Festival Odyssées en Yvelines

Odyssées en Yvelines: quatorzième festival pour l’enfance et la jeunesse

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Abdelwahed Sefsaf

Une nouvelle édition conçue par Abdelwaheb Sefsaf, metteur en scène et musicien, nommé directeur il y a un an, du Théâtre de Sartrouville-Centre Dramatique National.  «A l’école, dit-il, j’ai découvert le  théâtre et à celui-ci, ma découverte du monde. En CM2, je suis fasciné par une représentation scolaire et au collège, je m’inscris au club théâtre et joue Calchas dans La Belle Hélène de Jacques Offenbach. Aujourd’hui artiste, je sais ce que je dois à l’éducation populaire et à l’action culturelle.»
Pendant trois mois, six petites formes créées pour l’occasion, essaimeront dans une quarantaine de communes. des Yvelines: théâtres, centres sociaux, conservatoires, bibliothèques, collèges, salles municipales avec  séances scolaires, ou tout public.
Il y en a pour tous les âges à partir de quatre ans : Le Chat sur la photo d’Odile Grosset-Grange, jusqu’aux adolescents, et des styles et univers contrastés, du réalisme au poétique. Mais une préoccupation commune chez les artistes: parler d’aujourd’hui aux enfants, en abordant des thèmes comme l’immigration  avec Esquif (à fleur d’eau) d’Anaïs Allais Benbouali; l’adoption: Malik le Magnifik d’Abdelwaheb Sefsaf; la sexualité: Love à Gogo de Marion Aeshchlimann et Benjamin Villemagne, ou encore l’exil: Cette note qui commence au fond de ma gorge de Fabrice Melquiot. L’heure n’est plus aux bisounours

Le Chat sur la photo d’Antonio Carmona, mise en scène d’Odile Grosset-Grange

Après Cartoon plébiscité l’an dernier au festival La Tête dans les nuages à Angoulême et actuellement en tournée, (voir Le Théâtre du blog), la metteuse en scène quitte l’univers des ados et s’adresse aux tout petits. Anya va nous raconter l’histoire du « pire samedi où elle s’est réveillée au milieu de la nuit et a rassemblé ses quatre ans et demi de courage». Tout a commencé quand elle a perdu son chat. Ce compagnon de jeu avec qui elle partageait l’exploration de la maison lui manque et son doudou, Froussard est son nouvel adjoint détective. Qui fait disparaître les objets de la maison comme la photo d’elle avec son chat? D’où viennent les craquements qu’elle entend la nuit: ce  ne sont pas les disputes de ses parents ni les bruits incessants de la circulation? Anya mène l’enquête avec Froussard, jusqu’au grenier et imagine une invasion par les sorciers de la forêt voisine:   ses parents ne s’aiment plus, croit-elle, et vont peut être divorcer,… Quand la lumière s’éteint et qu’ils voient passer dans les couloirs des inconnus chargés de cartons, le doudou n’en mène pas large, Anya non plus…

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© Christophe Raynaud De Lage

 

Odile Grosset-Grange a passé commande à Antonio Carmona, auteur de pièces et de romans pour la jeunesse. Il avait envie de parler de la peur, elle voulait une héroïne. Cette histoire inverse les stéréotypes de genre et le doudou (Guillaume Riant) un peu emprunté a la trouille, la petite fille (Marie-Camille Le Baccon, intrépide et sautillante) va de l’avant.

La scénographe Cerise Guyon a conçu une charmante maison miniature dont les différents niveaux s’ouvrent comme autant de mystérieux tiroirs à explorer. Et les objets apparaissent et disparaissent entre les mains des acteurs comme par enchantement, grâce aux tours de magie enseignés par Père Alex. La metteuse en scène traite ce mini-polar avec élégance, légèreté et humour. Les comédiens ne surjouent pas la peur et un texte écrit au passé et  que se partagent les protagonistes entre les scènes dialoguées, apporte à la pièce la distance d’une histoire qu’on raconte.

