Horizon, mise en scène de Raphaëlle Boitel

Horizon, mise en scène de Raphaëlle Boitel

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© Pierre Planchenault

 

Après l’Opéra de Bordeaux en 2019, la cathédrale Saint-Front à Périgueux trois ans plus tard, les toits et terrasses du Ministère de la Culture à Paris sont devenus une piste d’envol pour les quatorze artistes de cette création. «Il s’agit d’exploiter au mieux, dit Raphaëlle Boitel, les particularités d’un bâtiment dans un ballet acrobatique à ciel ouvert avec une référence au dépassement de soi et à la force de la solidarité. »

Elle quitte ici les jeux d’ombres et de lumières qui font le charme de La Chute de l’ange (voir Le Théâtre du blog) mais le plein jour lui convient aussi bien. Chaque scène et chaque mouvement sont imaginés à partir de cette architecture du XVII ème, et du XVIII ème siècle imaginée par Victor Louis, l’architecte de l’Opéra de Bordeaux ( encore lui!).
Pour achever ce terrain de jeu, sur la terrasse qui fait face au Conseil d’Etat, ont été dressées des colonnes noires. Et au fait du toit d’ardoises, trois mâts chinois tutoient le ciel à trente mètres du sol. Des agrès pour une demi-heure d’un ballet aérien, au-dessus de la place où Buren a installé ses Deux plateaux, dits Les Colonnes. (1986)

Une cycliste extravagante se fraye un chemin en équilibre sur un vélo, parmi les spectateurs perchés sur les colonnes noires et blanches ou assis au sol. Elle va rejoindre la troupe de circassiens en escaladant la façade. «Ils ont pensé à tout, ironise-t-elle, sauf à mettre des escaliers! » Avant de présenter les institutions qui dominent la place: Comédie-Française, Conseil d’Etat, Ministère de la Culture, Conseil constitutionnel.
Il est rare de voir du cirque dans ce respectable environnement et de pouvoir assister aux répétitions toute la semaine.

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©Pierre Planchenault

Sur un pignon de la façade, un acrobate en équilibre sur les mains, dessine sur l’azur d’impressionnantes figures, avant de retrouver ses partenaires. Tous aussi élégants, en costume noir et chemise blanche : Fleuriane Cornet, Louis Davion, Valentin Dubois, Gaëtan Dubriont, Rémi Girard, Nabil Hadim, Antoine Henriques, Matthieu Le Gall, Nhât-Nam Lê, Yasmine Ouadi, Mohamed Rarhib, Vassiliki Rossillion, Marie Tribouilloy, Quentin Signori,  nous éblouissent dans des courses-poursuites, sauts et chutes vertigineuses pour finir avec un trio au mât chinois, une chorégraphie ponctuée par des figures en drapeaux flottant à trente mètres du sol,

Ces monte-en-l’air –circassiens ou  “traceurs »  du «parkour», une discipline sportive où on franchit des obstacles urbains ou naturels en courant, sautant, cascadant–  apportent un supplément de poésie à cette architecture austère et solennelle.

La chorégraphie acrobatique, orchestrée sur un arrangement véloce des Quatre Saisons de Vivaldi, confirme le talent de Raphaëlle Boitel dont les spectacles en tournée sont à découvrir.

 Mireille Davidovici

Spectacle créé du 15 au 17 septembre au Palais- Royal, place Colette, Paris (Ier)dans le cadre des Olympiades culturelles.

 La Chute des Anges

Du 29 septembre au 7 octobre, Théâtre des Célestins, Lyon; les 10 et 11 octobre, Le Volcan, Le Havre (Saine-Maritime).

Les 8, 9 décembre ,Théâtre Jean Vilar, Suresnes (Hauts-de-Seine) ; le 12 décembre, Centre culturel Jacques Duhamel, Vitré (Deux-Sèvres) ; les 15 et 16 décembre, Le Théâtre-Centre national de la marionnette Laval (Mayenne) ; les 20 et 21 décembre, La Passerelle, Saint-Brieuc (Côtes-d’Armor).

Du 16 au 18 janvier, Théâtre de Lorient (Côtes d’Armor) ; les 25 et 26 janvier, Théâtre de Cornouaille, Quimper (Finistère).

Et les 17 et 18 mars,Théâtre de Charleville-Mézières (Ardennes).

Ombres Portées les 17 et 18 novembre, L’Azimut-La Piscine, Châtenay-Malabry (Hauts-de-Scène) dans le cadre de la Nuit du cirque et en tournée.

Un Contre un du 26 au 30 décembre, Théâtre Silvia Monfort, Paris (XV ème) puis en tournée.

 


On n’est pas là pour sucer des glaces mise en piste du Galapiat Cirque

On n’est pas là pour sucer des glaces, mise en piste du Galapiat Cirque

© Sébastien Armengol-5190 - copieC’est le « spectacle de fin d’études » de la trente et unième promotion de cette institution reconnue dans le monde entier avec onze garçons et cinq filles, neuf disciplines de cirque, neuf nationalités. Mis en piste par d’anciens élèves  qui ont fondé le collectif du Galapiat Théâtre, il y a treize ans.«  Ce qui est intéressant, c’est le désir des élèves de se mettre en danger, de sortir de leur zone de confort. C’est beau, c’est ça pour nous le cirque.» (…) «Après quinze jours de résidence, on leur a dit: Jusque là, tout va bien, mais c’est le dernier spectacle que vous allez faire ensemble… Soudain, ils en ont pris conscience et n’ont pas envie de rater cela. Notre désir est qu’ils donnent envie d’être rencontrés. Nous ne sommes pas inquiets, ils sont bons, c’est leur métier, ce sont des chats. »

