, le hasard fait bien les choses: la chorégraphe cherchant l’œuvre de W.G. Sebald dans une bibliothèque tombe sur Le Rituel du serpent, un ouvrage d’Aby Warburg (1866-1929), un historien de l’art juif allemand interné à la clinique Bellevue à Kreuzlingen (Suisse) comme le fut aussi Vaslav Nijinski, la star des Ballets Russes (1889-1950) … Elle va donc  faire son miel e toutes ces informations, selon le principe du «bon voisin» développé par Aby Warburg: «Quand vous allez prendre un livre dans une bibliothèque, celui dont vous avez réellement besoin n’est pas celui-là, mais son voisin. »

Avec une voix off monocorde, Gaëlle Bourges égrène son texte aux accents durassiens (on pense à Hiroshima mon amour). Entre souvenirs intimes, moments d’histoire de la danse contemporaine, évocation des guerres et de la Shoah, les interprètes s’animent sporadiquement, ombres grises, estompées par un tulle tendu à l’avant-scène :  petites danses enfantines, esquisses de pas de ballets classiques, bribes de L’Après-Midi d’un faune… Et un moment-clef pour Gaëlle Bourges dans sa quête mémorielle: la reconstitution du rituel du serpent, dansé par  les Indiens Hopi au Nouveau-Mexique, photographié puis décrit par Aby Wartburg à une conférence qu’il donna à la clinique Bellevue. Ce qui lui valut une «guérison partielle ». Cette «danse éclair» fait resurgir le passé, de l’oubli.

Les musiques de Krystian et  Stéphane Monteiro a.k.a Xtronik correspondent aux évocations du texte. Ainsi que les costumes stylisés d’Anne Dessertine et les clairs-obscurs, fondus enchaînés et contre-jours créés par Maureen Sizun Vom Dorp. Du cousu main:  Gaëlle Bourges  croise les fils d’une mémoire collective. Se superposent ici la genèse de la pièce, ses rêves et réminiscences littéraires comme Walden d’Henry David Thoreau, les poèmes d’Emily Dickinson, le show Buffalo Bill’s wild west show, une offense à la mémoire amérindienne…

Dans ce labyrinthe infini de mots, images et mouvements, Gaëlle Bourges, comme à son habitude, convoque l’histoire de l’art. On se rappelle A mon seul désir (2015), élégante reconstitution de la tapisserie La Dame à Licorne ou, plus récemment, On va tout rendre, évoquant le pillage de l’Acropole d’Athènes par un ambassadeur britannique au début du XIX ème siècle et  (La Bande à) LAURA, autour du célèbre tableau Olympia d’Edouard Manet. 

Ici, texte et images prennent souvent le pas sur une danse fantomatique et certains spectateurs en ont été frustrés. Mais il faut se laisser bercer par cette douce rêverie spatio-temporelle en compagnie des spectres qu’Austerlitz ressuscite.
Nous avons été séduite par cette quête pour retrouver « dans ce qui a été et qui est déjà en grande part effacé, des lieux et des personnages qui au-delà du temps et d’une certaine manière, gardent un lien avec nous ».
Un dialogue poétique et politique émouvant sur les ruines du XX ème siècle.


Mireille Davidovici

Spectacle vu le 13 décembre au  Carreau du Temple, 4 rue Eugène Spuller, Paris  (III ème).  T. 01 83 81 93 30.

Du 18 au 31 janvier, Théâtre Public de Montreuil-Centre Dramatique National (Seine-Saint-Denis).

Les 13 et 14 février, Maison de la Culture d’Amiens (Somme).

Le 1 er mars, Théâtre Antoine Vitez- Scène d’Ivry (Val-de-Marne)  et du 5 au 7 mars, Théâtre de la Vignette, Montpellier (Hérault). 

 

 


Archives pour la catégorie Danse

Chapter 3: The Brutal Journey of the Heart chorégraphie de Sharon Eyal et Gai Behar

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© Stefan Dotter for Dior

 

Créée en 2019, cette pièce est la dernière d’une trilogie : OCD Love (2016) et Love Chapter 2 (2017) consacrée à l’exploration du sentiment amoureux. Ici, les battements de cœur rythment le corps collectif de la L-E-V Dance Company. Nous retrouvons avec plaisir le vocabulaire si particulier de Sharon Eyel et Gai Behar qu’ils ont décliné ensuite dans Into the Hairy et dernièrement Jakie avec le Nederlands Dans Theater (voir le Théâtre du Blog)

 Les sublimes costumes en tissu imprimé avec un grand cœur rouge, conçus par la styliste Maria Grazia Chiuri (Christian Dior Couture), sculptent les anatomies des interprètes, tous exceptionnels. Parés de cette seconde peau, Keren Lurie Pardes, Darren Devaney, Alice Godfrey, Guido Dutilh, Johnny McMillan, Juan Gil, Nitzan Ressler et Frida Dam Seidel dansent avec ardeur, épousant de manière quasi organique la musique électronique de DJ Ori Lichtik avec parfois des élans latino ou disco : autant de respirations dans cette plongée brutale au vif des émois amoureux…

La chorégraphe exige un engagement extrême et une tension intense pour traduire physiquement des états émotionnels. La tribu se défait et se recompose en un mouvement perpétuel: échappées en duos sensuels, petits pas de côté vers la liberté..  Puis les danseurs s’agglutinent en un tout organique. Leurs bras et jambes semblent être des tentacules se déployant et se rétractant. Les lumières d’Alon Cohen traduisent toutes les couleurs de l’amour: rouge de la passion, vert spectral du dépit, clairs-obscurs de la mélancolie…

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© Stefan Dotter for Dior

 Sharon Eyal cite volontiers Little Life de l’autrice américaine Hanya Yanagihara : «Les choses se cassent et parfois se réparent. Et vous réalisez que la vie se réorganise pour compenser votre perte, parfois à merveille.» Ici, les corps érigés comme des flèches et oscillant sur la pointe des pieds, les torses cambrés à l’extrême et les petits gestes allusifs des mains constituent sa signature : «Je travaille à l’instinct, dit-elle, je mets la peau de mon âme à nu.» Et les artistes suivent ses indications: « silence, sécheresse, peur, intégrité, secret, nostalgie, noir, lune, eau, odeur, démon, froideur, couleur… »

Issue de la Batsheva Dance Company où elle a été danseuse, puis chorégraphe et directrice artistique associée, Sharon Eyal a développé un style minimaliste avec techniques gaga d’Ohad Naharin et bases classiques, avec aussi un penchant pour le «groove» et l’«underground clubbing culture». Un monde d’où vient Gai Behar qui a créé avec elle, en 2015, leur compagnie L-E-V, maintenant installée en France. Il faut aller la découvrir. Sharon Eyal et Gai Behar sont  aussi artistes-invités de grands ballets.
La chorégraphe, née à Jérusalem, se dit aujourd’hui le cœur brisé par la guerre que mène son pays: on peut l’entendre dans cette pièce exigeant du public et des artistes, une grande concentration.

 Mireille Davidovici

Spectacle vu le 5 décembre dans le cadre de Fréquence Danse, au Cent-Quatre, 5 rue Curial, Paris (XIX ème). T. : 01 53 35 50 00.