Esquif (à fleur d’eau) texte et mise en scène d’Anaïs Allais Benbouali

Près de Lampedusa  des migrants© Reuters J. Medina

Près de Lampedusa, des migrants © Reuters J. Medina

La Méditerranée en a gros sur le cœur: elle déborde de tous les noyés qui gisent  au fond de l’eau. Incarnée par une actrice, elle va parler en leur nom. Pour connaître leur histoire, elle invite le public à se masquer les yeux d’un bandeau et à se laisser guider jusqu’à eux «  de l’autre côté ». De très nombreuses voix prient alors les  enfants de ne pas les oublier, et, en leur nom, de parler d’eux aux parents, responsables de ces tragédies.
Amandine Dolé, actrice et musicienne explique aux enfants comment la Méditerranée, autrefois lieu d’échange entre l’Europe et l’Afrique, est devenue une frontière absurde et un tombeau pour les migrants. Après ces préliminaires un peu didactiques, elle laisse la parole à la Méditerranée qui a les traits d’une jeune femme enceinte (Anissa Kaki). Elle a un petit flacon rempli d’eau et investit délicatement l’air de jeu: une légère bâche en plastique bleu ciel qui gonfle parfois sous l’effet d’un ventilateur….Une scénographie simple et très lisible de Lise Abbadie.
L’actrice raconte les requins, raies mantra, et bébés pieuvres, leurs jeux et leurs chants, puis laisse la place aux voix des disparus : Vinia, Sarah, Kadi, Adama, Asha, Ousman, Neba, Moussa, Abi, Jahia, Ibrahim, Samuel, Mubarak, Asante, Emilie, Sekou, Sabtou, Yasmine, Samy, Esther, Yussif, Maïmouna, Nanomi, Abdo, Peter, Saïd, Hamid …Venant de Guinée, Ghana, Syrie, Cameroun, Afghanistan, Irak, Somalie… « Ils auraient pu venir de France, Espagne, Belgique, Italie, Suisse ou Allemagne si le monde était inversé. Et pour ça, il suffit juste de retourner une carte et ceux du bas seront en haut,  et ceux d’en haut, en bas. »

Esquif ┬0472

® C. Raynaud de Lage_

 

La mer se retire après ce voyage dans les abysses et revenus sur la terre ferme, nous ouvrons les yeux et découvrons une maquette de bateau: le navire ambulance Océan Viking qui sauve chaque année des milliers d’hommes, femmes et enfants du naufrage. La musicienne qui a accompagné le spectacle sur son violoncelle évoque alors l’action de S.O.S. Méditerranée, avec chiffres et récits des sauveteurs…

Anaïs Allais Benbouali a construit Esquif (à fleur d’eau), une « immersion à l’aveugle pour une mer et un violoncelle », à partir de témoignages enregistrés de rescapés recueillis par l’Océan Viking. «Grâce au récit de leurs histoires, nous pourrons sortir d’un profond sommeil collectif »dit  la metteuse en scène  qui envoie ce S.O.S.« à la jeunesse porteuse de changement ». Chaque enfant ou adulte repart avec un prénom inscrit sur un papier dans une enveloppe en guise d’In Memoriam ».

Ce documentaire de trente-cinq minutes, en forme de conte poétique, s’adresse avec beaucoup de tact aux enfants à partir de huit ans. Il peut s’accompagner de sensibilisation scolaire faite par les bénévoles de S.O.S. Méditerranée. L’alerte est lancée: aux programmateurs et éducateurs de l’entendre.
La metteuse en scène, comédienne et directrice artistique de la compagnie la Grange aux Belles est aussi l’autrice de nombreux textes comme Au milieu de l’hiver j’ai découvert en moi un invincible été chez Actes-Sud Papiers et Par la mer (quitte à être noyées)  aux éditions Koïnè. Elle a réalisé avec Isabelle Mandin son premier documentaire, À regarder les poissons, autour de notre rapport à l’empathie. Restons attentifs à ses prochaines réalisations.

(À suivre)

Mireille Davidovici

 Jusqu’au 23 mars, Théâtre de Sartrouville et des Yvelines, place Jacques Brel, Sartrouville. T. 01 30 86 77 79.

 


Archives pour la catégorie Magie

Mehdi Ait Elhocine

© Xavier Bogenschutz

© Xavier Bogenschutz

 Mehdi Ait Elhocine

Il avait huit ans quand son frère qui en avait dix-neuf, lui montra un tour: sans jamais regarder le jeu, il devait deviner la carte qui lui faisait face. Avec plusieurs techniques: au début, il touchait la carte et la devinait, mettait le paquet sur sa tête et il devinait à nouveau! Un moment incroyable pour le petit garçon qu’il était… Mais le grand frère refuse de lui indiquer comment cela marche et lui dit de trouver par lui-même.
Mehdi cherche donc, s’entraîne encore et encore, trouve une solution et veut bien révéler son secret, à condition qu’il lui révèle le sien. Il le fait, son frère aussi mais ce n’est pas la même technique et il trouve ça tout aussi incroyable…

A seize ans, pour impressionner une fille, il lui montre les tours qu’il a appris, plus jeune. Elle adore et se met à en chercher des nouveaux. Heureusement, c’est Noël et il va au marché de Noël à la Défense où se trouve un stand de magie tenu par Paul Techer (MagicLandes) qui y fait des démonstrations incroyables.
Mais le matériel a un coût et Mehdi Ait Elhocineva faire des anniversaires pour financer ses tours. Trois ans plus tard, il entre dans l’animation et crée ses premiers spectacles pour enfants… A vingt-et un ans, il en réalise un pour adultes et commence à s’exercer à l’hypnose. Apprentissage de nombreuses techniques, lecture de nombreux livres spécialisés…. Puis il entre dans Les 78 Tours, une association d’échanges entre magiciens où il peut tester ses spectacles en public lors d’événements et festivals…