Sébastien Armengol-5666 (2) - copieAu menu, différentes disciplines circassiennes. Surtout du côté acrobatie,avec la bascule coréenne (le Suisse Damien Bucci, le Danois Sébastien Krefeld, les Suédois Oskar Norin (qui est aussi violoniste) et Anton Persson): un imposant collectif tout à fait étonnant avec de brillants numéros. Mais aussi l’Espagnol Fernando Arevalo Casado et le Chilien Pbalo Pennalilo Soto à la corde lisse, l’Allemande Darianne Koszinki à la corde volante, l’Italienne Aurora Dini et la Française Noémi Devaux au cerceau aérien. Le Mexicain Ivan Morales au trapèze volant. Et à la roue Cyr (une roue en tube métallique d’environ deux mètres où s’insère l’acrobate pour réaliser des figures) l’Italienne Marica Marinoni qui avait commencé par la trampoline. Et les Français Céline Vaillier et Maël Thierry au mât chinois.. Nombre de ces numéros étant réalisés plutôt en solo… Et le brillant Carlo Cerato qui pratique un jonglage d’anneaux avec un grand sens du comique et une certaine couleur surréaliste.
Donc surtout plusieurs disciplines de haut niveau d’acrobatie en l’air sur corde ou trapèze ou au sol et plus de garçons que de filles… Mystère des sélections à l’entrée ! Cela commence par les glissades drôlatique d’un acrobate les pieds pris dans des blocs de glace. Jusqu’au moment où ses camarades l’aideront à s’en délivrer. Mais  cela commence mal avec ce numéro trop long et mal mis en scène comme la plupart des autres qui suivront sans vraiment de lien.

Mais tout est impeccablement réglé et il y a une solidarité exemplaire entre les élèves comme dans toutes les promotions du C.N.A.C. Cela fait du bien de voir ces jeunes gens issus de pays si différents (mais aucun Africain !) travailler tous ensemble avec autant de passion que de maîtrise de soi et d’humilité. Ici, personne ne sert de faire valoir à quiconque et on sent un respect absolu de chacun au sein de cette école. Les apprentis-comédiens de certaines grandes écoles pourraient en prendre de la graine…

191202_RdL_0256_xlarge - copieOui, mais voilà, l’édition 2019 ressemble à celle de 2018 et nettement moins bonne que les précédentes:  la mise en piste ou en scène comme on voudra n’est pas de grande qualité : manque de rythme, redites (comme la bascule coréenne) longueurs, fausse fin… On nous dira sans doute que c’est une première mais non, il n’y aucune raison,  la première représentation doit aussi être impeccable et tous les spectateurs ont droit au meilleur…

C’est dommage pour ces futurs artistes, tous exceptionnels, qui vont entrer dans la vie professionnelle mais ici on assiste plus à une démonstration tout à fait réussie de travaux d’élèves mais non à un véritable spectacle. Et on a le droit d’être déçu. Poésie et prises de risque acrobatiques sont loin d’être incompatibles mais ici l’ensemble est trop brut de décoffrage et il y a encore du travail en perspective…  Il faudrait absolument au moins resserrer les choses avant la longue tournée annoncée: cela irait déjà mieux.  Donc à suivre.

Philippe du Vignal

Du 4 au 15 décembre, Centre National des Arts du Cirque, 1 rue du Cirque, Châlons-en-Champagne (Marne).

Parc de la Villette, Paris ( XIXème), du 22 janvier au 16 février; Les Halles, Schaerbeek (Belgique)  les 28, 29 février et le 1er mars.
Théâtre municipal de Charleville-Mézières (Ardennes), les 24, 25 et 26 mars. Cirque Théâtre d’Elbeuf (Seine-Maritime).
Pôle national Cirque -Normandie au festival SPRING les 3, 4 et 5 avril.

Le Manège-Scène nationale de Reims ( Marne) les 17, 18 et 19 avril.
Montigny-lès-Metz (Moselle), Cirk’Eole dans le cadre des festivals Les nuits d’Eole et Passages, les 8, 9 et 10 mai.
Centre culturel Le Grand Pré de Langueux (Côte d’Armor),  les 5, 6 et 7 juin

 

CIRCa 2019 Festival du cirque actuel, Entretien avec Marc Fouilland

© G.Guibert

© G.Guibert

CIRCa 2019 Festival du cirque actuel

 

Entretien avec Marc Fouilland directeur du pôle national du cirque d’Auch

 Ce trente-deuxième festival est le dernier que programme Marc Fouilland qui va quitter la direction du CIRCa, après dix-huit ans de bons et loyaux services. Que de chemin parcouru depuis 1997, date de son arrivée à Auch, au service culturel de la Ville, où il comprend que «le projet à construire ici, doit s’appuyer sur les arts du cirque  » !