Les 2 et 3 février, Comédie de Genève (Suisse); le 8 février, L’Onde, Vélizy-Villacoublay (Yvelines); le 20 février, Théâtre de l’Arsenal, Val-de-Reuil (Eure).

Love Chapter 2 , du 21 au 23 mars, Théâtre du Rond-Point, Paris ( VIII ème) 

Into the Hairy, les 9 et 10 avril, Comédie de Clermont-Ferrand. Du 12 au 14 avril, avec Chaillot-Théâtre national de la Danse, à la Grande Halle de la Villette, Paris (XIX ème).

 

Festival Paris l’été Asylum, chorégraphie de Rami Be’er par la Kibbutz Contemporary Dance Company

Festival Paris l’été

Asylum, chorégraphie de Rami Be’er, par la Kibbutz Contemporary Dance Company

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© Udi Hilman

Fondée en 1970, cette compagnie israélienne dirigée depuis 1996 par Rami Be’er, un de ses anciens danseurs, revient à Paris avec ce ballet présenté au festival de la Danse, il y a quatre ans, et qui avait enthousiasmé le public.
Dix-huit interprètes se déploient avec une exceptionnelle énergie, guidés par un danseur au mégaphone qui pourrait être leur garde-chiourme. Et si l’on en croit son titre, cette pièce traite du sort des migrants. Un propos risqué aujourd’hui en Israël, quand le gouvernement veut expulser les milliers de demandeurs d’asile africains…

La narration, peu explicite, est relayée par une gestuelle nerveuse traduisant les violences subies, en les plaçant dans un contexte plus large. Comme le suggèrent les numéros de matricule égrenés sur la bande-son et les chants d’enfants en hébreu: «  On tourne, on tourne en rond toute la journée, debout assis, on marche en rond jusqu’à ce que nous trouvions notre place. » On pense à d’autres exils et déportations…

Apeurée, harassée, la troupe défile à l’unisson avec des mouvements mécaniques et répétitifs. Certains danseurs essayent parfois des échappées en solo ou duo, avant de se fondre de nouveau dans le cortège. Il y a des luttes au corps à corps qui mettent en valeur leurs qualités athlétiques. Sur les visages se lit la terreur, et les bouches ouvertes laissent échapper des cris muets.

Cette danse, très expressionniste, ne se veut pas mouvement esthétique mais répond à un engagement politique: «Mes chorégraphies, dit Rami Be’er, sont influencées par le fait que nous vivons au Nord d’Israël, à seulement huit kilomètres de la frontière libanaise. Cela fait partie de notre identité. »

Après Horse in the sky  (2018) dénonçant la souffrance des soldats à la guerre, Asylum renvoie à celle des exilés. Malgré un fil dramaturgique peu clair fait de déchaînements de violence, la puissance et la beauté plastique des corps, la parfaite cohésion et la précision des mouvements de ces excellents danseurs nous emportent plus loin que cette dénonciation. Et ici, nous est révélée une compagnie d’Israel, moins connue en France que d’autres….

Mireille Davidovici

Spectacle vu le 15 juillet, au lycée Jacques Decour, 12 avenue Trudaine Paris (IX ème).


Festival Paris l’été, jusqu’au 30 juillet. T. 01 44 94 98 00.

Montpellier danse 2023 (suite) Black Lights, chorégraphie de Mathilde Monnier

Montpellier danse 2023 (suite)

Black Lights, chorégraphie de Mathilde Monnier

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© M. Coudray

« Quand j’ai lu ce recueil, le déclic s’est fait », dit la chorégraphe, adaptant ici des textes issus d’H24, commandés pour une série diffusée sur Arte en 2021. Vingt-quatre autrices ont écrit de courts scénarios sur les violences faites aux femmes, des plus quotidiennes ou insignifiantes, aux plus dramatiques. A partir de faits réels, lus, entendus ou vécus.

« La danse peut faire quelque chose en plus que le cinéma, dit Mathilde Monnier. Elle produit du récit qui dit autre chose de ces corps. » Bâti sur neuf de ces textes, choisis pour leur qualité orale, Black lights comme son titre l’indique, apporte de la lumière à la noirceur de la condition des femmes.

Ces histoires au féminin sont portées par huit danseuses ou comédiennes. On les voit gisant  sur le plateau parmi des souches calcinées, dans d’étranges postures. Ces corps déformés et désarticulés, rampent péniblement, les pieds enfermés dans des chaussures à talon. Elles se libèreront progressivement de ces attributs contraignants pour danser en liberté. Ce que racontent leurs mouvements va à l’encontre des récits que nous entendons au fil de la pièce. Seules -mais les autres toujours à leur écoute- elles sont un chœur en marche.

«  Il y a quelque chose qui ne va pas. Qui ne passe pas.» : une remarque sur sa coiffure, déplacée de son patron, dit l’une d’elles qui prend conscience du sexisme ordinaire (Le Chignon d’Agnès Desarthe). Faits anodins comme le diktat des talons hauts dans 10 cms au-dessus du sol  d’Alice Zeniter romancière et dramaturge; harcèlements dans Mon harceleur de Lize Spit, mais aussi le témoignage poignant d’un féminicide : Je brûle de la romancière grecque Ersi Sotiropoulos…

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© M. Coudray

Chacune se fait ici la porte-parole des femmes évoquées par les autrices de H24 mais, pour Mathilde Monnier, « la question de la victimisation n’est pas une assignation » et elle veut mettre à jour la force de résistance et de résilience de ses sœurs, à travers une action collective au plateau. A contre-courant des textes, la danse et le corps prennent le relais et mettent les mots à distance et, sans faire l’économie de la colère ou de l’émotion, apportent humour et dérision. Ils disent aussi la capacité du deuxième sexe à se reconstruire.

«Le corps est mon sujet, le mouvement est mon objet, dit la chorégraphe». Certains reprocheront à Black Lights un trop plein de paroles et une scénographie pauvrette. Ici, les mots priment sur la danse mais évitent le misérabilisme et la plainte, trop souvent entendus par les temps qui courent.

Et le but n’est-il pas de faire passer le message ? «N’hésitez pas à vous emparer de ces paroles, elles sont fortes, ce sont les vôtres», écrit l’une des réalisatrices dans la préface d’H24. Mathilde Monnier la prend au mot, avec Isabel Abreu, Aïda Ben Hassine, Kaïsha Essiane, Lucia García Pulles, Mai-Júli Machado Nhapulo, Carolina Passos Sousa, Jone San Martin Astigarraga et Ophélie Ségala. Elles nous rappellent qu’en France, cent-vingt-deux femmes ont perdu la vie en 2021, sous les coups de leur conjoint, ou ex-conjoint.

Comme d’habitude, la chorégraphe, autrice d’une quarantaine de pièces, nous surprend, par ses positions en lien avec, entre autres, « l’être ensemble », le rapport à la musique, la mémoire: elle collabore avec des artistes et penseurs comme Jean-Luc Nancy,  Philippe Katerine, Christine Angot, La Ribot, Heiner Goebbels….Trente-quatre de ses créations ont été présentées au festival de Montpellier, ville où elle est accueillie en résidence à la Halle Tropisme.

Mireille Davidovici

Spectacle vu le 22 juin Théâtre de l’Agora à Montpellier.