 

« Max de Magic Dream, dit-il, m’a aidé : une personne en or et le cœur sur la main qui m’a toujours parfaitement conseillé et accompagné dans mes choix. Comme Faïd Lecame, un artiste incroyable qui critique toujours de manière objective et constructive. Il a su élever ma magie, m’encourage dans mes nouvelles actions et me soutient. Mehdi Ait Elhocine, dit-il, a une famille et des amis d’une valeur inestimable, présents à chaque instant. Son épouse a vu ses premiers tours et ils font maintenant des spectacles ensemble. «M’ont aussi aidé à grandir: le fait d’avoir joué à Gaveau à Paris, devant l’ambassadeur de Chine. La salle était pleine et c’était impressionnant pour le jeune magicien que j’étais. Et maintenant, je gère mieux mon stress et je m’adapte aux différentes situations et toujours, je trouve vite une solution aux imprévus.
Mais il y a aussi des évènements qui m’ont fait perdre confiance en moi pour m’intégrer. J’avais été harcelé au collège… Et être devenu magicien a un lien avec ça. Dans ce rôle, je suis une autre personne et je peux m’exprimer. Après en avoir pris conscience, il y a trois ans, j’ai créé mon action de sensibilisation au harcèlement scolaire et tout mis en œuvre et là, j’ai découvert une autre influence de la magie. »
Il aime, en particulier, celle pour enfants. «Que ce soit sur scène, dans un gymnase, à domicile., etc. je sais que tout va bien se passer. Mais j’apprécie aussi le mentalisme, le mystère et la magie avec les adultes pour créer une émotion, les accompagner dans mon monde, les faire réfléchir et poser des questions sur ce qu’ils viennent de voir. Que ce soit sur scène, pour un mariage, pour des événements, soirées. « 

Mehdi Ait Elhocine admire, entre autres, Derren Brown : «La psychologie qu’il y a derrière, est incroyable et il sait créer des émotions fortes. Mais l’artiste qui m’a véritablement marqué est Yann Frisch. J’ai eu la chance d’assister à son spectacle Le Syndrome de Cassandre que j’ai adoré. Ce mélange de clown, magie, histoire… tout est bon. A voir pour la technique comme pour l’écriture. J’ai aussi vu Personne, dans la même veine. Un spectacle déroutant où il joue des gens aux fortes personnalités. Avec une énergie folle et les tours inclus dans l’histoire, sont dingues.
Et j’ai eu la chance de le voir en conférence avec son numéro Baltass. Encore plus folle que le numéro : on voit le travail de précision qu’il y a eu en amont et tout est calculé : rires, temps faibles, temps forts. Bref, aucun hasard et il n’est pas champion du monde pour rien !Enfin, il y a les livres de Jacques Delord qui m’accompagnent encore. »

 Attiré par le mentalisme, les techniques psychologiques, la magie avec des objets quotidiens : billets, rubicube, cartes…. il dit avoir aussi  été influencé par des films comme Jumanji, Hook… qui ont stimulé son imaginaire : « Quand je suis devenu magicien, j’ai créé mes spectacles autour d’histoires.  Celui que j’ai en tête, un personnage qui a marqué l’histoire, j’aimerais qu’il voit le jour. J’aime beaucoup dire un conte au public et l’amener dans mon univers. 

Et la magie actuelle ? Il pense ne pouvoir la juger. « Les temps changent et il faut s’adapter. J’ai du mal avec les réseaux sociaux mais il faut y être présent. J’ai du mal aussi avec cette magie commerciale où, chaque jour « Le Tour de l’année » va sortir.
Mais je vois des magiciens créant des effets incroyables avec les nouvelles technologies qui changent la vision de leur art comme Kévin Micoud ou Étienne Saglio…
Il faut savoir se renouveler, chercher tout ce qui parle au public et qui le touche… Et bien vérifier nos informations. Il est très à l’écoute et nos mots ont un poids. Chaque personne a une culture différente et je dois prendre cela en compte dans mes choix de tours et mon discours. De fortes croyances peuvent créer un climat gênant après un tour. Je dois donc faire attention à mon style et aux histoires que je choisis. Mais je suis curieux, j’aime apprendre, découvrir… cela influence mon travail. » 

A part son métier, il aime les sorties, le théâtre, l’improvisation théâtrale, les jeux vidéo et de société, surtout ceux de stratégie. Il lit aussi Stephen King et jouer aux playmobil avec ses fils, voyager en restant sur place. Et dit-il, « si vous avez des univers imaginaires à me proposer, je suis preneur. »

 Sébastien Bazou

Interview réalisée le 3 juin.

https://mehdillusion.fr/
Et sur l’action de sensibilisation au harcèlement scolaire: https://youtu.be/XbvEimG3xl0

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