Le terrain est favorable car l’aventure circassienne débute ici en 1975. L’abbé de Lavenère-Lussan organise un atelier cirque au collège Oratoire Sainte-Marie pour apprendre aux jeunes à vivre ensemble. Le Pop Circus, école de cirque d’Auch, est né et, dès 1989, la ville accueille les rencontres de la Fédération Française des Écoles de Cirque (FFEC) sous divers chapiteaux. En 1996, le Festival ouvre ses portes aux compagnies professionnelles, alors que le « nouveau cirque » commence à émerger. Jusque là gérée par des bénévoles, la structure se dote d’un permanent en 1999. Elle a gardé ce lien avec ces amateurs en mobilisant, pendant le Festival, quelque deux cents volontaires qui assurent, entre autres, l’accueil aux entrées des spectacles ou conduisent les navettes entre les dix-sept salles et chapiteaux disséminés en ville et transfèrent artistes et programmateurs vers les gares et l’aéroport.

À l’arrivée de Marc Fouilland, l’équipe va s’étoffer petit à petit. Il prend en 2001 les commandes de la première Scène conventionnée pour les arts du cirque, baptisée Circuit, qui sera labellisée “Pôle national des arts du cirque Auch-Gers-Midi-Pyrénées » en 2011, sous le nom de CIRCa. Dès 2012, il organise l’installation du CIRC (Centre d’Innovation et de Recherche Circassien) sur le site d’une ancienne caserne. Autour du Dôme de Gascogne, chapiteau permanent pensé pour accueillir les spectacles en frontal ou en circulaire, on trouve une salle de répétition de 480 m2, un restaurant d’insertion (la Cant’Auch), des bureaux, des ateliers et espaces de stockage. Les vastes terrains alentour permettent de dresser des chapiteaux itinérants pendant le festival.

 

Instable ©thomas-amorim

Instable de Christophe Huysamn cie les Hommes penchés © thomas-amorim

L’équipe compte aujourd’hui dix-sept salariés permanents pour mener, tout au long de la saison, outre le Festival, des actions culturelles et pédagogiques régionales et des résidences de création. « La mission du pôle national comporte des actions en milieu scolaire qui touchent près de 16.000 jeunes du département », précise Marc Fouilland.

 Le Festival n’est donc que la partie visible du complexe CIRCa. Cet événement annuel a pour objectif de « mettre en visibilité les artistes », en rassemblant écoles de cirque, artistes professionnels et programmateurs (trois cents cette année !)  « La chance du festival, ce sont les rencontres des écoles », dit Marc Fouilland qui définit le cirque contemporain comme : « pratiqué par des artistes qui on suivi des écoles ». Au Festival, on peut voir les travaux de plus de 550 élèves sous l’égide de la FFEC : Fédération Française des Ecoles de Cirque, qui réunit douze fédérations régionales et 136 écoles, soit 27. 000 licenciés de tout âge, amateurs et professionnels… 

 

C) Ch ristophe Raynaud de Lage

i-solo de Jérôme Thomas © Christophe Raynaud de Lage

L’heure est au bilan pour le directeur : « Le public a grandi avec CIRCa : moins de 5.000 au début et plus de 30.000 spectateurs cette année !  Pour la plupart prêts à prendre des risques. « C’est  l’un des rares endroits où la diversité des propositions permet aux gens de se laisser surprendre, dit Marc Fouilland. Le public comprend que le cirque d’aujourd’hui est pluridisciplinaire et, par la suite, il peut aller vers la danse et le théâtre. Le langage du corps parle directement. L’artiste questionne sur comment, on prend sa vie en charge. Ici, on veut former un public avec une programmation qui n’enferme pas le cirque dans des formes commerciales mais le met devant des corps engagés d’artistes qui prennent des risques comme cette année, les Suédois de Circus I Love you ou les Italiens du Circo Zoé ( Born to be circus) (…) 

Les artistes d’aujourd’hui continuent en effet à prendre des risques sur les formes avec des dispositifs circulaires, frontaux, quadri-frontaux et beaucoup d’inventions d’agrès, d’écritures. Même les compagnies installées, par exemple cette année, pour Moebius, la compagnie XY a dû déporter sa pratique avec la chorégraphie de Rachid Ouramdane. Et Jérôme Thomas a joué son solo (I-Solo) devant six cents spectateurs. »

Les Scènes nationales ont commencé à programmer des spectacles de cirque mais se montrent plus frileuses vis-à-vis de cet art, qu’envers la danse. Et une douzaine seulement de leurs responsables a assisté au Festival. « J’ai fait le choix, dit Marc Fouilland, d’intensifier le nombre de spectacles car les compagnies ont besoin d’être vues pour être diffusées. Il y en a trente-deux cette année dont la moitié sont venues en résidence de création à Auch. » En revanche, il y avait trente-cinq programmateurs étrangers, car le cirque continue à beaucoup tourner en dehors de l’hexagone : « L’Institut Français s’est beaucoup servi du cirque comme passeport de la culture française mais les budgets sont en baisse… »  

© Charlette Lefebure

Möbius de RAchid Ouramdane cie XY © Charlette Lefebure

Pourquoi quitter un CIRCa en plein essor ? « Parce que c’est le bon moment pour moi, dit Marc Fouilland. Avant de me lasser, d’être trop fatigué. Mais je suis très fier du travail accompli et des fidélités que j’ai eues. Par exemple, la compagnie franco-catalane Baro d’evel, que j’ai accompagnée depuis sa sortie d’école, Jérôme Thomas  ou encore Christophe Huysman, un auteur de théâtre avec sa compagnie Les Hommes penchés. L’une des chances, quand on travaille dans le secteur, c’est de voir évoluer les artistes, de voir comment on passe de spectacles à une œuvre.» De cet observatoire, il a pu aussi assister à l’évolution et des thématiques et des engagements politiques : « L’écologie, la question des femmes mais aussi celle du genre, posée y compris par les hommes. Car le circassien est quelqu’un qui n’a pas envie d’entrer dans des moules. Il veut réinventer des fonctionnements collectifs.»    