Montpellier Danse se poursuit jusqu’au 4 juillet, 18 rue Sainte-Ursule, Montpellier (Hérault). T. : 04 67 60 83 60.
Du 20 au 23 juillet, Festival d’Avignon .

Du 30 novembre au 2 décembre, Théâtre de la Cité Internationale, Paris ( XIV ème).

Le 17 et 18 janvier, La Comédie, Clermont-Ferrand (Puys-de Dôme); Les 26 et 27 janvier, T.P.R., La Chaux-de-Fonds (Suisse).

Les 7 et 8 février, MC2, Grenoble ( Isère) ; le 22 février, Théâtre des Salins, Martigues ( Bouches-du-Rhône).

Du 20 au 23 mars, Les Subs, Maison de la Danse, Lyon.

Du 4 et 5 avril, Le Quartz, Brest.

 

Montpellier Danse (suite) Into the Hairy, chorégraphie de Sharon Eyal

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© Katerina-Jebb

 Into the Hairy, chorégraphie de Sharon Eyal, co-auteur : Gai Behar

«Je ne veux pas voir la chorégraphie, je veux voir la magie. Je veux ressentir et je veux que les gens ressentent ce que je veux leur donner. » dit la chorégraphe israélienne qui pénètre « à l’intérieur d’une chevelure  » pour en démêler le mystère. Cette pièce pour sept danseurs nait de la nuit, d’une obscurité profonde qu’il nous  faut scruter, pour distinguer les corps enchevêtrés.

De lents mouvements animent le groupe sur la musique électronique hypnotique du compositeur anglais Koreless ( alias Lewis Roberts) où se glisseront des notes de musique sacrée. Seuls, les visages et les mains d’une blancheur blafarde, sont éclairés. La lumière spectrale (création Alon Cohen ) sculpte une étrange cérémonie: «J’aime le noir, dit Sharon Eyal. Pour moi, le noir est de la lumière et les danseurs apportent la lumière.» Dans cette pénombre permanente d’intensité variable, le mouvement fait jaillir cette humanité somnambule, habillée paar Maria Grazia Chiuri de Christian Dior-Couture, juste-au-corps arachnéides, fins comme une deuxième peau. Une esthétique raffinée jusqu’au bout des doigts, avec ongles et bijoux, mode« gothique ».

Issue de la Batsheva Dance Company où elle a été interprète, puis chorégraphe et directrice artistique associée, Sharon Eyel développe un style minimaliste, mêlant techniques gaga d’Ohad Naharin et classique, avec un penchant pour le « groove » et l’«underground clubbing culture». Un monde d’où vient aussi Gai Behar qui a lancé avec elle, en 2015,  leur compagnie de danse : L-E-V.

Into the Hairy, comme une œuvre picturale, se compose et se défait en permanence, avec d’étranges postures, silhouettes déformées en figures grotesques ou images allégoriques rappelant un retable : bras en croix, bustes inclinés ou exposés nus, à la manière d’un  Christ…
La chorégraphe demande à ses interprètes un engagement extrême et une tension physique intense pour traduire des états émotionnels par le corps « Je travaille à l’instinct, je mets la peau de mon âme à nu, dit Sharon Eyel.» Telle une armée de l’ombre, les danseuses et danseurs avancent, reculent, se dispersent pour créer d’impressionnants tableaux. «Ce n’est pas un récit mais une expérience, j’ai l’impression de faire du cinéma. »

Nous recevons Into the Hairy comme une toile de maître. En répétitions, Sharon propose images et mots qui stimulent l’imagination : « Deep into the hairy. Dirty and gentle. Broken. Alon. Alone. Alone. Alone. Deeper. Stronger. Weaker. SAdder. More alone. Hole….  » (Profond dans la chevelure… Sale et doux. Brisé. Seul. Seul. Seul. Plus fort. Plus faible. Plus triste. Plus seul. Plus profond. Vide ) … »

Dans ses trois pièces précédentes, OCD Love, Love Chapter 2 et The brutal Journey of the heart, il s’agissait d’amour.
Ici, nous touchons au cœur d’une intimité tribale en forme de rituel ésotérique qui exige du public, comme des artistes, une grande concentration. Il faut aller découvrir cette artiste qui projette d’installer sa compagnie en France. A côté de leurs pièces réalisées à la L-E-V, Sharon Eyal et Gai Behar en créent d’autres pour le Nederlands dans Theater, le Ballet royal de Suède et le Göteborgs Operans Danskompani….

Mireille Davidovici

Spectacle vu le 22 juin à l’Opéra-Comédie de Montpellier.

Montpellier-Danse se poursuit jusqu’au 4 juillet: 18 rue Sainte-Ursule, Montpellier (Hérault). T. : 04 67 60 83 60.

Du 30 juin au 3 juillet, Festival de Spoleto, (Italie) ; 6 au 8 juillet, Julidans, Amsterdam (Pays-Bas).

Du 17 au 20 août, Festspiele, Salzburg (Autriche).

Du 5 au 7 octobre, Théâtre des Louvrais, Cergy-Pontoise (Val d’Oise; le 17 octobre, Stadsschouwburg, Bruges (Belgique) ; du 20 au 22 octobre, Internationaal kunstcentrum deSingel, Anvers (Belgique) et du 26 au 28 octobre, Dampfzentrale, Berne (Suisse).

Les 11 et 12 novembre, Wiesbaden, (Allemagne).

Le 24 novembre, Festival de danse, Cannes.

Festival Montpellier Danse: Annonciation/ Torpeur/ Noces, chorégraphies d’Angelin Preljocaj

Festival Montpellier Danse: Annonciation/Torpeur/ Noces, Chorégraphies d’Angelin Preljocaj

Pour ouvrir ce festival, une création, Torpeur et les reprises d’Annonciation et Noces par cette compagnie avec aujourd’hui, trente danseurs permanents. Un parcours dans l’œuvre de l’artiste , auteur d’une soixantaine de pièces, du solo aux grandes formes, dans un style résolument contemporain, alternant fresques narratives et projets plus abstraits. Nous avons ici un belle sélection qui permet de voir la permanence et les évolutions de son style.

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Torpeur (création 2023) © JCCarbone

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Interprétée par deux danseuses, la visite de l’Ange Gabriel à Marie. Il n’est pas la créature éthérée, le Saint-Esprit qui ensemence la Vierge, mais un être à la gestuelle puissante. Comme un extra-terrestre qui arrive sur une musique vrombissante dans une trainée de lumière rouge, il vient troubler la quiétude de la jeune femme. Assise sur un banc, elle semble attendre dans des postures lentes et épurées, nimbée d’un halo de lumière froide: à l’image de l’iconographie traditionnelle représentant souvent cette scène fondatrice de la religion chrétienne dans un jardin clos, symbole de virginité.

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© JC Carbonne-

L’intrusion bruyante et mouvementée de l’Ange, incarné avec fougue par Clara Freschel (en alternance avec Mirea Delogu) s’apparente ici à une pénétration fécondatrice : d’abord, tout feu tout flamme, comme sorti des Enfers, la créature s’approche avec douceur de Marie (Florette Jager, en alternance avec Verity Jacobsen) , au physique plus frêle qu’elle. Celle-ci tente quelques esquives et pas de côté, mais sera submergée par la gestuelle impérieuse de ce visiteur, sans céder pleinement à son emprise.
Les corps s’effleurent avec pudeur, dégageant une sensualité sereine. Un baiser s’échange, léger comme un souffle… Puis l’Ange disparaît comme il est venu, laissant l’héroïne songeuse sur son banc. La musique limpide de Stéphane Roy (Crystal Music) alterne avec le Magnificat d’Antonio Vivaldi, mariant profane et sacré sous la lumière toujours précise chez Angelin Preljocaj de Jacques Chatelet.