 Marc Fouilland ne part pas très loin : il prend la tête de l’Adda 32 ( Association départementale pour le développement des arts du Gers),  l’un des partenaires privilégiés de CIRCa. De là, il pourra suivre au plus près le devenir d’une structure qu’il a mise en place et fait prospérer, et les artistes qui lui tiennent à cœur. « Ce festival doit rester à  la fois un lieu pour les familles et offrir une visibilité au contemporain.» Pour son successeur, dont la nomination interviendra l’année prochaine, il émet le vœu que l’État qui soutient CIRCa depuis le départ, le finance enfin à la hauteur de ses promesses… À suivre.

Mireille Davidovici, le 28 octobre.

Le festival 2019 s’est tenu du 18 au 27 octobre. CIRCa , Allée des Arts, Auch (Gers) T. : 05 62 81 65 00 www.circa.auch.fr

Machine de cirque de Vincent Dubé

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Machine de cirque, de Vincent Dubé

 

   Ils sont cinq, Elias Larsson, Raphaël Dubé, Maxima Laurin, Ugo Dario, avec un musicien multi-instrumentiste et pas mal accoquiné avec le surréalisme, Frédéric Lebrasseur. Leur chantier : un échafaudage qui n’a l’air de rien mais sera le lieu de leurs prodiges, chutes et envols verticaux. Techniciens ultra qualifiés, de par la précision et la force de leurs gestes, enfants par le jeu, les risques joyeux qu’ils prennent et leurs rires complices, champions sportifs évidemment ; avec tout cela, ils nous éblouissent et nous font rire, sans jamais se prendre pour des dieux. Ils sont juste jeunes et beaux, dans leur maîtrise fragile, capables d’encaisser les ratés de leur spectacle hyper rodé, quitte à lâcher un « merde » très décontracté pour une tentative en échec (aussitôt surmonté, selon la loi du cirque). Ils prennent le temps de souffler après cent acrobaties à la bascule qui nous tiennent, nous, en haleine, et trouvent le moyen de se reposer (se poser ailleurs, comme des oiseaux ?) avant de s’élancer encore, requinqués par leurs moments de danse lente ou d’humour très contemporain.

Peu importe le fil dramaturgique, le seul véritable fil est celui, à la lettre, de la « machine de cirque ». Ils imaginent un monde où ils seraient les seuls survivants? De fait, ils sont seuls à tout faire, à cinq, sur la scène. Seuls, enfin presque, car nous sommes là. Ils s’autorisent à franchir le quatrième mur, à rompre l’enchantement pour venir chercher dans la salle dans la salle une gentille fille qui voudra bien jouer avec eux un moment. La nôtre eut le talent d’accepter avec discrétion et bienveillance, guidée par la main de son prétendant au milieu de ses partenaires jouant – c’est l’occasion ou jamais – les utilités. On vous laisse découvrir comment. Tous pour un, un pour tous : ils osent même laisser un temps l’un d’eux se dépatouiller avec son trapèze en vrille ou autre verticale à parcourir par tout moyen possible, surtout le plus inattendu.  « Hé, les gars ! » : à ce niveau, on peut appeler à l’aide, « pour de faux », ça détend.

Leur dispositif scénographique en rajoute sur le double registre d’une efficacité sidérante et de l’image d’une technologie mécanique jouissant de sa propre complication. La bascule coréenne, le jonglage aux massues ou de la roue Cyr, grands classiques du cirque, ils les réinventent avec leur danse fluide, l’enchaînement des causes et des effets qui les conduisent à passer mine de rien d’un agrès à un autre, sans jamais insister sur la performance. Désinvoltes ? Plutôt des fous du timing, du tempo, du rythme et d’une élégance huilée à l’humour.

Ces jeunes messieurs ne viennent pas de nulle part : Cirque du Soleil, les Sept doigts de la main, récompenses au grand concours du Cirque de Demain… Bonnes écoles, mais ils ont largement dépassé le stade de l’école, assez libres pour inventer un numéro irrésistible qu’ils font délicieusement durer. Nus, fragiles, comment protéger sa pudeur avec quatre serviettes de bain pour quatre, quand en seul en accapare plusieurs ? Jonglerie inédite, acrobatie douce réglée comme un ballet, étourdissant calcul géométrique en action que ce morceau de bravoure !

Ils ont la grâce. Ce concentré de cirque contemporain tourne dans le monde entier depuis la création de leur groupe en 2013. Si vous avez la chance de ne pas les avoir encore croisés, saisissez celle de les voir à la Scala.

Christine Friedel

La Scala (Paris 10e), à 18h30 jusqu’au 3 novembre (18h le dimanche) -T.01 40 03 44 30

Théâtre Musical Pibrac (31820) à 20h30 le 29 novembre- T.05 61 07 12 11

L’Olympia (Paris 9e) à 20h30 le 7 décembre – T. 0 892 68 33 68

La Grange de La Tremblay à Bois d’Arcy (78 390) à 2Oh30 le 27 mars 2020 – T.01 30 07 11 80

 

Bosch Dreams mise en scène de Samuel Tétreault, mise en images d’Ange Potier

Bosch Dreams mise en scène de Samuel Tétreault, mise en images d’Ange Potier

 Bosch4_1A l’heure où l’on met en scène les grands peintres de l’Histoire, comme à la Carrière des Lumières aux Baux-de-Provence (voir Le Théâtre du Blog), des circassiens osent ici faire une incursion  surprenante dans l’œuvre de Jérôme Bosch (1450-1516). La compagnie  québécoise les 7 Doigts, qui joue depuis 2002 et avec succès dans le monde entier, célèbre, à la demande de la fondation Hieronymus 500, le cinq centième anniversaire de la mort du peintre avec une remarquable création  alliant numéros spectaculaires et cinéma d’animation.

Les 7 Doigts  nous invite ici à partager Le Jardin des Délices. Le célèbre triptyque, exposé au Musée du Prado à Madrid, s’ouvre ici en plein écran, comme un gigantesque livre d’images où les circassiens rejoignent les créatures fantastiques du peintre, natif de Den Bosch,  un bourg au sud des Pays-Bas.  Une petite fille au ballon rouge nous entraîne dans ce monde fabuleux, telle une Alice au pays des merveilles, et nous conduit dans cette iconographie irréelle, du Paradis à l’Enfer. Elle se révèlera aussi une excellente trapéziste et meilleure guide que le conférencier aux commentaires lourds et inutiles qui essaye, entre les scènes, de décrypter cette œuvre étrange.. 

 Les images parlent mieux que les mots, et les corps nous enchantent. On se promène dans le panneau central du tableau, peuplé d’une humanité étrange et fornicatrice, d’un bestiaire monstrueux et cocasse. De la toile, animée en trois dimensions par Ange Potier, émergent  des villageois aux masques grotesques, un prestidigitateur et des acrobates moyenâgeux. Plus tard, une contorsionniste décrit des arabesques dans une bulle, telle les femmes écartelées du tableau… Light my fire enflamme un duo  aérien onirique : Jim Morrison, poète et musicien, cofondateur du groupe The Doors ( 1943-1971) était un grand admirateur de Jérôme Bosch…

 Après les délices de ce jardin, accompagnées des musiques planantes de The Doors ou de Philip Glass un paysage d’apocalypse se déploie, scènes de guerre et d’incendie dans une scénographie calquée sur le dernier volet du triptyque. Avec des artistes  au sommet de leur art au milieu des bombes, des sirènes et des flammes… Malgré les commentaires besogneux de l’animateur pédagogue et ses clins d’œil appuyés du côté de Salvador Dali, qui rompent régulièrement la magie du spectacle, cette féérie nous captive, et nous ne regretterons pas d’être venus.

Mireille Davidovici

Spectacle vu à Bonlieu-Scène nationale d’Annecy (Haute-Savoie), le 19 décembre.

Les 24 et 25 janvier, Maison des Arts du Lac Léman Thonon-les-Bains (Haute-Savoie) ; du 29 au 31 janvier, Scène nationale de Bayonne (Pyrénées- Atlantiques).
Le 5 février, Scènes Mitoyennes de Cambrai (Nord) ; les 8 et 9 février, Grand Théâtre de Mâcon (Saône-et-Loire )  et du 12 au17 février, Odyssud, Blagnac (Haute-Garonne).

F(я)iction, spectacle de fin d’études, trentième promotion, mise en scène d’Antoine Rigot et Alice Ronfard de la compagnie des Colporteurs

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F(я)ICTION, spectacle de fin d’études, trentième promotion du Centre National des Arts du cirque, mise en scène d’Antoine Rigot et Alice Ronfard

Le C.N.A.C. est un établissement supérieur et de recherche. Inauguré en 1986 dans le cirque municipal de Châlons-en-Champagne construit à la fin du XIXe siècle par l’architecte Louis Gillet, et ensuite dans les années cinquante, voué à des matchs de catch… Inscrit au titre des Monuments historique depuis 1984,  il a aussi depuis trois ans, de nouveaux espaces de travail sur le site de la Marnaise, situé à proximité.

Il dépend du ministère de la Culture et attribue depuis 2015, le Dnsp AC -Diplôme national supérieur professionnel d’artiste de cirque, à l’issue d’un cursus de trois ans en collaboration avec l’Ecole nationale des arts du cirque (Enacr) de Rosny-sous-Bois assurant la formation en première année. Et depuis 2012, le C.N.A.C. participe au Bac L-option arts du cirque,  au lycée Pierre Bayen de  Châlons-en-Champagne, et assure aussi des formations pour les professionnels du cirque…

La compagnie des Colporteurs  fondée en 96, s’associa à celle des Nouveaux Nez pour imaginer il y a dix ans, La Cascade, Pôle national des arts du cirque à Bourg-Saint-Andéol (Ardèche) et produit et diffuse ses spectacles sous chapiteau. Antoine Rigot a été formé à l’Ecole Nationale du Cirque Annie Fratellini. Et Alice Ronfard a mis en scène une trentaine de pièces  au Canada et a récemment  Candide de Voltaire au Théâtre du Nouveau Monde à Montréal où elle avait aussi créé L’Imposture (voir Le Théâtre du Blog).