« Qu’est censé ouvrir en nous cet événement ? De nombreux peintres ne cessent d’interroger ce catapultage de symboles antinomiques qu’est l’Annonciation mais ce thème à la problématique si proche du corps est quasi évacué de l’art chorégraphique», écrivait Angelin Preljocaj à la création à Châteauvallon en 1995.
Cette pièce narrative proposée en ouverture du festival et de la soirée, pose la question de la fécondation et induit habillement la métaphore de la création qui s’ensemence des influences et des frictions d’une œuvre à l’autre, et entre artistes.

Torpeur

« La torpeur est un état de corps, entre la sidération, la prostration, la nonchalance, l’abattement, et l’abandon », dit le chorégraphe de sa nouvelle création, dans l’air du temps en ce jour de canicule.

La pièce prolonge l’ambiance pensive d’Annonciation mais démarre en flèche: douze danseurs surgissent des coulisses  en costumes fluides blanc ivoire, flottant dans les contrejours (création lumière Éric Soyer). Sur la musique répétitive de 79Dils se croisent dans des alignements géométriques, des symétries quasi classiques, marchent en agitant bras et jambes, exécutent de petits sauts. Un chœur bourré d’énergie. Puis, cédant à la fatigue, ils suspendent leurs gestes, dans des postures lascives, avec des mouvements de bassin alanguis : la bande son s’assourdit en basses percussives. 

Bientôt ils quitteront les tenues évanescentes concoctées par Elenora Peronetti,  et s’étendent au sol dans une nudité relative (slip et soutien-gorge couleur chair), pour s’aligner les uns derrière les autres en un cercle mouvant. Ronde horizontale, où bras et jambes, alternativement levés dessinent une fresque ajourée à la manière de ces ribambelles découpées dans une bande de papier. Cette pièce léchée, élégante, d’une facture classique nous a laissés un peu à la porte. Un peu loin la sensualité recherchée par l’artiste : « Convoquer les corps, l’espace et le temps, pour donner une forme à l’indolence, pour trouver un rythme à la lenteur et peut-être inventer une nouvelle grammaire paresseuse de l’hébétude ». Mais il faut parfois savoir ralentir, surtout avant le tsunami qui va suivre.

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© JC carbone

Point d’orgue de la soirée, cette pièce de 1989 nous a sidéré. La musique d’Igor Stravinsky, écrite entre 1914 et 1917 puis finalisée en 1923 pour les Ballets russes à Paris, mise en scène par Nijinska, la sœur de Nijinski, est interprétée ici par Les Percussions de Strasbourg et le Chœur contemporain d’Aix-en-Provence, dirigé par Roland Hayrabediann. Elle est d’une mystérieuse beauté et d’une modernité étonnante. Percussions éruptives aux accents orientaux, voix chaudes des femmes et ténébreuses des hommes, venues des profondeurs des Balkans.

« Aussi loin que remonte ma mémoire, écrivait le chorégraphe à la création, les Noces ont toujours sonné pour moi comme une étrange tragédie (…) La mariée, s’offrant comme une forme renversée d’un rituel funèbre, verserait les larmes en s’avançant vers un rapt consenti. » Dans la tradition slave, (Angelin Preljocaj est originaire d’Albanie) c’est une marchandise qu’on échange. Ici la mariée est déclinée en cinq exemplaires, avec jupe courte virevoltante, jambes galbées dans des bottines noires, face à cinq hommes en chemise blanche et cravate noire.
Comme offerte en sacrifice, l’une des danseuses est amenée,
yeux bandés sur le plateau, et… s’effondre, poupée de son ! Mais elle se relèvera et rejoindra ses compagnes pour une danse athlétique. Les hommes, eux, en rang d’oignon sur des bancs d’école, attendent leur heure. Les couples évoluent ensemble ou séparément, dans un cercle à géométrie variable délimité par les bancs déplacés au gré des séquences.
Ils se déchaînent en bonds, savants jeux de jambes, bras et bustes, glissades et tournoiements, emportés par la musique. Ensemble ou alternativement, hommes et femmes se cherchent, se trouvent, se fuient dans les savants contrejours et clairs- obscurs, lumières chaudes et froides.
Les danseuses  se dédoublent en cinq grandes poupées de chiffon blanc qu’elles manipulent, émouvantes figures de leur aliénation, puis, jetant ces tristes avatars au loin, elle plongent à plusieurs reprises du haut des bancs dans les bras de leur promis, sauts risqués d’une précision extrême, comme le reste de cette folle cérémonie, à la fois joyeuse et funèbre.

Noces restera longtemps imprimé dans nos mémoires, avec cette musique envoûtante qui soulève et anime les corps. Bravo, Mirea Delogu, Antoine Dubois, Matt Emig, Chloé Fagot, Clara Freschel, Verity Jacobsen, Florette Jager, Erwan Jean-Pouvreau, Florine Pegat- Toquet, Maxime Pelillo, Valen Rivat-Fournier, Lin Yu-Hua.Bravo aussi Caroline Anteski pour ses costumes et Jacques Chatelet pour ses éclairages. Aux saluts, le public s’est levé enthousiaste. Il ne faut pas manquer ce florilège qui bénéficie d’une grande tournée.

Mireille Davidovici

Spectacle vu le 21 juin au Corum, Montpellier ( Hérault).

Montpellier Danse se poursuit jusqu’au 4 juillet, 18 rue Sainte-Ursule, Montpellier. T. : 04 67 60 83 60.

 Du 11 au 14 septembre, Pavillon Noir, Aix-en-Provence (Bouches-du-Rhône).

Du 18 au 20 octobre, Opéra de Rouen ( Seine-Maritime) ; du 7 au 10 octobre, Scène Nationale de Châteauvallon, Ollioules (Var).

Du 1er au 3 décembre, Théâtre des Champs-Elysées, Paris. 

 Les 22 et 23 mars, Scène 55, Mougins  ; 26 mars, Théâtre en Dracénie, Draguignan (Var); du 28 mars au 5 avril, Opéra Royal du château de Versailles ,

Le 7 avril, Théâtre de Thionville ; les 26 et 27 avril, Théâtre Jean Vilar, Suresnes ( Hauts-de-Seine) .

Du 16 au 18 mai, Théâtre National de Nice ; le 24 mai, Auditorium, Dijon ( Côte d’Or) ; 20 juillet, Nuits de la Citadelle, Sisteron (Alpes-de-Haute-Provence).

Festival de Marseille 2023

 «Danse et corps en mouvement sont l’ADN de ce festival créé en 1996 », disait Marie Didier, qui en a pris les rênes l’an dernier à la suite de Jan Goossens (voir Le Théâtre du Blog). Elle y voyait «l’opportunité de mettre en place des projets plus ouverts sur la Méditerranée et des aventures liées à ce territoire phocéen pluriculturel, terre d’exil et d’asile ».

Le festival tient cette ligne cosmopolite, en proposant trente-deux événements d’artistes venus de vingt-et-un pays (Allemagne, Angleterre, Belgique, Brésil, Canada, Chili, Congo, Écosse, Égypte, France, Grèce, Iran, Kazakhstan, Liban, Maroc, Nouvelle-Zélande, Ouganda, Pologne, Pays-Bas, Sahara occidental, Venezuela). En trois semaines et quatre week-ends, et dans vingt lieux partenaires, on y voit : spectacles de danse, théâtre, concerts, films, expositions, ateliers… Dont Bless the Sound That Saved a Witch Like Me, le beau solo de Sati Veyrunes, chorégraphié par Benjamin Kahn vu récemment au festival d’Uzès danse (voir Le Théâtre du Blog). Et des propositions hors-norme et inattendues, comme ce soir-là.

Waka-Criée, conception et mise en scène d’Éric Minh Cuong Castaing

@Pierre Gondard

@Pierre Gondard

Nous avions été très émus par Phoenix, vu en 2018 à ce même festival : des drones filmaient simultanément trois danseurs sur scène et des artistes à Gaza. (voir le Le Théâtre du blog). Ici, même principe, mais avec un propos plus léger. La scène du théâtre de la Criée est reliée, via des caméras avec le studio d’enregistrement du groupe d’ados Waka Starz, en Ouganda, visible sur un grand écran. En temps réel, nous assistons à un double spectacle.
Devant nous, la chanteuse des Waka Starz, Racheal M. chante et danse avec une folle énergie, avec ses frères et soeurs, eux restés à Wakaliga, quartier défavorisé de Kampala. Ces artistes en herbe nous font visiter le studio familial de Wakaliwood où ils montent et diffusent leurs clips vidéo qu’on peut voir en surimpression, grâce à un savant mixage réalisé par Isaak Ramon. Entre comédie musicale, afro-futurisme, chorégraphie kung-fu et satire politique, ces clips atteignent des millions de vues sur YouTube et Tik Tok.

Les Waka Starz ont un répertoire engagé et leurs musiques croisent les influences reggaeton, afro-beat et pop anglo-saxonne, et des textes en anglais ou en lunganda, langue parlée en Ouganda, s’insurgent contre les violences faites aux enfants et prônent la liberté des femmes. Ils nous font partager le « wag » ( rythme) de leur pays. Abonnés au système D. , ils nous racontent la réalité de leur quartier, leur soif de réussite et nous font entendre avec talent et invention, leur foi en l’avenir. Lève toi et danse, le dernier titre appelle les spectateurs à se lever pour partager leur fougue.

Éric Minh Cuong Castaing, issu des arts visuels, s’est très tôt intéressé aux écritures chorégraphiques en temps réel. Avec sa compagnie Shonen, basée à Marseille, il explore les relations entre danse et nouvelles technologies. Il échange avec les Waka Starz depuis 2019 et nous donne ici une belle leçon d’optimisme !

 Love You, Drink Waterconcert d’Awir Leon, chorégraphie dAmala Dianor, création vidéo de Grégoire Korganow

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© Pierre Gondard

Ce trio est réuni autour du nouvel album d’Awir Leon Love You, Drink Water, prétexte à un show dansé avec projections d’images mêlant captation en direct et film d’art. Le musicien accompagne depuis longtemps les spectacles d’Amala Dianor avec des compositions originales.
Ici, les rôles s’inversent et le danseur chorégraphie son concert. Homme-orchestre, il déplace les instruments de musique, montre des mouvements au chanteur, guide le cadreur autour de lui pour ses prises de vue. Mais il virevolte parfois librement sur la scène dans son style particulier, glissant avec virtuositédu hip-hop aux danses européenne et africaine contemporaines, comme on l’a vu dans son solo Wo-Man (voir Le Théâtre du Blog).

Ce concert dansé trouve son point d’orgue dans une séquence qui rassemble les trois artistes : la caméra bouge et filme, partenaire du chanteur et du danseur. Ceux qui attendent plus de danse seront peut-être déçus : l’essentiel du spectacle met en scène l’opus de François Przybylski, alias Awir Leon. Auteur, chanteur, compositeur, il s’inscrit dans la mouvance indietronic. Un style électro-pop-rock, adouci par une ambiance paisible, avec des fréquences sonores beaucoup moins élevées. La rythmique soutenue apportée par les samples percussifs et mélodiques ne vient pas heurter l’oreille et permet des développements plus poétiques.
« Awir » : ciel, en gallois : la voix rocailleuse de l’interprète évoque des univers rugueux, mais amène aussi des envolées lyriques, avec des paroles dont le sens échappera à ceux qui ne maîtrisent pas bien l’anglais.
Le photographe et réalisateur Grégoire Korganow nous montre des images de forêts brumeuses et d’étendues aquatiques où des corps se noient mais que la danse sublime. Pour cet habitué des plateaux de danse, ces corps
représentent une sorte de paysage intérieur qu’il transcrit, comme ici.
Ses ondins et ondines romantiques, au milieu de zombies sinistres, rappellent-ils que la Méditerranée qui borde Marseille, est un tombeau pour des hommes, femmes et enfants…

Haircuts by children, conception de Darren O’Donnell

Chez Kenze Coiffure, des élèves de CM1 formés en une semaine par des professionnels, tiennent pendant un week-end, un salon de coiffure au centre ville et offrent coupe et coloration gratuites. Ils ont appris, pendant leurs heures de classe, à gérer les rendez-vous, accueillir les clients volontaires avec une citronnade, balayer les cheveux épars.
A l’aise, bienveillants et sérieux : «C’est comme à l’école mais en plus amusant », dit une petite fille qui s’applique à manier peigne et ciseaux, bombes colorantes, avec l’accord des grandes personnes, une fois n’est pas coutume.

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© Estelle Laurentin

Cette action saugrenue est proposée par un collectif canadien avec la perspective de responsabiliser les enfants et d’amener les adultes à leur faire confiance. C’est charmant et, sans doute une expérience enrichissante pour les petits et les grands. Quant au résultat esthétique, ce n’est pas ce qui compte. La coiffure est un métier qui s’apprend et requiert un talent de visagiste.
La démarche vise à ce que « les jeunes changent de statut et deviennent des acteur·rice·s à part entière de la société, les adultes renoncent au contrôle et se fient à leur créativité, leur dextérité et leur sens des responsabilités. » Darren O’Donnell se fait fort de « créer des situations sociales inédites et d’en faire jaillir du sens ». Chacun en tirera les conclusions. Pour autant, ce projet, plus pédagogique qu’artistique, est un exemple des actions culturelles et de sensibilisation des publics menées en marge des œuvres programmées au festival.

Mireille Davidovici

Spectacle vu le 23 juin, au Théâtre de la Criée, 30 Quai de rive neuve, Marseille. T. : 04 91 54 70 54.

Le 24 juin, Chez Kenze Coiffure, 7 rue de la République, Marseille (II ème). T. : 04 91 91 39 79.

Festival de Marseille jusqu’au 9 juillet, 7 rue de la République, Marseille (II ème). T.:  04 91 99 00 20. Entrée parfois gratuite ou à 10 €; billetterie solidaire de 2.000 places à 1 €. Contact : rp4@festivaldemarseille.com T. : 04 91 99 02 53.