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© Christophe Raynaud de Lage :

Oui, mais voilà : la direction des jeunes interprètes et la mise en scène n’ont rien à voir avec celles des remarquables présentations de fin d’études précédentes. Les numéros se succèdent mais souvent sans rythme et ne font pas spectacle. Et la référence à Shakespeare est des plus floues. «Inspirés par les thèmes que propose La Tempête, s’appuyant sur un travail d’écritures et d’improvisations, les Colporteurs ont invité ces jeunes artistes circassiens à partir à la recherche d’un un univers et d’une identité qui leur est propre et où tout est possible. Un monde inversé, celui de la création et du fantastique, de l’autre côté du miroir. Le défi était de parvenir à créer une forme autant théâtrale que circassienne, un cirque qui parle à la communauté, qui donne du sens à la performativité. »

On veut bien, mais cette note d’intention assez prétentieuse n’aboutit sur rien de bien convaincant… Quelle déception! Et pour un cirque qui, soi-disant, «donne du sens à la performativité», il faudra repasser ! Nous ne vous conseillons pas du tout ce pseudo-spectacle. Et encore une fois, les jeunes circassiens, leur énergie et le haut niveau de leurs performances ne sont pas ici en cause.

Philippe du Vignal

Centre national des Arts du Cirque, Châlons-en-Champagne (Marne) jusqu’au 15 décembre.

Paris,  Parc de la Villette, du 23 janvier au 17 février. Cirque Théâtre d’Elbeuf (Seine-Maritime). Pôle national Cirque-Normandie, dans le cadre du festival Spring, du 29 au 31 mars. Théâtre municipal de Charleville-Mézières (Ardennes), du  19 au  22 mars.
Le Manège, Scène nationale de Reims (Marne), du 12 au 14 avril. Montigny-lès-Metz  (Moselle), du 20 au 22 avril.

 

 

La Condition collective, chorégraphie et mis en scène d’Elsa Guérin

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La Condition collective, chorégraphie et mis en scène d’Elsa Guérin

Deuxième édition de ce festival piloté par Jean Lambert-wild, directeur du Théâtre de l’Union, Centre Dramatique National de Limoges et de l’Académie qui fête ses vingt ans. Cette année, il s’est ouvert  à une nouvelle discipline : le cirque. Huit spectacles gratuits dont La Condition collective pour ce festival de l’Union des écoles avec notamment, Le Cercueil est trop grand pour la fosse, venu de Singapour et Le Roi Lear, de l’Académie centrale de Pékin, Zone franche de Conakry (Guinée),  quatre « masterclass », un stage de théâtre et deux stages de critique professionnelle. «Ce festival international, dit Jean Lambert-wild, est aussi l’occasion d’affirmer que la Nouvelle-Aquitaine, la ville de Limoges et la Haute-Vienne  sont des terres d’accueil, d’échange qui ne ratent jamais l’opportunité de célébrer le talent de cette jeunesse et de s’ouvrir à l’ailleurs. »

L’Académie est, elle, située au château du Mazeau à Saint-Priest-Taurion à douze kilomètres de Limoges. Sur 1.200 m2, avec plateau, salles de répétition et de cours, loges, locaux vidéo, centre de documentation, atelier de construction, et  espace de vie. L’Académie,  ouvrira aussi ses portes à la prochaine rentrée une classe préparatoire destinée à des élèves venus d’Outre-Mer, une grande première en France: on vous reparlera de cette expérience inédite…

La Condition collective est le résultat d’un atelier de travail d’environ deux mois avec les élèves de troisième année de la Séquence 9 de l’Académie de l’Union à Limoges : Gabriel Allée, Claire Angenot, Quentin Ballif, Matthias Beaudoin, Romain Bertrand, Hélène Cerles, Ashille Constantin, Yannick Cotten, Estelle Delville, Laure Descamps, Antonin Dufeutrelle, Nina Fabiani, Marine Godon, Isabella Olechowski, Sherley Paredes, Nicolas Verdier. Cela se passait ce soir-là sous le grand chapiteau du Sirque, Pôle National des Arts du Cirque/Nouvelle Aquitaine, à Nexon (Haute-Vienne). Avec une scénographie frontale:  juste un rideau de fond et un tapis de danse, pour une centaine de spectateurs.  

«Imaginée et mise en scène, dit Elsa Guérin,  pour les seize jeunes élèves-comédiens de L’Académie de l’Union, La Condition collective, une pièce où jonglage et mouvement sont au cœur de l’écriture avec une succession de transformations, un fondu enchaîné d’états, les corps des acteurs et les objets s’agencent, entrent en contact pour former un groupe, gomment les frontières pour créer une entité, qui s’agrège et se désagrège, se déploie, se répand, se rétracte, avance.» Cela commence par une intervention de Jean-Luc Godard en voix off: pas très claire… Puis se succèdent quelques tableaux où les jeunes comédiens prennent des poses en groupe comme autrefois les acteurs du Living Theatre, puis le travail de jonglage en groupe débute avec une transformation permanente du groupe qui s’apparente souvent à de la danse contemporaine et visiblement inspiré de Merce Cunningham. Le jonglage s’effectue avec un maximum de trois boules souples, ce qui n’est déjà pas si mal pour des comédiens après un travail de courte durée…

La relation entre le travail au quotidien d’un jeune acteur en formation et une discipline comme le jonglage? Pas évident mais pourtant solide: exigence d’une concentration maximum donc équilibre entre le corps et l’esprit, manipulation d’un objet dans l’espace,  jeu individuel mais aussi collectif, indispensable solidarité dans le groupe… Tout cela bien utile dans la formation d’un jeune comédien et Paul Golub, le responsable pédagogique de l’Académie, a eu raison d’introduire ce temps d’apprentissage d’une discipline circassienne dans le cursus. Et il y a une belle séquence où une bataille a lieu entre garçon/ garçon, fille/fille ou encore garçon/fille chacun avec une boule sur la tête. Il s’agit bien entendu de faire tomber cette foutue boule de la tête de l’adversaire jusqu’à extinction. Un (e)seul(e) restant en piste à la fin.