Montpellier Danse :quarante-troisième édition Prophétique (on est déjà né.es) Chorégraphie de Nadia Beugré

Montpellier Danse : quarante-troisième édition

Comme les précédentes, cette manifestation conjugue passé et présent avec, souvent, la recréation d’œuvres de Dominique Bagouet, chorégraphe, fondateur du C.C .N. de Montpellier et du festival, mort en 1992  et celle d’autres artistes qui sont invités à revenir sur des pièces anciennes :  Angelin Preljocaj, Kader Attou, Boris Charmatz et pour, la première fois à Montpellier Danse, Jean-Claude Gallotta, avec Ulysse Grand large (1981). Mais comme d’habitude, le directeur Jean-Paul Montanari, dénicheur de talent, nous fait aussi découvrir et suivre de jeunes créateurs. En ces premiers jours, une programmation très contrastée et majoritairement féminine, qui ne laissera personne indifférent, comme ce festival avec, en deux semaines, deux à trois spectacles par soir…

 Prophétique (on est déjà né.es) Chorégraphie de Nadia Beugré

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©Werner Strouven

Nous sommes invités sur une musique électro et un DJ exubérant, à partager la vie intense d’un salon de coiffure…qui décoiffe. Sur le plateau, jonché de mèches de cheveux et tresses, s’alignent des chaises en plastique blanc et pendent des étoffes pailletées scintillant dans les lumières… Le maître de cérémonie chauffe la salle, bientôt électrisée et encourage les interprètes dans leurs déhanchements et galipettes acrobatiques : postures mêlant twerk, breakdance, coupé-décalé et voguing… En costumes extravagants, mi-hommes, mi-femmes, sept artistes non binaires ou transgenre nous font pénétrer dans leur univers décalé, leurs rêves et revendications pour le droit à la différence.

Rencontrés à Abidjan, Beyoncé, Canel, Jhaya Caupenne, Taylor Dear, Kevin Kero ont inspiré cette étrange pièce queer : «Des personnes drôles, émouvantes et talentueuses, dit la chorégraphe. Le voguing, leur vocabulaire venu du coupé-décalé, la façon dont elles marchent, dansent, parlent, c’est toute une culture puissante et singulière .» Se sont jointes à elles Jhaya Caupenne, Belge d’origine ivoirienne et la travestie brésilienne Acauã El Bandide Shereya, la plus exubérante et sans doute la plus expérimentée (elles ne sont pas toutes professionnelles). « La plupart jonglent avec une double vie, précise Nadia Beugré. La journée, esthéticiennes, coiffeuses sur les marchés, elles essayent la nuit de trouver des endroits à elles pour se retrouver, rêver, et délirer. »

La chorégraphe a capté cette énergie, laissant libre cours au style de chacune, quitte à être un peu débordée par leurs propositions, souvent provocatrices à l’extrême. Quand retentir Le Boléro de Maurice Ravel, elles se lancent dans un concert de chiens et elles, aboient ou se lancent dans des bagarres canines…  Suivront une série de performances où les corps se déchainent et où elles montrent leur plastique séduisante: dos musculeux, jambes gainées de résille, fesses rebondies frémissantes, strings moulant les sexes,  interrompues par adresses au public et jeux de scène.

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©Werner Strouven

Le salon de coiffure est le lieu où l’on se maquille, on se travestit, on se perruque, et où le ballet se développe autour de la métaphore capillaire. Une des artistes se revêt d’une carapace de cheveux emmêlés que ses partenaires tressent en lock dreads… Solos dansés, distribution de bonbons au public, exhibitions corporelles, concours à-qui-fera-la-plus-belle-bulle-de-chewing-gum: ces «folles » (sic), nous entraînent dans une ronde endiablée puis, au final, égrainent une comptine enfantine en rupture avec l’insolence et la trivialité de certains moments. 

Jean-Christophe Lanquetin a donné une touche de chic à cet univers précaire: tissus chamarrés, fils tendus derrière les chaises de jardin, puis croisés dans la lumière d’Anthony Merlaud ouvrent une échappée poétique dans ce monde où la misère se dit avec humour. Celle de la vie marginalisées de personnes non binaires et transgenres, en butte à l’homophobie et à la transphobie, voire menacées de mort. Elles nous le racontent ici, mais l’excès risque de masquer leurs revendications.

Le public est baladé entre séquences performatives impressionnantes et vulgarité caricaturale. La provocation plait à certains, mais en révulse d’autres qui n’en ressentent pas la dimension parodique. Bref, quelque chose ne passe pas… Et, dans l’ensemble, cette création est encore décousue : le rythme du début se relâche dans les séquences où la parole de cette curieuse tribu prend le pas sur la danse. Une parole qui émerge aujourd’hui sur de nombreuses scènes de théâtre et de danse avec plus ou moins de bonheur…

 Prophétique (on est déjà né.es) est l’aboutissement d’un long travail poursuivi par Nadia Beugré entre Montpellier où elle a installé sa compagnie depuis 2015 et Abidjan, sa ville natale.. Elle y a commencé la danse avec Béatrice Kombé, avant de rejoindre l’École des Sables de Germaine Acogny au Sénégal. Après cette première un peu «chaude» sans doute la pièce évoluera-t-elle vers plus de rigueur, comme le rythme et le climat qui nous embarquent au début.

Mireille Davidovici

Spectacle vu le 21 juin au Théâtre de la Vignette, rue du Val de Montferrand, Montpellier.

Les 11 et 12 août, Tanz im August, Berlin.

Du 18 au 20 octobre, Théâtre Garonne, La Place de la Danse, C.D.C.N. Toulouse Occitanie, Toulouse; les 14 et 15 novembre, Points communs, Cergy ; du 29 novembre au 2 décembre, Festival d’Automne, Centre Pompidou, Paris.

Montpellier Danse jusqu’au 4 juillet, 18 rue Sainte-Ursule, Montpellier. T. :04 67 60 83 60 .

June Events 2023 : Open/Closed, chorégraphie de Pierre Piton

June Events 2023

Open/Closed, chorégraphie de Pierre Piton

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Open_Closed © Grégory Batardon

Fondé en 1999 par Carolyn Carlson aujourd’hui présidente d’honneur, l’Atelier de Paris devient Centre de Développement Chorégraphique National en 2015. Avec ce festival, il clôt sa saison axée sur les résidences de compagnies et des créations. Fidèle à sa mission de formation continue, il programme chaque année des master-classes avec des figures historiques de la danse, soutient la création mais favorise aussi la reprise des pièces du répertoire avec d’autres théâtres.
Dans cet esprit, une vingtaine de rendez vous -certains gratuits- dans plusieurs lieux parisiens, à la Cartoucherie et dans le bois de Vincennes et sur des places publiques. Et il offre à des chorégraphes de montrer leurs travaux en cours, en prélude aux deux spectacles présentés chaque soir. Cette année encore, le Centre culturel suisse hors-les-murs, à cause de la fermeture de ses locaux pour travaux, présente ici des chorégraphies d’artistes helvètes souvent surprenants.

 

Open/Closed, chorégraphie et interprétation de Pierre Piton

Collé tel un insecte ou un gecko au grand mur en fond de scène, le danseur au long corps élastique essaye de s’y fondre dans des équilibres et contorsions. Accompagné d’une création sonore organique… Sur sa console, Simone Aubert capte le moindre bruissement de ses gestes et, en direct, le transforme en bourdonnements et vibrations. Comme enfermé dans la verticalité du mur, il s’en éloigne pour explorer par reptations l’horizontalité du sol, jusqu’à se coller aux spectateurs assis par terre et obligés de se déplacer. Il ira jusqu’à ramper sous le tapis de danse, séquence étouffante…

Entre convulsions, figures précaires et dans un rapport incongru aux murs et au sol, Pierre Piton met au défi l’en-dedans et l’en-dehors du corps, ses vêtements ôtés et agités en drapeau. Il devient une créature primitive, un monstre sympathique entre insecte et serpent. Sa progression ininterrompue métamorphose la configuration de la salle et rend le public mouvant. Une odeur de terre humide nous parvient dans le clair-obscur du plateau.

Pierre Piton se voit d’une génération «d’un entre-deux », celle d’une dystopie : «Open/Closed est un essai dansé d’extériorisation de cette ambiguïté. Cette performance pense le corps comme flou… L’exploration se fait au sein d’un être changeant, et devenant insaisissable ». En connivence avec la musicienne, il nous entraîne dans un univers bizarre. Invités à nous déplacer avec lui, nous devenons partie prenante de ce solo, troisième création du chorégraphe, aujourd’hui membre du collectif The Field, à la Tanzhaus de Zürich. Un artiste à suivre.

Mireille Davidovici

June Events jusqu’au 17 juin, Atelier de Paris, Cartoucherie de Vincennes, route du Champ de manœuvre. T. 01 41 74 17 07. Métro : Château de Vincennes, puis navette gratuite, ou bus 112.

Festival La Maison Danse, Uzès

Festival La Maison Danse, Uzès

Rebaptisé par la nouvelle directrice du Centre de Développement Chorégraphique National, le Festival d’Uzès ouvre sa vingt-huitième édition. «Plus dense, pour ramasser l’énergie avec des parcours dansés en journée», dit Émilie Peluchon qui signe sa première programmation.
En cinq dates, dix-sept chorégraphes de tous horizons, pour dix-huit spectacles et vingt-quatre représentations dans l’espace public ou dans la salle municipale polyvalente L’Ombrière. Un parcours dans l’ancienne cité ducale et l’occasion d’apprécier son patrimoine. Venue de Danse Dense, plateforme d’accompagnement et de visibilité pour les chorégraphes, Émilie Peluchon, en première ligne pour le repérage de nouveaux talents, cherche aussi à gagner un public jeune et familial, en sortant du minimalisme conceptuel, sans renoncer à l’exigence.

Né sur la scène du jardin de l’Evêché dominé par une magnifique muraille sous les arbres, cet événement annuel n’est pas la seule activité du C.D.C.N. : « Une scène mobile qui nous incite à aller vers les habitants. » Sans lieu propre, la Maison Danse Uzès essaime dans le Gard, apportant le sixième art dans les localités excentrées, tout en tissant un solide partenariat avec la Scène Nationale d’Alès et le Théâtre de Nîmes-Scène conventionnée pour la danse contemporaine.
Les missions du C.D.C.N. ne s’arrêtent pas à la diffusion de spectacles dans le Gard mais vont au-delà, via le réseau très actif des douze autres C.D.C.N. Émilie Peluchon souhaite aussi développer les pratiques amateurs peu présentes à Uzès et dans le  département: « Le conservatoire municipal d’Uzès n’a pas de section danse.» Mais elle a découvert «un énorme réseau underground de pratique hip-hop et quatre danseurs ont été sélectionnés pour les prochains J.O. dans la nouvelle discipline « break dance ». Elle a donc confié à la chorégraphe Valentine Nagata Ramos la réalisation d’un spectacle de battle pour les réunir.

Autre nouveauté de la Maison Danse : un festival d’automne : « Un espace-temps pour le jeunesse isolée dans une ville sans gare et sans transport en commun le week end. En leur proposant des formes qui peuvent les intéresser. L’idée est de lancer la saison et qu’on se retrouve en fin de parcours au mois de juin.»

Comme annoncé, les propositions du festival sont nombreuses  et en une soirée nous avons pu voir quatre pièces, essentiellement au féminin. Émilie Peluchon souhaite accompagner les chorégraphes émergentes, alors que les créatrices ont de moins en moins accès à des postes de direction des Centres Chorégraphiques Nationaux, comme l’a montré une récente étude…

Magdaléna chorégraphie de Chloé Zamboni

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Magdalena © Òandy Kozekwa

Dans la pénombre, à la lumière rasante d’un projecteur et d’une bougie,  deux corps assis, symétriquement enlacés, déploient lentement bras et jambes… Presque jumelles, Marie Viennot et Chloé Zamboni vont prendre diverses postures, formant des figures sculpturales duelles qui rappellent la statuaire classique. A l’origine, les danseuses ont travaillé sur les Variations Goldberg  de Jean-Sébastien Bach, musique aujourd’hui remplacée par la composition électronique d’ Arthur Vonfelt , sourdes nappes sonores répétitives.

Cette ambiance crépusculaire, cette gestuelle parcimonieuse nous invite à la contemplation : une étroite intimité se noue entre les artistes qui s’étreignent puis se séparent, l’une quittant la scène et laissant l’autre à sa solitude, à tour de rôle. L‘économie des gestes met en exergue les variations d’humeur qui se jouent dans cette rencontre physique. Le moindre mouvement du regard, de la tête, des membres, prend une signification et demande une réelle concentration aux spectateurs. Mais la musique somnanbulique ne permet pas, contrairement à celle de Bach, attentive à tout, de rester en éveil tout au long de cette belle proposition, première création de la chorégraphe.

L‘économie des gestes met en exergue les variations d’humeur qui se jouent dans cette rencontre physique. Le moindre mouvement du regard, de la tête ou des membres, prend une signification et demande une réelle concentration aux spectateurs. Mais la musique somnambulique ne nous permet pas, contrairement à celle de Bach, de rester en éveil tout au long de cette belle et première création de la chorégraphe.

G r oove, chorégraphie et interprétation de Soa Ratsifandrihana

Le mot: groove vient du jazz et, plus précisément, du swing des années trente. Cette danseuse et chorégraphe franco-malgache s’en réapproprie le rythme et glisse en silence, lentement féline, puis amplifie ses mouvements à mesure que montent les sons acérés, métalliques et proches de l’esthétique glitch, de Sylvain Darrifourcq et ceux, plus hip hop, d’Alban Murenzi. « Musicalement, la pièce a deux visages, dit Soa Ratsifandrihana, celui du “glitch“ et du “break“ ; je navigue entre différentes danses que mon corps a traversées. Je cite et transforme des danses de l’afindrafindrao de Madagascar, le madison afro-américain, la danse post-moderne… »« 

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©Sandy Korzekwa

Ce métissage musical et grammatical structure ce solo qui évolue d’une rigueur technique, à une libération progressive du mouvement. La danseuse passe de l’univers contemporain d’Anne Teresa De Keersmaeker ou de Boris Charmatz dont elle a été l’interprète, au rituel des danses malgaches. « La recherche de groove, dit-elle, nécessite de se laisser porter par la musique, avec une marge d’improvisation. »
Elle quitte le costume à larges épaulettes, genre cyborg, conçu par Coco Petitpierre, pour retrouver un corps plus naturel.
Installés tout autour d’elle, sous les  arbres du jardin du temple, nous sommes invités à partager dans une grande proximité, le sens du groove. Ce solo, entre puissance tellurique et grâce féminine, nous communique une énergie roborative. Depuis 2016, Soa Ratsifandrihana a créé ses propres chorégraphies. G r oo v e est la troisième après Tendimite (2016) et Folia (2020). Elle est depuis cette année, artiste associée au Kaaitheater à Bruxelles où elle prépare un trio.