Mais tout n’est pas de cette veine !  Et on a plus affaire ici à une démonstration en quarante-cinq minutes qu’à un véritable spectacle, même si les jeunes comédiens sont très engagés et si cela se passe dans d’excellentes conditions techniques. On oubliera vite la «chorégraphie» comme la «mise en scène», assez prétentieuses d’Elsa Guérin. Mais qu’importe, ces seize jeunes comédiens auront sans doute beaucoup appris dans cette pratique du jonglage, à la fois sur la conscience de leur propre corps et ses limites, et sur les mouvements d’ensemble. «Il faut entretenir la vigueur du corps pour conserver celle de l’esprit, disait déjà Vauvenargues en 1746».

Philippe du Vignal

Spectacle vu le 15 juin, au Sirque, Pôle National des Arts du Cirque/ Nouvelle Aquitaine Nexon (Haute-Vienne).

L’Académie de l’Union, Ecole Supérieure professionnelle de Théâtre du Limousin, Le Mazeau, 87480 Saint-Priest-Taurion.T. : 05 55 37 93 93/06 45 38 13 48. adm@academietheatrelimoges.com

 

 

Optraken par le Galactik Ensemble

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Optraken par le Galactik Ensemble

 Le Monfort à Paris est devenu un lieu de  référence pour les arts du cirque, présentés dans la salle, ou sous un chapiteau. Les cinq garçons du Galactik Ensemble se sont formés à l’Ecole nationale des arts du cirque de Rosny-sous-Bois qui dispense une excellente formation. Ils pratiquent une «acrobatie de situation », dans un rapport entre un environnement accidenté et la capacité de l’homme à s’y ajuster. Leur démarche consistant à placer l’individu comme le groupe,  face à un imprévisible réel et à une situation à risques. 

 Le plateau nu est surmonté de quatre-vingt petits sacs gentiment suspendus aux cintres, dont on se dit qu’ils finiront bien par tomber!  D’abord dans un ballet de châssis noirs, apparaît et disparaît un acrobate. On en comprend le mécanisme: deux compères, alternativement, manipulent les châssis et les font passer d’un côté et de l’autre, mais ils réalisent ce tour de magie avec une grande fluidité, sans qu’on en voit les coutures. D’une simplicité prodigieuse, comme l’ensemble du spectacle.

 Le danger est partout ! L’un secoue la tête et il en tombe des petites billes qui explosent par terre ! Il y a aussi quelques belles glissades avec une chorégraphie de l’absurde. Sur  ce plateau où règne le noir, des lumières à dominante blanche et des costumes clairs  pour un univers visuel élégant et recherché. 

Malgré la virtuosité de leurs acrobaties, Mathieu Bleton, Mosi Espinoza, Jonas Julliand, Karim Messaoudi et Cyril Pernot ne visent pas à en mettre plein la vue, mais à déclencher le rire, le sourire mais aussi parfois la peur. Ce spectacle d’une heure, fluide, précis et exigeant, offre de beaux moments de grâce et nous tient en haleine. Très bien construit, avec une  vraie progression dramaturgique, il commence doucement et finit en apothéose.  Ici, tout ne passe pas par la performance, même si elle est présente d’un bout à l’autre. Une leçon pour les jeunes… et les moins jeunes.

Julien Barsan

Théâtre Monfort, Paris XVème jusqu’au 25 novembre T. 01 56 08 33 88

Moulin du Roc, Niort,  le 30 novembre, et du 5 au 7 décembre, à la Coupe d’or à Rochefort, et du 18 au 22 décembre au Théâtre de Lorient.

 Les 16 et 17 janvier à la Passerelle à Gap ; le 20 janvier à Houdremont (La Courneuve), du 25 au 27 janvier à Châteauvallon (Var).
Le 2 février à la Mégisserie de Saint-Junien ; le 25 février à Mars-Mons, et le 28 février aux Halles de Schaerbeek à Bruxelles.
 Les 23 et 24 mai aux 3T de Châtellerault.

 

Cirkopolis par le Cirque Eloize, mise en scène de Dave Saint-Pierre et Jeannot Painchaud

©Cirque Eloize

©Cirque Eloize

Cirkopolis par le Cirque Eloize, mise en scène de Dave Saint-Pierre et Jeannot Painchaud

Il faut saluer l’ouverture d’un nouveau théâtre dans  le XIIIème, place d’Italie, succédant à un cinéma,  ce qui est très rare.  Avec un spectacle grand public mais non racoleur de cette compagnie de cirque québécoise au doux nom d’Éloize, un mot du patois acadien se prononçant elwaz et signifiant «éclair de chaleur» aux Îles-de-la-Madeleine, archipel du golfe du Saint-Laurent à 200 km de la côte Est du Québec et dont les artistes de la première troupe du Cirque Éloize étaient tous originaires. Fondé en 1993, la compagnie a créé quelque onze spectacles originaux dont iD en 2009, Cirkopolis en 2012, Le Music-Hall de la Baronne en 2014 et Saloon en 2016. Avec plus de 4.000 représentations dans cinquante  pays…

«Ce spectacle, dit Jeannot Painchaud qui a fondé la compagnie et en est le directeur artistique, parle d’espoir, de la quête de soi-même qui conduit à la liberté,  Le personnage principal se rend compte qu’il veut échapper à ces engrenages de la ville-usine, quitter cet environnement déshumanisé qui finirait par l’écraser. » Dave Saint-Pierre dont  nous avions vu un spectacle en solo au dernier festival d’ Avignon, (voir Le Théâtre du Blog) en a réalisé la chorégraphie, avec un souci d’esthétique et d’harmonie du geste. Et les performances circassiennes qui se succèdent, ont donc, grâce à lui ici, un supplément d’âme. Un vrai plaisir… Hasley, un homme seul, évolue dans l’environnement étouffant d’une ville-usine et d’immenses engrenages, en images de synthèse d’une qualité exceptionnelle qui s’inspirent du fameux Metropolis de Fritz Lang ou Brazil de Terry Gilliam.