For You / Not for you , chorégraphie et interprétation de Solène Wachter

« Pour vous/ pas pour vous », le titre du solo et la répartition bi-frontale des spectateurs annoncent un espace de représentation divisé en deux, que cette créatrice définit en installant des rampes de led qui éclairent alternativement un gradin et laissent l’autre dans l’ombre. Elle adopte la gestuelle d’une pop-star en concert mais s’est aussi inspirée des gestes pratiques des techniciens, comme : donner des tops, rouler des câbles, installer un pied de micro, voir si tout fonctionne bien : « Côté face, dit Solène Watcher, il y a une qualité explosive dans le mouvement, j’ai regardé des “lives“d’Ariana Grande ou Madonna. Côté pile, j’ai observé les techniciens, les gestes de montage et démontage d’un spectacle qui, invisibles du public, créent une grande machinerie.»

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Four you/not for You © Sandy Korzekwa

Au centre du plateau, la soliste alterne ces styles d’écriture, avec des mouvements nerveux, secs et précis et des motifs répétitifs. Elle opère des basculements incessants et rapides d’un côté à l’autre, changeant de mimique pour raconter aux uns, le concert et, aux autres, l’envers du décor. Elle adopte le visage expressif de la star d’un côté, et de l’autre, concentrée, s’applique à des gestes techniques : faire pivoter les barres de leds, les allumer et les éteindre d’un geste sec, en complicité avec Max Adams qui a créé la lumière et opère à vue. D’un côté, on voit la danseuse éclairée en plein visage, de l’autre, comme nous sommes plongés dans le noir, nous distinguons sa silhouette à contre-jour, dansant devant les gradins, le public faisant office de décor.

Il faut un peu de temps pour saisir le principe de cette dramaturgie complexe et en lire les différentes grammaires mais nous sommes bientôt pris dans le mouvement d’une danse électrisée, réglée au millimètre. Solène Wachter déborde d’énergie et nous communique ses emprunts à l’univers double-face d’un concert avec un certain humour.
Sortie du Conservatoire National Supérieur de Paris puis de l’école P.A.R.T.S., cette remarquable artiste participe aux créations de Boris Charmatz, Ashley Chen, Maud Le Pladec et Anne Teresa de Keersmaeker. En compagnonnage avec le Centre Chorégraphique National d’Orléans, elle est aussi artiste associée à la Ménagerie de verre à Paris.

Bless The Sound That Saved A Witch Like Me – Cri(s)…chorégraphie de Benjamin Kahn interprétation de Sati Veyrunes

Sur la scène historique du jardin de l’Évéché, postée devant un grand tapis blanc tendu devant le haut mur de pierre, Sati Veyrunes accueille le public en anglais : « Je veux partager un son avec vous, vous offrir un voyage sans but, je veux partager avec vous un cri de vie… » Son regard bleu, agrandi par des lentilles, accroche les spectateurs. Avec calme, elle investit le plateau et soudain pousse un grand cri, puis se lance dans une danse tournoyante jusqu’au vertige.`

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Sati Veyrunes ©Sandy Korzekwa

Comme hallucinée, elle observe un long silence, puis la voilà en transe. Des éclairages tremblotants et la musique de Lucia Ross soulignent les soubresauts qui traversent son corps. Plus tard, elle se jettera théâtralement à terre, comme sous l’emprise d’une rage inextinguible.  Mais la pluie commence à tomber et inonde vite le plateau: le final de cette pièce intense de quarante-cinq minutes prend alors des allures d’apocalypse…

Deuxième volet d’une trilogie de portraits signés Benjamin Kahn, Bless The Sound That Saved A Witch Like Me – Cri(s)  explore le cri et sa nécessité dans le contexte de la crise géopolitique et climatique. « Pour cette seconde pièce, dit le chorégraphe, j’avais envie, avec Sati Veyrune, de nous connecter à quelque chose de physique. Le cri m’est alors apparu, en tant que forme rapide, en tant que chemin court entre l’intime et le collectif. »
De cri en transe, entrecoupés par de longs silences et des paroles au public, il émane de Sati Veyrunes à la fois une grande candeur, et une puissance de vie et de révolte. Sa danse, magnifiée par la remarquable création-lumière de Nils Doucet, force l’admiration.

Mireille Davidovici

Spectacles vus le 9 juin à Uzès. Le festival La Maison Danse a eu lieu du 7 au 11 juin, 2 place aux Herbes Uzès (Gard) T. : 04 66 03 15 39.

Magdaléna

Le 22 juin, Mouvement sur la ville, Montpellier/plateforme professionnelle.

Du 13 au 17 juillet La Parenthèse, La Belle Seine Saint-Denis, au festival d’Avignon off.

Les 25 et 26 octobre, P.S.O., Comédie de Clermont-Ferrand (Puy-de-Dôme).  

Les 28 et 29 novembre, Festival Danse Dense Paris -Théâtre de Vanves (Hauts-de-Seine) .

Le 26 mars, Immersion Danse, L’Étoile du Nord Paris ( XVIII ème)

Groove

Le 14 juin, C.C.N. Normandie, Caen (Calvados) .

Le 10 septembre Plastic Dance Flore, Versailles ( Yvelines) ; le 22 septembre, Danse à tous les étages ! Rennes (Ile-et Vilaine).

Le 8 octobre, C.C.N. de Tours (Indre-et-Loire).

Le 4 et 5 décembre, Dance collection, (Japon).

Du 6 au 8 février, Les 2 scènes-Scène Nationale de Besançon (Doubs).

du 1 au 5 avril T2G, Gennevilliers (Seine-Saint-Denis)

For you not for you

Le 11 juin Festival Nomadanse,  Rennes (Ile-et-Vilaine).

Du 23 au 25 novembre, La Ménagerie de Verre et Danse Dense, Paris (XI ème).

Les 23 et 24 janvier, Pôle-Sud, C.D.C.N. de Strasbourg (Bas-Rhin) ; le 31 janvier, La Place de la danse-C.D.C.N. et le Théâtre Garonne, Toulouse (Haute-Garonne).

Le 23 mars, L’Étoile du Nord, Paris (XVIII ème).

Le 23 mai, Le Manège-Scène nationale, Reims (Haute-Marne).

Bless The Sound That Saved A Witch Like Me-Cri(s)…

Le 13 juin, Théâtre de l’Échangeur, Bagnolet (Seine-Saint-Denis) et le 30 juin, festival de Marseille (Bouches-du-Rhône).

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