Détournant les agrès et accessoires de cirque de leur fonction initiale, les artistes réalisent des tableaux très réussis, entre poésie et performance. Avec, en particulier, un superbe numéro de roue Cyr, du nom de son inventeur québécois, de diabolo-exceptionnel de virtuosité et de beauté-puis de mât chinois, avec une danseuse et son partenaire. Nous rêvons avec le personnage principal, quand une autre danseuse, toute de mauve vêtue, passe dans les airs avec tendresse entre les mains de ses partenaires qui la soutiennent telle une déesse: une véritable icône reprise sur l’affiche. Une chanson l’accompagne : «Saurais-tu quitter les songes pour te joindre à nous? » Tout un programme! La partition musicale transporte le public. Mais les applaudissements à la fin de chaque numéro, nuisent un peu à la fluidité du spectacle.

Les jeunes artistes de neuf nationalités occupent avec une belle énergie les quelque trente mètres d’ouverture du plateau. et nous offrent, pour le final, un vrai feu d’artifice de performances, mêlant danse, cirque et théâtre. Un beau spectacle qu’Olivier Peyronnaud, le directeur de ce nouveau lieu qui vient d’ouvrir (voir prochainement l’entretien avec lui dans Le Théâtre du Blog) offre au public.

Jean Couturier

Le 13ème Art, Place d’Italie, Paris XIII ème ,jusqu’au 29 octobre.
www.le13emeart.com www.justepourrire.fr

             

Chills (Frissons ) par le cirque cambodgien

 

Chills (Frissons ) par le cirque cambodgien de l’association Phare Ponieu Selpak

 

IMG_617Le sourire khmer n’a rien d’une légende,  et s’il éclot de la pierre des temples (comme celui de Bayon, à Angkor, il est aussi le symbole du courage et du charme d’un pays qui fait tout pour s’en sortir. Les khmers rouges avaient réquisitionné l’ancien lycée français de Phnom Penh, lieu selon eux d’un savoir “bourgeois“ qu’ils voulaient éradiquer,  et en avaient fait l’effroyable S21, un centre de détention et de torture!

Mais aujourd’hui, on voit partout s’ouvrir des écoles, courir des bandes d’enfants et d’adolescents en uniforme bleu marine et blanc, ou bien en toge safran. Ici les monastères bouddhistes sont aussi des lieux d’enseignement gratuits.

Parmi les nombreuses O.N.G. qui prennent en charge les enfants orphelins ou en danger, l’association Phare Ponieu Selpak «clarté des arts », fondée, entre autres, par la Française Véronique Decrop, s’engage pour leur formation, par le dessin, le théâtre, la musique et le cirque, tout en leur permettant de suivre une scolarité générale.

Une parfaite réussite dont Chills est la démonstration éblouissante. Ce cirque moderne, sans animaux et virtuose, propose une petite fiction : il était une fois une bande de collégiens, dont un froussard, terrorisé par les fantômes. Moquez-vous : les rouleurs de mécanique trembleront à leur tour devant les mauvais esprits. Le plus jeune voudrait séduire la musicienne ? Les rouleurs en question l’en empêcheront, occasion de bagarres très acrobatiques et de jongleries aussi précises que pleine d’humour.

Et le tout est à l’avenant, avec des fantômes, incroyables contorsionnistes, un «petit», jongleur hors pair,  un froussard, bel humoriste à froid, et tous ces circassiens, remarquables acrobates et équilibristes qui arrachent au public des oh ! et des ah!

16730173_1338128249587561_2916559601639436405_nMât chinois, envols de tissus, sauts et défis à la pesanteur, équilibres invraisemblables : pas un temps mort, pas une seconde de trop, avec des numéros rythmés à la perfection. La musique, jouée sur des instruments traditionnels, l’improvisation théâtrale : ici, tout est moderne, vivant et respire la joie de jouer chez ces artistes qui, en complicité immédiate avec le public, ne s’attardent pas sur la performance. Et pour ne rien gâcher, avec un dénouement de la pièce “moral“ : tout bien réfléchi, les mauvais esprits ne peuvent nous faire du mal que si l’on veut bien…

Une autre équipe de cette troupe vient de clore avec Eclipse, une tournée dans la région Rhône-Alpes-Auvergne. Guettez ce cirque cambodgien connu en France qui a en effet une qualité comparable aux Sept Doigts de la main, cette compagnie québécoise qui vient de triompher au Bataclan, à Paris,  avec Réversible.

Christine Friedel

Spectacle vu à Phnom Penh, le 20 mars.
Festival du mime de Périgueux, les 27 et 28 juillet.  Autres dates encore possibles : informations  auprès du collectif Clown d’ici et d’ailleurs, qui organise les tournées.
diffusion@ccai.fr.

 

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